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LA PROTECTION JURIDIQUE DU HANDICAPÉ MENTAL EN DROIT PUBLIC SUISSE

26 LES HANDICAPÉS MENTAUX

En tout état de cause, cependant, l'internement ne peut être décidé qu'après une enquête dans laquelle les parents ou le tuteur et, s'il est capable de discernement, le handicapé doivent pouvoir s'exprimer. Une procédure de recours judiciaire devrait aussi exister.

A cet égard, à Genève, la loi sur le régime des personnes atteintes d'affections mentales du 14 mars 1936 prévoit la possibilité d'un pla-cement dans des ètablissements publics ou privés des handicapés lors-que la sécurité publilors-que ou l'intérêt des malades l'exigent. Lorslors-que tel n'est pas le cas, les handicapés peuvent être hébergés dans leur propre famille ou chez des tiers, sous la surveillance du Conseil de surveillance psychiatrique. L'internement intervient sur décision du Département de la prévoyance sociale et de la santé publique, sur demande écrite des parents, représentants légaux ou amis, d'une autorité de police (mais seulement en cas d'urgence, de danger notoire ou d'abandon) ou du Conseil de surveillance psychiatrique. Il est intéressant de relever que le malade ou la personne autorisée s'intéressant à lui - sans doute les représentants légaux et la famille - peuvent demander la fin de l'internement mais que la famille peut s'opposer à la sortie d'un malade.

Enfin, tout intéressé - donc aussi les parents du handicapé - a un droit de recours au tribunal administratif contre les décisions du Conseil de surveillance psychiatrique concernant les personnes atteintes d'affections mentales (article 8 de la loi sur le tribunal administratif N ° 46 et la loi précitée article 19).

Quant à la question de savoir si l'internement dans l'intérêt du malade incapable de discernement peut avoir lieu d'office contre la volonté des parents, elle ne paraît pas comporter de réponse entière-ment juridique. Il s'agit, en effet, d'apprécier le poids respectif de l'in-térêt du malade, du libre arbitre des parents et les obligations de la collectivité envers les handicapés. Ce sont là plus des questions de morale sociale que de droit. Tout ce que le droit permet de dire est que si le malade met en danger l'ordre public, la volonté des parents doit céder devant l'intérêt public au maintien de l'ordre.

F) Le droit de recours.

En pnnc1pe, le droit de recourir suppose l'exercice des droits. A cet égard, le droit public n'a pas de notion autonome de cet exercice.

II y a donc lieu de reprendre les conditions de l'exercice des droits en procédure, notamment civile, par analogie.

Un point cependant mérite l'attention. En principe certains recours (le recours de droit public au Tribunal fédéral, du moins encore à l'heure actuelle) exigent pour être recevables, que le recourant soit lésé

DROIT PUBLIC 27 dans ses droits par une décision le concernant personnellement. Sur cette base, seul :'intéressé lui-même ou son représentant légal peuvent agir en justice. En revanche, par exemple, les parents du handicapé mental non-interdit et majeur ne le peuvent pas. On peut cependant se demander si, à la lumière de l'arrêt époux Mueller-Gilliers 17 déclarant recevable le recours de la mère d'un enfant illégitime contre la décision de mettre l'enfant sous tutelle, on pourrait admettre un recours des parents du handicapé « dont personne mieux que le père (ou la mère) ne peut défendre mieux les intérêts dans une affaire personnelle».

Dans d'autres recours, en revanche (par exemple le recours de droit administratif au Tribunal fédéral), le recours peut être intenté par toute personne atteinte par la décision ayant un intérêt digne de pro-tection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. L'intérêt digne de pro-tection des parents du handicapé non-interdit et majeur n'est pas dou-teux 1s ; il serait, en revanche, peut-être, plus délicat de démontrer que les parents sont atteints par la décision. Il va, en revanche, sans dire que le handicapé capable de discernement et les tuteur ou représentant légal du handicapé mental capable de discernement ou non peuvent, le cas échéant, tenter de tels recours en son nom.

17 Recueil des arrêts du Tribunal fédéral (ATF) 97 (1971) 1 262.

1s En effet, comme l'a dit le Tribunal fédéral dans un arrêt Stadtbernischer Apothekerverein (ATF 97 (1971) 1 593) cet intérêt peut être de droit ou de fait.

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RÉSOLUTWN ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES NATIONS UNIES

2856 (XXVI). Déclaration des droits du déficient mental.

L'Assemblée générale,

Consciente de l'engagement que les Etats Membres de l'Organisation des Nations Unies ont pris, en vertu de la Charte ,d'agir tant conjoin-tement que séparément, en coopération avec l'Organisation, pour favo-riser le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l'ordre économique et social,

Réaffirmant sa foi dans les droits de l'homme et les libertés fonda-mentales et dans les principes de paix, de dignité et de valeur de la personne humaine et de justice sociale proclamés dans la Charte.

Rappelant les principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme, des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme 1 et de la Déclaration des droits de l'enfant 2 , ainsi que les normes de progrès social déjà énoncées dans les actes constitutifs, les conventions, les recommandations et les résolutions de !'Organisation internationale du Travail, de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, de !'Organisation mondiale de la santé, du Fonds des Nations Unies pour l'enfance et d'autres organisations intéressées, Soulignant que la Déclaration sur le progrès et le développement dans le domaine social 3 a proclamé la nécessité de protéger les droits et d'assurer le bien-être et la réadaptation des handicapés physiques et mentaux,

Ayant à l'esprit la nécessité d'aider les déficients mentaux à déve-lopper leurs aptitudes dans les domaines d'activités les plus divers, ainsi qu'à promouvoir, dans toute la mesure possible, leur intégration à une vie sociale normale,

Conscients que certains pays, au stade actuel de leur développement, ne peuvent consacrer à cette action que des efforts limités,

1 Résolution 2200 A (XXI).

2 Résolution 1386 (XIV).

a Résolution 2542 (XXIV).

RÉSOLUTION 29 Proclame la présente Déclaration des droits du déficient mental et demande qu'une action soit entreprise, sur le plan national et inter-national, afin que cette Déclaration constitue une base et une référence communes pour la protection de ces droits :

1. Le déficient mental doit, dans toute la mesure du possible, jouir des mêmes droits que les autres êtres humains.

2. Le déficient mental a droit aux soins médicaux et aux traitements physiques appropriés, ainsi qu'à l'instruction, à la formation, à la réadaptation et aux conseils qui l'aideront à développer au maximum ses capacités et ses aptitudes.

3. Le déficient mental a droit à la sécurité économique et à un niveau de vie décent. Il a le droit, dans toute la mesure de ses possi-bilités, d'accomplir un travail productif ou d'exercer toute autre occu-pation utile.

4. Lorsque cela est possible, le déficient mental doit vivre au sein de sa famille ou d'un foyer s'y substituant et participer à différentes formes de la vie communautaire. Le foyer où il vit doit être assisté.

Si son placement en établissement spécialisé est nécessaire, le milieu et ses conditions de vie devront être aussi proches que possible de ceux de la vie normale.

5. Le déficient mental doit pouvoir bénéficier d'une tutelle qualifiée lorsque cela est indispensable à la protection de sa personne et de ses biens.

6. Le déficient mental doit être protégé contre toute exploitation, tout abus ou tout traitement dégradant. S'il est l'objet de poursuites Judiciaires, il doit bénéficier d'une procédure régulière qui tienne plei-nement compte de son degré de responsabilité eu égard à ses facultés mentales.

7. Si, en raison de la gravité de leur handicap, certains déficients mentaux ne sont pas capables d'exercer effectivement l'ensemble de leurs droits, ou si une limitation de ces droits ou même leur suppression se révèle nécessaire, la procédure utilisée aux fins de cette limitation ou de cette suppression doit préserver légalement le déficient mental contre toute forme d'abus. Cette procédure devra être fondée sur une évaluation, par des experts qualifiés, de ses capacités sociales. Cette limitation ou suppression des droits sera soumise à des révisions pério-diques et préservera un droit d'appel à des instances supérieures.

2027° séance plénière 20 décembre 1971

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