Lycée Louis-Le-Grand,Paris MPSI 4– Mathématiques A. Troesch
Problème n
o11 : Fonctions régulières sur un intervalle
Problème 1– Calcul approché d’une intégrale
On propose dans ce problème d’analyser l’erreur commise lors de la mise en oeuvre de différentes techniques de calcul approché d’une intégrale.
Partie I – Approximation polynomiale au bord gauche
Soitf une fonction de classeCn+1 sur un intervalle[α, β].
1. Justifier, pour toutℓ∈[[0, n+ 1]], l’existence du réelMℓ= sup[α,β]|f(ℓ)|. On conserve cette notation jusqu’à la fin du problème.
2. Justifier que le polynôme
P =
n
X
ℓ=0
f(ℓ)(α)
ℓ! (X−α)ℓ
est l’unique polynômeP deRn[X]tel que pour toutℓ∈[[0, n]],P(ℓ)(α) =f(ℓ)(α).
3. Montrer que
Z β
α
(f(x)−P(x)) dx
6 Mn+1
(n+ 2)!(β−α)n+2.
4. Soit f une fonction de classe Cn+1 sur un intervalle [a, b], et N ∈ N∗. On subdivise l’intervalle [a, b] en N intervalles[xk, xk+1](k∈[[0, N−1]]), oùxk=a+kh, avech=b−Na.
Justifier que lorsqueN tend vers+∞ Z b
a
f(x) dx=
n
X
ℓ=0
(b−a)ℓ+1 (ℓ+ 1)!Nℓ+1
N−1
X
k=0
f(ℓ)(xk)
! +O
1 Nn+1
. 5. Commentez le casn= 0.
Partie II – Approximation polynomiale au point milieu
Avec les notations de la partie précédente, on note, pourk∈[[0, N−1]],mk le milieu de[xk, xk+1]et, pourf de classe Cn+1 sur[a, b],Qn,k l’unique polynôme tel que pour toutℓ∈[[0, n]], Q(ℓ)n,k(mk) =f(ℓ)(mk).
1. En adaptant la preuve de la partie I, montrer que Z b
a
f(x) dx=
n
X
ℓℓ=0pair
(b−a)ℓ+1 2ℓ(ℓ+ 1)!Nℓ+1
N−1
X
k=0
f(ℓ)(mk)
! +O
1 Nn+1
2. En comparant Z xk+1
xk
Qn,k et Z xk+1
xk
Qn+1,k, montrer que sin est pair, etf est de classeCn+2, alors
Z b
a
f(x) dx=
n
X
ℓℓ=0pair
(b−a)ℓ+1 2ℓ(ℓ+ 1)!Nℓ+1
N−1
X
k=0
f(ℓ)(mk)
! +O
1 Nn+2
1
3. Commenter et comparer les casn= 0 etn= 1.
Ces méthodes ne sont pas très pratiques pour de grandes valeurs dencar elles nécessitent la connaissance des dérivées successives de f. Pour cela, on leur préfère souvent des méthodes d’interpolation, ne nécessitant pas la connaissance des dérivées def.
Partie III – Méthodes de Newton-Cotes
Soit n>1. La méthode de Newton-Cotes d’ordre nconsiste à approcher sur chaque intervalle[α, β] de la subdivision l’intégrale à calculer par un polynôme interpolantf enn+ 1valeurs uniformément réparties sur le segment [α, β]. On suppose dans ce qui suit quef est de classeCn+1sur l’intervalle [a, b]d’intégration, donc aussi sur un intervalle[α, β]
de la subdivision. On note, pourk∈[[0, n+ 1]],yk=α+nk(β−α).
1. Exprimer (sous forme d’une somme) l’unique polynôme P de degré au plus n tel que pour tout k ∈ [[0, n]], P(yk) =f(yk).
2. Justifier qu’il existe des coefficientsbn,ℓ,ℓ∈[[0, n]], indépendants def,αetβ, tels que Z β
α
P(t) dt= (β−α)
n
X
ℓ=0
bn,ℓf(yℓ).
On exprimerabn,k en fonction de l’intégrale Z n
0
t(t−1). . .(t−k−1)(t−k+ 1). . .(t−n) dt.
3. Justifier que
n
X
k=0
bn,k= 1.
4. Contrôle de l’erreur d’interpolation.
(a) Soit xun élément de[α, β] distinct desyi, etg la fonction définie sur[a, b]par
g(t) =f(t)−P(t)− q(t)
q(x)(f(x)−P(x)), oùq(t) =
n
Y
k=0
(t−yk).
Justifier que lesyisont des zéros de g. Trouver unn+ 2-ième zéro deg distinct desyi. (b) Montrer qu’il existe c∈[a, b]tel queg(n+1)(c) = 0
(c) En déduire que|f(x)−P(x)|6Mn+1
n
Y
k=0
(x−yk) (n+ 1)! . 5. Soit, pour N ∈N∗,
IN =h
N−1
X
k=0 n
X
ℓ=0
bn,ℓf
a+
k+ ℓ n
h
, oùh=b−a N . Justifier qu’il existe un réelCn indépendant deN, def, et de aetb, telle que
Z b
a
f(t) dt−IN
6 CnMn+1(b−a)n+2
Nn+1 .
On exprimeraCn à l’aide de l’intégrale Z n
0 |t(t−1)·(t−n)|dt.
6. Jusqu’à la fin de cette partie, on suppose de plus que n est pair et que f est de classe Cn+2. On garde les notations du début de la partie.
(a) Montrer que Z β
α
(x−y0)· · ·(x−yn) dx= 0.
(b) En considérant P−λ(x−y0)· · ·(x−yn), montrer qu’il existe un polynôme Qde degré au plus n+ 1, tel que
Z β
α
Q(t) dt= Z β
α
P(t) dt, etQ′(ym) =f′(ym), oùm= n2.
2
(c) En adaptant le raisonnement de la question 5 avecq(t) = (t−ym)
n
Y
k=0
(t−yk), montrer que
Z b
a
f(t) dt=IN+O 1
Nn+2
. (d) Expliciter le casn= 2.
Partie IV – Méthode de Gauss
La méthode de Gauss est une adaptation de la méthode par interpolation de Newton-Cotes. Il s’agit d’interpoler la fonction sur chaque intervalle de la subdivision en des points répartis de façon non régulière cette fois, mais choisis de sorte à minimiser l’erreur. Il est fréquent de choisir comme points d’interpolation des racines d’une famille de polynômes. On considère dans un premier temps une fonction f de classe C2n de [−1,1] dans R, et on définit pour toutn ∈N, les polynômes Pn = (X2−1)n et Ln =Pn(n) (à constante multiplicative près, ce sont les polynômes de Legendre).
1. (a) Montrer que pour tout k∈[[0, n]],Pn(k)possède au moins kracines distinctes dans ]−1,1[.
(b) Justifier que les racines de Ln sont toutes simples et appartiennent à l’intervalle ]−1,1[. On les note
−1< r1< r2<· · ·< rn<1.
2. Soit Qn le polynôme de Rn−1[X] interpolantf aux points r1, . . . , rn. Justifier l’existence de réelsλ1, . . . , λn, indépendants def, tels que
Z 1
−1
Qn(x) dx=
n
X
ℓ=1
λℓf(rℓ).
On note désormaisIn(f) = Z 1
−1
Qn(x) dxet on étudie l’erreur faite en approchantI(f) = Z 1
−1
f(x) dxparIn(f).
3. (a) Montrer que siP est un polynôme vérifiantdeg(P)< n, alorsIn(P) =I(P).
(b) Montrer que si P est un polynôme vérifiantdeg(P)<2n, alors In(P) = I(P)(on pourra comparer avec I(R), oùR est le reste de la division euclidienne deP parLn).
Ainsi, la méthode est « exacte » non seulement sur les polynômes de degré au plusn−1 (comme toute méthode d’interpolation en n point), mais aussi sur les polynômes de degré au plus 2n−1, ce qui laisse supposer une erreur bien meilleure qu’une méthode d’interpolation standard.
4. Polynôme d’interpolation de Hermite de f
(a) À tout polynôme H de l’espace vectorielR2n−1[X], on associe l’élément deR2n suivant : ϕ(H) = (H(r1), H′(r1), H(r2), H′(r2), . . . , H(rn), H′(rn)).
Établir queϕest un isomorphisme (d’espaces vectoriels) deR2n−1[X]dansR2n.
(b) En déduire qu’il existe un polynôme Bn de degré strictement inférieur à2net un seul tel que :
∀j∈[[1, n]], Bn(rj) =f(rj) et B′n(rj) =f′(rj).
5. Montrer que I(Bn) =In(f).
6. Dans cette question, on fixe x un nombre réel donné de [−1,1], distinct des nombres r1, . . . , rn. On définit l’applicationg sur[−1,1]par la relation
g(t) =f(t)−Bn(t)−α·(Pn(n)(t))2, où le réelαest l’unique réel tel queg(x) = 0.
(a) Justifier l’existence et l’unicité deα.
(b) Montrer queg′ s’annulle en au moins2npoints distincts de]−1,1[
3
(c) En déduire l’existence dec∈]−1,1[tel que
f(x)−Bn(x) = (n!)2
((2n)!)3 ·f(2n)(c)(Pn(n)(x))2. 7. En conclure que :
|I(f)− In(f)|6 M2n 2n
n
2 · 22n+1 (2n+ 1)!. oùM2n désigne un majorant def(2n)sur[−1,1].
8. On suppose maintenant que f est une fonction de classeC2n sur un intervalle quelconque[α, β], et on désigne toujours parM2n un majorant de f(2n)sur l’intervalle[α, β]. Donner un majorant de
Z β
α
f(u) du−β−α 2
n
X
j=1
λjf
α+β 2 +rj
β−α 2
en fonction deM2n,n,αet β.
9. Montrer que si f est une fonction de classeC4 sur un intervalle[a, b], et N ∈N∗, alors :
Z b
a
f(u) du−b−a 2N
N−1
X
k=0
f
mk− b−a 2N√
3
+f
mk+ b−a 2N√
3
6M4(b−a)5 4320N4 , où, pour tout k dans[[0, N−1]], mk est le milieu de l’intervalle
a+nk(b−a), a+k+1n (b−a), et M4 est un majorant def(4).
4