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Article pp.218-219 du Vol.1 n°3 (2011)

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Texte intégral

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CORRESPONDANCE /CORRESPONDENCE

Ingestion accidentelle de méthadone chez un enfant de 11 mois

Accidental methadone ingestion in an 11-month-old infant

N. Delvau · T. Detaille · P. Hantson

Reçu le 2 novembre 2010 ; accepté le 4 décembre 2010

© SFMU et Springer-Verlag France 2011

Mots clésMéthadone · Intoxication accidentelle · Pédiatrie · Toxicocinétique

KeywordsMethadone · Accidental poisoning · Infant · Toxicokinetics

L’efficacité du chlorhydrate de méthadone, opioïde de syn- thèse, est connue depuis plus de 60 ans dans le traitement de substitution des toxicomanies induites par la morphine et l’héroïne. Malgré les risques de mésusage et d’intoxications, la méthadone, qui était prescrite en France essentiellement sous forme de sirop, a été commercialisée depuis 2008 sous forme de gélule, afin d’améliorer essentiellement son acces- sibilité, son stockage et son confort d’utilisation. La concen- tration maximale par gélule de « méthadone sèche » est de 40 mg. Il existe cependant dans les pays limitrophes (en Belgique notamment) un risque d’exposition à des prépara- tions magistrales nettement plus dosées (plus de 100 mg par gélule) pouvant mettre particulièrement en danger une popu- lation pédiatrique [1]. Les intoxications accidentelles chez les enfants de moins d’un an restent exceptionnelles [2–5].

Nous rapportons le cas d’une fillette âgée de 11 mois (10 kg) qui est découverte inconsciente dans son lit et ame- née par ses parents aux urgences d’un hôpital du sud de la Belgique. À l’admission aux urgences, l’enfant est cyanosée et présente une respiration agonique accompagnée d’une bradycardie (fréquence cardiaque 60/min). Les pouls ne sont pas palpés. Une réanimation cardiorespiratoire est

débutée. Après cinq minutes de prise en charge consistant en une ventilation au masque et au ballon, des compressions thoraciques et une perfusion de 100 ml de sérum physio- logique, l’enfant récupère une hémodynamique adéquate.

Elle reste cependant apnéique et est intubée et ventilée méca- niquement après 15 minutes de ventilation au masque et au ballon. La constatation d’un myosis oriente rapidement vers un syndrome d’intoxication par opiacés. L’enquête familiale révèle que la mère bénéficie d’un traitement de substitution par méthadone. L’enfant semblerait avoir pu dérober une gélule de méthadone dosée à 40 mg qui se serait trouvée dans la poche d’un pantalon appartenant à son père qui détournerait occasionnellement le traitement destiné à son épouse. Un acte de maltraitance parentale ne peut évidemment pas être formellement exclu.

Une première gazométrie montre un pH à 6,99, une PaCO2

à 104 mmHg, une PaO2à 44 mmHg sous une FiO2de 1,0, en ventilation contrôlée, le déficit en base est à–1 mmol/l. Les pressions inspiratoires sont élevées à 36 cmH2O. La radio- graphie de thorax montre un œdème pulmonaire bilatéral.

L’électrocardiogramme est normal. La biologie standard est non contributive, hormis une glycémie à 374 mg/dl.

L’administration d’une dose initiale de 0,1 mg/kg nalo- xone résulte en un réveil rapide de l’enfant. Une perfusion continue de naloxone est débutée à la dose de 0,15 mcg/kg par minute. Celle-ci permet la récupération d’une respiration spontanée efficace. La perfusion est poursuivie pendant 15 heures à cette dose, puis sevrée progressivement et arrêtée définitivement 60 heures après l’admission. L’évolution est rapidement favorable. La radiographie de thorax contrôlée six heures après l’admission est normalisée. L’extubation est réalisée 39 heures après l’admission. La glycémie se nor- malise sans apport d’insuline. Après un suivi de six mois, l’enfant ne présente aucune séquelle.

Des dosages toxicologiques sanguins réalisés par HPLC- MS (spectrométrie de masse couplée à la chromatographie liquide à haute performance) ont permis de déterminer un temps de demi-vie d’élimination de la méthadone de 17,9 heures, avec un pic sérique de méthadone de 105μg/l à la 12eheure.

N. Delvau · T. Detaille · P. Hantson (*) Département de médecine aiguë, université catholique de Louvain, B-1000 Bruxelles, Belgique

e-mail : philippe.hantson@uclouvain.be P. Hantson

Louvain Centre for toxicology and applied pharmacology, université catholique de Louvain,

B-1000 Bruxelles, Belgique

Ann. Fr. Med. Urgence (2011) 1:218-219 DOI 10.1007/s13341-010-0027-7

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-afmu.revuesonline.com

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La toxicocinétique de la méthadone chez le nourrisson est rarement rapportée et semble dans notre cas superposable à la pharmacocinétique observée chez l’adulte (demi-vie plas- matique rapportée variant entre 8 et 18 heures avec des extrê- mes de 48 à 72 heures) [6]. Lors de décès observés chez les enfants, les concentrations létales s’établissaient entre 200 et 489μg/l [7]. Notre observation retrouve également une hyperglycémie sans cétose, qui témoigne vraisemblablement d’une insulinorésistance induite par la méthadone [8].

Après deux ans de surveillance par le réseau de pharma- covigilance et des CAPTV (centres antipoison et de toxico- vigilance), depuis la mise sur le marché en avril 2008 de la méthadone sous forme de gélule, on dénombre sept acci- dents pédiatriques [9]. Toutes ces intoxications étaient le fruit de négligences, malgré un conditionnement initial sécu- risé. Sur ces sept accidents, on note le décès d’une fillette de quatre ans après une dose de 130 mg (en provenance de Belgique), malgré une prise en charge médicale rapide, et deux autres cas sévères qui ont survécu à une ingestion de respectivement 40 et 80 mg, malgré un arrêt respiratoire lors du transport non médicalisé assuré par les parents. Il semble essentiel de garder une concentration en principe actif limitée par gélule (40 mg en France) et de se souvenir que l’ingestion d’un seul comprimé met en jeu le pronostic vital d’un enfant. Cela justifie une prise en charge immédiate et le recours systématique à des moyens médicalisés en cas d’appel au centre 15. Une surveillance de 72 heures, en

milieu de réanimation pédiatrique, s’impose pour les formes symptomatiques.

Références

1. Nisse P, Cezard C, Peucelle D, et al (2006) Ingestions accidentel- les de produits de substitution par des enfants. Revue des cas du centre antipoison de Lille 1995-2005. Acta Clinica Belgica 61 (Suppl 1):3740

2. Couper FJ, Chopra K, Pierre-Louis MLY (2005) Fatal methadone intoxication in an infant. Forensic Sci Int 153:71–3

3. Glatstein M, Finkelstein Y, Scolnik D (2009) Accidental metha- done ingestion in an infant. Case report and review of the litera- ture. Pediatr Emerg Care 25:10911

4. Biarent D, Maes V, Fonteyne C, et al (2000) Intoxication à la méthadone chez lenfant. Reanim Urgences 9:50811

5. Mistry V, Jeffery AJ, Madira W, et al (2010) Methadone toxicity in infants: a report of two fatalities. Forensic Sci Med Pathol 6:11620 6. Robinson AE, Williams FM (1971) The distribution of methadone

in man. J Pharm Pharmacol 23:3538

7. Milroy CM, Forrest ARW (2000) Methadone deaths: a toxico- logical analysis. J Clin Pathol 53:27781

8. Tiras S, Haas V, Chevret L, et al (2006) Nonketotic hyperglycemic coma in toddlers after unintentional methadone ingestion. Ann Emerg Med 48:44851

9. Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.

Direction de l’évaluation des médicaments et des produits bio- logiques, département de pharmacovigilance (29 septembre 2009) http://www.afssaps.fr/var/afssaps_site/storage/original/application/

83e6e90a48d5beba0556099fa00be94d.pdf

Ann. Fr. Med. Urgence (2011) 1:218-219 219

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