Convergence de suites de variables al´eatoires
A. Godichon-Baggioni
I. Rappels de probabilit´es
F ONCTIONS DE R EPARTITION ´
Soit (Ω, F, P ) un espace probabilis´e et X : Ω −→ R une variable al´eatoire. La fonction de r´epartition F X : R −→ [ 0 , 1 ] de X est d´efinie pour tout x ∈ R par
F X ( x ) = P [ X ≤ x ] .
Elle est croissante, continue `a droite et
x→−∞ lim F X (x) = 0 ,
x→+∞ lim F X ( x ) = 1 .
E XEMPLES :
1. Si X suit une loi de Bernoulli de param`etre p,
F X (x) =
0 si x < 0 1 − p si 0 ≤ x < 1 1 si x ≥ 1 2. Si X suit une loi uniforme sur [ 0 , 1 ] ,
F X ( x ) =
0 si x < 0 x si 0 ≤ x ≤ 1 1 si x ≥ 1 3. Si X suit une loi normale centr´ee r´eduite,
F X ( x ) = Z x
−∞
√ 1 2 π e −
t2 2
dt .
−1.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0
0.00.20.40.60.81.0
−1.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0
0.00.20.40.60.81.0
−4 −2 0 2 4
0.00.20.40.60.81.0
F IGURE – Fonctions de r´epartition d’une loi de Bernoulli de param`etre
p = 0.75 (`a gauche), d’une loi uniforme (au centre) et d’une loi
normale centr´ee r´eduite (`a droite).
II. Modes de convergence
C ONVERGENCES DE VARIABLES AL EATOIRES ´
On consid`ere une suite de variables al´eatoires (X n ) et on s’int´eresse `a ses diff´erents modes de convergence, i.e
I Convergence en loi
I Convergence en probabilit´e I Convergence presque s ˆure
I Convergence en moyenne quadratique
C ONVERGENCE EN LOI
D´efinition
Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires. On dit que (X n ) converge en loi vers une variable al´eatoire X et on note
X n
− −−−− L →
n→+∞ X
si pour toute fonction continue born´ee ϕ, on a E [ϕ ( X n )] − −−−− →
n→+∞ E [ϕ ( X )] .
De mani`ere ´equivalente, on dit que (X n ) converge en loi vers X si pour toute fonction uniform´ement continue et born´ee ϕ, on a
E [ϕ (X n )] − −−−− →
n→+∞ E [ϕ (X)] .
E XEMPLES
Exemple 1 : Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n ∼ B
p + 1−p n , alors
X n
− −−−− L →
n→+∞ X ∼ B( p ).
Exemple 2 : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n = −X, o `u X ∼ N (0, 1), alors
X n
−−−→ L n→∞ X .
Exemple 3 : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n ∼ N 0 , σ 2 + 1 n
, alors X n
− −−−− L →
n→+∞ X ∼ N 0 , σ 2
C ONVERGENCE EN LOI
Proposition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires. X n converge en loi vers une variable al´eatoire X si et seulement si en tout point de continuit´e x de la fonction de r´epartition F X de X on a
F X
n( x ) − −−−− →
n→+∞ F X ( x ).
E XEMPLES
Exemple 1 : Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n ∼ B
p + 1−p n , alors
X n
− −−−− L →
n→+∞ X ∼ B( p ).
Exemple 2 : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n = −X, o `u X ∼ N (0, 1), alors
X n
−−−→ L n→∞ X .
Exemple 3 : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n ∼ N 0 , σ 2 + 1 n
, alors X n
− −−−− L →
n→+∞ X ∼ N 0 , σ 2
C ONVERGENCE EN LOI Corollaire
Soient ( X n ) une suite de variables al´eatoires et X une variable al´eatoire telles que X n , X sont absolument continues de densit´es f n , f , alors X n converge en loi vers X si et seulement si pour tout x ∈ R,
f n ( x ) − −−−− →
n→+∞ f ( x ).
Exemple 2 : Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n = − X, o `u X ∼ N ( 0 , 1 ) , alors
X n
−−−→ L n→∞ X.
Exemple 3 : Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1, X n ∼ N 0 , σ 2 + 1 n
, alors X n
− −−−− L →
n→+∞ X ∼ N 0, σ 2
C ONVERGENCE EN LOI
Soit X une variable al´eatoire, on rappelle que sa fonction caract´eristique Φ X est d´efinie pour tout t par
Φ X ( t ) = E e itX
.
Proposition
Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires, X n converge en loi vers X si et seulement si pour tout t ∈ R,
Φ X
n( t ) − −−−− →
n→+∞ Φ X ( t ).
E XEMPLE : LANCERS DE PI ECE `
On rappelle que X i vaut 1 si le i-`eme lancer veut ”Pile” et 0 sinon, et on a donc X i ∼ B(θ). Un estimateur naturel de θ est
θ ˆ n = 1 n
n
X
i=1
X i
alors
θ ˆ n − −−−− L →
n→+∞ θ.
C ONVERGENCE EN PROBABILIT E ´
D´efinition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires. On dit que ( X n ) converge en probabilit´e vers X et on note
X n − −−−− P →
n→+∞ X
si pour tout > 0,
P [|X n − X| > ] − −−−− →
n→+∞ 0.
Exemple : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires, avec pour tout n ≥ 1, X n ∼ B p n
, o `u p ∈ (0, 1), alors X n P
− −−−− →
n→+∞ 0.
C ONVERGENCE EN LOI V S C ONVERGENCE EN PROBABILIT E ´
Proposition
Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires. Si (X n ) converge en probabilit´e vers une variable al´eatoire X, alors (X n ) converge en loi vers X.
Attention ! La r´eciproque est g´en´eralement fausse !
Contre-exemple : Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires, avec X n = −X, o `u X ∼ N (0, 1).
Proposition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires. Si ( X n ) converge en loi
vers une constante c, alors ( X n ) converge en probabilit´e vers c.
C ONVERGENCE PRESQUE S URE ˆ
D´efinition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires. On dit que ( X n ) converge presque s ˆurement vers X et on note
X n
− −−−− p.s →
n→+∞ X
si P
n→+∞ lim X n = X
= P
ω ∈ Ω; lim
n→+∞ X n (ω) = X (ω)
= 1 .
C ONVERGENCE PRESQUE S URE ˆ V S CONVERGENCE EN PROBABILIT E ´
Proposition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires. Si ( X n ) converge presque s ˆurement vers une variable al´eatoire X, alors ( X n ) converge en probabilit´e vers X.
Attention ! La r´eciproque est g´en´eralement fausse !
Contre-exemple : Soit X une variable al´eatoire suivant une loi
uniforme sur [ 0 , 1 ] et la suite d’´ev`enements ( A n ) d´efinie par
A 1 = { X ∈ [ 0 , 1 ]} , A 2 = { X ∈ [ 0 , 1 / 2 ]} , A 3 = { X ∈ [ 1 / 2 , 1 ]} ,
A 4 = { X ∈ [ 0 , 1 / 4 ]} ,... Alors Y n = 1 A
nconverge en probabilit´e
vers 0 mais ne converge pas presque s ˆurement.
C ONVERGENCE PRESQUE S URE ˆ V S CONVERGENCE EN PROBABILIT E ´
Application du lemme de Borell-Cantelli : Si pour tout > 0, X
n≥1
P [|X n − X| ≥ ] < +∞, alors ( X n ) converge presque s ˆurement vers X.
Exemple : Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires telle que pour tout n ≥ 1,
P [ X n = 0 ] = 1 − 1
n 2 et P [ X n = n ] = 1
n 2 .
C ONVERGENCE EN MOYENNE QUADRATIQUE
D´efinition
Soit ( X n ) une suite de variables al´eatoires de carr´e int´egrable. On dit que ( X n ) converge en moyenne quadratique vers X et on note
X n L
2− −−−− →
n→+∞ X
si
E
h |X n − X| 2 i
− −−−− →
n→+∞ 0 .
Exemple : lancer de pi`ece θ ˆ n converge en moyenne
quadratique vers θ .
C ONVERGENCE EN MOYENNE QUADRATIQUE V S CONVERGENCE EN PROBABILIT E ´
Proposition
Soit (X n ) une suite de variables al´eatoires. Si (X n ) converge en moyenne quadratique vers une variable al´eatoire X, alors (X n ) converge en probabilit´e vers X.
Attention ! La r´eciproque est g´en´eralement fausse ! Contre-exemple : Soit (X n ) la suite de variables al´eatoires d´efinie pour tout n ≥ 1 par
P [ X n = 0 ] = n − 1
n , P [ X n = n ] = 1
n .
R ´ ESUM E ´
X n
− −−−− p.s →
n→+∞ X = ⇒ X n − −−−− P →
n→+∞ X = ⇒ X n
− −−−− L →
n→+∞ X
X n L
2− −−−− →
n→+∞ X = ⇒ X n − −−−− P →
n→+∞ X = ⇒ X n
− −−−− L →
n→+∞ X
Remarque : Il n’y a pas d’implication ”g´en´erale” entre
convergence presque s ˆure et convergence en moyenne
quadratique.
C ONTRE - EXEMPLES
Contre-exemple 1 : moyenne quadratique ⇒ presque s ˆure.
Soit X une variable al´eatoire suivant une loi uniforme sur [ 0 , 1 ] et la suite d’´ev`enements ( A n ) d´efinie par A 1 = { X ∈ [ 0 , 1 ]} , A 2 = { X ∈ [ 0 , 1 / 2 ]} ..., et on consid`ere la suite Y n = 1 A
n. Contre-exemple 2 : presque s ˆure ⇒ moyenne quadratique.
On consid`ere une suite de variables al´eatoires ( X n ) telle que pour tout n ≥ 1,
P [ X n = 0 ] = 1 − 1
n 2 et P [ X n = n ] = 1
n 2 .
III.In´egalit´es classiques
I N EGALIT ´ E DE ´ M ARKOV
Proposition (In´egalit´e de Markov)
Soient c, p > 0 et X une variable al´eatoire admettant un moment d’ordre p, on a
P [| X | ≥ c ] ≤ E
| X | p
c p .
I N EGALIT ´ E DE ´ B IENAYM E ´ -T CHEBYCHEV
Corollaire (In´egalit´e de Bienaym´e-Tchebychev)
Soit c > 0 et X une variable al´eatoire admettant un moment d’ordre 2, alors
P [| X − E [ X ]| ≥ c ] ≤ V [ X ] c 2 .
Exemple : lancer de pi`ece : On a pour tout > 0,
P h
θ ˆ n − θ ≥ i
≤ θ(1 − θ)
2 n .
I N EGALIT ´ ES DE ´ C AUCHY -S CHWARZ
Th´eor`eme (In´egalit´e de Cauchy-Schwarz)
Soit X , Y deux variables al´eatoires admettant un moment d’ordre 2.
Alors
E [|XY|] ≤ q
E [ X 2 ] E [ Y 2 ].
Exemple : Soit (X n ) , (Y n ) deux suites d’estimateurs convergeant en moyenne quadratique vers 0. On suppose qu’ils convergent ´egalement `a l’ordre 4, i.e ils admettent des moments d’ordre 4 et
E
h |X n − x| 4 i
− −−−− →
n→+∞ 0 et E
h |Y n − y| 4 i
− −−−− →
n→+∞ 0.
Alors X n Y n converge en moyenne quadratique vers xy.
I N EGALIT ´ E DE ´ H ¨ OLDER
Th´eor`eme (In´egalit´e de H ¨older)
Soit X , Y deux variables al´eatoires, et p , q > 1 tel que 1 p + 1 q = 1. Si X admet un moment d’ordre p et si Y admet un moment d’ordre q, alors
E [|XY|] ≤ ( E [|X| p ])
1p( E [|Y| q ])
1q.
Exemple 1 : Si X admet un moment d’ordre r, alors pour tout r 0 ∈ ( 0 , r) ,
E h |X| r
0i
≤ ( E [|X| r ])
r0 r
.
Exemple 2 : Soit ( X n ) , ( Y n ) deux suites d’estimateurs o `u X n
converge `a l’ordre r vers 0, avec 2 < r < 4, et Y n converge `a
l’ordre r−2 2r vers 0.
IV. Th´eor`emes asymptotiques
L OI FAIBLE DES G RANDS N OMBRES
Soit X 1 , . . . , X n des variables al´eatoires ind´ependantes et identiquement distribu´ees, on note
S n =
n
X
i=1
X i .
Th´eor`eme (Loi faible des Grands Nombres)
Soient X 1 , . . . , X n des variables al´eatoires ind´ependantes et
identiquement distribu´ees admettant une moyenne m = E [ X 1 ] , alors S n
n
− −−−− P →
n→+∞ m .
L OI F ORTE DES G RANDS N OMBRES
Th´eor`eme (Loi Forte des Grands Nombres)
Soient X 1 , . . . , X n des variables al´eatoires ind´ependantes et
identiquement distribu´ees admettant une moyenne m = E [X 1 ], alors S n
n
− −−−− p.s →
n→+∞ m.
Exemple : lancer de pi`ece On a θ ˆ n − −−−− p.s →
n→+∞ θ.
L ANCER DE PI ECE `
0 500 1000 1500 2000
0.200.300.400.50
F IGURE – Evolution en fonction de n d’une r´ealisation de θ ˆ
navec
θ = 0.5
T H EOR ´ EME ` C ENTRAL L IMITE
Th´eor`eme (Th´eor`eme Central Limite)
Soient X 1 , . . . , X n des variables al´eatoires ind´ependantes et identiquement distribu´ees de moyenne m = E [ X 1 ] et de variance σ 2 = V [ X 1 ] , alors
√ n S n
n − m L
− −−−− →
n→+∞ N 0 , σ 2 ce que l’on peut ´ecrire comme
√ n σ
S n
n − m L
− −−−− →
n→+∞ N ( 0 , 1 ).
L ANCER DE PI ECE ` EQUILIBR ´ EE ´
Dans le cas du lancer de pi`ece, on a E [X 1 ] = 1 2 et V [X 1 ] = 1 4 , et
donc √
n
θ ˆ n − 1 2
L
− −−−− →
n→+∞ N
0 , 1
4
,
ce que l’on peut ´ecrire comme
P n := 2 √ n
θ ˆ n − 1
2 L
− −−−− →
n→+∞ N ( 0 , 1 ).
L ANCER DE PI ECE ` EQUILIBR ´ EE ´
−4 −2 0 2 4
0.00.20.40.60.81.0
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−4 −2 0 2 4
0.00.20.40.60.81.0
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−4 −2 0 2 4
0.00.20.40.60.81.0
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