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| La Lettre du Rhumatologue • N° 429-430 - février-mars 2017CAS CLINIQUE
Spondyloarthrite • Rachitisme hypophosphatémique lié à l’X • Enthésite
Spondyloarthritis • X-linked hypophosphatemia • Entheso- pathy
Enthésite ne rime pas toujours avec spondyloarthrite
Enthesitis not always means spondyloarthritis
N. Poursac*, T. Schaeverbeke*
U
ne patiente de 32 ans nous est adressée pour second avis sur une spondyloarthrite (SpA) résistant aux anti-Tumor Necrosis Factor.Examen clinique
La patiente ne rapporte aucun antécédent. Elle décrit avoir depuis 10 ans des douleurs mécaniques des avant-pieds, des talons et du bassin. L’examen physique retrouve des douleurs à la palpation des enthèses achilléennes, des crêtes iliaques et du rachis lombaire ainsi que des lésions cutanées compatibles avec du psoriasis.
Examens complémentaires
La protéine C réactive (CRP), le bilan auto-immun et l’IRM du rachis et des sacro-iliaques sont normaux. L’échographie des tendons d’Achille (figure 1) met en évidence une enthé- site confirmée à l’IRM (figure 2) .
Le diagnostic de SpA périphérique enthésitique est retenu selon les critères de l’Assess- ment of Spondyloarthritis international Society (ASAS) [enthésite + psoriasis]. Un nouvel essai d’étanercept puis de golimumab se solde par un échec après une amélioration transitoire de 2 mois.
Devant l’absence de réponse à 3 anti-TNF, le diagnostic est remis en question et le dossier intégralement repris. On constate alors qu’une phosphatémie basse, à 0,58 mmol/ L, lors du dernier examen biologique, est retrouvée également sur toutes les analyses réalisées en laboratoire de ville entre 2004 et 2012. Le bilan étiologique conclut à un diabète phosphaté lié au Fibroblast Growth Factor 23 (FGF23) [taux de réabsorption du phosphate à 64 %, pas de signes de Fanconi, parathormone = 60 pg/ ml, calcium = 2,3 mmol/ L, calciurie des 24 h à 2,6 mmol/ L, calcitriol bas, FGF23 à 3N].
En réinterrogeant la patiente, on retrouve dans l’enfance un traitement par vitamine D pour retard de croissance. Elle mesure 1,53 m. Un rachitisme hypophosphatémique lié à l’X est confirmé par l’analyse génétique (mutation hétérozygote de l’exon 11 du gène PHEX).
Les anti-TNF sont définitivement arrêtés et le diagnostic de SpA est récusé. Un traitement par calcitriol et phosphate est instauré, permettant une amélioration.
Discussion
Le rachitisme hypophosphatémique lié à l’X est l’étiologie la plus fréquente d’hypo- phosphatémie associée au FGF23 (1) .
Il est dû à une mutation d’un gène régulateur du phosphate, situé sur le chromosome X, synthétisant une endopeptidase dont la mutation entraîne une élévation du FGF23, à l’origine du diabète phosphaté. Outre le rachitisme, différents phénotypes sont décrits, parmi lesquels des enthésopathies calcifiantes pouvant mimer une SpA (figure 3) [1-3] .
Conclusion
Le rachitisme hypophosphatémique lié à l’X est une pathologie rare qui se manifeste par des douleurs enthésitiques axiales ou périphériques pouvant à tort faire envisager le diagnostic de SpA et qui impose le dosage de la phosphatémie devant tout tableau
douloureux chronique. II
Légendes
Figure 1. Échographie montrant une enthésite des tendons achilléens en coupes longitudinale (A, B) et axiale (C) .
Figure 2. Enthésite achilléenne droite avec œdème calcanéen en regard.
Figure 3. Enthésopathie calcifi ante dans le cadre d’un rachitisme lié à l’X mimant une SpA (2) .
1. Liang G, Katz LD, Insogna KL, Carpenter TO,
Macica CM. Survey of the enthesopathy of X-linked hypophosphatemia and its characterization in Hyp mice.
Calcif Tissue Int 2009;85(3):235-46.
2. Karaplis AC, Bai X, Falet JP, Macica CM. Minera-
lizing enthesopathy is a common feature of renal phosphate- wasting disorders attributed to FGF23 and is exacerbated by standard therapy in Hyp mice.
Endocrinology 2012;153(12):5906-17.
3. Polisson RP, Martinez S, Khoury M et al. Calcifi cation of entheses associated with X-linked hypophosphatemic osteomalacia. N Engl J Med 1985;313(1):1-6.
Références bibliographiques
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
* Service de rhumatologie, hôpital Pellegrin, CHRU de Bordeaux.
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