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The electrical stimulation of the internal ear at the University Hospitals of Geneva

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

The electrical stimulation of the internal ear at the University Hospitals of Geneva

KOS, Maria Izabel

Abstract

Multichannel cochlear implantation is a clinical technique that was introduced at the University Hospitals of Geneva (HUG) in 1985, by Prof Pierre Montandon. In 1994, I received the medical charges of the Centre Romand d'Implants Cochléaires (CRIC) that consisted of performing all surgical implantations as well as of promoting the paediatric cochlear implantation. This practice is the central focus of this thesis, which is presented in the form of a report on the experience and the lessons learned during the past 25 years within the framework of the CRIC. During this period, more than 200 implantation surgeries were performed on more than 170 patients suffering from various types of deafness. This thesis is based on clinical studies and original data gathered between 1985 and 2009 by the multidisciplinary team of the CRIC. It includes three main parts. The first is a description of the methods and approaches followed by our team. The second part presents the results in terms of the hearing performance of the implanted patients who were classified according to three different clinical situations: post-lingually deafness, [...]

KOS, Maria Izabel. The electrical stimulation of the internal ear at the University Hospitals of Geneva. Thèse de privat-docent : Univ. Genève, 2010

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:12924

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:12924

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Les implants de l’oreille interne aux Hôpitaux Universitaires de Genève

Thèse de Privat-Docent

Dr Maria Izabel Kos

Faculté de Médecine de Genève

Service d’Oto-Rhino-Laryngologie et de Chirurgie cervico-faciale Département des Neurosciences cliniques (NEUCLI)

Hôpitaux Universitaires de Genève

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Avant-propos

L’implantation cochléaire multicanal a été introduite à Genève en 1985, dans les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), par le Prof. Pierre Montandon. En 1994, j’ai été nommée médecin responsable du Centre Romand d’Implants Cochléaires (CRIC) avec les mandats de réaliser toutes les chirurgies d’implantation ainsi que d’instaurer l’implantation cochléaire pédiatrique. Cette activité, fondamentalement clinique, est le thème central de ce mémoire qui se présente comme un rapport sur l’expérience et les enseignements acquis avec cette pratique au cours des 25 dernières années dans le cadre du CRIC. Pendant cette période, plus de 200 chirurgies d’implantation ont été réalisées sur plus de 170 patients atteints de différents types de surdité.

Ce mémoire comporte trois parties principales, basées sur des études cliniques et données originales recueillies entre 1985 et 2009 par l’équipe multidisciplinaire du CRIC. La première partie est consacrée à une description des diverses méthodologies et approches propres à l’implantation cochléaire suivies au sein du CRIC. Dans une deuxième partie sont analysés les résultats en termes de la performance auditive des patients implantés, classés selon trois situations cliniques différentes : la surdité post-linguale, la surdité pré-linguale avec implantation précoce et quelques rares cas de surdité pré-linguale avec implantation tardive.

Cette partie comprend également un examen des complications causées par l’implant, notamment celles ayant requis une réimplantation. Un dernier chapitre porte un regard sur la possibilité de développer dans le futur d’autres implants de l’oreille interne, en traitant la question naissante de l’implant vestibulaire. Les travaux décrits dans ce chapitre constituent, à ma connaissance, les premiers essais de stimulation électrique du système vestibulaire effectués sur l’être humain. Je suis heureuse d’avoir pu y apporter ma contribution sur le plan chirurgical.

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TABLE DES MATIÈRES

1. Introduction et objectif ... 5

1.1. Historique du développement des implants cochléaires ... 5

1.2. Historique de l’implantation cochléaire à Genève ... 7

2. Aspects méthodologiques de l’implantation cochléaire ... 9

2.1. La sélection des candidats ... 9

2.2. L’évaluation de l’excitabilité de nerf auditif ... 10

2.2.1. Le test du promontoire ... 10

2.2.2. Les potentiels évoqués auditifs produits par stimulation électrique ... 10

2.2.3. L’EABR par la cochléostomie exploratrice... 11

2.3. La chirurgie d’implantation ... 13

2.4. Les implants cochléaires utilisés ... 14

2.4.1. L’implant Ineraid® ... 15

2.4.2. L’implant Advanced Bionics® ... 17

2.4.3. L’implant Med-El® ... 17

2.4.4. L’implant Cochlear® ... 17

2.5. Le suivi postopératoire des patients... 18

2.5.1. L’adaptation du processeur externe ... 18

2.5.2. Contrôles médico-techniques ... 19

2.5.3. Les colloques multidisciplinaires hebdomadaires ... 19

2.6. Evaluation de la compréhension du langage ... 20

2.6.1. Evaluation des performances chez les adultes post-linguaux ... 20

2.6.2. Evaluation des performances chez l’enfant ... 22

2.6.3. La batterie CRIC pour l’évaluation de la perception du langage ... 23

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3.1. Introduction ... 30

3.2. Résultats de l’implantation dans la surdité post-linguale ... 31

3.2.1. Le collectif de patients et les types d’implants ... 31

3.2.2. Identification des sons du langage avant et après l’implantation ... 32

3.2.3. Les performances selon le type d’implant ... 34

3.2.4. Les performances selon l’étiologie de la surdité ... 35

3.2.5. Les performances selon l’âge à l’implantation ... 36

3.2.6. Discussion ... 37

3.3. Résultats de l’implantation précoce dans la surdité pré-linguale ... 39

3.3.1. Le collectif de patients et les types d’implant ... 39

3.3.2. Evaluation du langage chez le jeune enfant implanté... 40

3.3.3. Développement du langage après l’implantation ... 41

3.3.4. Discussion ... 43

3.4. Résultats de l’implantation tardive dans la surdité pré-linguale ... 44

3.4.1. Le collectif de patients et les types d’implants ... 44

3.4.2. Mode de communication avant et après l’implantation ... 44

3.4.3. Seuils auditifs à l’audiogramme tonal avant et après l’implantation ... 45

3.4.4. Evaluation de la communication orale avant et après l’implantation ... 46

3.4.5. Discussion ... 47

4. Complications résultant de l’implantation ... 49

4.1. Matériel et méthodes ... 49

4.2. Description des diverses complications observées ... 49

4.2.1. Pannes électroniques... 49

4.2.2. Fractures de l’implant ... 50

4.2.3. Infections ... 50

4.2.4. Problèmes de positionnement des électrodes ... 51

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4.4. Discussion ... 54

4.5. Conclusion ... 57

5. De l’implant cochléaire à l’implant vestibulaire : les premiers pas ... 59

5.1. Contexte et objectif ... 59

5.2. Anatomie et fonction vestibulaire... 60

5.3. Détermination des sites de stimulation chez l’être humain ... 61

5.3.1. Développement des approches chirurgicales ... 63

5.3.2. Vérification de l’adéquation des sites d’implantation choisis ... 64

5.4. Une prochaine étape vers l’implant vestibulaire : la stimulation électrique chronique ... 67

5.5. Remarque finale ... 68

6. Conclusion générale ... 69

7. Bibliographie ... 71

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Avant-propos

L’implantation cochléaire multicanal a été introduite à Genève en 1985, dans les Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), par le Prof. Pierre Montandon. En 1994, j’ai été nommée médecin responsable du Centre Romand d’Implants Cochléaires (CRIC) avec les mandats de réaliser toutes les chirurgies d’implantation ainsi que d’instaurer l’implantation cochléaire pédiatrique. Cette activité, fondamentalement clinique, est le thème central de ce mémoire qui se présente comme un rapport sur l’expérience et les enseignements acquis avec cette pratique au cours des 25 dernières années dans le cadre du CRIC. Pendant cette période, plus de 200 chirurgies d’implantation ont été réalisées sur plus de 170 patients atteints de différents types de surdité.

Ce mémoire comporte trois parties principales, basées sur des études cliniques et données originales recueillies entre 1985 et 2009 par l’équipe multidisciplinaire du CRIC. La première partie est consacrée à une description des diverses méthodologies et approches propres à l’implantation cochléaire suivies au sein du CRIC. Dans une deuxième partie sont analysés les résultats en termes de la performance auditive des patients implantés, classés selon trois situations cliniques différentes : la surdité post-linguale, la surdité pré-linguale avec implantation précoce et quelques rares cas de surdité pré-linguale avec implantation tardive.

Cette partie comprend également un examen des complications causées par l’implant, notamment celles ayant requis une réimplantation. Un dernier chapitre porte un regard sur la possibilité de développer dans le futur d’autres implants de l’oreille interne, en traitant la question naissante de l’implant vestibulaire. Les travaux décrits dans ce chapitre constituent, à ma connaissance, les premiers essais de stimulation électrique du système vestibulaire effectués sur l’être humain. Je suis heureuse d’avoir pu y apporter ma contribution sur le plan chirurgical.

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1. Introduction et objectif

Les cellules ciliées sont le maillon faible des diverses structures qui s’enchaînent pour former les voies auditives. Normalement, lorsque les cils des cellules ciliées bougent, ces dernières modifient leur potentiel transmembranaire ; ceci déclenche des potentiels d’action qui se propagent dans les fibres du nerf auditif, et ainsi de suite au travers de plusieurs relais jusqu’au cerveau. Ces cellules peuvent être endommagées par des agents tels que les bruits trop forts, certains produits ototoxiques, certaines maladies congénitales ou acquises, et même par le vieillissement physiologique. Toutes ces causes provoquent des surdités dites de perception. Les atteintes des structures de l’oreille externe ou moyenne, chargées de la transmission mécanique du son à l’oreille interne, peuvent aussi résulter en un autre type de surdité, dite de transmission. Dans ce cas, la surdité n’est jamais totale et elle peut être corrigée par des interventions médicamenteuses, chirurgicales ou par l’utilisation d’appareils acoustiques. En opposition, la surdité de perception peut progresser jusqu’à ce que la majorité des cellules ciliées cessent d’être fonctionnelles. Les vibrations sonores ne sont alors plus transformées en signal nerveux, même si les sons ont été amplifiés par des appareils acoustiques. Cette situation, qui représentait une grande frustration pour les personnes atteintes ainsi que pour leur médecin ORL, a pu être contournée grâce à l’implant cochléaire.

L’objectif de ce mémoire est de retracer en détail l’expérience et les résultats obtenus avec l’implantation cochléaire chez des adultes et des enfants au cours des 25 dernières années de cette pratique dans les Hôpitaux Universitaires de Genève au sein du Centre romand d’implants cochléaires (CRIC).

1.1. Historique du développement des implants cochléaires

Les études histologiques montrent que beaucoup de fibres du nerf auditif survivent et restent morphologiquement intactes même dans des cas de surdité totale avec perte de pratiquement toutes les cellules ciliées. Il devait donc être possible, du moins théoriquement, de les activer directement par stimulation électrique.

En 1957, Djourno, Eyriès et Vallancien [1957] ont été les premiers à démontrer que la stimulation électrique du nerf auditif produisait des sensations auditives. Djourno travaillait au développement d’un stimulateur électrique implantable destiné à l’animal. Eyriès, médecin

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exprimait le désir qu’on tentât l’impossible pour faire cesser, même très imparfaitement, sa surdité totale. ». Ensemble ils décidèrent de tenter une intervention, après avoir pleinement informé le patient des risques d’échec. Lors de la reprise chirurgicale pour effectuer la greffe du nerf facial, Eyriès plaça les électrodes du stimulateur dans le conduit auditif interne, au voisinage des fibres restantes du nerf auditif sectionné. Dès les premiers essais de stimulation, ils rapportent que « ...la parole est entendue comme une succession d’éclats rapprochés : il est évident que le sujet traduit bien les amplitudes et mal les fréquences. Toutefois, il établit rapidement une correspondance, une sorte de « codage », entre les syllabes et les mots et ses perceptions déformées … si le « codage » des mots s’avérait suffisant après un entraînement systématique, on pourrait évidemment songer à un procédé pratique de prothèse dans des cas où aucune autre méthode ne pourrait donner d’impression auditive. ». Suite à cette conclusion visionnaire, d’autres vont rapidement reprendre le flambeau.

En 1960, House [1976] est l’un des premiers à activer le nerf auditif en glissant une électrode dans la cochlée, une technique évidemment beaucoup moins invasive que celle utilisée par Djourno et coll [1957]. Simmons [1966] et Michelson [1971] suivront la voie tracée par House. L’implant cochléaire monocanal était né. Cependant, à cette époque, ces essais ne firent l’objet que de descriptions à caractère anecdotique, basées sur des expériences isolées.

L’absence d’une analyse multidisciplinaire organisée ralentissait la recherche. Un rapport commandé par le National Institutes of Health (NIH) et réalisé par un expert indépendant [Bilger, 1977] démontra qu’un implant avec un seul canal ne permettait pas la compréhension du langage. Néanmoins, ce même rapport montrait aussi que les patients communiquaient significativement mieux avec leur prothèse enclenchée qu’avec leur prothèse éteinte.

Le NIH a alors décidé d’encourager la recherche dans ce domaine et on s’est vite aperçu qu’il fallait développer des implants cochléaires multicanaux, si on voulait avoir une chance de respecter le principe de tonotopie, essentiel au bon fonctionnement du système auditif. Ainsi, après quelques années d’utilisation d’implants multicanaux, une équipe d’Iowa [Gantz et coll, 1988] entreprit une grande étude comparative. Utilisant une prise en charge chirurgicale identique et des méthodes d’évaluation communes à un grand groupe de patients, cette équipe a pu facilement démontrer la supériorité indiscutable des implants multicanaux, qui se sont alors rapidement développés grâce à de nombreux essais cliniques. C’est ainsi qu’en 1988, lors du premier consensus sur les implants cochléaires établi par le NIH [1988], approximativement 3’000 patients avaient déjà été implantés. L’on constatait alors que certains patients utilisateurs d’un implant multicanal pouvaient tenir une conversation orale

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implants cochléaires multicanaux de première génération, mais ceux-ci ne représentaient encore que 5% des cas.

Plusieurs groupes de recherche [Wilson et coll, 1991 ; Boex, 1992 ; Boex et coll, 1994 ; McDermott et coll, 1994] ont montré au cours des années suivantes qu’en améliorant uniquement « la stratégie de codage des sons », c.-à-d. l’algorithme qui transforme le signal sonore en une succession d’impulsions électriques distribuées sur les électrodes implantées, et tout en conservant exactement le même matériel implanté, on pouvait permettre à la majorité des patients implantés de suivre une conversation sans l’aide de la lecture labiale. Ceci a donné naissance à ce que nous appelons aujourd’hui les implants cochléaires multicanaux de deuxième génération. Ainsi, lors du consensus du NIH suivant [1995], on constatait qu’environ 13’000 patients avaient été implantés et que la grande majorité de ceux qui utilisaient les processeurs sonores multicanaux les plus récents, obtenait des résultats au-delà de 80% de réponses correctes lors des tests les plus difficiles, sans lecture labiale.

Actuellement (2010), plus de 200’000 personnes ont été implantées dans le monde.

L’efficacité de la réhabilitation fonctionnelle par l’implant cochléaire dépasse tout ce qui a été obtenu par n’importe quelle autre prothèse de stimulation nerveuse. Les enfants sourds de naissance sont capables de développer le langage oral et de suivre une école normale avec leurs camarades entendants. L’implant cochléaire est aujourd’hui un traitement régulièrement dispensé contre la surdité profonde. Il est remboursé par les assurances sociales et sert de modèle pour le développement d’autres prothèses comme les implants visuels ou vestibulaires [Wilson et coll, 2008].

1.2. Historique de l’implantation cochléaire à Genève

Chirurgien otologiste, le Prof. Pierre Montandon a été nommé à la tête du service ORL des HUG en 1975, à une époque où il n’existait que des implants monocanaux. Montandon, suite à des travaux expérimentaux dans le domaine de l’électrophysiologie de l’oreille dans le laboratoire Eaton Peabody, du Prof. Nelson Kiang à Boston (Harvard University et Massachussetts Institute of Technology – MIT) [Montandon et coll, 1975 a et b], s’est intéressé au développement en cours de l’implant multicanaux, capable de restituer une audition adéquate pour la communication verbale en cas de surdité totale.

Les travaux qui semblaient les plus prometteurs à l’époque, étaient réalisés à Salt Lake City

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Après avoir visité plusieurs centres de recherche aux Etats-Unis et en Europe, et sur le conseil de Kiang, Montandon choisit de collaborer avec Eddington et d’utiliser un prototype mis à disposition de ce groupe de recherche par la maison Symbion de Salt Lake City, qui fabriquait déjà le cœur artificiel de Jarwick. Cet implant fut utilisé simultanément en Europe, à Genève et a Oslo (Norvège), avant d’être commercialisé sous le nom d’Ineraid®. Après les premières implantations réalisées (1985) à Genève, il est apparu nécessaire de constituer d’une équipe de recherche multidisciplinaire sur place. Une équipe de haut niveau de qualification était requise pour permettre la pleine participation de Genève à une collaboration internationale avec les principaux centres de recherche américains. Marco Pelizzone, alors en stage à New York, fut le candidat choisi pour diriger cette équipe.

Avec des résultats très concluants, qui ont conforté l’instance américaine de contrôle, la

« Federal Drug Administration » (FDA), de permettre l’utilisation commerciale de l’implant Ineraid aux Etats-Unis, Genève a reçu la mission d’organiser, conjointement avec l’Université Royale d’Oslo, un cours international de formation et d’information. Ce cours, réalisé à Genève en 1987, concernait la chirurgie d’implantation, l’ingénierie technique et les théories biophysiques de l’audition. Il eut un grand succès et a accueilli des participants venus du monde entier, y compris de la Chine.

Physicien de formation, le Prof. Marco Pelizzone avait rejoint le groupe genevois avec mission de mettre sur pied une équipe de scientifiques et d’ingénieurs chargée d’exploiter au mieux les observations originales pouvant être recueillies sur les patients implantés. Au départ, l’effort de recherche a porté sur la démonstration objective de l’activation du système auditif central, grâce au développement de techniques de potentiels évoqués [Pelizzone et coll 1989 ; Kasper et coll, 1991] et à l’enregistrement des champs magnétiques cérébraux évoqués par stimulation électrique du nerf auditif [Pelizzone et coll, 1986a, 1986b, 1987]. Puis les recherches se sont progressivement orientées vers la caractérisation psychophysique des sensations auditives produites et le développement de nouvelles stratégies de codage des sons.

L’équipe genevoise dirigée par Pelizzone [Boex, 1992 ; Boex et coll, 1994, 1996] a été la première à fournir une validation indépendante de la stratégie « Continuous Interleaved Sampling (CIS) » proposée initialement par Wilson et coll [1991]. Par la suite, alors que jusque là toutes les observations avaient été recueillies auprès des patients de manière aigue à l’aide de matériel de laboratoire non-transportable, cette équipe a été la première à développer un processeur portable permettant de mesurer l’apport réel de ces implants dans la vie quotidienne [Pelizzone et coll, 1995]. Les processeurs portables genevois ont été mis à

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Boston et en Caroline du Nord. Les résultats obtenus par ces autres patients étaient similaires aux nôtres et cette nouvelle stratégie a connu une large diffusion dans les milieux intéressés.

Tous les implants cochléaires disponibles aujourd’hui utilisent encore les principes fondamentaux validés au cours de ces études.

Entre 1985 et 1995, nous étions donc passés des implants cochléaires multicanaux de première génération aux implants cochléaires multicanaux de deuxième génération et l’équipe genevoise avait activement et pleinement participé à ces développements. Par prudence, les implants à Genève avaient été jusqu’alors essentiellement réservés à des adultes souffrant de surdités post-linguales. Ces derniers avaient une mémoire auditive du langage oral qui les aidait à déchiffrer les sensations auditives produites par leur implant. Mais nos résultats, ainsi que ceux d’autres groupes internationaux, suggéraient que la qualité de l’information auditive délivrée par les systèmes les plus récents pourrait permettre à des enfants sourds de naissance de développer le langage oral.

Au début des années 90, le nombre de candidats à l’implantation commence à augmenter progressivement, ainsi que l’activité clinique autour des patients implantés. En 1992, quand j’ai rejoint le Service d’ORL et de Chirurgie cervico-faciale, 12 chirurgies d’implantation avaient déjà été réalisées. En 1994, j’ai été nommée médecin responsable du Centre Romand d’Implants Cochléaires avec le mandat de développer l’implantation pédiatrique et d’en assurer l’activité chirurgicale. Dans ce cadre, j’ai par la suite réalisé toutes les chirurgies d’implantation avec des différents modèles d’implant, chez des enfants dès l’âge de 1 an à des adultes jusqu’à l’âge de 85 ans.

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2. Aspects méthodologiques de l’implantation cochléaire

Genève est l’un des centres pionniers de l’implantation cochléaire multicanal. Dès le début de cette activité en 1985, une équipe multidisciplinaire fut constituée, réunissant des chirurgiens otologiques et plastiques, des physiciens, des ingénieurs, des logopédistes et des psychologues [Montandon et coll, 1989]. C’est en 1994 qu’un centre pour l’implantation cochléaire, le Centre Romand d’Implants Cochléaires - le CRIC -, fut officiellement créé, concrétisant ainsi un accord verbal qui existait de longue date entre les hôpitaux universitaires de Lausanne et de Genève.

L’équipe du centre s’est efforcée de résoudre les difficultés à mesure que l’activité se développait et que le nombre de patients augmentait. Les aspects méthodologiques développés et utilisés dans ce cadre sont présentés dans ce chapitre.

2.1. La sélection des candidats

Le but de l’implantation cochléaire est de redonner, même passablement déformée, une perception auditive permettant à la personne sourde de communiquer oralement, l’implant cochléaire devant apporter un gain supérieur à celui d’un appareil auditif conventionnel.

Il convient de rappeler que la surdité est un terme qui ne se prête pas à une généralisation car toutes les surdités sont loin d’être équivalentes. Le moment d’installation de la surdité est crucial car il détermine le mode de communication et a des implications diverses lors de la prise de décision pour un implant cochléaire. Une première distinction doit se faire entre la personne sourde post-linguale, celle qui a perdu progressivement ou brusquement son audition après avoir appris la langue orale, et celle dite sourde pré-linguale qui a perdu son audition avant l’apprentissage du langage, que ce soit par atteinte congénitale ou acquise.

N’ayant aucun intérêt financier et étant orienté vers la recherche, le CRIC n’a jamais pratiqué une sélection de candidats avec un souci d’obtenir des performances optimales, par exemple en ne retenant pour l’implantation que des patients capables potentiellement d’obtenir d’excellents résultats. Toute personne sourde profonde, indépendamment du type et de la durée de sa surdité, de l’âge, du mode de communication ou de l’origine, est considérée candidate [Montandon et coll, 1992a] pour autant que l’implantation soit jugée utile pour le patient. Notre seule restriction (en accord avec les textes officiels des assurances sociales) se

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l’implant cochléaire, c.-à-d. celle de permettre à son utilisateur d’établir la communication orale.

Dans notre centre, la sélection des patients candidats à un implant cochléaire se déroule de la façon suivante. Le médecin ORL diagnostique la surdité par des examens de routine. Puis le patient est adressé au CRIC pour une série d’examens plus spécialisés. Ces examens spécialisés ont pour objectif de s’assurer que le patient peut bénéficier d’un implant cochléaire et que ce dernier apportera une amélioration de sa perception auditive. Cette étape préopératoire comprend des consultations avec la chirurgienne ORL, une imagerie par CT ou IRM de l’oreille interne, des potentiels évoqués auditifs (PEA), un bilan langagier avec les logopédistes, un bilan de la fonction vestibulaire (équilibre), une consultation psychologique ainsi qu’une présentation pratique de l’implant cochléaire par les ingénieurs. Tous ces résultats sont discutés par l’équipe multidisciplinaire du CRIC et une proposition de traitement est faite au patient (ou à ses responsables légaux s’il s’agit d’un enfant sourd). La décision d’implantation est prise en commun par le patient et le médecin spécialisé.

2.2. L’évaluation de l’excitabilité de nerf auditif

Il est indispensable de pouvoir démontrer que le patient sourd, candidat à l’implant cochléaire, possède bel et bien un nerf auditif qui puisse être stimulé électriquement. Il s’agit d’une condition nécessaire, mais évidemment pas suffisante, au succès de l’implantation cochléaire.

2.2.1. Le test du promontoire

A l’origine, n’existaient que des méthodes subjectives et peu fiables pour déterminer cet aspect crucial. Avec ces méthodes, le patient devait décrire la sensation causée par une stimulation électrique extra-cochléaire. L’électrode de stimulation étant posée, soit sur le promontoire de l’oreille moyenne (à l’aide d’une aiguille transtympanique), soit directement sur la membrane tympanique. Les patients rapportant une sensation sonore lors de ce test étaient alors considérés comme des candidats à l’implant.

En 1988, une étude a été menée à Genève pour évaluer la validité de cette procédure [Liard et coll, 1988]. Dans cette étude, 119 personnes avec une audition normale, résiduelle ou une surdité profonde, ont été testées par l’application d’un courant électrique sur la membrane tympanique à l’aide d’une petite électrode en or développée spécialement à cet effet. Ces

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incapables de qualifier la sensation. Certains la décrivaient comme une sensation purement tactile. En plus d’être inexacte, cette méthode était inapplicable à un grand nombre de patients, tels ceux souffrant d’un fort acouphène ou ayant des difficultés de compréhension ou de communication comme, par exemple, les très jeunes enfants.

Pour aller de l’avant, nous avions besoin d’une méthode objective démontrant sans ambigüité l’activation des voies auditives.

2.2.2. Les potentiels évoqués auditifs produits par stimulation électrique

Le développement d’une méthode de démonstration objective de la stimulation électrique des voies auditives a été une étape fondamentale à franchir. Une telle méthode se passe de la collaboration du sujet et devient applicable aux patients n’ayant jamais eu d’expérience auditive, tels les patients souffrant de surdité congénitale, ainsi qu’aux patients ne pouvant pas décrire ce qu’ils ressentent, par exemple, les enfants en très bas âge ou encore les patients sous narcose. Dans le domaine de l’audition, la meilleure méthode objective est celle de l’enregistrement des réponses évoquées par stimulation auditive du tronc cérébral, cette dernière étant utilisée en routine dans tous les services ORL du monde.

Ce qu’il restait à faire était alors évident : il suffisait d’enregistrer les réponses évoquées par stimulation électrique de l’oreille interne. Mais cela était plus facile à dire qu’à faire. Alors que les réponses auditives du tronc cérébral sont des signaux de l’ordre du millionième de Volt qui se manifestent dans le centième de seconde suivant le stimulus sonore, le signal nécessaire pour la stimulation électrique de l’oreille est de l’ordre du Volt, donc un million de fois plus grand. La stimulation électrique produit donc au temps « zéro » un signal perturbateur un million de fois plus grand que les réponses qu’il faut pouvoir détecter dans le centième de seconde suivant. Lorsque nous avons commencé à nous intéresser aux implants cochléaires à Genève, ces problèmes techniques n’étaient pas résolus. Certains auteurs donnaient toutefois crédit à des réponses qui de toute évidence provenaient de la perturbation de leur appareil d’enregistrement et qui ne ressemblaient en rien à celles du système auditif.

Pelizzone et coll [1989] sont parvenus à maîtriser ces problèmes techniques. Ils ont réussi à démontrer que le tracé des potentiels évoqués du tronc cérébral par la stimulation électrique de l’oreille interne (EABR pour Electrically evoked Auditory Brainstem Responses) chez le patient sourd profond implanté était très similaire au tracé de potentiels évoqués par stimulation sonore (ABR pour Auditory Brainstem Responses) chez des personnes

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celles des ABR, à ceci près que toutes les latences des réponses sont environ 2 ms plus courtes. Ceci démontre que la stimulation électrique de l’oreille interne active bien les mêmes relais auditifs du système nerveux central (et dans la même séquence) que la stimulation sonore. Le raccourcissement des latences est dû au fait que la stimulation électrique « court- circuite » le processus de transduction effectuée par l’oreille interne lors de la stimulation sonore normale [Pelizzone et coll, 1989].

Une fois ces développements effectués, nous avions à disposition une méthode objective et fiable pour évaluer l’activation des voies auditives. Mais cette méthode ne s’appliquait qu’aux patients déjà implantés et laissait de côté les patients candidats à un implant. Pour ces derniers, il fallait trouver un moyen d’explorer la cochlée en y plaçant une électrode de stimulation pour pouvoir effectuer de telles mesures avant l’implantation cochléaire proprement-dite.

2.2.3. L’EABR par la cochléostomie exploratrice

L’exploration de la cochlée, la cochléostomie exploratrice, est une procédure élaborée par Montandon [Montandon et coll, 1992b; 1994]. Elle précède l’implantation. Elle consiste à introduire une électrode de stimulation dans la cochlée pour pouvoir, avant l’implantation: (1) enregistrer des EABR de haute qualité, (2) évaluer la perméabilité de la cochlée (qui peut être ossifiée ou fibrosée). Mais il est clair que cela reste un geste (minimalement) invasif et, qu’avant de se résoudre à le pratiquer, nous avions démontré, en comparant les stimulations extra- et intra-cochléaires sur les mêmes patients, que la stimulation intra-cochléaire était beaucoup plus efficace que la stimulation extra-cochléaire [Pelizzone et coll, 1989]. La stimulation intracochléaire permet d’obtenir des résultats fiables.

La technique de la cochléostomie est un prolongement naturel de la technique de chirurgie otologique adoptée à Genève. Nous utilisons un abord transméatal pour accéder à l’oreille moyenne, comme proposé initialement par Lempert en 1934, systématisé ensuite par Schuknecht [Meltzer, 1962] de la « Massachussetts Eye and Ear Infirmary » et amené à Genève par Montandon. Il s’agit d’une technique d’opération microscopique, en anesthésie locale et minimalement invasive, peu utilisée en Suisse et en Europe. Nous l’utilisons pour la quasi-totalité des tympanoplasties, stapédotomies et de tympanotomies exploratrices. Le recours à l’anesthésie locale permet de communiquer avec le patient et d’obtenir ainsi une appréciation immédiate du résultat chirurgical.

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donner accès à la spire basale de la cochlée. Si l’entrée de la cochlée est oblitérée par de la fibrose ou de l’ossification, celles-ci sont enlevées à l’aide de micro-instruments et micro- drill. Dans les cas d’ossification extensive, lorsqu’aucun espace n’est détecté, c’est l’apex cochléaire qui est ouvert. Une fois la cochlée ouverte, une électrode de test y est introduite pour l’enregistrement des EABR. Il s’agit d’un enregistrement techniquement difficile. En effet, les réponses de l’EABR sont très petites et, pour obtenir un enregistrement propre, il faut impérativement annuler les multiples artefacts venant de l’environnement électrique du bloc opératoire et de la stimulation électrique elle-même [Montandon et coll, 1992a, 1992b].

Finalement, le patient décrit les sensations perçues lors de la stimulation électrique et son visage est inspecté à la recherche d’une stimulation indésirable du nerf facial. Dans les cas où les EABR sont présents, la chirurgie d’implantation est réalisée, après l’induction de la narcose. Dans quelques rares cas, l’implantation a été différée ou abandonnée, soit parce qu’aucune réponse n’a été détectée laissant suspecter une pathologie de type rétro-cochléaire, soit à la demande du patient. Notre expérience montre que les chances d’obtenir une stimulation avec l’implant cochléaire, dans les cas où nous n’avons pas observé une réponse électrique lors de la cochléostomie exploratrice, sont de moins de 2 %.

Récemment nous avons été confrontés à un cas qui illustre l’intérêt de la cochléostomie. Il s’agissait d’une patiente souffrant d’une surdité profonde rétro-cochléaire causée par une sidérose superficielle. Certains rares rapports de bons résultats obtenus dans ce type de surdité [Hathaway and coll, 2005 ; Dhooge et coll, 2002] ont justifié la demande de la patiente de recevoir un implant. Lors de la cochléostomie exploratrice nous n’avons pas pu observer des potentiels évoqués électriques à la stimulation des 2 oreilles. Nous avons différé l’implantation pour donner un temps de réflexion à la patiente. La patiente, avertie, a renoncé à cette implantation, en toute probabilité inutile.

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2.3. La chirurgie d’implantation

Figure 2.1. Radiographie postopératoire d’un enfant implanté à l’âge de 5 ans, à droite. Cette figure illustre une implantation standard. Le processeur est placé sous le muscle temporal, sur l’écaille temporale et le faisceau d’électrodes est introduit dans la cochlée (ligne jaune).

(Photo CRIC)

Comme indiqué précédemment, la chirurgie d’implantation est entreprise suite à la cochléostomie exploratrice et induction de la narcose. L’incision des tissus rétro auriculaires qui permet l’accès au site opératoire a beaucoup évolué au fil des années. Initialement, l’incision était large et faite en un seul plan jusqu’au périoste [Balkany et coll, 1999]. Elle a ensuite été traitée en deux plans : un plan cutané et un sous-cutané, avec des incisions décalées. Ceci permet, à la fin de la chirurgie, une fermeture en enveloppe protégeant le stimulateur implanté d’une éventuelle nécrose ou déhiscence de la plaie opératoire.

Actuellement, l’incision est faite selon la technique minimalement invasive décrite par

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tympanotomie postérieure. Cette ouverture est faite de façon minimale, car la cochlée a déjà été ouverte au cours de la cochléostomie exploratrice. Ceci est très avantageux, spécialement dans des cas d’ossification cochléaire, car l’on évite ainsi d’ouvrir trop largement la tympanotomie postérieure. Sans cette ouverture, il serait nécessaire de fraiser extensivement le promontoire tympanique, parfois jusqu’à l’apex cochléaire, via la tympanotomie postérieure, à la recherche d’un espace dans la cochlée [Montandon et coll, 1994]. Mais un fraisage extensif par cette voie est à éviter, car il se fait à proximité du nerf facial qui se trouve ainsi exposé à un risque additionnel de lésion par réchauffement ou déchirure causée par la fraise chirurgicale.

Finalement, le stimulateur est placé sur l’écaille temporale, sous le muscle temporal, dans une poche confectionnée par le décollement du muscle du plan osseux. Le faisceau d’électrodes pénètre dans l’oreille moyenne via la mastoidotomie et tympanotomie postérieure et ensuite, par la cochléostomie, dans la cochlée (Figure 2.1). La cochléostomie est colmatée avec un petit morceau d’aponévrose. L’incision est suturée et couverte avec des bandelettes de stéri- strip. Un pansement compressif est laissé en place pendant 24 heures. Les points de suture sont enlevés 7 jours après la chirurgie. Ce type de chirurgie ne requiert en général que deux jours d’hospitalisation.

Une analyse des complications opératoires observées pendant les 25 années d’implantation cochléaire dans ce Centre fait l’objet du chapitre 4 de cette thèse.

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2.4. Les implants cochléaires utilisés

Figure 2.2 : Un implant cochléaire se compose d’une partie implantée et d’un appareil externe porté autour de l’oreille ou à la ceinture. Le microphone (1), le processeur (2) et l’antenne (3) se trouvent dans l’appareil externe. Le stimulateur (4) et le faisceau d’électrodes (5) font partie de l’implant qui stimule le nerf auditif (6). (Illustration Med-El)

L’implant cochléaire se compose d’une partie interne (le stimulateur implanté) et d’une partie externe (le processeur vocal) dont le principe est de transformer les sons captés en signaux électriques et de les envoyer directement aux fibres du nerf auditif. En conséquence, il faut transmettre le signal à travers la peau pour relier ces deux parties. Les implants les plus modernes (Advanced Bionics®, Med-El®, Cochlear®) utilisent tous une transmission transcutanée par ondes électromagnétiques (Figure 2.2). Le tout premier prototype utilisé à Genève, le système Ineraid®, qui était un des tous premiers implants cochléaires multicanaux, utilisait quant à lui une prise percutanée. Tous ces systèmes, bien que très différents dans leur aspect, fonctionnent cependant sur le même principe que l’on peut résumer en 6 points : 1. Les sons du langage et les bruits sont captés par le microphone et transmis au processeur

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2. Le processeur convertit les sons dans un code d’excitation distribué sur plusieurs électrodes.

3. Cette information est envoyée à l’antenne (fixée par aimantation en regard de l’implant) qui la transmet à travers la peau au moyen d'ondes radio.

4. Le stimulateur implanté capte les ondes radio, les décode, crée les impulsions électriques et les envoie aux différentes électrodes implantées dans la cochlée.

5. Les électrodes implantées dans l’oreille interne stimulent les fibres du nerf auditif, lequel transmet à son tour ces signaux au cerveau.

6. Le cerveau analyse alors ces signaux dans ses aires auditives et les interprète comme des sons.

A ce jour, quatre types différents d’implants cochléaires ont été utilisés à Genève.

2.4.1. L’implant Ineraid®

Le prototype d’implant cochléaire « Ineraid », fut conçu par Eddington, bio-ingénieur, et Parkins, chirurgien otologiste [Eddington et coll, 1978]. Cet implant fut d’abord fabriqué par Symbion sous forme de prototype. Le brevet fut ensuite fabriqué et commercialisé par Smith and Nephew-Richards, aux Etats-Unis. Cet implant avait la particularité d’utiliser une prise percutanée, fixée à l’os temporal, qui transmettait les signaux à travers la peau. Le développement ultérieur de la transmission transcutanée et la miniaturisation électronique ont conduit à son abandon à la fin des années 90. Il n’est plus disponible aujourd’hui. Nous allons cependant consacrer ici quelques lignes à sa description, car il illustre de manière exemplaire la transition entre l’implant cochléaire multicanal de première et de deuxième génération.

La première implantation cochléaire d’un prototype multicanal « Ineraid » en Europe a été réalisée en 1985 à Genève par le Prof. P. Montandon. Déjà à l’époque, ce système permettait à certains volontaires sourds implantés une bonne compréhension de la parole, sans l’appui de la lecture labiale [National Institutes of Health Consensus statement, 1988]. Tous les patients utilisaient alors la stratégie de codage des sons appelée « Compressed Analog » (CA), qui activait toutes les électrodes implantées simultanément. A l’aide d’un simple filtrage passe- bande, les signaux de basses fréquences étaient transmis aux électrodes implantées dans la région de l’apex de la cochlée et ceux de hautes fréquences, aux électrodes implantées dans la région de la base de la cochlée. Grâce à la présence des multiples électrodes, la tonotopie de la cochlée était respectée, une condition essentielle au bon fonctionnement du système auditif, ce qui ne pouvait être envisagé avec un implant monocanal. Cependant, il était clair d’emblée qu’un système multicanal ne serait supérieur à un système monocanal que si les différents

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canaux étaient en mesure de véhiculer des informations indépendantes. Il était tout aussi clair, théoriquement, que des électrodes voisines stimulées simultanément ne pouvaient véhiculer des informations parfaitement indépendantes. Dans la réalité [Favre et Pelizzone, 1993], les expériences menées avec des patients implantés montraient qu’environ 50% du signal transmis sur une électrode se retrouvait sur l’électrode voisine (distantes de 4 mm dans la cochlée). On ne pouvait parler dans ces conditions de réelle indépendance entre les canaux.

Les mêmes expériences indiquaient toutefois que ces interférences devenaient négligeables dès que l’on activait les électrodes séquentiellement. Il fallait donc réaliser une stratégie de codage des sons qui utilise une activation séquentielle des électrodes implantées.

Suivant les conseils de nos collègues de Boston, c’est ce qu’ont fait B. Wilson et coll [1991]

en proposant la stratégie de codage des sons « Continuous Interleaved Sampling » (CIS).

Comme dans la stratégie CA, les signaux acoustiques du CIS sont divisés en bandes de fréquence par un filtrage passe-bande et les fluctuations d’intensité dans chaque bande sont transmises aux électrodes implantées en respectant la tonotopie. Mais, contrairement à la stratégie CA, la stratégie CIS, comme son nom l’indique, utilise une activation séquentielle des électrodes implantées pour réduire autant que possible les interactions inter-électrodes nuisibles à l’indépendance des canaux. Des expériences comparatives [Wilson et coll, 1991 ; Boex, 1992 ; Boëx et coll, 1994] ont pu être menées sur des patients utilisateurs du prototype

« Ineraid » car, grâce à la flexibilité offerte par la prise percutanée de ce système, il était facile de comparer les deux codages sur un même patient. Toutes ces expériences comparatives ont systématiquement démontré la supériorité marquée de la stratégie CIS, cette dernière offrant de très significatives améliorations des performances de compréhension du langage par rapport à la stratégie CA. Grâce à la prise percutanée, nous étions passés de l’implant cochléaire multicanal de première génération à l’implant cochléaire multicanal de deuxième génération.

La stratégie CIS ne pouvait toutefois pas être intégrée aux processeurs vocaux portables disponibles à l’époque. Il fallait utiliser un équipement fixe de laboratoire, lourd et encombrant. C’est pourquoi notre groupe a mis en place une collaboration internationale avec les centres de recherche de la Massachussetts Eye and Ear Infirmary à Boston (D. Eddington), le Research Triangle Institute à Durham (B.Wilson) et l’Ecole d’Ingénieurs de Genève pour aboutir à la réalisation du premier processeur portable – le Geneva Wearable Processor (GWP) – capable d’intégrer la stratégie CIS [Pelizzone et coll, 1995]. Grâce au financement

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des patients utilisant des prototypes « Ineraid » à Boston, Durham et Genève. Certains patients genevois les utilisent encore aujourd’hui dans leur vie quotidienne.

Malheureusement la compagnie Smith and Nephew-Richards a été incapable de développer et de commercialiser un nouveau processeur vocal. On connaît déjà la suite : elle fut rachetée par une compagnie concurrente, puis le système « Ineraid » fut simplement abandonné.

2.4.2. L’implant Advanced Bionics®

Les systèmes d’implant cochléaires « Clarion », de la marque Advanced Bionics, sont fabriqués aux Etats-Unis. Ils sont issus des recherches effectuées par Schindler et coll [1992].

L’implant « Clarion » a été le premier à proposer commercialement une stratégie de codage CIS, très proche de celle développée en recherche aux Etats-Unis et à Genève. Nous avons alors effectué une étude comparative spéciale, en « démontant » un système « Clarion » et en connectant temporairement les sorties de son stimulateur implantable à la prise percutanée de patients utilisateurs du prototype « Ineraid » [Boex et coll, 1996]. Les divers tests de perception du langage ayant produit des résultats presque identiques sur les mêmes patients, nous avons alors commencé à utiliser cliniquement à Genève les systèmes « Clarion » dès 1995.

Depuis lors, plusieurs modèles de cette marque ont été utilisés. Certains de ces modèles ont proposé l’utilisation d’un « Electrode Positioning System » (EPS) [Fayad et coll, 2000]. Ce système est une pièce en silicone, indépendante du faisceau d’électrodes proprement dit, qui doit être placée entre le faisceau et la paroi externe de la cochlée dans le but de forcer les électrodes en direction de la paroi interne de la cochlée et, ainsi, des neurones situés dans le modiolus. Certains cas de méningite potentiellement associés à l’usage de l’EPS ayant été diagnostiqués aux Etats-Unis et dans certains centres européens chez des enfants porteurs d’implants, nous avons immédiatement décidé de ne plus l’utiliser. Heureusement nous n’avons observé aucun cas de méningite. Plus tard, par souci de sécurité, le fabriquant a retiré ce modèle du marché.

2.4.3. L’implant Med-El®

Lorsque les suspicions de cas de méningite liés à un modèle d’implant cochléaire sont apparues, nous avons souhaité ne plus être dépendants d’un seul fabriquant d’implants et nous avons commencé dès 2000 à utiliser cliniquement à Genève les systèmes « Med-El ».

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Ces systèmes sont fabriqués en Autriche. Ils sont issus des recherches effectuées par Hochmayer-Desoyer IJ et Hochmair ES [1993] et utilisent pour le codage des sons une stratégie CIS très proche de celle développée à l’origine par B. Wilson et coll [1991].

2.4.4. L’implant Cochlear®

Finalement, en 2004, nous avons commencé d’utiliser les systèmes d’implants cochléaires

«Cochlear», fabriqués en Australie. Ils sont issus des recherches effectuées par Clark et coll [1986].

Cet implant était l’un des deux premiers implants multicanal de première génération disponibles en 1985, l’autre étant le prototype «Ineraid». Dès sa première conception, il comportait une transmission transcutanée (par ondes radio) alors que l’implant « Ineraid » utilisait une prise percutanée. Pourquoi ne l’avons-nous pas utilisé à cette époque ? Contrairement à beaucoup d’autres centres qui ont privilégié d’emblée la solution la plus aboutie, nous avons choisi le modèle utilisant une simple prise percutanée, car nous ne voulions pas être restreints par les limitations d’un stimulateur implanté. Convaincus que nous n’étions qu’aux balbutiements du développement des implants cochléaires, nous tenions à pouvoir offrir à nos patients d’autres stratégies de codage des sons dès qu’elles seraient validées. Par chance, l’histoire nous a donné raison et nos patients ont pu bénéficier rapidement des avantages de la stratégie CIS. La compagnie « Cochlear » a du développer un nouveau stimulateur (celui que nous utilisons aujourd’hui) pour pouvoir réaliser les plus récentes stratégies de codage des sons. Les patients utilisant l’ancien stimulateur « Cochlear » ont dû être réimplantés pour pouvoir en bénéficier.

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2.5. Le suivi postopératoire des patients

Figure 2.3 : Séance de réglage du processeur externe d’un enfant. Après un conditionnement auditif, l’enfant peut collaborer en indiquant les seuils de perception auditive sur chaque électrode. (Photo CRIC)

2.5.1. L’adaptation du processeur externe

L’adaptation du processeur externe a lieu environ 4 semaines après l’implantation. La première séance de « réglage » sert à déterminer, sur chaque électrode implantée, les courants de seuil et de confort capables de produire, respectivement, une sensation tout juste perceptible et une sensation forte qui ne soit pas désagréable. C’est au cours de cette séance que le patient sourd fait pour la première fois l’expérience des nouvelles sensations auditives produites par son implant.

Chez l’adulte sourd post-lingual, cette adaptation est relativement simple. Comme l’adulte dispose d’une mémoire auditive acquise avant la surdité, il peut collaborer avec les ingénieurs et décrire ses perceptions sur la base de ses souvenirs, en donnant des indications fiables quant à la hauteur et l’intensité des sons. Il repart à son domicile avec un processeur vocal réglé de manière standard. Il est ensuite revu quelques jours après, puis à des intervalles de plus en plus espacés, jusqu’à que son processeur vocal soit réglé de manière optimale et adapté à sa perception individuelle. Ce cycle de mise en route de l’implant cochléaire peut avoir des durées très variables suivant le type de patient. Certains adultes sourds post- linguaux parviennent à téléphoner dès les premières heures d’utilisation de l’implant, alors

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que chez les petits enfants, l’adaptation à l’implant est une procédure qui exige d’avantage de patience et d’expertise.

Chez les enfants en très bas âge, plus d’un mois de réglage est parfois nécessaire pour déterminer, ne serait-ce que le seuil de perception. Le réglage du processeur est un travail progressif qui s’exécute en deux étapes. Il commence avant même l’implantation proprement dite, sous forme d’un conditionnement de l’enfant à des jeux structurés qui lui permettront ensuite de jouer à « écouter ». Par la suite, lors des séances de réglage, ce conditionnement nous aidera à trouver des niveaux de stimulation adéquats pour cet enfant (Figure 2.3). En cas de doute, et cette situation est fréquente avec les tout petits enfants avec qui il est parfois difficile de collaborer, des niveaux de stimulation volontairement faibles sont utilisés dans un premier temps, pour des raisons de sécurité. Seul un suivi très régulier de ces enfants dans leur processus d’acquisition des premières étapes de la communication orale révélera comment affiner le réglage du processeur vocal et atteindre une bonne qualité d’audition.

2.5.2. Contrôles médico-techniques

Le cycle d’adaptation du processeur vocal étant terminé, tous les patients sont revus régulièrement, au minimum une fois par an, pour des séances de contrôle médical et technique de l’implant et du processeur externe. Les patients sont reçus au CRIC par une équipe multidisciplinaire composée d’ingénieurs, logopédistes, physiciens, médecins et psychologues, chacun intervenant dans le domaine de ses compétences. En dehors de ces contrôles programmés, les patients reviennent au besoin pour résoudre des pannes techniques (batteries, câbles, …) ou d’éventuels problèmes médicaux. Le CRIC dispose aussi d’une ligne de téléphone spéciale que les patients peuvent utiliser 24 heures sur 24 (oralement ou par SMS) en cas d’urgence médicale, de panne ou même de doute. En outre, et ceci est particulièrement important dans la prise en charge des enfants implantés, les thérapeutes du groupe multidisciplinaire sont souvent sollicités pour participer à des réunions scolaires ou médicales, pour donner leur avis sur les dossiers de patients ou pour préparer la réintégration d’un nouveau porteur d’implant dans son milieu social ou scolaire. Cette démarche a pour but de diffuser plus largement les connaissances sur le fonctionnement et la manipulation des implants cochléaires souvent lacunaires dans les milieux non spécialisés. Il faut souligner que la prise en charge de patients utilisateurs d’un implant cochléaire est un engagement à vie pour le Centre responsable.

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2.5.3. Les colloques multidisciplinaires hebdomadaires

Dès le début, le CRIC a instauré des colloques multidisciplinaires hebdomadaires sur les

« implants cochléaires ». Ces colloques réunissent toute l’équipe multidisciplinaire du Centre (ainsi que les médecins internes, stagiaires, thérapeutes et enseignants externes au groupe mais participant d’une manière ou d’une autre à cette activité) et ont pour objectif principal celui de maintenir un langage commun qui soit compris de chacun des participants malgré des formations extrêmement diverses.

Ces colloques sont aussi l’occasion de passer régulièrement en revue les dossiers de tous les patients. Chaque nouveau cas y est exposé et une procédure sur mesure est établie. Dans les cas difficiles, on confronte les solutions proposées par chaque intervenant qui présente des observations dans son domaine de compétence et, suite à une discussion générale, une décision est prise. Ces colloques sont aussi l’occasion pour les membres de l’équipe de discuter et exposer leurs travaux de recherche et de recueillir des éléments pour leurs présentations lors des congrès et séminaires externes.

2.6. Evaluation de la compréhension du langage

Le but essentiel de l’implantation cochléaire est d’améliorer la communication orale. Donc la manière la plus rigoureuse d’évaluer le gain apporté par l’implant est de mesurer la compréhension du langage avant et après l’implantation. Mais la compréhension du langage est un processus complexe faisant intervenir plusieurs éléments [Khomsi, 1987]:

1. la capacité à entendre les sons élémentaires du langage, c.-à-d. les phonèmes ; 2. la capacité à les assembler pour former des mots;

3. la capacité à reconnaître et identifier ces mots (c.-à-d. le lexique);

4. la capacité à construire des phrases à partir d’une suite de mots (c.-à-d. la syntaxe) et 5. la capacité cognitive nécessaire à la compréhension du message véhiculé.

Dès le début de notre activité à Genève, nous nous sommes heurtés à un problème majeur qui est celui d’évaluer l’apport de l’implant sur la compréhension du langage oral. La première difficulté est apparue avec un de nos premiers patients de langue maternelle française. Nous avions choisi d’utiliser la liste de « Phrases de Fournier » (un test de routine utilisé en clinique), mais avons rapidement constaté que le patient les avait mémorisées et, plus d’une année après, les répétait par cœur, alors que nous avions épuisé les « stocks » de phrases disponibles. Une autre difficulté tôt rencontrée a été celle des différentes langues maternelles

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français car, selon la langue, les difficultés phonétiques et lexicales (ainsi que les règles syntaxiques) sont très différentes. Il est devenu rapidement primordial de trouver une manière uniforme de tester un groupe de patients très diversifié, ayant des langues maternelles différentes et avec des origines culturelles et sociales très diverses, tout en se mettant à l’abri des effets de mémorisation. En fait, l’implant cochléaire n’agit que sur l’audibilité des sons du langage. Il ne modifie pas (heureusement !) les capacités phonologiques, lexicales, syntaxiques, mnésiques et cognitives du patient.

2.6.1. Evaluation des performances chez les adultes post-linguaux

Presque la moitié des patients implantés dans notre Centre sont des adultes qui ont appris le langage avant de devenir sourds. Ces patients ont une mémoire auditive du langage parlé et savent écrire. Quels sont les tests qui existent pour évaluer ce type de patients ? Un aperçu de la littérature montre qu’il existe, dans chaque langue, une kyrielle de tests, allant de l’identification de phonèmes à la compréhension de phrases inattendues et complexes.

Comment faire un choix ? Idéalement, les patients sourds implantés devraient être soumis à des tests n’évaluant que leur discrimination auditive, en éliminant si possible les autres sources de variabilité. Il faudrait, en outre, que le même test puisse être répété souvent pour pouvoir suivre et mesurer rigoureusement la progression du patient au cours du temps.

Finalement, pour les centres dont la population de patients est très internationale, ce même test devrait être applicable à des patients de différentes langues maternelles.

Rabinowitz et coll [1992] ont fait une étude en utilisant toute une batterie de tests normalisés et couramment utilisés aux Etats-Unis. Ces tests comprennent entre autres l’identification de voyelles et consonnes isolées, l’identification de mots monosyllabiques isolés (NU-6 Minimal Auditory Capacities (MAC) battery [Owens et coll, 1985], la reconnaissance de mots dans des phrases simples à haut contenu contextuel (CUNY sentences) [Boothroyd et coll, 1985] et, finalement, la compréhension de phrases très difficiles et inattendues (IEEE Harvard sentences) [Grant et Braida, 1991]. Cette étude a permis de démontrer une très forte corrélation (R>0.85) entre, d’une part, les mesures d’identification de logatomes et, d’autre part, toutes les autres mesures, soit aussi bien la reconnaissance de mots monosyllabiques NU-6 que celles des mots dans des phrases CUNY et que la compréhension des phrases IEEE.

Rabinowitz et coll, [1992] ont par la suite recommandé l’utilisation d’un indice pondéré basé sur l’identification des voyelles (V) et des consonnes (C), (CxCxV)0.333, qui donne un double

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l’utilisation de test d’identification de voyelles et consonnes pour évaluer les performances des patients implantés car : (1) pour autant qu’une large plage de performances soit testée, les résultats de ces tests sont très fortement corrélés à tous ceux des autres mesures de compréhension du langage, (2) ils minimisent les facteurs de variabilité en se concentrant sur l’audibilité des sons du langage ; et (3) ils sont répétables à l’infini, donc idéaux pour suivre l’évolution d’un patient au cours du temps.

Le test d’identification des voyelles et des consonnes

C’est sur la base de ces recommandations que nous avons été amenés à développer nos propres tests d’identification de voyelles et de consonnes [Pelizzone et coll, 1993]. Nous nous sommes volontairement limités à travailler avec un sous-ensemble de voyelles (a/an/e/i/o/ou/ü) et de consonnes (d,p,t,k,b,g,f,s,v,z,m,n,l,r) qui soit commun à la majorité des langues pratiquées en Europe. Les voyelles sont présentées sous forme isolée, sans consonne accompagnante. Les consonnes sont présentées sous la forme : aCa, aFa, aMa, etc. Le patient est assis à 1m d’un haut-parleur (Fostex ™ UP203 S) dans une chambre insonorisée. Les logatomes sont présentés dans une séquence aléatoire par un locuteur mâle à 75 dB SPL A. A chaque présentation, le patient doit donner sa réponse à l’aide d’une tablette graphique qui présente toutes les options possibles (Figure 2.4). On ne lui indique pas si sa réponse est correcte ou incorrecte. Un test est composé d’un bloc de 56 logatomes (8x7 voyelles ou 4x14 consonnes). A la fin du test, le pourcentage de bonnes réponses est calculé. En règle générale, nous faisons toujours 3 tests d’identification de voyelles et 3 tests d’identification de consonnes dans la même séance. Ainsi, les performances du patient sont évaluées sur la base de la reconnaissance de 168 voyelles et 168 consonnes, ce qui est statistiquement suffisant.

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Figure 2.4 : Le test d’identification des voyelles et des consonnes est réalisé dans une chambre insonorisée. Le patient indique sur une tablette graphique le logatome qu’il entend.

Le résultat correspond au pourcentage d’identifications correctes. (Photo CRIC)

Nous avons utilisé ce test, que nous appelons « test d’identification des voyelles et des consonnes » lorsque cela était possible, c.-à-d. lorsque nous devions évaluer des patients ayant acquis le langage oral et sachant lire, c.-à-d. ayant les moyens de répondre par l’intermédiaire de la tablette graphique. Pour représenter les résultats, nous utilisons l’indice composé (CxCxV) 0.333, où V représente la moyenne de réponses correctes sur 168 présentations de voyelles et où C représente la moyenne de réponses correctes sur 168 présentations de consonnes.

2.6.2. Evaluation des performances chez l’enfant

Il est fréquent aujourd’hui d’implanter les enfants sourds très tôt dans leur vie, typiquement dès l’âge de 1 an. Le test d’identification de voyelles et de consonnes tel qu’il est décrit ci- dessus n’est évidemment pas adapté à l’évaluation des enfants de moins de 8-9 ans. D’autres approches sont donc requises.

Les enfants sourds de naissance, ou atteints de surdité pré-linguale, doivent apprendre à communiquer oralement avec leur implant. Contrairement aux adultes devenus sourds, ils ne disposent pas d’une mémoire auditive du langage pour déchiffrer les sensations auditives

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dure environ 4 ans et dont la trajectoire varie d’un enfant à l’autre en fonction, non seulement de l’enfant, mais aussi de contextes très divers comme ceux de la famille, de l’école, de la culture, etc. [Deriaz M, 2009]. Cette trajectoire est encore plus compliquée chez l’enfant implanté. Tout d’abord, comme nous l’avons déjà mentionné à propos des enfants en bas âge, les premiers réglages du processeur vocal peuvent ne pas être optimaux et il n’est même pas certain qu’au début l’enfant ait les moyens d’entendre tous les sons du langage. En outre, même si la qualité du réglage est bonne, il n’aura au mieux qu’une audition encore imparfaite.

Finalement, ses progrès dépendront aussi de la qualité et de la fréquence de l’entrainement auditif qui lui est dispensé. Si tout se passe bien, ce n’est qu’après 4 à 5 ans que l’on pourra pleinement apprécier les fruits de cet apprentissage.

Face à cette variabilité dans le rythme d’acquisition du langage oral chez les enfants, on constate qu’il faudrait disposer d’une pléiade de tests spécifiques couvrant toutes les différentes facettes et une large plage de niveaux de langage. Pour approcher ce but, Marielle Deriaz, logopédiste senior au CRIC, s’est efforcée d’élaborer une batterie de tests et d’échelles d’évaluation (décrite ci-dessous). L’usage à intervalles réguliers de cette batterie nous permet d’obtenir des indices signalant d’éventuels défauts dans le réglage de l’implant ou dans la stratégie de réhabilitation. Ainsi, si les résultats des tests d’un enfant semblent dévier de la norme attendue, nous tentons d’en comprendre les raisons et proposons rapidement des interventions correctives.

Notre batterie d’évaluation du langage chez les jeunes enfants comprend deux grandes catégories d’évaluation : l’évaluation de la perception du langage et celle de la production du langage.

2.6.3. La batterie CRIC pour l’évaluation de la perception du langage

Le test des Paires Minimales (PM)

Le test des paires minimales a été développé par M. Deriaz. Il s’agit d’un test comprenant 18 paires de mots, les mots de chaque paire ne se différenciant que par un seul phonème. Les 18 paires sont divisées en 3 niveaux de difficulté croissante (voir Tableau 2.1).

On présente à l’enfant une planche avec deux images (p. ex: sapin-lapin, coq-phoque, château-bateau…). La thérapeute prononce à voix normale (et en empêchant toute lecture labiale par l’enfant) le mot correspondant à un seul des deux objets de la paire, et l’enfant doit désigner l’image correspondant au mot entendu. Le score est exprimé par le pourcentage de mots correctement identifiés. Ce test a l’avantage de pouvoir être répété à l’infini puisqu’il ne

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