36 | La Lettre du Cardiologue • N° 500 - décembre 2016
Grand Prix 2016
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erlauréat
CAS CLINIQUE
Fistules • Shunt • Coronaires • Congénital
Fistula • Shunt • Coronary arteries • Congenital
Trop gros pour être vrai
Too big to be true
L. Cacoub, J. Rosencher*
C
ertaines anomalies congénitales peuvent rester asymptomatiques de (très) nombreuses années.Observation
Monsieur O., 89 ans, est adressé pour insuffisance cardiaque (IC) et accélération d’une fibrillation atriale (FA) permanente. Il n’a pas d’antécédent significatif. L’examen clinique retrouve des signes d’IC droite. L’ECG s’inscrit en FA rapide avec un aspect de bloc de branche droit complet. L’échographie transthoracique met en évidence une dilatation des cavités droites avec une insuffisance tricuspide importante et un shunt gauche/droit significatif (rapport Qp/Qs à 1,56). La coronarographie met en évidence une coronaire droite dominante sans sténose significative, ainsi qu’une dilatation importante du tronc commun et de l’artère circonflexe, de plus de 15 mm de diamètre, tortueuse et très cal- cifiée. Il existe une fistule coronaro-camérale vers le sinus veineux et les cavités droites (figure 1) . L’angioscanner cardiaque met en évidence une volumineuse fistule calcifiée et très tortueuse, cheminant dans le sillon auriculoventriculaire et s’abouchant dans le sinus veineux (figures 2-4) . L’opacification précoce de la distalité du sinus veineux et de l’oreillette droite confirme la présence d’un shunt important, responsable d’une dilatation significative des cavités droites.
Compte tenu de l’âge avancé du patient et de la taille de la fistule, le traitement a été uniquement symptomatique.
Discussion
Les fistules coronaro-camérales (FCC) sont des malformations rares, dont l’incidence est estimée à 0,02 % dans la population générale (1) . Elles peuvent être congénitales ou acquises ( post-chirurgicales, post-biopsies myocardiques ou post-traumatique s).
Elles peuvent naître des 3 artères coronaires mais sont plus fréquentes à partir de la coronaire droite. La taille de la fistule et un rapport débit pulmonaire/débit systémique (Qp/Qs) > 1,5 déterminent un shunt important .
La grande majorité des patients est asymptomatique et la découverte est le plus souvent fortuite. L’évolution naturelle des FCC est lente et les complications tardives, comme l’infarctus du myocarde par phénomène de vol artériel ou thrombotique, la fibrillation atriale, l’insuffisance cardiaque droite ou l’endocardite infectieuse favorisée par le shunt.
Les indications de prise en charge des FCC sont mal définies. Il semble admis de proposer une fermeture en cas de large fistule chez les patients symptomatiques. Cependant, la fermeture d’une fistule coronaire ancienne, anévrysmale et tortueuse, est associée à une augmentation du risque d’infarctus du myocarde. Le traitement historique était la ligature chirurgicale par voie épicardique ou endocardique. La fermeture percutanée est maintenant le plus souvent préférée (embolisation par coils ou plugs vasculaires).
Conclusion
Les FCC représentent une anomalie coronaire rare, le plus souvent asymptomatiques et pouvant être découvertes très tardivement. Les indications de prise en charge chirurgicale ou percutanée restent mal définies et sont décidées au cas par cas. II
Légendes
Figure 1. Aortographie. Visualisation d’une dilatation coronaire anévrysmale, tortueuse et calcifi ée, remplissant le sinus veineux.
Figure 2. Angioscanner cardiaque (artéfacté par la FA). (§) Dilatation importante de la fi stule coronaro-camérale qui est tortueuse et calcifi ée. (*) Perméabilité de l’IVA.
Figure 3. Angioscanner cardiaque. (*) Trajet proximal normal de l’artère coronaire droite.
(§) Trajet de la fistule coronaro-camérale dans le sillon auriculoventriculaire. (@) Sinus veineux non encore opacifi é par le produit de contraste.
Figure 4. Angioscanner cardiaque. (*) Opaci- fi cation et dilatation du sinus veineux. (§) Opa- cifi cation et dilatation de l’oreillette droite.
1. Gowda RM, Vasavada BC, Khan IA. Coronary artery fi stulas: clinical and therapeutic considerations. Int J Cardiol 2006;107(1):7-10.
Référence bibliographique
* Clinique Ambroise-Paré, Neuilly-sur-Seine.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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