314 | La Lettre de l'Hépato-gastroentérologue • Vol. XX - n° 5 - septembre-octobre 2017
CAS CLINIQUE
Grand Prix MICI 2017
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elauréat
Une maladie diffi cile à avaler
A bitter disease to swallow
Nassim Hammoudi*, M. Maillet*, A.L. Audrain-Cathala*, M. Allez*, J.M. Gornet*, M.L. Tran-Minh*
* Service de gastroentérologie, hôpital Saint-Louis, Paris.
L’
atteinte œsophagienne de la maladie de Crohn est rare (0,2 % des patients) et son traitement, non codifi é. Nous décrivons le cas d’un patient ayant développé une œsophagite ulcérée sévère secondaire à une maladie de Crohn.Observation
Un patient, âgé de 23 ans, sans antécédent, consulte en octobre 2006 pour douleurs abdo- minales, diarrhée, aphtose buccale, aphagie et amaigrissement de 8 kg. Le diagnostic de maladie de Crohn est posé devant une valvule de Bauhin ulcérée, des ulcérations aphtoïdes pancoliques avec des intervalles de muqueuse saine à la coloscopie. La gastroscopie retrouve un vaste ulcère œsophagien creusant à 34 cm des arcades dentaires (fi gure 1) , avec granulomes à l’histologie. Après l’échec des traitements par acide 5-aminosalicylique (5-ASA), corticothérapie, nutrition parentérale et 6-mercaptopurine, un traitement par infl iximab en bithérapie est introduit fi n 2007 permettant une amélioration clinique après l’induction puis une perte de réponse précoce, malgré une optimisation à 10 mg/
kg. Un nouveau bilan est réalisé : l’endoscopie retrouve un ulcère hémicirconférentiel œsophagien creusant (fi gure 2) et le scanner thoracique, un épaississement localisé de l’œsophage au contact de l’aorte. Compte tenu de la gravité clinique, endoscopique et de l’échec du traitement médical, une intervention chirurgicale est discutée, mais il est fi nalement décidé d’optimiser l’infl iximab à 15 mg/kg toutes les 6 semaines. Ce traitement a permis une rémission clinique prolongée et une cicatrisation endoscopique sur un mode sténosant (fi gure 3) nécessitant 2 séances de dilatation début 2009 (fi gure 4) . Il n’y avait pas de signe d’activité infl ammatoire. Après désescalade progressive, l’infl iximab est arrêté en mai 2010, avec poursuite du 6-mercaptopurine seul, lui-même arrêté en septembre 2016. Le patient est toujours en rémission clinique.
Discussion
Nous décrivons ici une atteinte œsophagienne sévère de maladie de Crohn cortico- résistante, sensible à l’infl iximab à fortes doses.
L’atteinte œsophagienne, bien que rare, peut être sévère. L’aspect endoscopique le plus fréquent est la présence d’ulcères parfois creusants, et l’apparition de sténoses œsopha- giennes secondaires n’est pas rare (1) . Les immunosuppresseurs et les anti-TNF semblent être effi caces, notamment l’infl iximab dans les formes fi stulisantes (2).
Conclusion
L’atteinte œsophagienne de la maladie de Crohn peut poser des problèmes diagnostiques et thérapeutiques du fait de sa rareté et de sa potentielle sévérité. Elle doit ainsi être
connue des gastroentérologues. II
Légendes
Maladie de Crohn – Œsophage – Sténose.
Crohn’s disease – Esophagus – Stenosis.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références bibliographiques
1. Decker GA, Loftus EV Jr, Pasha TM, Tremaine WJ, Sand-
born WJ. Crohn’s disease of the esophagus: clinical features and outcomes. Infl amm Bowel Dis 2001;7(2):113-9.
2. Heller T, James SP, Drachenberg C, Hernandez C,
Darwin PE. Treatment of severe esophageal Crohn’s disease with infl iximab. Infl amm Bowel Dis 1999;5(4):279-82.
Figure 1. Vaste ulcère creusant.
Figure 2. Ulcère œsophagien hémi- circonférentiel creusant.
Figure 3. Sténose œsophagienne pré- dilatation.
Figure 4. Œsophage cicatriciel.
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