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La condition juridique des handicapés mentaux : Colloque du 24 avril 1972

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Conference Proceedings

Reference

La condition juridique des handicapés mentaux : Colloque du 24 avril 1972

THORENS, Justin, et al.

THORENS, Justin, et al . La condition juridique des handicapés mentaux : Colloque du 24 avril 1972 . Genève : Georg, 1973, 123 p.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:141223

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LA CONDITION JURIDIQUE

/

DES HANDICAPES MENTAUX

Colloque du 24 avril 1972

JUSTIN THORENS Introduction.

GASTON GARRONE

Quelques aspects médico-sociaux de la débilite mentale.

BLAISE KNAPP

La protection juridique du handicapé mental en droit public suisse.

ALEXANDRE BERENSTEIN

La protection juridique du handicapé mental en droit social.

HENRI DESCHENAUX

La protection juridique du. handicapé m tal en droit privé.

ROGER DAMI

Le handicapé mental et la tutelle.

PHILIPPE GRA VEN

La protection juridique du handicapé mental en droit pénal.

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MÉMOIRES PUBLIÉS PAR LA FACULTÉ DE DROIT DE GENÈVE

LA CONDITION JURIDIQUE DES HANDICAPÉS MENTAUX

Colloque du 24 avril 1972

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LA CONDITION JURIDIQUE

/

DES HANDICAPES MENTAUX

COLLOQUE DU 24 AVRIL 1972

GENEVE

LIBRAIRIE DE L'UNIVERSITE GEORG & Cie S.A.

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© 1973 by Librairie de l'Université Georg et Cie S.A.

Droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays.

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INTRODUCTION

par Justin THORENS,

Professeur à la Faculté de droit de l'Université de Genève.

Le 24 avril 1972 la Faculté de droit organisait un colloque sur la protection juridique des handicapés mentaux. Cette manifestation s'est révélée un grand succès. Le public et les milieux intéressés ont afflué en un tel nombre à la Faculté que la salle retenue, pourtant imposante, s'est révélée trop petite et que de nombreuses personnes n'ont pu entrer.

Ce succès d'affluence n'a pas cessé de toute la journée et au début de l'après-midi le colloque était transporté à I' Aula. Il a duré jusqu'à passé 18 heures animé par les questions de chacun, membres du public, étudiants et professeurs.

La Faculté de droit avait organisé ce colloque dans le cadre de la politique universitaire dite «porte ouverte». Elle estime en effet que l'Université doit être ouverte, c'est-à-dire accessible au public qu'un sujet intéresse. L'Université doit faire le nécessaire, sans déroger en rien à la qualité de l'enseignement et de la recherche, pour que le public comprenne qu'elle est au service de la collectivité. L'Université n'existe que par et pour la Cité. Elle n'est pas un monde à part existant dans une tour d'ivoire el si elle veut réaliser sa mission elle doit s'occuper des grands problèmes de l'heure et apporter sa contribution à leut solution. Une Université qui ne remplit pas cette tâche tombe dans le mandarinat, quelque soit par ailleurs la qualité de ses maîtres, la valeur de son enseignement et le niveau de ses recherches.

La Faculté de droit s'intéresse à tous les problèmes de l'homme, puisque le droit règle les rapports des hommes entre eux et des hom- mes avec les choses. Elle s'intéresse autant et sans doute plus aux problèmes humains qu'aux problèmes patrimoniaux. L'homme est l'élé- ment essentiel d'une civilisation, les biens sont faits pour l'homme mais non l'homme pour les biens. La Faculté de droit est partie de ces réflexions pour envisager et mettre sur pied ce colloque. L'idée initiale est venue de l'un des siens, le professeur Pierre Lalive. Elle a ren-

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2 LES HANDICAPÉS MENTAUX

contré immédiatement un intérêt considérable car il ressort de toutes les données que ce problème est essentiel.

Le profane, déjà affolé et dérouté, en constatant que le nombre des handicapés mentaux ne cesse d'augmenter, ne comprend plus lorsqu'il s'aperçoit que cette augmentation est une conséquence du développe- ment de notre civilisation et que les progrès de la médecine, bien loin de diminuer ce nombre, en favorisent l'accroissement. Cette remarque est une simple constatation et non pas une critique. Les raisons de ce fait surprenant au premier abord sont les suivantes. Les progrès médi- caux d'une part rendent possible la naissance ou la survivance d'en- fants qui antérieurement ne seraient pas nés ou seraient morts en bas âge et d'autre part permettent l'existence de handicapés mentaux adultes qui auparavant décédaient avant d'entrer dans leur âge mûr.

A ce sujet les statistiques qui m'ont été soumises et les renseignements que m'a communiqués le professeur Garrone démontrent qu'avant l'uti- lisation généralisée des antibiotiques un sixième seulement des handi- capés mentaux atteignait quarante ans alors qu'aujourd'hui cinq sixièmes d'entre eux arrivent à cet âge.

Je cite ces chiffres car eux seuls, par leur sécheresse même, rendent clairement perceptible l'étendue du drame des handicapés mentaux et les conclusions que la société devrait en tirer. Dans une population correspondant à celle de notre pays les spécialistes estiment que sept à huit pour mille des habitants sont des handicapés mentaux graves, c'est-à-dire des handicapés mentaux chez qui le quotient intellectuel est inférieur à cinquante. Il est extrêmement difficile de se prononcer sur le nombre exact des handicapés mentaux en prenant en considé- ration les handicapés moyens et légers mais il ne semble pas arbitraire sur la base d'une extrapolation d'estimer actuellement ce nombre à quelque deux pour cent de notre population.

Non seulement ce nombre ne fait qu'augmenter constamment mais le problème posé par l'existence même des handicapés mentaux pour la société devient toujours plus aigu. Jusqu'à récemment les handicapés mentaux vivaient le plus souvent dans le cadre de la famille. Actuelle- ment la cellule familiale a éclaté et se limite aux parents et à leurs descendants immédiats. En conséquence, bien souvent, en cas de décès de ses parents, l'enfant handicapé mental est seul et sans protecteur naturel effectif. De même l'âge auquel arrivent aujourd'hui les handi- capés mentaux a pour conséquence que normalement les parents qui s'occupaient de leurs enfants finissent par mourir avant ceux-ci.

Le handicapé mental se trouve laissé à lui-même sans personne pour s'occuper de lui alors qu'il a souvent besoin de soins constants.

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INTRODUCTION 3 Lorsque la Faculté de droit m'a fait l'honneur de me charger de la préparation de ce colloque je me suis longtemps demandé quelle formule retenir. Après avoir discuté de ce problème avec mes collègues qui avaient accepté de participer à la préparation, c'est-à-dire les pro- fesseurs Berenstein, Deschenaux, Graven, Knapp et Lalive, nous avons estimé que ce colloque devait être interdisciplinaire dans le sens le plus large, Nous avons jugé que tous les milieux intéressés devaient parti- ciper à cette préparation dans un groupe de travail élargi. Ce groupe de travail devait comprendre non seulement des juristes mais aussi des médecins et dans ces deux disciplines non seulement des universitaires mais également des praticiens. En outre ce groupe de travail devait être composé aussi et 5Urtout des milieux intéressés, c'est-à-dire des asso- ciations de parents, des assistantes sociales, etc. j'ai donc pris contact avec les personnes susceptibles de s'intéresser à ce travail et j'ai la joie de dire que la réponse a toujours été positive. La formule que nous avons retenue s'est révélée extrêmement utile et enrichissante car venant d'horizons très difiérents les membres du groupe de travail ont essayé de parler de la même chose et de trouver un langage commun.

Le groupe de travail était constitué dans sa phase finale de MM. Alexandre Berenstein, professeur à la Faculté de droit et juge au Tribunal fédéral, Roger Dami, directeur du Service de protection de la jeunesse, Henri Deschenaux, professeur aux Facultés de droit de Fri- bourg et Genève, Gaston Garrone, professeur à la Faculté de médecine, Philippe Graven, professeur à la Faculté de droit, Blaise Knapp, pro- fesseur à la Faculté de droit, rapporteurs, de Mmes Bernadette Berger, Valy Degoumois, Yvonne Posternak, de Mlle Françoise Boulaz, de M. jean-Claude Droze, du Dr jean-Jacques Eisenring, du Dr Harry Feldmann, de M. jean-Paul Galland, de M. Fernand jost, de M. Pierre Lalive, professeur à la Faculté de droit, du Dr jean Posternak, profes- seur à la Faculté de médecine, du Dr Michel Tchicaloff, de M. Raymond Uldry, de M. Claude Voegeli et du soussigné.

Au terme d'une préparation fort longue qui a duré près d'une année il s'est agi de déterminer les questions précises qui feraient l'objet des rapports et des discussions. Ces questions ont été élaborées par le groupe de travail élargi en partant notamment de celles posées par les milieux intéressés. je tiens à remercier ici tout spécialement l' Asso- ciation genevoise des parents d'enfants mentalement déficients qui au cours de deux réunions de son comité a mis au point les questions qui se posaient en pratique le plus souvent aux parents et nous les a transmises, questions qui sont devenues les problèmes de base autour desquels on a pu construire les rapports.

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4 LES HANDICAPÉS MENTAUX

Le colloque avait pour but, et les rapports qui sont publiés dans cet ouvrage ont pour effet, de présenter au public un panorama simple mais complet de l'essentiel de la législation et de la jurisprudence se rapportant au statut juridique des handicapés mentaux. Il s'agit en effet de réfléchir sur ce qui existe et de réfléchir sur ce qui devrait être.

Je pense pouvoir dire que le travail très important des rapporteurs a permis de s'approcher du résultat. C'est la raison pour laquelle d'ail- leurs les rapports n'ont pas été pensés comme des documents à l'usage universitaire mais comme des textes à l'usage du grand public et des milieux intéressés. Les rapports doivent permettre aux handicapés men- taux et à leur famille de trouver une réponse ou une ébauche de réponse à leurs problèmes.

Les rapports ont été mis à l'épreuve du feu, c'est-à-dire soumis à la discussion. Cette discussion avait commencé avant le colloque lui- même puisque les rapporteurs avaient rédigé des projets qui avaient été envoyés au groupe de travail élargi avant de recevoir leur rédaction provisoirement définitive. Chacun des membres du groupe de travail avait fait part de ses réflexions quant aux points qui avaient été laissés dans l'ombre, quant aux questions qui paraissaient trop théoriques, trop scientifiques, etc. Ces rapports, tirés à cinq cents exemplaires, ont été mis à disposition des participants au colloque et étaient épuisés le jour même.

La Faculté de droit présente dans cet ouvrage les rapports définitifs.

Cette publication pouvait se faire de diverses façons mais en définitive la solution retenue a été la publication effective des rapports, mis à jour et complétés dans la mesure nécessaire par la discussion du 24 avril et par les lettres fort nombreuses qui sont parvenues au groupe de travail à l'issue de cette journée.

Avant de terminer cette introduction je désire exprimer en mon nom et au nom de la Faculté de droit nos remerciements très sincères à tous les membres du groupe de travail et notamment aux personnes étrangères à la Faculté, médecins, assistantes sociales, parents, etc.

qui n'ont pas hésité à consacrer un temps considérable à cette tâche.

Sans leur participation le colloque n'aurait jamais pu être ce qu'il est devenu. Ma gratitude va tout spécialement aux rapporteurs qui vou- dront bien me pardonner de les avoir relancés si souvent... et à M. Claude Voegeli, assistant, dont le concours m'a été précieux. Je n'aurais garde enfin d'oublier les personnes qui ont participé à nos débats et grâce auxquelles un vent frais et des idées nouvelles ont soufflé dans notre vénérable alma mater.

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INTHODUCTION 5 Si l'ouvrage que la Faculté de droit publie aujourd'hui a pour résultat qu'un handicapé mental soit mieux défendu et que l'attention du public et de l'autorité soit attirée sur les insuffisances de la légis- lation, nos efforts n'auront pas été vains.

Pour émettre un vœu personnel qui, j'en suis certain, est partagé par tous les participants au colloque, je souhaite que de toute urgence l'Etat mette à disposition des handicapés mentaux des foyers et mai- sons spécialisées en nombre suffisant et plus encore peut-être aujour- d'hui pour les adultes que pour les jeunes.

Les handicapés mentaux doivent être des hommes à part entière malgré leur état. Ils n'ont pas demandé de naître, ils n'ont pas demandé d'être malades et souvent ils ne vivent que par les soins médi- caux qui leur sont prodigués, en d'autres mots c'est la société qui leur donne la vie et qui les garde en vie. Si les handicapés mentaux ne peuvent pas être considérés comme des hommes à part entière il fau- drait alors avoir le courage de tirer les conclusions de cette consta- tation et se rendre compte que les progrès de la médecine, bien loin de toujours aider l'homme, peuvent parfois se retourner contre lui.

j. THORENS.

Genève, le 31 mars 1973.

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QUELQUES ASPECTS MÉDICO-SOCIAUX DE LA DÉBILITÉ MENTALE

par Gaston OARRONE,

Professeur de psychiatrie extrahospitalière à la Faculté de médecine de l'Université de Genève,

Médecin-Directeur du Centre Psycho-social Universitaire.

Les connaissances médicaies dans le domaine de la déficience men- tale se sont considérablement accrues au cours de ces dernières décennies : anomalies chromosomiques, troubles métaboliques, embryo- pathies, affections pré-, péri- et post-natales nous ont apporté nombre d'éclaircissements étiologiques.

A partir de ces découvertes, des progrès sensibles ont été réalisés dans le domaine de la prévention. Toutefois, malgré les mesures prises, le nombre absolu des déficients mentaux continue de s'accroître. La thérapeutique, au sens classique du terme, n'a pas beaucoup progressé.

De ce fait, il convient de ne pas réduire la déficience mentale à sa seule dimension médicale, car, en l'absence de thérapeutiques spé- cifiques, celle-ci risquerait de conduire à l'apragmatisme.

,Le mérite appartient surtout aux pédagogues d'avoir compris qu'il était possible de fournir aux déficients mentaux, aussi bien dans le domaine cognitif qu'éducatif, des apports compatibles avec leur pou- voir d'acquisition. Dès lors naissait une nouvelle conception de la débilité mentale qui, au lieu de souligner l'aspect déficitaire du sujet, portait l'accent sur ses possibilités réelles ou potentielles. A partir de là, psychiatres et psychologues se sont attachés à mesurer ces possi- bilités, à étudier !es modes particuliers d'organisation de la person- nalité des déficients mentaux.

A l'heure actuelle, pour le psychiatre, la recherche dans le domaine de la débilité mentale porte sur les aspects suivants : étiologique, épi- démiologique, psychopathologique, assistanciel et thérapeutique.

Nous envisagerons rapidement les aspects épidémiologique et psy- chopathologique, qui se rapportent au thème de ce colloque.

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8 LES HANDICAPÉS MENTAUX

1. ASPECT ÉPIDÉMIOLOGIQUE.

Les auteurs ayant procédë à des enquêtes épidémiologiques con- viennent que le taux de prévalence de la déficience mentale dans la population générale est d'environ 8 %0. Ceci équivaudrait à recenser 2.000 déficients mentaux à Genève. Toutefois, dans des pays comme le Danemark et la Suède, qui ont mis au point des systèmes d'assis- tance corrects, le nombre de cas connus par les services responsables est de 4 ou 5 %0. La différence entre ces deux taux proviendrait avant tout d'un dépistage précoce insuffisant.

D'autre part, le nombre de déficients mentaux adultes tend à s'ac- croître du fait de l'augmentation de leur durée de vie consécutive à une meilleure hygiène et aux progrès thérapeutiques généraux (anti- biotiques surtout).

Or, ce sont précisément ces adolescents et ces adultes qui nous inté- ressent particulièrement dans ce colloque, car ce sont eux qui sollicitent davantage l'attention du juriste (droits et obligations civiques, mariage, responsabilité civile et pénale, etc.).

2. ASPECT PSYCHOPATHOLOGIQUE.

Une définition correcte de la déficience mentale est encore à trouver.

Les notions classiques, réductives sont à rejeter. La déficience mentale ne peut, en effet, se réduire ni à la constatation d'un déficit intellectuel, ni à celle d'un trouble de l'adaptation, du comportement ou de la relation. R Herber tente de cerner une définition en faisant dépendre la notion de déficience mentale de l'association de deux critères dont chacun est insuffisant à lui seul pour conclure : une infériorité générale du développement intellectuel commençant pendant la période du déve- loppement, et une médiocrité de la qualité de réponse de l'individu aux stimulations de son milieu naturel et social.

Des classifications ont cependant été établies. Elles sont toutes tri- butaires des buts pour lesquels elles ont été faites et sont donc néces- sairement incomplètes. Elles nous permettent cependant de transmettre un certain nombre d'informations concernant un sujet déterminé.

C'est pour des raisons éminemment pédagogiques que la psycho- métrie s'est développée : Binet et Simon ont établi un test composite permettant de mesurer les années de retard d'un enfant déterminé par rapport à la moyenne des enfants de son âge. La notion d'âge mental dérive de l'application systématique de ce procédé.

Pour des raisons pratiques, Stern a introduit ultérieurement la notion de Q.I. (quotient intellectuel) calculée en établissant le rapport

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ASPECTS MÉDICO-SOCIAUX 9 âge mental/âge réel. Ainsi un enfant de 10 ans qui a un âge mental (d'après les tests psychométriques) de 5 ans aura un Q.I. de 50, le Q.I. « normal » étant de 100. Sont considérés comme déficients les individus qui présentent un Q.I. inférieur de deux écarts-type par rap- port à la moyenne fixée pour la population du même âge (écart- type = 10 à 15). Est considéré comme déficient tout individu dont le Q.I. est inférieur à 75.

Les tests psychométriques modernes (tel le Wexler) sont établis à partir d'items qui explorent :

a) les performances verbales (niveau de langage) ; b) les performances motrices ;

c) les performances opératoires (mémoire, rétention, capacité d'abstraction, capacité d'anticipation, etc.).

Ils laissent donc de côté des secteurs de la personnalité tels que le caractère, la vie aliective, la sociabilité, l'adaptabilité, pour ne citer que les principaux.

Le tableau I, ci-après, illustre la signification concrète de la notion de Q.I. dans le domaine des acquisitions.

TABLEAU I

Classification tenant compte de la notion de Q.I. :

Q.I. = 0 à 25 i'enfant ne parvient pas à constituer le langage.

(Classiquement : Idiotie)

Q.I. = 25 à 50 l'enfant peut acquérir les mécanismes de la lecture, mais non la compréhension de ce qu'il lit.

(Classiquement : Imbécillité)

Q.I. 50 à 75 l'enfant peut apprendre à lire et écrire, et à com- prendre les problèmes concrets. Il ne peut pas déduire une loi générale à partir d'un phénomène particulier ( « il est incapable d'abstraction » ). Il peut reproduire, mais pas inventer.

Le Q.I. ayant été établi essentiellement pour des buts scolaires, sa généralisation hors de ce contexte devient facilement abusive.

Il reste cependant une notion pratique pour déterminer ce qu'un enfant est capable d'apprendre.

Plusieurs auteurs ont essayé d'introduire des tests comportant d'au- tres items : ainsi le « Vineland Scale of Social Maturity » qui comporte une série de questions touchant les performances habituelles de l'enfant

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10 LES HANDICAPÉS MENTAUX

dans le domaine de l'habillage, du langage, de la toilette, de la com- munication, etc.

Cette échelle, dont les différents items n'ont malheureusement pas été traduits, ni étalonnés dans les pays francophones, permettrait d'éta- blir un âge social comparable à l'âge mental et donc aussi un quotient social (Q.S.).

Sloan et Birch décrivent de leur côté des comportements adaptatifs dont ils indiquent les caractéristiques suivant l'âge.

(Voir tableau II, page suivante, où les chiffres de Q.I. sont donnés à titre indicatif.)

Malgré tous ces efforts, ces différentes échelles ne nous donnent qu'une idée très partielle de la structure psychologique réelle du débile mental. De plus, elles sont trop exclusivement attachées à décrire ce qui est déficitaire (ce que le déficient mental a en moins que l'individu normal du même âge) et n'apportent aucun élément pour la compré- hension du mode d'organisation psychologique de l'enfant ou de l'adulte déficient mental (--en quoi le déficient mental est-il différent de l'indi- vidu « normal » ).

Or, de nombreuses études cliniques et paracliniques ont montré à quel point la psychologie (au sens large, c'est-à-dire le mode d'être) du déficient mental est autre. Elle conditionne des comportements et des modes de réaction qui sont propres à ce type d'organisation mentale.

Ces études, étant essentiellement cliniques, n'aboutissent pas à la constitution de nouvelles échelles pluri-dimensionnelles, mais permettent une appréciation cas par cas des caractéristiques individuelles.

Ainsi, aucune échelle ne peut, à l'heure actuelle mesurer la qualité de la relation qu'un déficient mental est capable d'établir, ni ses pos- sibilités d'identification et par là d'autonomisation.

Certains traits de caractère, dits infantiles, sont communs dans la déficience mentale. Ils peuvent influencer, indépendamment du Q.I. ou du niveau de comportement adaptatif, l'adéquation réelle du sujet à une situation donnée : ainsi la suggestibilité, la crédulité, la tendance à la dépendance, la susceptibilité, la passivité, l'hyperémotivité. Ils peuvent en outre être déterminants dans l'appréciation de la capacité juridique d'un individu donné.

La réactivité particulière, face à l'entourage du déficient mental, peut tout aussi bien conditionner son comportement : réactions de compensation (surinvestissements paradoxaux), tendance excessive à l'admiration pour le mieux doué, attitude générale d'abattement qui le

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N

Niveau I (Q.I. 0 à 20-25)

Niveau II (Q.I. 20-25 à 35)

Niveau III (Q.I. 35 à 50-55)

Niveau IV (Q.I. 50-55 à 70-75)

TABLEAU Il.

Classification du comportement adaptatif (d'après W. Sloan et j.W. Birch, 1955).

Age préscolaire : 0 à 5 ans Maturation et développement Retard énorme; possibilités in- fimes dans les domaines sensori- moteurs ; a besoin de soins infir- miers.

Mauvais développement moteur ; langage minimal ; généralement incapable de profiter d'un ap- prentissage pour devenir auto- nome ; peu ou pas de capacités de communication.

Peut parler ou apprendre à com- muniquer ; mauvaise prise de conscience sociale ; assez bon développement moteur ; peut profiter d'un apprentissage vi- sant à acquérir une autonomie ; nécessité d'une surveillance mo- dérée.

Peut acquérir des possibilités de contact social et de communica- tion, retard minimal dans les données sensorimotrices ; rare- ment distingué du normal avant un âge ultérieur.

Age scolaire: 6 à 21 ans Apprentissage et éducation Présence d'un certain développe- ment moteur ; incapable d'ap- prentissage pour acquérir une autonomie ; a besoin de soins totaux.

Peut parler ou apprendre à communiquer ; peut acquérir des habitudes d'hygiène élémentaire, ne peut pas acquérir de connais- sances scolaires ; profite d'ap- prentissage visant des habitudes systématiques ( « dressage » ).

Peut avoir acquis, vers l'âge de 20 ans, des connaissances sco- laires du niveau de la quatrième année primaire * si on lui donne une éducation spéciale.

Peut avoir acquis, un peu avant 20 ans, des connaissances sco- laires du niveau environ de la sixième année primaire*. Ne peut pas accéder aux sujets généraux traités dans les classes secondaires. Nécessite un ensei- gnement spécial, en particulier au niveau d'âge des classes se- condaires.

Adultes : 21 ans

Adaptation sociale et professionnelle Présence d'un certain développement moteur et du langage ; totalement in- capable de subvenir à son propre entretien ; nécessite des soins et une surveillance absolue.

Peut contribuer partiellement à son propre entretien mais sous contrôle total ; peut acquérir des possibilités d'autoprotection à un niveau d'utilité minime dans un environnement con- trôlé.

Capable de suffire à son entretien dans des métiers non qualifiés ou semi-qualifiés ; a besoin de surveil- lance et de directives devant un stress économique ou social léger.

Capable d'adaptation sociale et pro- fessionnelle, avec une éducation et un apprentissage approprié. A besoin fréquemment de surveillance et de directives devant un stress écono- mique ou social.

*

Classes approximatives car ces données sont tirées d'une recherche brit annique.

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12 LES HANDICAPÉS MENTAUX

rait partir battu dans les activités qu'on lui propose, estimation pessi- miste de ses propres possibilités, recherche constante d'approbation, etc.

Cette réactivité, que l'on pourrait qualifier de névrotique, dépend davantage de facteurs histonques, d'expériences faites, de situations vécues, que des possibilités intellectuelles ou adaptatives génériques.

Elle montre une fois encore que la personnalité du déficient mental ne se définit pas par un simple déficit, mais qu'elle consiste en une orga- nisation particulière. Celle-ci dépend, certes, du potentiel de base, mais ne se comprend pas en dehors des expériences historiques, personnelles, de chaque individu, pris séparément et pour lui-même.

Ainsi, le tableau synthétique que nous essayons d'établir ne doit être considéré que comme un moyen approximatif de réflexion juri- dique, réflexion qui doit cependant s'accompagner, comme pour les individus normaux, du support indispensable de la connaissance appro- fondie de chaque cas particulier.

TABLEAU III

Essai d'appreciation de La capacité juridique générale dans la déficience mentale.

1) Niveaux J et li (Q.I. 0 - 35)

posent tous des problèmes quant à la responsabilité civile et pénale.

Il leur est difficile de s'adapter activement à une vie de groupe et de comprendre donc les phénomènes sociaux.

2) Niveau Ill (Q.I. 35 - 55)

comporte des restrictions certaines dans la responsabilité pénale et relatives dans le domaine de la responsabilité civile. Il com- prend avec difficulté les phénomènes sociaux.

3) Niveau IV

ne s'écarte pas considérablement d'une population d'un niveau cul- turel et éducatif fruste. Les limitations des responsabilités sont plutôt en relation avec la structure de la personnalité (organisation psychologique, caractère), qu'avec le déficit intellectuel. Ils doivent être appréciés cas par cas comme n'importe quel autre membre de la population.

EN CONCLUSION.

Les différentes classifications actuellement en usage dans le domaine de la déficience mentale permettent de situer un individu donné par rapport à ses possibilités intellectuelles (cognitives), adaptatives, éven-

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ASPECTS MÉDICO-SOCIAUX 13 tuellement sociales, Les notions sont utiles et pratiques pour déterminer

\'adéquation des méthodes d'enseignement ainsi que des dispositions à prendre pour réaliser une insertion professionnelle et sociale correcte.

Toutefois, elles ne mesurent pas les facteurs qui peuvent déterminer, modifier ou influencer le comportement général du déficient mental.

Elles sont susceptibles d'aider le juriste dans sa réflexion, mais ne remplacent en aucun cas l'observation et l'appréciation individuelle de chaque cas particulier.

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LA PROTECTION JURIDIQUE DU HANDICAPÉ MENTAL EN DROIT PUBLIC SUISSE

par Blaise KNAPP,

Professeur à la Faculté de droit de l'Université de Genève.

Le 20 décembre 1971, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté une « Déclaration des droits du déficient mental » (Résolution N° 2856 (XXVI)) dont le texte figure en annexe. Le dispositif de cette Déclaration concerne le droit constitutionnel et administratif dans ses points :

1) Assimilation aussi large que possible aux autres individus ; 2) Droit aux soins, à l'instruction, à la formation ;

3) Droit à la sécurité économique et à un niveau de vie décent ; 6) Protection contre l'exploitation et droit à des procédures régulières ; 7) L'interdiction ne doit pas être abusive.

Il conviendra, en outre, d'examiner la manière dont les devoirs géné- raux de l'individu envers l'Etat sont accomplis par le handicapé mental.

Cette Déclaration, pas plus d'ailleurs que la Déclaration des droits de l'Homme adoptée par l'ONU, ne crée par elle-même des droits pour le handicapé ou des devoirs pour l'Etat dont les tribunaux pourraient être saisis. Elle c0nstitue un programme, un idéal proposé aux Etats membres de l'ONU. Dans le dernier considérant de son préambule, la Déclaration indique, elle-même, que l'Assemblée générale des Nations Unies demande qu'une « action soit entreprise, sur le plan national et international » afin que la Déclaration devienne une norme créatrice de droits et d'obligations.

Avant d'analyser les divers points soulevés par la Déclaration, il faut encore poser ttois principes : 1. l'individu est présumé non handi- capé jusqu'à preuve du contraire ; 2. la jouissance des droits (aptitude

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16 LES HANDICAPÉS MENTAUX

à être au bénéfice des droits) 1 doit être distinguée de l'exercice des droits 2 (aptitude à acquérir des droits et encourir des obligations en faisant des déclarations et des demandes à l'administration et aptitude à en demander le respect au juge) - l'exercice des droits présuppose la capacité de disœrnement - ; 3. Nous présumons que, sous réserve de preuve contraire, les handicapés des niveaux 1 et II n'ont pas de capacité de discernement alors que les handicapés des niveaux III et IV l'ont dans une mesure croissant selon la légèreté du handicap.

A) Les libertés individuelles.

Le droit constitutionnel suisse connaît une série de libertés indivi- duelles. Expresses ou tacites, elles résultent toutes de la Constitution fédérale. Les dispositions expresses les contenant ne font, en principe, aucune distinction entre les individus. Par conséquent, en l'absence de toute restriction expresse, chacun, y compris le handicapé mental, jouit, en principe, de ces libertés. D'ailleurs, même si ces libertés sont, selon certains auteurs, des droits des individus envers l'Etat - et l'Etat seul - (thèse qui pose, d'une part, le problème de la nature de ces droits et, d'autre part, celui de savoir dans quelle mesure le handicapé en a l'exercice) - on considère aussi qu'elles constituent des principes fondamentaux de l'ordre juridique suisse que les autorités doivent respecter en vertu du principe de la légalité.

Quelle que soit la théorie retenue - droits subjectifs ou statut légal - , il convient de faire plusieurs distinctions pour tenir compte des réalités de fait du handicap mental.

1) Tous les handicapés doivent bénéficier de la liberté personnelle, c'est-à-dire de la protection de leur droit au développement de leur personnalité, au respect de leur dignité, au respect de leur intégrité physique. Il parait, en revanche, plus douteux que les handicapés des niveaux 1 et II s puissent faire usage, dans les faits, de la liberté d'aller et venir. Pour ceux-ci, le problème du maintien de leur faculté d'appré-

1 Pour Forsthoff (Lehrbuch des Verwaltungsrechts, ge édition) p. 173/4, cette notion ne correspond pas exactement en droit public à celle du droit privé.

Giacometti, Allgemeine Lehren des rechtstaatlichen Verwaltungsrechts, estime qu'en principe la notion est la même en droit public et en droit privé mais que le droit public peut l'élargir (p. 297). A. Grise!, Droit administratif suisse, p. 315, est du même avis.

2 Pour Forsthoff, p. 174/6, le droit public n'a pas de notion de l'exercice des droits autre que le droit privé. Giacometti, p. 297-8, estime ici aussi que sous réserve de dispositions contraires de droit public, la notion est identique à celle du droit privé ; on trouve un avis identique à celui de Giacometti chez Grise!, p. 315.

3 Nous utilisons ici la classification que le professeur Garrone a bien voulu établir aux fins du colloque. Voir p. 7 à 13.

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DROIT PUBLIC 17 cier une situation et de se déterminer en conséquence, c'est-à-dire la garantie de leur faculté de discernement comprise dans la liberté personnelle - ne se pose pratiquement que dans la mesure où ils auraient le discernement ; le cas sera donc rare. En revanche, les han- dicapés des niveaux Ill et IV font usage de la liberté d'aller et venir et bénéficient de la garantie de leur faculté de discernement.

2) Tous les handicapés bénéficient de l'égalité des individus dans la loi et devant la loi (art. 4 Cst). (Droit d'être entendu avant toute déci- sion défavorable à leur sujet, droit à une décision prise par un organe compétent et composé correctement, droit à l'assistance judiciaire, droit à une application non-arbitraire de la loi) 4, sous réserve des inégalités en leur faveur, comme en leur défaveur, justifiées objectivement par leur état. Encore faut-il, bien entendu, que ces inégalités légitimes n'aillent pas au-delà de ce que l'intérêt public exige.

3) Tous les handicapés suisses doivent bénéficier de la liberté d'éta- blissement sur n'importe quel point du territoire suisse, (art. 45 Cst), car le handicap mental n'est pas un motif de refuser l'autorisation de s'établir (voir cependant ci-après sous D. 3 la difficulté que peut pré- senter l'obtention d'un acte d'origine, condition de l'établissement).

Cependant, la liberté d'établissement ne peut être exercée par le han- dicapé sous tuteile, qu'avec l'accord de l'autorité tutélaire, dans la mesure où cet établissement crée un domicile (art. 25/I CCS). Si, enfin, les handicapés tombent de façon permanente à la charge de la com- munauté - ce qui pourrait être notamment le cas des handicapés des niveaux I et II - l'autorisation de s'établir pourrait leur être retirée d'après la Constitution (art. 45/III Cst). Les handicapés qui ne peuvent travailler et sont une charge pour la communauté ne bénéficient pas, parfois, de la liberté d'établissement (art. 45/IV Cst).

4) En ce qui concerne les libertés purement idéales : liberté d'opinion, liberté religieuse (art. 49 et 50 Cst), liberté d'association (art. 56), de réunion, de presse (art. 55 Cst), liberté artistique, liberté de langue, on peut admettre que tous les handicapés en bénéficieront, mais que la mesure dans laquelle ils pourront en faire usage effectivement dépendra de la gravité du handicap. On peut penser que les handicapés des niveaux 1 et II, et les handicapés incapables de discernement n'en auront guère l'exercice. En outre, bien entendu, le tuteur des handicapés inca- pables de discernement ne peut exercer ces libertés pour son pupille.

En matière de liberté de conscience et de croyance, on remarquera que la Constitution prévoit que les parents ou tuteurs ont Je droit de

4 Sur cette notion voir notamment J.F. Aubert, Traité de droit constitutionnel suisse, p. 644 ss.

(24)

JS LES HANDICAPÉS MENTAUX

disposer de l'éducation religieuse des enfants jusqu'à l'âge de 16 ans révolus (art. 49/UI Cst). Pour les handicapés des niveaux III et IV capables de discernement, on pourrait soit admettre une extension de ce pouvoir des parents et tuteurs au-delà de l'âge de 16 ans, soit au contraire, affirmer qu'en l'absence de disposition expresse, un tel pou- voir ne leur appartient plus dès que le handicapé a dépassé l'âge de

16 ans. La seconde hypothèse est la plus conforme au principe de la légalité qui exige notamment une base légale pour toute restriction à la liberté.

5) Il ne paraît guère douteux que les handicapés mentaux bénéficient de la garantie de la propriété, quel que soit le niveau de leur handicap.

Cependant, l'usage de cette liberté sera fonction de la gravité du han- dicap et de la présence d'une capacité de discernement. Si le handicapé est sous tutelle, le tuteur fera usage de la garantie de la propriété en son nom.

6) Les handicapés mentaux des niveaux I et II ne paraissent pas pouvoir faire usage de la liberté du commerce et de l'industrie, c'est-à- dire choisir librement une activité lucrative et les moyens de l'exercer.

Car ils n'ont, en principe, pas la capacité de discernement pour opérer ce choix. La question doit être tranchée à la lumière de leur capacité de discernement pour les handicapés du niveau III. Enfin, les handicapés du niveau IV, eux-mêmes, s'ils ont la capacité de discernement, devraient non seulement pouvoir bénéficier du libre choix de leur acti- vité, mais encore exercer cette activité librement. On peut, enfin, se demander si lorsque le tuteur choisit une profession pour son pupille ou détermine les moyens selon lesquels cette activité s'exercera, il fait usage de la liberté de commerce et de l'industrie de son pupille. Nous pensons que tel est le cas, car il n'y a aucune raison pour que le handicapé même incapable de discernement se voie imposer une activité économique par l'Etat. Ceci n'exclut pas que si le handicapé demande un travail, l'Etat décide de celui qui lui sera attribué.

7) Quant au droit au mariage, il est réglementé par le droit civil auquel on voudra bien se référer 0•

Bien entendu, lorsqu'il fait usage des libertés individuelles, le han- dicapé quelle que soit sa faculté de discernement a, doit respecter les limites auxquelles l'exercice de celles-ci est soumise, d'une façon géné- rale : intérêt public, ordre public, santé, sécurité, moralité, tranquillité publiques.

0 Voir le rapport de M. Deschenaux, p. 67 à 96.

6 En ce sens Griset, p. 315 et Forsthoff, p, 175.

(25)

DROIT PUBLIC

B) Les devoirs généraux.

On considère, en général, que les individus ont certains devoirs envers la collectivité : devoir de vote (qui est, pour certains, un droit) et devoir militaire.

1. Le vote.

Selon la législation de tous les cantons, les interdits - ou personnes sous tutelle - n'ont pas l'exercice du droit de vote même s'ils ont une capacité de discernement limitée ; ils n'ont pas non plus le droit d'être élus à des fonctions publiques. C'est ce que prévoient par exem- ple les articles 43, 72 et 104 de la Constitution genevoise et l'article 10 de la loi genevoise sur les votations et les élections du 23 juin l 961.

Bien entendu, le tuteur éventuel ne peut pas agir pour ces personnes.

En outre, dans une dizaine de cantons, l'incapacité de discernement qui n'a pas donné lieu à interdiction n'est pas une cause de privation du droit de vote (niveau IV et probablement, dans certains cas, niveau III).

La privation du droit de vote cantonal pour ce motif entraîne la privation du droit de vote fédéral (art. 74/II Cst).

Le fait que l'incapable de discernement non interdit puisse voter se Justifie par les difficultés de preuve quant à la capacité de discerne- ment 1. Cependant, lorsque de nombreux incapables de discernement non interdits sont réunis dans une même commune, leur poids électoral pourrait entraîner des conséquences imprévisibles.

La personne pl'ivée du droit de vote ne peut, bien entendu, signer valablement des initiatives ou des demandes de référendum, car de telles signatures supposent le droit de vote.

2. Le service militaire.

Selon la Constitution fédérale (article 18), tout Suisse est tenu au service militaire. Cependant, la loi sur l'organisation militaire de la Confédération suisse du 12 avril 1907 prévoit, que, lors du recrutement, les hommes sont versés dans une des trois catégories suivantes : hommes aptes au service militaire, hommes aptes aux services com- plémentaires et hommes incapables de servir (article 5). Une ordon- nance du Conseil tédéral du 20 août 1951 précise que cette classification se fait sur la base d'une visite sanitaire effectuée par une commission composée de trois médecins (articles 2 et 6) et selon des critères établis

7 Voir Aubert, p. 409.

(26)

20 LES HANDICAPÉS MENTAUX

par le Département militaire fédéral (article 22). Les interdits devraient être exemptés par la Commission de visite sanitaire automatiquement.

Il devrait en être de même de tous les individus incapables de discer- nement présentant un certificat médical. En revanche, les individus incapables de discernement se présentant au recrutement sans certificat médical risquent bien d'être recrutés (probablement seulement au niveau IV}, même s'ils ne devraient pas l'être.

Les individus exempts du service militaire doivent la taxe militaire.

Cependant, la loi sur la taxe militaire prévoit qu'est exonéré de la taxe celui qui est incapable, par suite d'infirmités du corps ou de l'esprit, de subvenir aux dépenses indispensables à son entretien et à celui de sa famille et ne possède pas une fortune suffisante à cet effet. Il semble en résulter que les handicapés du niveau IV (éventuellement même du niveau III) pourraient être appelés à payer la taxe militaire, du moins selon une interprétation littérale de la loi.

3. Les obligations de police.

Tous les handicapés doivent respecter les règles de police admi- nistrative (voir ci-dessus A). Mais, au niveau de la sanction, leur état peut avoir des répercussions s.

C) Les droits sociaux.

En simplifiant, on peut appeler droits sociaux les dispositions de la Constitution qui confèrent aux individus le droit d'exiger que l'Etat leur garantisse, seul ou par l'intermédiaire de tiers, certaines facilités tels que le logement, l'éducation, le travail, etc.

A l'heure actuelle, en Suisse, la Constitution fédérale ne garantit que trois prestations de l'Etat. Les handicapés mentaux peuvent sans le moindre doute bénéficier de deux d'entre elles : le droit à l'assistance judiciaire (art. 4 Cst, dûment interprété par le Tribunal fédéral) et le droit à une sépulture décente (art. 53/Il).

Le troisième et seul véritable droit social résulte de l'art. 27 Cst.

Il s'agit du droit à l'instruction primaire suffisante et gratuite dans les écoles publiques. On doit, tout naturellement, s'interroger sur la portée de cette disposition pour les handicapés mentaux. Dans la mesure où certains handicapés capables de discernement, notamment du niveau IV, peuvent suivre l'enseignement commun, ils ont le droit d'aller à l'école publique ordinaire. En ce qui concerne les autres handicapés qui, soit ne sont pas en mesure de suivre l'école ordinaire, soit, bien que capables

s Voir le rapport concernant le droit pénal de M. Graven, p. 103 à 119.

(27)

DROIT PUBLIC 21 de discernement, ne peuvent apprendre ce qui leur est enseigné au rythme ordinaire, on admet généralement que l'art. 27 de la Constitution ne leur ouvre auc1111 droit, car il n'oblige pas les cantons à accepter, sans restriction aucune, tous les enfants à l'école primaire publique 11.

Y aurait-il dès lors obligation des cantons de prévoir des écoles spéciales pour ces enfants? Cette opinion a été défendue par certains en se fondant sur le fait que la Confédération subventionne l'éduca- tion des enfants infirmes et que, si les parents doivent, d'après le Code civil, donner une instruction à leur enfant handicapé (art. 275/11), les cantons doivent leur en fournir les moyens 10. Cependant, l'opinion dominante considère que l'art. 27 ne permet pas d'imposer une telle obligation aux cantons.

A l'heure actuelle, donc, le droit constitutionnel fédéral ne prévoit pas de droit pour le handicapé mental à disposer d'écoles spécialisées publiques et gratuites. Il y a là une inégalité évidente, sinon entre les enfants - car on pourrait estimer qu'à des situations diverses cor- respondent des régimes juridiques divers - entre les parents. Le sub- ventionnement - limité - et le paiement de rentes de sécurité sociale 11 ne lui apportent qu'un remède notoirement insuffisant.

Cependant, cette situation aurait pu se modifier si le projet de nouvel art. 27 avait été inscrit dans la Constitution. Il prévoyait, en effet, que

,~ le droit d'acquérir une formation est garanti». Ce texte a, cependant, été rej.eté lors du vote constitutionnel des 3-4 mars 1973 car, si le peuple l'a adopté par 507.021 oui contre 453.873 non, 11

Y

2 cantons l'ont repoussé contre 10

Yi

cantons 12, pour des motifs qui dépassaient cette déclaration de principe.

Cependant, cet échec n'est peut-être que temporaire. En outre, il ne faut pas oublier que cette nouvelle disposition aurait créé avant tout une obligation de légiférer envers le législateur. Il eût appartenu à celui-ci de décider notamment comment et combien d'écoles seraient construites, qui pourrait et devrait les fréquenter, qui devrait en sup- porter les frais. C'est ainsi que la construction, le fonctionnement des écoles et l'établissement de cours spéciaux pour handicapés mentaux

11 Voir l'étude, en allemand, de la Sous-commission Vll de la Commission suisse pour les problèmes du handicap mental : la situation du handicapé mental en droit suisse, OFAS 1970, p. 72.

10 Ibid., p. 72/3.

11 Voir à ce sujet le rapport concernant le droit social de M. Berenstein et le Message du Conseil fédéral du 19 janvier 1972, concernant les nouveaux articles constitutionnels sur l'enseignement et la recherche - FF 1972 1 393 ss.

12 C'est la sixième fois que les majorités des cantons et du peuple divergent depuis 1848.

(28)

22 LES HANDICAPÊS MENTAUX

auraient pu être subventionnés par la Confédération et non plus seule- ment par l' Assurance-invalidité.

D'ailleurs, même l'inscription d'un droit à la formation dans la Constitution ne résoud, à elle seule, aucun problème. En effet, il y a lieu de ne pas se leurrer. Si l'on veut éviter qu'il en aille des écoles spécialisées comme des établissements spéciaux prévus pour les délin- quants, qui n'existent souvent pas encore, plus de trente ans après l'adoption du Code pénal, l'initiative pour la création des écoles spé- cialisées viendra des particuliers intéressés à la question. Il n'y a, en effet, aucun moyen autre que politique d'obliger le législateur à légiférer et le gouvernement à agir dans ce domaine.

En effet, même l'affirmation du Conseil fédéral, dans son message précité, que le nouvel article 27 /1 ouvrirait aux individus la voie du recours de droit public 13 ne saurait convaincre, car, ce recours a des effets uniquement cassatoires, c'est-à-dire qu'il permet d'obtenir l'annu- lation de décisions illégales ou inconstitutionnelles, mais n'est pas un moyen d'obliger l'étUtorité à fournir une prestation - soit en l'espèce à construire une ècole spécialisée ou créer des cours particuliers. Un 1el recours permet donc de s'opposer efficacement à une discrimina- tion dans l'accès à l'instruction ou à un établissement existant (voir déjà art. 4 Cst), à une contrainte obligeant un enfant à suivre une formation ne correspondant ni à ses gouts ni à ses aptitudes (liberté individuelle non écrite) à un refus des subsides légalement prévus.

li ne permet en revanche pas d'obtenir que le législateur se conforme à son obligation de créer les conditions nécessaires pour que les handi- capés mentaux bénéficient d'une formation adéquate et que l'exécutif mette effectivement sur pied de telles conditions. Enfin, dans la mesure où un enseignement spécialisé est dispensé dans les écoles primaires publiques, la loi sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 ouvre à son article 73 un recours au Conseil fédéral si un écolage est exigé.

Dans le domaine scolaire, il y a lieu de tenir en outre compte du droit cantonal. Ce droit varie considérablement d'un canton à l'autre 14 • On peut, semble-t-il, distinguer trois situations : les cantons qui con- fèrent aux handicapés un droit à une éducation spécialisée et ont créé des écoles ou classes spécialisées, les cantons qui connaissent des dis- positions les obligeant à créer des écoles spécialisées ou des classes particulières et les cantons qui prévoient le simple subventionnement

13 Ibid., p. 417.

14 Voir rapport publié par l'OFAS précité, p. 107-122.

(29)

DROIT PUBLIC 23 de l'éducation de ces enfants. Le canton de Genève tombe dans la seconde catégorie mais connaît aussi un subventionnement limité (art.

23 de la loi sur l'instruction publique du 6 novembre 1940).

A part ces droits, le droit constitutionnel suisse ne connaît pas d'autres droits sociaux généraux. On ne voit donc pas que les handi- capés aient un droit constitutionnel au travail, à des soins, ou à la sécurité économique. Cependant, ceci n'empêche pas que, grâce à la législation sociale, des soins leur soient donnés, un travail leur soit fourni et une certaine sécurité économique leur soit accordée. On admet, en effet, en général que les droits sociaux de rang constitutionnel ne sont efficaces que si une législation d'exécution les met en œuvre. En Suisse, nous n'avons, dans ce domaine, certes guère de tels droits sociaux, mais la législation d'application existe déjà. Le besoin pratique est ainsi, au moins en partie, satisfait.

D) Les demandes à l'administration.

Certaines décisions touchant les particuliers sont prises d'office par l'administration. Ces décisions peuvent, sans doute, être prises envers un handicapé mental comme envers tout autre individu (par exemple taxation d'office 15, signalisation routière et mesures de police admi- nistrative).

En revanche, la plupart des décisions administratives nécessitent une demande des intéressés. Ces décisions administratives sont souvent divisées en décisions créant, modifiant ou annulant des droits ou des obligations, décisions de constatation de droits ou d'obligations et décisions rejetant des demandes tendant à l'obtention de décisions du premier type ou les déclarant irrecevables. On pourrait certes, sur le modèle du droit privé, distinguer parmi ces décisions celles qui impli- quent l'acquisition de droits à titre gratuit et celles qui entraînent des obligations pour les administrés, on en déduirait que le handicapé mental capable de discernement, même sous tutelle, devrait, en tout état de cause, pouvoir présenter seul toutes les demandes tendant à obtenir des décisions lui assurant des avantages gratuits.

Cette conception ne nous paraît pas satisfaisante en droit public car îl nous semble que, dans ce domaine du droit, la notion même d'avan-

15 Signalons, à propos du droit fiscal, que l'art. 31 de la loi sur les contri- butions publiques de Genève permet aux parents de déduire certaines sommes forfaitaires de leur revenu imposable au titre d'enfants handicapés, majeurs ou non, autorise la déduction des frais médicaux et la défalcation des rentes inva- lidité. Sur le plan fédéral, les rentes sont imposables à 80 % mais les parents peuvent aussi déduire une somme forfaitaire par descendant handicapé néces- siteux.

(30)

24 LES HANDICAPÉS MENTAUX

tage gratuit n'existe pas, sauf, peut-être, en ce qui concerne les sub- sides scolaires ou les rentes de sécurité sociale. En effet, la demande déclenche l'application du droit public et administratif avec ses avan- tages et ses désavantages légaux. Il nous paraît, en conséquence, qu'en règle générale, le handicapé ne doit pouvoir présenter seul les demandes que s'il n'est pas 8ous tutelle et s'il se rend compte de la portée de sa demande et de ses conséquences, c'est-à-dire, s'il est capable de discer- nement. En outre, il va sans dire que la demande ne peut recevoir un accueil favorable que si le handicapé réunit les conditions dont la loi prévoit d'une façon générale qu'elles doivent être remplies dans la personne de l'administré.

Sur cette base, on pourrait, peut-êtr.e, faire les distinctions suivantes : 1) Certains actes administratifs ne mettent pas en cause la personne elle-même mais ses biens (par exemple un permis de bâtir, une décla- ration d'impôts). il ne paraît pas y avoir de difficultés pour qu'à leur égard le handicapé (niveau IV et peut-être III) qui aurait la faculté de discernement et qui ne serait pas sous tutelle puisse adresser les informations requises à l'administration ou solliciter une décision. Si le handicapé est sous tutelle, mais a la capacité de discernement néces- saire, sa demande ou sa déclaration doit être considérée, en règle générale, comme nulle, sauf si le tuteur la ratifie ; ces actes dépassent, en effet, en général, des actes de la vie courante que l'interdit capable de discernement peut accomplir seul ; le handicapé doit être protégé contre lui-même. Si le handicapé n'a pas la capacité de discernement et est sous tutelle, il est évident que seul le tuteur peut agir en son nom.

Si, en revanche, le handicapé qui n'a pas la capacité et n'est pas sous tutelle adresse quand même une demande à l'administration, celle-ci est tenue, selon l'article 368 du Code civil, de signaler le cas à l'autorité de tutelle si elle se rend compte de l'état du demandeur. Si elle ne s'en rend pas compte, la demande ou l'information devrait être considérée comme sans effet juridique (voir la solution analogue de l'article 18

du Code civil). Il en irait de même de l'acte administratif pris ensuite de cette demande ou réclamation, dès que l'incapacité de discernement serait invoquée.

2) Certains actes administratifs et notamment certaines autorisations administratives mettent en cause la personne elle-même (par exemple permis de conduire, permis de chasse, permis de pêche, certificat de capacité professionnelle). Ces autorisations ne peuvent être accordées que sous réserve que les conditions posées par la loi quant à la per- sonne du demandeur soient remplies, par exemple un examen portant sur des connaissances abstraites, notamment d'ordre juridique. L'exa-

(31)

DROIT PUBLIC 25 men devrait révéler le handicap, ou l'absence de discernement en tout cas dans les niveaux I à Ill. Quant au niveau IV, la situation paraît plus délicate. Si le handicapé de ce niveau, sous tutelle ou non, a la capacité de discernement, il peut, en principe, obtenir ces autorisations si la loi ne prévoit pas que seul le tuteur éventuel peut présenter la demande (art. 34 de la loi sur la nationalité, par exemple). S'il ne l'a pas et est sous tutelle, le tuteur ne peut, par définition, agir pour le handicapé. S'il ne l'a pas et n'est pas non plus sous tutelle, nous nous retrouvons dans le dernier cas décrit ci-dessus.

En ce qui concerne, en particulier, le permis de conduire, l'arrêté du Conseil fédéral concernant les exigences médicales requises des conducteurs de véhicules et l'examen médical du 28 avril 197116,

prévoit que le candidat doit remplir un questionnaire. Celui-ci comporte notamment des questions sur l'existence de maladies mentales, d'épi- lepsie ou crises analogues, d'infirmités en général et sur la tutelle.

Si les réponses fournies, ou l'examen médical sommaire que subissent tous les demandeurs de permis, créent des doutes sur l'aptitude du candidat, il est renvoyé devant un médecin-conseil. L'arrêté du Conseil fédéral prévoit que le permis de conduire une automobile légère ou un motocycle doit être refusé si le candidat a une grave maladie des nerfs, une maladie mentale importante, une oligophrénie, une psychopathie, ou des troubles ou pertes de connaissance périodiques.

3) Enfin il ne paraît pas y avoir de difficultés à ce que les handicapés des niveaux III et IV, capables de discernement, puissent, qu'ils soient sous tutelle ou non, demander des décisions de pure constatation con- cernant leur personne, comme l'octroi d'un passeport ou d'un acte d'origine. Pour les handicapés des niveaux I et II et les autres handi- capés incapables de discernement, les demandes devraient être sou- mises par le tuteur, sinon elles seraient sans effet.

E) l'internement ou le placement.

1La Constitution fédérale ne prévoit pas de droit à l'internement ou au placement du handicàpé mental, pour protéger sa santé par exem- ple. L'internement ne peut, dès lors, intervenir que si l'ordre public l'exige, c'est-à-dire si la santé, la sécurité, la tranquillité ou la moralité publiques le rendent nécessaire. Il s'agit en effet, de la privation d'un droit fondamental de la personne : celui d'aller et venir librement, droit qui ne peut être restreint que pour des motifs d'intérêt public.

16 Recueil des lois fédérales 1971, p. 479.

(32)

26 LES HANDICAPÉS MENTAUX

En tout état de cause, cependant, l'internement ne peut être décidé qu'après une enquête dans laquelle les parents ou le tuteur et, s'il est capable de discernement, le handicapé doivent pouvoir s'exprimer. Une procédure de recours judiciaire devrait aussi exister.

A cet égard, à Genève, la loi sur le régime des personnes atteintes d'affections mentales du 14 mars 1936 prévoit la possibilité d'un pla- cement dans des ètablissements publics ou privés des handicapés lors- que la sécurité publique ou l'intérêt des malades l'exigent. Lorsque tel n'est pas le cas, les handicapés peuvent être hébergés dans leur propre famille ou chez des tiers, sous la surveillance du Conseil de surveillance psychiatrique. L'internement intervient sur décision du Département de la prévoyance sociale et de la santé publique, sur demande écrite des parents, représentants légaux ou amis, d'une autorité de police (mais seulement en cas d'urgence, de danger notoire ou d'abandon) ou du Conseil de surveillance psychiatrique. Il est intéressant de relever que le malade ou la personne autorisée s'intéressant à lui - sans doute les représentants légaux et la famille - peuvent demander la fin de l'internement mais que la famille peut s'opposer à la sortie d'un malade.

Enfin, tout intéressé - donc aussi les parents du handicapé - a un droit de recours au tribunal administratif contre les décisions du Conseil de surveillance psychiatrique concernant les personnes atteintes d'affections mentales (article 8 de la loi sur le tribunal administratif N ° 46 et la loi précitée article 19).

Quant à la question de savoir si l'internement dans l'intérêt du malade incapable de discernement peut avoir lieu d'office contre la volonté des parents, elle ne paraît pas comporter de réponse entière- ment juridique. Il s'agit, en effet, d'apprécier le poids respectif de l'in- térêt du malade, du libre arbitre des parents et les obligations de la collectivité envers les handicapés. Ce sont là plus des questions de morale sociale que de droit. Tout ce que le droit permet de dire est que si le malade met en danger l'ordre public, la volonté des parents doit céder devant l'intérêt public au maintien de l'ordre.

F) Le droit de recours.

En pnnc1pe, le droit de recourir suppose l'exercice des droits. A cet égard, le droit public n'a pas de notion autonome de cet exercice.

II y a donc lieu de reprendre les conditions de l'exercice des droits en procédure, notamment civile, par analogie.

Un point cependant mérite l'attention. En principe certains recours (le recours de droit public au Tribunal fédéral, du moins encore à l'heure actuelle) exigent pour être recevables, que le recourant soit lésé

(33)

DROIT PUBLIC 27 dans ses droits par une décision le concernant personnellement. Sur cette base, seul :'intéressé lui-même ou son représentant légal peuvent agir en justice. En revanche, par exemple, les parents du handicapé mental non-interdit et majeur ne le peuvent pas. On peut cependant se demander si, à la lumière de l'arrêt époux Mueller-Gilliers 17 déclarant recevable le recours de la mère d'un enfant illégitime contre la décision de mettre l'enfant sous tutelle, on pourrait admettre un recours des parents du handicapé « dont personne mieux que le père (ou la mère) ne peut défendre mieux les intérêts dans une affaire personnelle».

Dans d'autres recours, en revanche (par exemple le recours de droit administratif au Tribunal fédéral), le recours peut être intenté par toute personne atteinte par la décision ayant un intérêt digne de pro- tection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. L'intérêt digne de pro- tection des parents du handicapé non-interdit et majeur n'est pas dou- teux 1s ; il serait, en revanche, peut-être, plus délicat de démontrer que les parents sont atteints par la décision. Il va, en revanche, sans dire que le handicapé capable de discernement et les tuteur ou représentant légal du handicapé mental capable de discernement ou non peuvent, le cas échéant, tenter de tels recours en son nom.

17 Recueil des arrêts du Tribunal fédéral (ATF) 97 (1971) 1 262.

1s En effet, comme l'a dit le Tribunal fédéral dans un arrêt Stadtbernischer Apothekerverein (ATF 97 (1971) 1 593) cet intérêt peut être de droit ou de fait.

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