G ERGONNE
Analise algébrique. Dissertation sur un cas singulier que présente l’approximation des racines des équations numériques
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 10 (1819-1820), p. 122-130
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I22
APPROXIMATION
de x
et v résolvent
laquestion proposée.
Leursubstitution
dans nos trois fonctionsdonne,
eneffet, 45=9,I0 2, 36=62, 5I=,
nombres de la forme demandée.
20. Ceci
peut
donnerdes
ouvertures pour traiter d’autresquestions
du même genre, mais
d’un
ordreplus
élève(*).
ANALISE ALGÉBRIQUE.
Dissertation
sur un cassingulier que présente l’approxi-
mation des racines des équations numériques;
Par M. G E R G O N N E.
LORSQUE , par
un moyenquelconque,
on estparvenu a
la valeurapprochée
de l’une des racines réelles d’uneéquation numérique,
il est
d’usage
de diviser sonpremier
membre par le facteur binomequi répond
à cette racine. Ennégligeant
le reste ,qui
est d’autant(*) En nous adressant le présent mémoire, M. Coste nous
prie
de releverune inexactitude
qu’il
a commise à la page 262 du VIII.e volume de ce recueil ,laquelle
consiste à avoir attribué à Pascal la déconverfe de lapropriété
del’hexagone
circonscrit h une sectionIconique, qui
est réellement due à M.Brianchon. Pascal n’a découvert que la
propriété
del’hexagone
inscrit. A lavérité, il est
aujourd’hui
très-aisé de passer de chacun de ces deux théorèmes a l’autre ;mais,
au temps de Pascal , ou la théorie des pôles n’était pas con- nue , ce n’étaitpoint
une chose aussi facilequ’elle
peut leparaître présentement.
J. D. G.
plus petit que
la racine dont ils’agit
estplus approchée ,
lequotient, égalé à zéro,
estl’équation qui
doit faire connaître les autres racines de laproposée.
Soit ,
parexemple, l’équation
du troisièmedegré.
dont on trouve, pour l’une des
racines,
lavaleur approchée x=I,753 ;
en divisant sonpremier membre , mis,
pourplus
decommodité,
sous cette formepar le
binome x-1,753, négligeant
lepetit
reste0,000I05223 ,
et
égalant
lequotient à zéro ,
on aura , pour déterminerapproxi-
mativement les deux autres
racines , l’équation
du seconddegré
laquelle,
étantrésolue ,
donnera en outreSoit, plus généralement,
pour le troisièmedegré , l’équation
de
laquelle
on ait déduit x=a, pour une des valeursapprochées
de x, en divisant son
premier
membre par x-a , le reste de la division sera, comme l’onsait.
I24 APPROXIMATION
or ,
dire que a
est une valeurapprochée
de x , c’estdire ,
end’autres
termes , que a, substituée dans lepremier membre ,
leréduit presque à
zéro ,
ou encore que le résultat de sa substitution-dans
lepremier
membre est un nombre fortapprochant
de zéro;puis
donc que ce résultat estprécisément
le reste de notredivision.
il en faut conclure que ce reste est presque
nul ,
queconséquem-
ment le
quotient
est presque exact , etqu’ainsi . égalé
àzéro,
ilfera
sensiblement
connaître les autres racines del’équation. On a , de
cettemanière, l’équation
du seconddegré
laquelle donne ,
pour les valeursapprochées
des deux autresracines ,
Ce que nous venons de- dire du troisième
degré s’étend,
commel’on
sait ,
à tous les autres ; avec cette seule différencequ’on n’y
trouve
plus
les mêmes facilités pour résoudrel’équation privée
dela racine
déjà
obtenue.Mais,
dans tous les cas , ceprocédé a l’avantage
de réduire d’une unité ledegré
del’équation
àrésoudre ;
et , si l’on considère combien s’accroît la difficulté de la résolution d’une
équation
à mesure que sondegré s’élève,
on sentira que cetavantage
n’estpoint
du tout àdédaigner. Aussi ,
leprocédé
quenous venons
d’indiquer
est-il presque universellementindiqué
partous ceux
qui
ont écrit sur cette matière.Cependant ,
dans unarticle récent du
présent volume ,
un de nos collaborateurs a crupouvoir
élever des doutes sur lalégitimité
de cetteopération
danscertains cas ; et , comme les motifs
qu’il allègue ,
àl’appui
de sonopinion,
ontquelque
chose despécieux
, nous avonspensé qu’il
ne serait
point hors
de proposde prendre
laplume
pourdissiper
ses
ses
scrupules
etdétourner peut-être quelques
uns de noslecteurs de
la tentation de lespartager.
Soit
l’équation
du troisièmedegré
dont une des racines est sensiblement
égale
àl’unité, puisque
lasubstitution de cette valeur dans le
premier membre,
à laplace
dex , réduit ce
premier membre !sinon
àzéro,
du moins autrès-petit
nombre 0,000001 Divisons
donc,
suivant leprocédé admis ,
lepremier
membre de notreéquation
par le binome x-I, en né-gligeant
le reste etégalant
lequotient
àzéro ,
nous aurons, pourdéterminer
approximativement les.
deux autresracines , l’équation
de sorte que ces deux racines sembleraient être + I et -2 ; tandis
qu’il
estpatent,
parl’inspection
del’équation proposée , qu’elle
ne saurait avoir
qu’une
racine réelle seulement.La même chose arriverait encore, si l’on
partait de
la racineapprochée - 2 ;
endivisant ,
eneffet ,
parx+2 , négligeant
lereste et
égalant
lequotient
àzéro,
ontomberait
, pour la déter- mination des deux autresracines 1
surl’équation
qui
les feraitparaître
réelleset ébales.
On sent
qu’à l’inverse,
il ne serait pas difficile de former uneéquation
dutroisième degré qui,
ayant ses trois racinesréelles,
donnerait
néanmoins ,
en divisant sonpremier
membre par le fac-teur binôme
qui répond
à la valeurapprochée
de l’une d’entreelles,
Tom. X. I7
et
négligeant
le reste, unquotient
du seconddegré qui , égalé à
zéro,
feraitparaître imaginaires
les deux autres racines de cetteéquation ;
et il n’est pas besoin de direqu’il
en serait demême,
àplus
forteraison ,
dans lesdegrés plus
élevés.Que
doit-on donc penserd’après cela, ajoute-t-on ,
d’unprocédé qui
tend à confondreet à faire
prendre
les uns pour les autres des êtres aussi- essentiel- lementhétérogènes
que le sont lesquantités
réelles et lesquantités imaginaires ,
et à faireparaître possible
unproblème qui
ne l’estpas et pite versâ ? Tout cela est fort
spécieux ,
nous l’avouerons si l’on veut ; mais nousespérons
que l’on demeurera tout-à-l’heure bien convaincuqu’il n’y
a làqu’une
pure illusion.Qu’est-ce ,
eneffet,
que résoudrerigoureusement
uneéquation,
ou ,
plus généralement ,
un nombrequelconrlue d’équations ,
entretant d’inconnues
qu’on
levoudra ?
Tout le monde tombera d’accord que c’est trouver , pour les inconnues que ceséquations renferment,
un ou
plusieurs systèmes
de valeursqui ,
mises pour ces inconnues dans ces mêmeséquations,
rendent les deux membres de chacune d’ellesrigoureusement égaux ,
et réduisentconséquemment
leurspremiers
membres àzéro, si ,
comme nous le supposons , les seconds le sontdéjà. Que
ces valeurs soient réelles ouimaginaires , égales
ou
inégales ,
c’est cequi importe
fort peu , à considérer les chosessous un
point
de vuepurement analitiqne
et abstrait. Il arrivera seulement que leproblème qui
aura conduit à ceséquations
seratantôt
possible
et tantôtimpossible ,
aura tantôt unplus grand
ettantôt un moindre nombre de solutions.
Qu’est-ce
ensuite que résoudre ces mêmeséquations
par appro- ximation ? On conviendra encore que c’est trouver dessystèmes
devaleurs des inconnues
qui ,
sans réduire leurspremiers
membres àzéro,
les rendent du moinstrès-petits ;
etplus
ils les rendrontpetits
etplus
aussi ces valeurs serontapprochées ;
ellespourront d’ailleurs,
comme dans lepremier
cas, être indistinctement réellesou
imaginaires égales
ouinégales.
Mais il y a, entre ce cas et le
précédent ,
cette différence essen-I27 tielle que , tandis que , dans le
premier ,
le nombre et la naturedes
systèmes
de valeurs des inconnues se trouvent tout-à-faitlimités
et
déterminés , ici ,
aucontraire
unsystème
de valeurpeut
fort bien êtreremplacé par
un autre,qu’on
pourraregarder
commelui étant
équivalent y
en ce sensqu’il
aura comme lui lapropriété
de faire devenir les
premiers
membrestrès-petits,
par sa substi- tution à laplace
desinconnues ;
or , il pourra fort bien se faire que telle inconnuequi
était réelle dans lepremier système ,
soitau contraire
Imaginaire
dans lesecond ,
et viceversâ ,
sans que pour cela l’un ou l’autre de ces deuxsystèmes
cesse d’être admis- sible.Ainsi ,
pour ne pas sortir du seconddegré ,
s’il n’estquestion
seulement que de
résoudre ,
d’une manièreapproximative, l’équation
on le pourra
également
soit en donnant à x cesdeux valeurs
réelles et
inégales
soit,
en admettant ces deux valeursimaginaires
car , si les unes et les autres ne
réduisent
pas lepremier membre
à
zéro,
elles le rendent du moinstrès-petite
Il faut donc nécessairement conclure de tout ceci
qu.’un pro-
cédéapproximatif
ne saurait êtreréputé
vicieux parcela
seulqu’il présentera ,
sous formeréelle ,
des valeursqui, rigou-
reusement
parlant,
sontimaginaires,
ou, sous formeimaginaire ,
I28
APPROXIMATION
des valeurs
proprement réelles ; l’essentiel,
dans toutceci,
est queson les unes soit les autres valeurs rendent sensiblement
égaux
àzéro les
premiers
membres deséquations qu’elles
seront des-tinées à résoudre d’une manière
approximative.
Mais, dira-t-on
s’ils’agit
de fairel’application
de ces résultatsa des
problèmes
degéometrie.
les mutations dont il vient d’êtrequestion
nedeviendront-elles pas
tout-à-fait intolérables ? Peut-on admettrequ’un prublème,
lors mêmequ’il
estquestion
seulementde le résoudre par
approximation ,
soitpossible
ouimpossible ,
volonté ,
et soitsusceptible
aussi àvolonté
tantôt d’unplus grand
et tantôt d’un moindre nombre de solutions ?
Que si ,
aucontraire
ces considérations ne sont recevables
que
sous unpoint
devue
pu-rement
théorique
etabstrait ,
dequelle
utilitépeuvent-elles
être,puisqu’en
dernière analise la théorie n’a raisonnablement deprix
que comme servant de
guide
de lapratique ?
Nous
répondrons
à cesobjections
en faisant voirqu’au
contrairerien n’est
plus propre
que les considérationsgéométriques à
con-:firmer et à mettre dans tout son
jour
la doctrine que nous venonsd’établir ;
et cela est même si-vrai,
que ce sontprécisément
desconsidérations
géométriques qui
nous ont mentalementdirigés
danstout ce
qui précède.
Pour
prendre
unexemple
fortsimple,
considérons leproblème
où il
s’agit
de mener , par unpoint donné ,
unetangente
a uncercle ;
chacun sait que ceproblème présente
trois cas ;qu’il
adeux solutions
lorsque
lepoint
donné est extérieur aucercle ;
que ces deux solutions se réduisent à une
seule , lorsque
cepoint
est sur la
circonférence ;
etqu’enfin
il devientimpossible lorsque
ce même
point
lui est intérieur.Voilà pour ce
qui
concerne une théorierigoureuse
etabstraite ;
mais supposons que , sur le
terrain,
unpraticien
ait à mener, parun
point donné,
unetangente
à uncercle ;
et supposons deplus
que le
point
donné soit si voisin de la circonférencequ’il
soitpermis
de douter s’il est en dedans ou en
dehors ,
ou s’il estprécisément
sur elle. Nutre
praticien
hésitera-t-il dejoindre
lepoint
donné aucentre du cercle par une
droite ,
de mener par le mêmepoint
une
perpeudiculaire
à cettedroite,
et deréputer tangente
cetteperpendiculaire qui pourtant
serapeut-être
une sécante ou unedroite
étrangère
au cercle ? et serait-on recevable a luiobjecter
que
peut-être
saprétendue tangente
n’existe pas , ouqu’au
lieud’une tangente il en existe deux par le
point
donné ? A lavérité ,
il
pourrait
en être ainsi pourqui
yregarderait
deplus près ;
maiscela se réduit à dire que des racines
qui,
pour un certaindegré d’approximation , peuvent ,
sansinconvénient ,
êtreréputées égales , peuvent
pour undegré d’approximation plus parfait,
devenir Iné-gales
ouimaginaires;
et c’estjustement
ce que nous nous sommesproposés
d’établir.Il en ira à peu
près
demême , lorsqu’il
seraquestion
de menera un cercle une tangente
parallèle
à une droitedonnée ;
et à moinsd’une
précision à laquelle
lapratique
ne sauraitjamais
sepromettre d’atteindre ,
il arrivera leplus
souventqu’au
lieu d’unseul point
commun avec le
cercle ,
on en aura deux réels au deuximaginaires;
mais,
pourcela ,
leproblème
n’en sera pas moinsréputé
résolu.Ou voit par là que , dans
l’approximation pratique
des racinesdjs
équations numériques ,
onpeut
fort bien sedispenser
du re-cours à
l’équation
auxquarrés
des différences de ces racines. Toutes lesfois,
eneffet,
que , par des substitutionssuccessives ,
on seraparvenu à une valeur de x
qui, mise
à laplace
de cette inconnuedans le
premier
membre de laproposée ,
rendra cepremier
membretrès-petit ; quand
bien même le résultat obtenu ne se trouverait environné que d’autres résultats de mêmessignes
quelui ,
on n’ensera pas moins
autorisé ,
et cela sans craindre d’erreursensible , à
admettre dans
l’équation
deux racineségales
au nombresubstitué, quoiqu en rigueur
ces deux racinespuissent
fort bien êtreinégales
ou même
imaginaires.
Celarevient,
eneffet , à
supposerqu’une
courbe
parabolique qui a
l’un de ses sommets très-voisin de l’axeI30
APPROXIMATION RACINES.
des x ,
a cette droite pourtangente
à ce sommet , cequi
est in-contestablement
permis, lorsqu’il
n’estquestion
que deprocédés
purement approximatifs.
Une
conséquence
forcée de tout ceci c’est que lesimaginaires
nesont pas des êtres aussi essentiellement différens des
quantités
réellesqu’on
estgénéralement
dansl’usage
de le supposer ; que les unset les autres sont
cornparables
à certainségards ;
etqu’on peut ,
sans
pécher
contre larigueur
dulangage mathérnatique, dire ,
d’unequantité imaginaire , qu’elle
diffèreplus
ou moins d’unequantité
réelle ,
tout comme on le dirait de deuxquantités
réelles que l’oncomparerait
l’une àl’autre ;
c’est sans doute cequ’avait déjà
vouluinsinuer M. le
professeur
de Maizières à la page373
du I.ervolume de ce
recueil;
et c’est ce que confirme encore la nouvellethéorie des
imaginaires exposée
par MM.Français
etArgand ,
auxpages
61 , I33,222
et364
du IV.e volume desAnnales ;
etsi ,
dans cequi précède,
nous avonspréféré
les considérations lesplus
communes aux secours
qu’aurait
pu nous fournir une théorie encorecontestée ;
il n’en est pas moins vrai que les conclusionsauxquelles
nous sommes Farvenus ,
pourraient ,
à leur tour , venir àl’appui
decette