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Stockage multimode au niveau quantique pendant une milliseconde

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

Stockage multimode au niveau quantique pendant une milliseconde

JOBEZ, Pierre

Abstract

L'apparition de la physique quantique à la fin du XIXe siècle a inspiré nombre d'applications basées sur des effets quantiques. La communication quantique, basée sur l'utilisation de

"qubit" à l'instar des "bit" en communication classique, est l'une de ces applications. La valeur de ces qubits, pouvant être en superposition quantique, est impossible à copier parfaitement.

Aujourd'hui, la cryptographie quantique est déjà la manière la plus confidentielle de communiquer. Néanmoins, la distance de communication est aujourd'hui fortement limitée par les pertes dans les fibres optiques. Afin de pallier à ce problème, il faut avoir recours à un répéteur quantique, un protocole basé sur l'intrication quantique et l'utilisation de mémoires quantiques. Pendant mon doctorat, j'ai travaillé sur la réalisation d'une telle mémoire dans un solide. Mon travail a notamment été d'étendre le temps de stockage, améliorer l'efficacité ou encore réduire le bruit généré par cette mémoire.

JOBEZ, Pierre. Stockage multimode au niveau quantique pendant une milliseconde. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2015, no. Sc. 4856

URN : urn:nbn:ch:unige-836717

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:83671

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:83671

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UNIVERSITÉ DE GENÈVE FACULTÉ DES SCIENCES

Groupe de Physique Appliquée - Optique Prof. N. Gisin

Stockage multimode au niveau quantique pendant une milliseconde.

THÈSE

présentée à la Faculté des Sciences de l’Université de Genève pour obtenir le grade de Docteur ès Sciences, mention Physique

par

Pierre Jobez

de Villeneuve d’Ascq (Nord, France)

Thèse N

4856

GENÈVE 2015

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Résumé de la Thèse

L’apparition de la physique quantique à la fin du XIXe siècle a inspiré nombre d’applications basées sur des effets quantiques. La communication quantique, basée sur l’utilisation de "qubit" à l’instar des "bit" en communication classique, est l’une de ces applications. La valeur de ces qubits, pouvant être en superposition quantique, est impossible à copier parfaitement. Ce phénomène présente un avantage certain pour la transmission de données confidentielles. Aujourd’hui, la cryptographie quantique est déjà la manière la plus confidentielle de communiquer. Néanmoins, la distance de com- munication est aujourd’hui fortement limitée par les pertes dans les fibres optiques.

Afin de pallier à ce problème, il faut avoir recours à un répéteur quantique, un proto- cole basé sur l’intrication quantique. Ce protocole requière notamment l’utilisation de mémoires quantiques. Une mémoire quantique est un dispositif permettant de stocker un état quantique (porté par un photon par exemple) et de le sortir à un temps voulu sur demande.

Pendant mon doctorat, j’ai travaillé sur la réalisation d’une telle mémoire dans un solide. Mon travail a notamment été d’étendre le temps de stockage, améliorer l’efficacité ou encore réduire le bruit généré par cette mémoire. Les résultats obtenus montrent qu’il est possible de stocker un photon unique pendant plus d’une milliseconde avec un bonne fidélité. Ce résultat est le premier résultat expérimental de stockage de longue durée (milliseconde) dans un solide au niveau du photon unique. De plus, nous avons démontré d’une part l’amélioration d’un facteur 8 sur l’efficacité par l’utilisation d’une cavité, et d’autre part, le stockage de 50 modes temporels dans l’état de spin.

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Abstract

The emergence of quantum physics at the end of the XIXth century inspired many technologies based on quantum effects. Quantum communication is one of them. The idea is to use "qubits" (quantum bits) instead of conventionnal "bits". Unlike "classical bits", qubit states can be in superposition between "0" and "1", states that are impossible to copy perfectly. As a consequence, quantum communication is nowadays the best way to ensure privacy. However, communication distances are strongly limited by optical fiber losses. A protocol known as "quantum repeater", based on entanglement, has been proposed to solve this issue. It requires especially the use of optical quantum memories for single photons, which are able to store a quantum state and retrieve it on-demand.

During my PhD work, my goal was to realize such a quantum memory in a solid.

In particular, my work was to extend the storage time, increase the efficiency or even reduce the noise generated by the memory. Our results demonstrate that our memory is able to store a single photon during more than a millisecond with a good fidelity.

This is the first demonstration of long-term (millisecond) storage in a solid at the single photon level. In addition, I have shown a 8-fold increase in efficiency by using an impedance matched cavity, and furthermore, the spin-wave storage of 50 temporal modes.

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Table des matières

Résumé de la Thèse iii

Abstract v

Introduction 1

1 Les protocoles de mémoire dans les cristaux dopés aux ions terres

rares 5

1.1 Les cristaux dopés aux ions terres rares. . . 5

1.2 Le peigne de fréquence atomique (AFC) . . . 7

1.2.1 Génération d’échos AFC . . . 7

1.2.2 Stockage AFC dans l’état de spin : Une mémoire sur demande de longue durée . . . 10

1.2.3 Le protocole AFC-DLCZ . . . 13

1.3 Les autres protocoles utilisés dans les terres rares . . . 17

2 Préparation d’un AFC dans Eu3+ :Y2SiO5 21 2.1 Eu3+ :Y2SiO5 . . . 21

2.2 Préparation spectrale du cristal . . . 24

2.3 Création d’un AFC . . . 26

3 Expériences de stockage 33 3.1 Stockage dans 153Eu3+ :Y2SiO5 couplé à une cavité . . . 34

3.1.1 Montage expérimental . . . 34

3.1.2 Résultats . . . 36

3.2 Stockage multimode dans un cristal fortement dopé. . . 40

3.2.1 Montage expérimental . . . 40

3.2.2 Résultats . . . 42

3.3 Stockage longue durée d’états cohérents atténués au niveau quantique . 45 3.3.1 Montage expérimental . . . 46

3.3.2 Résultats . . . 46

(9)

3.4 Stockage longue durée de plusieurs qubits . . . 56

3.4.1 Montage expérimental . . . 56

3.4.2 Résultats . . . 58

3.5 Génération d’échos AFC-DLCZ . . . 62

3.5.1 Dispositif expérimental . . . 62

3.5.2 Résultats préliminaires . . . 62

4 AFC : Un analyseur efficace de qubit en time-bin 65 4.1 Principe . . . 65

4.2 Résultats . . . 66

4.3 Conclusion . . . 68

Conclusion 69 Remerciements 73 Bibliographie 75 A Appendice 81 B Articles publiés 83 Single-photon-level optical storage in a solid-state spin-wave memory . . . . 83

Cavity-enhanced storage in an optical spin-wave memory . . . 91

Coherent Spin Control at the Quantum Level in an Ensemble-Based Optical Memory . . . 106

Multiplexed on-demand storage of polarization qubits in a crystal . . . 111

(10)

Introduction

Depuis l’apparition de la théorie de la physique quantique à la fin du XIXe siècle, de nouveaux concepts viennent contredire la physique dite "classique", à l’instar de la théorie de la relativité. En effet, des phénomènes étonnants ne pouvant être expli- qués par la physique "classique" ont été prédits par la physique quantique. Dans le courant du XXe siècle, de multiples expériences confirment ces prédictions théoriques.

Par exemple, "l’expérience d’Aspect" en 1982 [1] démontre le concept d’intrication, un phénomène où deux objets pouvant être spatialement séparés d’une distance arbitrai- rement grande se comportent comme une seule et même entité. En deux mots, une action sur l’un des objets aura une conséquence sur l’autre objet, et ce, de manière instantanée. Cette découverte, et de manière plus générale le concept de superposition quantique ont inspiré beaucoup d’applications pratiques. Parmi celles-ci, il y a notam- ment l’ordinateur quantique, qui, grâce à l’utilisation de "qubits" à la place de "bits", pourrait atteindre des performances inatteignables avec un ordinateur classique. Le qubit, tout comme le bit, peut prendre une valeur 0 ou 1, mais également peut être une superposition quantique de la valeur 0 et 1. L’information portée par un seul qubit est donc supérieure à l’information portée par un bit.

Le qubit est aussi à la base de la cryptographie quantique [2], un mode de com- municaton qui tire profit du phénomène de superposition quantique pour augmenter la confidentialité des données communiquées. Ceci vient notamment de l’impossibilité de copier un état en superposition quantique de manière certaine. Des systèmes de QKD (Quantum Key Distribution) permettent déjà aujourd’hui de communiquer de manière quantique par fibre optique sur des distances dépassant 300 km [3]. De plus, il existe aujourd’hui un système commercial de QKD (commercialisé par la société ID- Quantique à Genève) pour des distances atteignant 100 km. Augmenter la distance de communication augmente irrémédiablement les pertes dans la fibre optique. Même en réunissant les meilleurs dispositifs actuels, la communication quantique par transmis- sion directe à travers une fibre ne peut pas raisonnablement atteindre des distances de l’ordre de 1000 km. Afin de résoudre ce problème, une solution à été proposée par Briegel et al. en 1998 [4]. Ce protocole a pour nom le répéteur quantique. L’idée est ici d’utiliser le concept d’intrication. Il faut tout d’abord être capable d’intriquer deux objets statiques A et B distants d’une distance d. Une autre paire C et D peut être

(11)

QM QM QM QM QM QM

d d

QM QM

d Mesure de Bell

A B C D E X Y Z

QM QM

A Z

Nd (a)

(b)

Figure 1 – Principe du répéteur quantique. En (a), on a N paires de mémoires quantiques intriquées et séparées d’une distanced. Une mesure de Bell sur les mémoires B et C distribue l’intrication sur la paire de mémoire AD non intriquée initialement. N-1 opérations comme celle-ci permettent de distribuer l’intrication sur une distance de Nd comme représenté en (b).

créée juste à côté de la première paire AB (voir figure 1). Une troisième paire EF peut être créée à côté de la paire CD et ainsi de suite jusque la paire YZ. Une mesure jointe (mesure de Bell) sur deux objets contigüs d’une paire différente (B et C par exemple) permet d’intriquer les deux autres objets (A et D). L’intrication est donc étendue d’une distance dà une distance 2d. Ceci peut être répétéN fois si l’on dispose deN+ 1 paires, et ainsi obtenir l’intrication de deux objets séparés d’une distanceN d.

Cette intrication peut finalement être utilisée pour communiquer de manière quantique sur de longues distances. Ces paires d’objets statiques peuvent être réalisées à l’aide d’une source de paires de photons intriqués associée à des mémoires quantiques [5]. En effet ces mémoires peuvent stocker un photon tout en conservant les propriétés phy- siques de celui-ci, et donc notamment l’intrication. La mémoire quantique est capable de ré-émettre sur demande le photon stocké, ce qui permet de réaliser la mesure jointe entre deux mémoires non-intriquées.

Dans le groupe de physique appliquée à Genève, on s’intéresse à la réalisation d’une telle mémoire. Comme expliqué ci-dessus, cette mémoire doit présenter une bonne fidé- lité mais également une très bonne efficacité pour des temps de stockage relativement longs (1ms-1s) afin d’être utilisable pour la réalisation d’un répéteur quantique. A noter que la réalisation de mémoire quantique peut être également utile pour la réalisation d’un ordinateur quantique. Dans ce cas, les caractéristiques requises sont différentes. A Genève, nous nous intéressons principalement à la réalisation de mémoires quantiques pour le répéteur quantique. Nous avons choisi de travailler avec des cristaux dopés terres rares qui seront présentés dans la section 1.1.

Durant ces 4 années de thèse, ma tâche à été principalement de réaliser une mé-

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moire quantique efficace et fidèle pour des temps de stockage longs (de l’ordre de la ms). J’ai donc travaillé avec Eu3+:Y2SiO5, un cristal dopé à l’europium permettant en théorie d’obtenir des temps de stockage extrêmement longs (plusieures heures) dans un état de spin grâce à une manipulation spécifique. Ni le système atomique, ni le protocole employé (AFC, Atomic Frequency Comb, présenté en section 1) ne présente de limitation fondamentale à la réalisation d’une mémoire quantique fidèle et efficace (>90%) pour de très longs temps de stockage (>1s). Ce projet est particulièrement ambitieux, car s’il n’est pas un projet de mémoire quantique simple à réaliser, il peut conduire à moyen terme à la réalisation d’une mémoire quantique pour les répéteurs quantiques.

J’ai donc travaillé sur un système cristal-cavité présentant une efficacité théorique de 100% (section 3.1). J’ai ensuite optimisé la capacité multimode de la mémoire sur un cristal sans cavité (section 3.2). Enfin les sections 3.3 et 3.4 traitent du stockage longue durée (∼ 1 ms) au niveau quantique, qui est certainement le résultat majeur obtenu durant ma thèse.

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(14)

Chapitre 1

Les protocoles de mémoire dans les cristaux dopés aux ions terres rares

1.1 Les cristaux dopés aux ions terres rares.

Les cristaux dopés aux ions terres rares ont pu être étudiés en détails depuis 1962 et l’apparition du laser. Ils ont trouvé une application notamment comme milieux à gain pour des systèmes laser. Par exemple, des lasers basés sur des cristaux de Nd :YAG sont couramment utilisés en ophtalmologie (traitement de la cataracte), chirurgie es- thétique (épilation laser), métalurgie (découpe de métaux) ou encore dans le monde du spectacle (pour l’éclairage). Dans le domaine de la communication, les fibres amplifi- catrices dopées avec des ions erbium ont permis d’améliorer considérablement le débit d’information transmise sur de longues distances. Ces cristaux sont également étudiés expérimentalement pour la réalisation de mémoires optiques depuis 2005 et la réalisa- tion du protocole CRIB (controlled reversible inhomogeneous broadening) [6, 7, 8]. Ce système atomique jouit d’une relative facilité d’utilisation comparé aux autres systèmes atomiques comme les gaz froids ou encore l’atome unique qui requièrent un piège [9].

Les gaz chauds sont relativement simples d’utilisation également, mais ils souffrent in- évitablement du déplacement permanent des atomes. Dans les cristaux dopés aux terres rares, les ions étudiés (les dopants) sont piégés dans la structure cristalline dès la crois- sance du cristal. En pratique, le cristal est refroidit à des températures cryogéniques (∼4K) afin de limiter l’interaction avec les phonons.

Lors du dopage, un ion de dopant vient remplacer un ion de la maille. Une diffé- rence de taille entre l’ion dopant et l’ion qu’il remplace peut créer des disparités sur la position du dopant dans cette maille et donc par conséquent, une largeur inhomogène spectrale. De plus, pour un dopage élevé, un dopant va ressentir un environnement localement modifié par la proximité de ses voisins dopants. Ainsi, d’un ion à l’autre, l’environnement qui l’entoure peut être complètement différent, la quantité et la dis-

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tance de proches voisins étant aléatoires. C’est pour cela que ces cristaux peuvent présenter une largeur inhomogène optique assez importante (typiquement de 100 MHz à 100 GHz) variant selon le dopage du cristal (typiquement de 10 ppm à 10000 ppm).

En revanche, la largeur homogène des ions de ces cristaux est remarquablement fine [10, 11]. En effet, les électrons les plus externes se situent sur la couche 4f et sont protégés par un effet d’écran par les électrons des couches 5s et 5p. Dans le cas d’un ion isolé, les transitions dipolaires électriques seraient interdites. L’interaction avec le champs cristallin rend de nouveau ces transitions possibles même si elles restent relativement faibles.

D’autre part, deux types de dopant existent : Les ions Kramers et les ions non- Kramers qui ont respectivement un nombre impair et pair d’électrons dans la couche 4f. L’interaction avec le champ cristallin aura des conséquences différentes selon la nature de l’ion. Pour les ions Kramers (Er3+, Nd3+ par exemple), l’état fondamental est un doublet dont la dégénérescence peut être levée par un champ magnétique externe.

La séparation de ces deux états peut ainsi atteindre facilement plusieurs dizaines de GHz. Pour les ions non Kramers, la dégénérescence du moment angulaire électronique est complètement levée par le champ cristallin dans les basses symétries. Ainsi pour des ions possédant un spin nucléaire I (Eu3+, Pr3+ par exemple où I=5/2), la structure hyperfine permet d’avoir plusieurs états fondamentaux à disposition, même pour un champs externe nul.

Plusieurs de ces cristaux ont démontré des propriétés de cohérence sans précédent, atteignant même des temps de cohérence de spin de plusieurs heures pour Eu3+:Y2SiO5[12].

Des temps de stockage de l’ordre de la seconde puis de la minute ont été obtenus avec le protocole EIT (Electromagnetically induced transparency) dans Pr3+:Y2SiO5 [13, 14, 15]. Par ailleurs, une efficacité de stockage de 69% a été obtenue pour le proto- cole GEM (Gradient echo memory) dans Pr3+:Y2SiO5 [16] démontrant également que des mémoires efficaces peuvent être réalisées dans ces cristaux. Le stockage de pho- tons uniques ou d’états cohérents atténués au niveau quantique ont été réalisés pour différents protocoles et différents cristaux [16, 17, 18, 19].

Pour toutes ces raisons, les cristaux dopés aux ions terres rares sont d’excellents candidats pour la réalisation de mémoires quantiques. Il reste néanmoins beaucoup de travail afin d’obtenir une mémoire quantique efficace, multimode, à bas bruit et à long temps de stockage pour une seule et même expérience.

Dans les sections suivantes, je présente en détail le principe du protocole AFC, puis, plus rapidement, les autres protocoles de mémoire utilisés dans les cristaux dopés aux ions terres rares. Les avantages et les limitations de chaque protocole seront également mis en avant.

(16)

1.2 Le peigne de fréquence atomique (AFC)

1.2.1 Génération d’échos AFC

Le protocole AFC (atomic frequency comb) ou peigne de fréquence atomique est le protocole que j’ai étudié pour réaliser une mémoire dans Eu3+:Y2SiO5. Il a été proposé par Afzelius et al. en 2009 [20] et réalisé expérimentalement pour la première fois en 2008, au niveau du photon unique [17]. Ce protocole a été développé pour des systèmes présentant naturellement une largeur inhomogène, comme par exemple les cristaux dopés aux ions terres rares.

A partir d’une absorption plate en fréquence (ou localement plate) dans la largeur inhomogène d’un cristal dopé terres-rares, on peut réaliser un profil spectral en forme de peigne comme représenté sur la figure 1.1. C’est ce que l’on appelle un AFC. En pratique, on peut préparer un AFC par pompage optique sur une largeur spectrale voulue qui détermine la bande passante (BW) de la mémoire. Ce peigne est donc constitué de plusieurs dents distribuées de manière périodique dans la bande passante de la mémoire. On notera ∆ la période de l’AFC et Ndents son nombre de dents. Le détail de la préparation d’un AFC dans un cristal est détaillé dans la section 2.3. Si l’on considère le cas limite où chaque dent de l’AFC est infiniment fine en fréquence, la position relative de l’atomei dans la largeur inhomogène s’écrit :

δωi = 2πni∆ (1.1)

avecniun entier désignant le numéro de la dent de l’ioni. L’état de l’ensemble atomique un instantt après l’absorption d’un photon s’écrit :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πni∆t|g1g2..eigi+1..gNi (1.2) avec N le nombre d’ions impliqués dans l’état collectif, |gii l’état fondamental de l’atomei et|eiison état excité.

Ainsi, un instant t=1/∆ après l’absorption du photon, la phase relative de l’ion i s’écrit

φi = 2πni∆1

∆ = 2πni (1.3)

Les atomes sont donc de nouveau en phase, un écho AFC est alors émit à l’instant t=1/∆ dans la direction de propagation respectant ainsi la condition d’accord de phase spatialk~ink~out =~0. L’efficacité de la mémoire est régit par ˜d, la profondeur optique moyennée sur la BW :

ηAF C = ˜d2ed˜ (1.4)

(17)

Γ Δ Profondeur optique

δ BW

d

Δ

Figure 1.1 – Profil spectral d’un AFC en forme de dents carrées, de profondeur optique maximaled, de périodicité ∆, de largeur de dent Γ et de bande passanteBW.

IN

OUT

Temps 1/∆

Figure 1.2 – Protocole AFC : Un écho est émis un temps 1/∆ après l’entrée.

Dans le cas réel, il n’est pas possible d’obtenir des dents infiniment fines. Celles- ci ont donc un profil spectral ainsi qu’une largeur que l’on notera Γ. On définit la finesse de l’AFC F par le rapport de la périodicité du peigne sur la largeur d’une dent : F = ∆/Γ. La profondeur optique moyennée sur la BW s’exprime, pour des dents carrés : ˜d =d/F. Le photon d’entrée dont la largeur spectrale couvre plusieurs dents, est absorbé selon cette valeur moyennée mais n’a pas la résolution pour voir la structure de peigne. La largeur de la dent va causer un déphasage supplémentaire qui ne sera pas compensé par l’AFC. En effet, l’AFC permet aux différentes dents de revenir en phase les unes par rapport aux autres mais ne compensent pas le déphasage entre les atomes d’une même dent. Bonarota et al. ont démontré que le profil carré est le profil spectral optimal de dent [21] pour un d donné. Le déphasage créé par une largeur de dent carré provoque une baisse d’efficacité d’un facteur sinc2(π/F), carré de la transformée de Fourier inverse d’une dent au temps t=1/∆. L’efficacité pour un AFC constitué de dents carrés s’écrit finalement :

ηAF C = ˜d2ed˜sinc2(π

F) (1.5)

Même dans le cas d’une très grande profondeur optique disponible, les formules 1.4 et 1.5 présentent une limite théorique pour l’efficacité de 54 %, à cause de la ré-

(18)

absorption de l’écho dans le cristal. Une profondeur optique grande augmente l’absorp- tion et la ré-émission du photon mais augmente également la ré-absorption de l’écho dans le milieu. D’autre part, une grande finesse F permet de limiter le déphasage et ainsi d’augmenter l’efficacité. Pour une profondeur optique d très élevée, il convient donc d’augmenter la finesse afin de diminuer la ré-absorption et de limiter le dépha- sage. Néanmoins, si ˜d diminue, l’absorption et la ré-émission du photon diminue. Pour une profondeur optique disponible donnée d, il existe donc une finesse optimum Fopt qui s’exprime [21] :

Fopt = π

arctan (2π/d) (1.6)

D’autre part, le temps de stockage du protocole est limité par le temps de cohé- rence T2 de la transition optique |gi ↔ |ei. La bande passante pouvant être choisie arbitrairement (modulo les limites fondamentales du système atomique), augmenter le nombre de modes à stocker n’affecte pas l’efficacité. En effet, la durée minimale d’un mode est grosso-modo donnée par l’inverse de la bande passanteτm = 1/BW. On peut remarquer que la bande passante s’exprime en fonction de ∆ et deNdents :

BW =Ndents∆ (1.7)

Or le nombre de modes que l’on peut stocker pour un temps de stockage 1/∆ est deNmodes = 1/(τm∆). La formule 1.7 devient donc :

Nmodes = BW

∆ =Ndents (1.8)

Le nombre de modes pouvant être stockés est donc donné par le nombre de dents total de l’AFC.

Ce protocole est donc très bien adapté aux expériences de stockage dans les cris- taux terres-rares. Le stockage de 64 modes utilisant l’AFC a été démontré en 2010 [22]. D’autre part, l’émission de l’écho ne requière aucune manipulation après l’ab- sorption du photon. Il s’agit là d’un avantage certain car aucune source de bruit ne viendra en principe polluer l’écho AFC. De ce fait, la démonstration d’une intrication photon-cristal [19] ou même cristal-cristal [23] a pu être réalisée à l’aide d’une source de paires de photons. Néanmoins, la ré-émission de l’écho AFC étant prédéterminée depuis la création du peigne, l’AFC ne peut émettre l’écho sur demande. Un protocole de mémoire quantique sur demande basé sur l’AFC est présenté dans la section 1.2.2.

Couplage à une cavité

L’absorption de certains cristaux terres-rares est particulièrement faible. C’est no- tamment le cas des cristaux dopés Europium, les dipôles des transitions optiques perti- nentes étant très faibles. Afin de résoudre ce problème d’absorption faible, le cristal peut

(19)

être placé dans une cavité bien choisie pour que l’absorption du système cristal-cavité atteigne 100% [24, 25]. Le principe est de placer le cristal dans une cavité asymétrique constitué d’un miroir de réflectivitéR2=100% et un miroir de réflectivitéR1 adaptée à l’absorption du cristal. Pour un cristal de profondeur optique moyenne ˜d, l’adaptation est réalisée lorsque la transmission dans le cristal lors d’un cycle de cavité est égale à la réflectivité du miroir, soit R1 = exp(−2 ˜d) [25]. En d’autres termes, pour chaque tour de cavité, la perte due au miroir R1 doit être égale aux pertes générées par l’absorp- tion du cristal, tout comme une cavité Fabry-Pérot classique où les pertes sur chacun des miroirs sont équilibrées. L’efficacité résultante du système cristal-cavité est donc uniquement donnée par la finesse finie de l’AFC [24, 25] :

ηcav = sinc2(π

F) (1.9)

en considérant qu’il n’y a pas de perte intra-cavité.

Dans l’article correspondant de cette thèse (appendice B page 91), nous avons fait une analyse de l’effet causé par une perte intra-cavité par tour de cavité. Pour une perted˜1, l’efficacité devient [26] :

ηcav = sinc2(π/F)

(1 + 4 ˜d)4 '(1−

d˜) sinc2(π/F) (1.10) Il faut donc réduire au maximum le rapport ˜

d afin de ne pas dégrader l’efficacité par les pertes intra-cavité. Pour une profondeur optique d disponible, il faut en fait trouver un bon compromis entre une finesse élevée pour limiter le déphasage et un ˜d important pour combattre les pertes.

Nous avons réalisé expérimentalement ce système cristal-cavité. Les résultats obte- nus sont détaillés dans la partie 3.1 et dans l’article correspondant page 91.

1.2.2 Stockage AFC dans l’état de spin : Une mémoire sur demande de longue durée

Le protocole de stockage AFC dans l’état de spin a été proposé par Afzelius et al.

en 2009 [20] puis réalisé pour la première fois en 2010 [27]. L’idée est la suivante : afin d’avoir un contrôle sur la ré-émission du photon stocké, on introduit au protocole d’écho AFC 2 impulsions π de contrôle. Un temps T <1/∆ après l’absorption du photon, on transfert la population de l’état excité |eii vers un état fondamental |sii initialement vide (voir figure 1.3). Ce transfert est réalisé par une impulsion π effective, que l’on appelle impulsion de contrôle. La cohérence optique entre les états |eii et|gii est donc transformée en une cohérence de spin entre les niveau |gii et |sii. Cette transition de spin présente également une largeur inhomogène, complètement décorrélée de la largeur

(20)

inhomogène optique. L’état collectif un instantt après le transfert est donc :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πni∆Te−j2πδspini t|g1g2..sigi+1..gNi (1.11) avecδispin la position de l’atome i dans la largeur inhomogène de spin.

IN

OUT

Temps TS+1/∆

Contrôle Contrôle

IN Contrôle

T T’

Figure 1.3 – Stockage AFC dans l’état de spin.

La cohérence étant maintenant entre deux états de spin, le déphasage dû à la largeur inhomogène optique (dans laquelle est préparé l’AFC) est gelé pendant tout le stockage dans l’état de spin. Lorsque l’on décide de ré-émettre le photon, on applique une seconde impulsion de contrôle, identique à la première afin de rétablir la cohérence optique initiale. On note TS le temps passé dans l’état de spin. Un temps T0 =1/∆-T après la seconde impulsion, l’état collectif s’écrit :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πnie−j2πδspini TS|g1g2..eigi+1..gNi (1.12) L’AFC a donc compensé la largeur inhomogène optique mais le déphasage dû à la largeur inhomogène de spin reste bien présent. Si on note ηT l’efficacité de transfert d’une impulsion de contrôle. L’efficacité du stockage AFC dans l’état de spinηSW (SW pour spin-wave) est donc :

ηSW = ˜d2ed˜sinc2(π

F2Tηspin(TS) (1.13) ηspin(TS) étant le terme de déphasage dans l’état de spin qui dépend de la largeur et de la forme de l’élargissement de spin.

Le temps de stockage est ainsi fortement limité par cette inhomogénéité de la tran- sition de spin. Dans les cristaux dopés terres rares, cette largeur est de l’ordre de quelques dizaine de kHz au mieux, limitant le temps de stockage à quelques dizaine de

(21)

µs. Il est toutefois possible de corriger ce déphasage en réalisant un écho de spin sur la transition de spin. L’idée est d’appliquer une première impulsion π radio-fréquence (RF) sur la transition |gii ↔ |sii un instant τ après l’impulsion de contrôle optique (voir figure 1.4). Après un instant t supplémentaire, l’état est :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πnie−j2πδispin(τ−t)|s1s2..gisi+1..sNi (1.14) On peut remarquer que si l’on applique une impulsion de contrôle sur la transition

|gii ↔ |eit =τ, le déphasage de spin sera compensé. Cette possibilité est tout à fait faisable en pratique. Néanmoins, on se limitera ici au protocole de stockage proposé ci-dessus avec deux impulsions de contrôle identiques. Un seconde impulsionsπ RF est donc appliquée à t = 2τ (voir figure 1.4). Un temps t0 après cette impulsion, l’état devient :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πnie−j2πδspini (τ−2τ+t0)|g1g2..sigi+1..gNi (1.15) Pour t0 =τ, la phase accumulée dans l’état de spin est nulle, la seconde impulsion de contrôle est ainsi appliquée, et l’écho est émis après un tempsT0 =1/∆-T.

Le temps de stockage est ici simplement limité par le temps de cohérence T2spin de la transition de spin. Dans ce cas, l’efficacité s’écrit :

ηSW = ˜d2ed˜sinc2(π

FT2e−2TS/T2spin (1.16) Le temps de cohérence optique T2 va lui limiter le temps 1/∆. la formule ci dessus est donc valide pour 1/∆ T2. Nous verrons plus en détail dans la section 3.2 l’effet du T2 optique effectif sur la capacité multimode de la mémoire.

Il est également possible de forcer la ré-émission du photon en sens inverse si l’une des impulsions de contrôle se propage dans le sens opposé au photon d’entrée, et la seconde impulsion de manière colinéaire. Soit concrètement :

~k1 =−~k2 =~kin (1.17)

Dans ces conditions l’accord de phase devient :

~kin~k1+~k2~kout =~0↔~kout =−~kin (1.18) L’efficacité n’est donc plus limitée par la ré-absorption et devient [20] :

ηSWinv = (1−ed˜)2sinc2(π

F2Te−2TS/T2spin (1.19)

(22)

IN

OUT

Temps π1

TS+1/∆

Contrôle Contrôleπ2

Figure 1.4 – Stockage AFC dans l’état de spin avec impulsions RF.

Si le cristal est placé dans une cavité adaptée en impédance (cf. section 1.2), l’effi- cacité est :

ηSWcav = sinc2(π

F2Te−2TS/T2spin (1.20) Pour des impulsions de transfert efficaces à 100% et une finesse F 1, des effica- cités très élevées proche de 100% peuvent être atteintes. Tout comme pour le stockage AFC standard (cf. section 1.2), le nombre de modes stockés n’affecte pas l’efficacité.

Néanmoins, cela requière que les champs de contrôle aient une bande passante suffi- sante pour transférer la totalité de l’AFC. Le temps de cohérence de spinT2spinpeut être étendu par découplage dynamique à l’environnement ainsi que par l’application d’un champ magnétique externe (cf. [12, 14]). Pour conclure, le protocole de stockage AFC dans l’état de spin pourrait permettre de réaliser un stockage quantique, multimode, efficace et de longue durée dans un cristal dopé terres rares.

1.2.3 Le protocole AFC-DLCZ

Réaliser le stockage d’un photon unique requière non seulement une mémoire quan- tique universelle mais également une source de photons uniques. La bande passante des mémoires quantiques sur demande dans les cristaux dopés terres-rares peut être limitée à quelques MHz, voir quelques dizaines de MHz (c’est le cas de Eu3+:Y2SiO5 et Pr3+:Y2SiO5). La génération de photons uniques d’une telle largeur spectrale par SPDC (spontaneous parametric down conversion) est délicate et requière un filtrage spectral important. De plus la réalisation d’un bon couplage du photon jusqu’à la mémoire est souvent difficile.

Dans le but de réaliser un répéteur, l’utilisation d’une mémoire quantique n’est en réalité pas nécessaire. Le protocole DLCZ proposé par Duan, Lukin, Cirac et Zoller en 2001 [28] est une manière astucieuse de s’affranchir de mémoire universelle et de source de photons uniques. L’idée est de tout d’abord créer une excitation unique directement dans le système atomique. Une manipulation du système permet ensuite de convertir sur demande l’excitation unique en photon unique. Ce protocole a largement fait ses

(23)

preuves dans les atomes froids notamment [29]. L’AFC-DLCZ, un protocole de type DLCZ basé sur l’AFC, a été proposé par Sekatski et al. en 2011. Nous proposons ici une version légèrement modifiée de celle proposée par Sekatski et al..

Afin de générer l’excitation unique dans le cristal dopé terres rares, une première impulsion d’écriture (W, "write") à t = 0 vient exciter une portion non négligeable de l’AFC (voir figure 1.5), préparé initialement sur l’état |gi. La phase de la cohérence optique créée commence donc à évoluer selon le schéma AFC. Un détecteur placé dans une direction a priori arbitraire, attend l’émission d’un photon émis par émission spontanée à la fréquencefes, résonante avec la transition|ei ↔ |si. Un filtre de bande passante étroite est donc nécessaire afin de filtrer les photons émis à d’autres fréquences.

A un instant TStokes, le détecteur clique, nous annonçant que l’ensemble a émit un photon unique dans cette direction. Ce photon est appelé photon "Stokes". Le détecteur peut aussi bien avoir annoncé l’émission de deux photon Stokes puisqu’il ne résout pas le nombre de photons. Si on note pS la probabilité de générer un photon Stokes, la probabilité d’en générer 2 est donnée par p2S. La pureté de l’excitation unique ainsi créée dépend de la proportion de photons uniques émis par rapport à l’émission de 2 photons et plus, elle même fonction de la quantité d’atomes excités par l’impulsion d’écriture. Une excitation faible va favoriser la pureté de l’excitation unique mais va réduire la probabilité de générer un photon. La détection de ce photon nous indique donc la création d’une "excitation" unique dans l’état|sidélocalisée sur tout les atomes.

L’ensemble atomique se retrouve donc dans un état de Dicke [30], la phase accumulée pendant le tempsTStokesrestant bien présente. Un instanttaprès l’impulsion d’écriture, une phase supplémentaire est accumulée due à la largeur inhomogène de spin. L’état peut donc s’écrire pourt > TStokes :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πni∆TStokese−j2πδspini (t−TStokes)|g1g2..sigi+1..gNi (1.21) Afin de compenser cette inhomogénéité de la transition spin, une impulsion π sur la transition |gi ↔ |si est appliquée au temps TRF. Enfin, une impulsion de lecture (R) est appliquée à l’instant TR afin de transférer l’excitation unique depuis |gi dans

|ei. Pour t > TR, on a donc :

|Φi =

N

X

i=1

e−j2πni∆TStokese−j2πni∆(t−TR)e−j2πδispin[TRF−TStokes−(TR−TRF)]|s1s2..eisi+1..sNi

=

N

X

i=1

e−j2πni∆(TStokes+t−TR)e−j2πδispin(2TRF−TStokes−TR)|s1s2..eisi+1..sNi (1.22) Un écho de photon (appelé photon anti-Stokes) est donc émit à la fréquence feg au

(24)

Temps

TS+1/∆ W R

Stokes Anti-Stokes W

R

Stokes Anti-Stokes

Cristal

W R

RF

Stokes Anti-Stokes

TS (a)

(b)

(c)

TRF

t=0 1/Δ

𝑠

𝑔 𝑒

TR

Figure 1.5 – (a)schéma montrant la direction des impulsions d’écriture (W) et de lecture (R), ainsi que des photons Stokes et anti-Stokes. (b) Diagramme en temps du schéma AFC- DLCZ. (c) Diagramme en énergie du schéma

tempst =TAS :

TAS =TR+ 1/∆−TStokes (1.23)

De plus la largeur inhomogène de spin est donc a priori compensée si (détails sur le cas réel en appendice) :

TRF = TR+TS

2 (1.24)

On peut dors et déjà constater que le temps d’émission du photon Stokes et celui de l’anti-Stokes sont corrélés (cf. équation 1.23). De plus, selon l’équation 1.23, à plu- sieurs modes temporels de Stokes distincts correspondent plusieurs modes anti-Stokes distincts. Cela offre la possibilité, pour le protocole AFC-DLCZ, de faire du stockage multimode temporel, ce qui n’est pas le cas pour le protocole DLCZ standard.

Enfin, pour que le photon anti-Stokes soit émit, l’accord de phase spatial doit être respecté. Or, comme on peut le voir sur la figure 1.5, on a :

~kW = −~kR (1.25)

~kAS = −~kS (1.26)

Le désaccord de vecteur d’onde s’exprime donc :

∆k~ =~kW~kStokes−2~kRF +~kR~kAS =−2~kRF (1.27)

(25)

Afin que ce désaccord de vecteur d’onde n’affecte pas l’efficacité, il faut vérifier que :

|∆k|L~ 2π (1.28)

avec L la longueur du cristal. Dans notre cas, L vaut 1 cm, et |∆k|~ = ωRF/c = 2π·34.5·106/(3·108)'0.72. Donc :

|∆k|L~ '7.2·10−3 2π (1.29)

On peut constater que l’excitation initiale (W) est générée sur une transition dif- férente de la transition d’émission (Stokes et anti-Stokes). Le profil de la distribution spatiale de l’onde de spin générée est ainsi différent du profil d’absorption spatial du cristal lors de l’émission du photon anti-Stokes. Ceci est donc à considérer pour le cal- cul de l’efficacité. Si l’on définit par ˜d1 la profondeur optique moyenne sur la transtion

|gi ↔ |eiet par ˜d2 la profondeur optique moyenne du cristal sur la transition|si ↔ |ei, on obtient après calcul, la formule d’efficacité suivante :

ηDLCZ = 4 d˜1d˜2

1−ed˜1(1−e

d˜1+d˜2 2

d˜1+ ˜d2

)2sinc2(π

FTe−2TS/T2spin (1.30) en gardant les définitions de la partie 1.2.

Cette expression se simplifie fortement si ˜d1 1. Cette condition est dans notre cas plutôt vérifiée (cf section 3.5). L’efficacité peut finalement s’exprimer :

ηDLCZ = 4

d˜2(1−e

d˜2

2 )2sinc2(π

FTe−2TS/T2spin (1.31) La limite fondamentale théorique de cette dernière expression est de ηDLCZlim '82%

pour ˜d2 '2.6.

Il est important de remarquer que l’émission d’un photon Stokes est temporellement séparée de l’application de l’impulsion d’écriture. Il en est de même d’ailleurs entre le photon anti-Stokes et l’impulsion de lecture. Par conséquent, étant donné que les temps TStokes et TAS sont corrélés (cf. équation 1.24), le protocole AFC-DLCZ est capable de stocker plusieurs modes temporels, tout comme l’AFC. La capacité multimode est d’ailleurs la même que pour le protocole AFC (cf. équation 1.8). Ceci est un avantage certain comparé au protocole DLCZ "standard" qui ne permet pas distinguer différents modes temporels lors de la lecture. Or, La capacité multimode est essentielle à la réalisation pratique d’un répéteur quantique [5]. En conséquence, le protocole AFC- DLCZ est donc non seulement une excellente alternative à la réalisation d’une mémoire de type DLCZ dans les cristaux dopés terres rares, mais il présente également cette capacité multimode qui pourrait conduire à la réalisation d’un répéteur quantique.

(26)

1.3 Les autres protocoles utilisés dans les terres rares

Controlled reversible inhomogeneous broadening (CRIB)

Le protocole CRIB a été proposé en 2006 [6, 7, 8]. Etant donné que les cristaux dopés aux ions terres rares présentent une largeur inhomogène, une excitation délocalisée dans l’ensemble atomique subit un déphasage important. Une idée est donc d’inverser l’évolution de la phase afin de voir les atomes revenir en phase. La première étape du protocole CRIB est de manipuler les atomes afin d’obtenir une ligne d’absorption étroite de largeur γ. Cette étape peut être réalisée par pompage optique. Cette ligne d’absorption est ensuite élargie de manière contrôlée par effet Stark et l’application d’un champ électrique externe variant selon la position le long de la direction de propagation.

L’élargissement spectrale Γ est choisi en fonction de la largeur spectrale du photon à stocker. L’absorption est ainsi diminuée d’un facteur γ/Γ. Le photon peut maintenant être absorbé dans cette raie élargie. L’état de cette excitation après un temps τ est donc :

|Φi=

N

X

i=1

e−jδωstark(zi|g1g2..eigi+1..gNi (1.32) avec δωstark(zi) le décalage en fréquence de l’atome i dû à l’effet Stark, N le nombre d’ions impliqués dans l’excitation collective,|giil’état fondamental de l’atome iet |eii son état excité. Les phases spatiales ont été volontairement omises.

Le champ électrique est ensuite inversé, l’effet Stark généré est donc lui aussi inversé (δωstark(zi) → −δωstark(zi). Un temps t après l’inversion du champ électrique, l’état collectif devient :

|Φi=

N

X

i=1

e−jδωstark(zie+jδωstark(zi)t|g1g2..eigi+1..gNi (1.33) Au temps t = τ, les atomes sont de nouveau en phase. Le moment dipolaire ma- croscopique ainsi créé génère un écho dans la direction de propagation. Une paires d’impulsionπ sur une autre transition peut également être insérée afin de transformer la cohérence optique en une cohérence de spin de temps de vie et de cohérence plus long.

Ce protocole peut être sujet à la ré-absorption. Une version de CRIB appelé GEM ("gradient echo memory") permet de s’affranchir de ce problème et ainsi d’atteindre en théorie une efficacité de 100%. En deux mots, avec ce protocole, on s’assure que les atomes situés à une position donnée dans le cristal présentent tous la même ligne d’absorption centrée à une fréquence particulière, évitant ainsi toute ré-absorption lors de la propagation dans le cristal. Dans sa version à deux niveaux, le protocole GEM a démontré 69 % d’efficacité dans Pr3+:Y2SiO5 au niveau du photon unique [16]. Une

(27)

efficacité de 87 % a par ailleurs été obtenue pour un stockage dans l’état de spin dans un gaz chaud avec un protocole GEM nécessitant un système Λ [31].Le temps de stockage est limité uniquement par le temps de cohérence de spin qui peut être très long.

Néanmoins, la profondeur optique effective du cristal est inversement proportionnelle à la bande passante de la mémoire. Or pour stocker un maximum de modes temporels, il faut diminuer la durée d’un mode au maximum, et donc augmenter la bande passante de la mémoire au maximum. Le nombre de modes que l’on peut stocker est donc inversement proportionnel à la profondeur optique disponible.

Lumière stoppée par transparence induite électromagnétique- ment (EIT)

Le protocole de lumière stoppée basé sur l’ EIT [32] est l’un des protocoles les plus utilisée pour la réalisation de mémoires quantiques, notamment dans des ensembles de Rb ou Cs. Un système Λ est nécessaire pour sa réalisation. Un champ de contrôle appliqué sur une des transitions optique provoque une fenêtre de transparence au centre du spectre d’absorption pour l’autre transition. La propagation dans cette fenêtre de transparence génère un effet de lumière lente et donc la compression du paquet d’ondes.

Une fois la totalité du paquet d’ondes comprimé à l’intérieur du milieu, le champ de contrôle est éteint de manière adiabatique et le paquet d’ondes est ainsi stocké dans la transition de spin du système Λ [32]. Afin de ré-émettre le paquet d’onde, le champs de contrôle est allumé de nouveau de manière adiabatique.

Etant donné que le stockage est réalisé sur une transition de spin, des temps de stockage longs [13, 14] peuvent être obtenus. Une efficacité de 100 % est possible théoriquement, la limitation principale étant la profondeur optique finie du système.

De plus, le nombre de de modes pouvant être stockés augmente comme la racine carrée de la profondeur optique du milieu, ce qui est un inconvénient comparé aux protocoles AFC et CRIB.

Revival of the silenced echo (ROSE)

Le protocole ROSE a été proposé et expérimenté pour la première fois en 2011 par Damonet al.[33]. C’est en réalité une adaptation du protocole d’écho de photon à deux impulsions. Si ce dernier peut être considéré comme un protocole de mémoire pour des impulsions classiques, il n’est en revanche fondamentalement pas possible de réaliser le stockage d’un photon unique en utilisant ce protocole dû au bruit de fluorescence trop élevé qu’il génère [34, 35, 36]. Dans le protocole ROSE, le système requis est aussi simple que pour l’écho de photons à deux impulsions, un système à deux niveaux. Une fois l’impulsion à stocker absorbée par le système, une impulsion π optique vient inverser la population après un temps τ. Pour ROSE, cette impulsion est envoyée dans le sens

(28)

contraire de celui de l’impulsion d’entrée alors que pour l’écho à deux impulsions elle est envoyée dans le même sens. Ainsi, un tempsτ après l’impulsion d’inversion, aucun écho ne sera produit contrairement au cas de l’écho à deux impulsions. Ceci est dû au fait qu’il n’y a pas d’accord de phase spatial dans ce cas. Finalement, un temps 2τ après la première impulsionπ, une seconde impulsion est envoyée toujours dans le sens contraire.

Les atomes reviennent alors en phase après au temps 4τ, et comme il y maintenant un accord de phase spatial, un écho est émis. Ce que l’on a gagné par rapport à l’écho à deux impulsions est que l’état excité n’est que faiblement peuplé au moment de l’écho.

Le bruit de fluorescence en est ainsi fortement réduit. Récemment, le stockage de 14 photons a été réalisé dans Tm3+:YAG avec une efficacité de 12 % et un signal sur bruit de 1 [37]. Une efficacité de 42 % a par ailleurs été obtenue dans Er3+:Y2SiO5 pour le stockage d’impulsions classiques [38]. Néanmoins, ce protocole souffre toujours d’une limitation fondamentale au niveau du bruit. En effet, après l’application de la première impulsionπ, la population décline de l’état excité vers l’état fondamental avec un temps T1 (temps de vie de l’état excité) et vient ainsi polluer l’excitation faible. L’application de la seconde impulsion π vient ensuite exciter cette population parasite accumulée pendant un temps 2τ. Afin de ne pas générer trop de bruit de fluorescence, il faut donc respecter la condition 2τ << T1, ce qui limite le temps de stockage possible pour un stockage au niveau quantique. De plus, le temps de cohérence optique T2 génère un déclin de l’efficacité en fonction du temps de stockage. Ce mêmeT2 est lui même limité par 2T1. Ce protocole tel qu’il a été expérimenté dans [37, 38] est fondamentalement limité à une efficacité de 54 %. Une autre version incluant une ré-émission dans le sens inverse est proposée dans [37] et permet de dépasser cette limite d’efficacité jusqu’à une efficacité théorique de 100% pour une profondeur optique infinie. Tout comme l’AFC, Le nombre de modes pouvant être stockés n’est pas limité par la profondeur optique, mais uniquement par la bande passante des impulsionsπ. Pour une profondeur optique disponibled, l’efficacité du protocole s’exprime :

ηROSE =d2e−de−8Tτ2 (1.34) Pour sa version avec une ré-émission en sens inverse, l’efficacité s’exprime alors :

ηROSE = (1−e−d)2e−8Tτ2 (1.35)

Rephased amplified spontaneous emission

Le protocole RASE a été proposé par Ledinghamet al.en 2010 [36]. Il ne s’agit pas d’un protocole de mémoire universelle, capable de stocker un photon d’entrée pour le ré-émettre mais d’un protocole capable de ré-émettre une excitation atomique unique dont la création à été annoncée par un photon. Ce protocole est en réalité du même

(29)

type que le protocole DLCZ proposé par Duan et al. en 2001, et prend tout son sens pour la réalisation d’un répéteur quantique.

Le protocole original RASE ne requière qu’un système à deux niveaux. Le principe est de préparer initialement tous les atomes dans l’état excité à l’aide d’une impulsion π. Un détecteur de photon unique permet de détecter l’émission spontanée amplifiée de photons provenant de l’ensemble atomique dans un mode spatial qui est défini par la position du détecteur et de l’optique en amont. La détection d’un photon annonce que l’état de base est peuplé par une excitation au minimum. Si l’on néglige la génération de 2 photons et plus par l’émission spontanée amplifiée, l’état collectif un tempsτ après la détection est :

|Φi=

N

X

i=1

e−jδωiτ|e1e2..giei+1..eNi (1.36) avecδωi la position en fréquence de l’atomeidans la largeur inhomogène,N le nombre d’ions impliqués dans l’état collectif, |gii l’état fondamental de l’atome i et |eii son état excité.

La population est ensuite inversée à l’aide d’une seconde impulsion π afin de per- mettre aux atomes de revenir en phase. Un temps t après cette seconde impulsion, l’état collectif peut s’écrire :

|Φi=

N

X

i=1

ejδωi(t−τ)|g1g2..eigi+1..gNi (1.37) Un écho sera donc produit un instant τ après la seconde impulsion. Le problème majeur de ce protocole est que afin d’obtenir un photon unique de bonne pureté dans l’émission spontanée amplifiée, la profondeur optique doit être suffisamment faible. Or, afin d’obtenir une bonne efficacité de ré-émission, la profondeur optique doit être la plus grande possible. Des corrélations quantiques entre l’émission spontanée amplifiée et son écho ont été observées pour des profondeurs optiques faibles par Ledingham et al. en mai 2012 [39]. Une version à 4 niveaux proposant un meilleur compromis entre pureté et efficacité à été proposée et expérimentée par Beavanet al.[40]. Une évolution du protocole utilisant un cristal placé dans une cavité a été proposée et récemment analysé [40, 41]. En utilisant cette cavité, il n’y aurait donc plus de compromis à faire entre la pureté des photons et l’efficacité du protocole. Le protocole RASE permet d’effectuer des temps de stockage longs dans l’état de spin pour sa version à 4 niveaux.

Une efficacité de 100% pourrait être obtenue grâce à l’utilisation de la cavité. Tout comme le protocole ROSE, l’absorption (donc l’efficacité) de la mémoire ne dépend pas de sa bande passante et donc ne dépend pas non plus du nombre de modes que l’on stocke. Pour résumer, dans sa version la plus complexe avec la cavité, le RASE est une très bonne adaptation du protocole DLCZ pour les cristaux dopés terres rares. La réalisation expérimentale reste assez complexe, elle n’a donc pas encore été réalisée.

(30)

Chapitre 2

Préparation d’un AFC dans Eu 3+ :Y 2 SiO 5

2.1 Eu

3+

:Y

2

SiO

5

L’Europium existe naturellement sous deux formes : 151Eu et 153Eu. L’abondance naturelle de chacun de ces isotopes est d’environ 50%. Ainsi, un cristal naturelle- ment dopé à l’Europium sera un mélange équilibré de ces deux isotopes. Les pre- mières mesures spectroscopiques sur ces cristaux ont montré des propriétés excessive- ment intéressantes, notamment en terme de temps de vie et de temps de cohérence [42, 43, 44, 45, 46]. Des mesures ont ensuite pu être effectuées sur des cristaux isotopi- quement purs, c’est à dire dopés par uniquement l’un des deux isotopes d’Europium.

Ces cristaux sont bien plus coûteux que les cristaux naturellement dopés mais ils pré- sentent bien des avantages. En effet, lorsque que l’on étudie un isotope dans un cristal dopé naturellement, la concentration du dopant que l’on étudie est la moitié de la concentration totale en dopants. Or, un dopage élevé est une source de dé-cohérence.

De plus, un cristal présentera une largeur inhomogène spectrale d’autant plus large que son dopage est important. Il est possible d’augmenter la profondeur optique en augmentant le dopage du cristal jusqu’au point où seul la largeur spectrale augmente sans augmenter la profondeur optique. Optimiser la profondeur optique d’un cristal fait l’objet de procédés de croissance complexes qui dépassent notre domaine de compé- tences. Un cristal isotopiquement pur permet donc d’obtenir des profondeurs optiques plus importantes pour un même dopage, tout en conservant des propriétés de cohérence similaires.

La profondeur optique est un point important de la croissance des cristaux dopés à l’Europium car contrairement à d’autres ions de terres rares (Pr3+, Nd3+) les forces de transitions optiques dans Eu3+ sont très faibles. Donc, un dopage assez élevé est nécessaire pour obtenir une absorption raisonnable, ce qui motive très largement la

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