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Génération d’échos AFC

1.2 Le peigne de fréquence atomique (AFC)

1.2.1 Génération d’échos AFC

Le protocole AFC (atomic frequency comb) ou peigne de fréquence atomique est le protocole que j’ai étudié pour réaliser une mémoire dans Eu3+:Y2SiO5. Il a été proposé par Afzelius et al. en 2009 [20] et réalisé expérimentalement pour la première fois en 2008, au niveau du photon unique [17]. Ce protocole a été développé pour des systèmes présentant naturellement une largeur inhomogène, comme par exemple les cristaux dopés aux ions terres rares.

A partir d’une absorption plate en fréquence (ou localement plate) dans la largeur inhomogène d’un cristal dopé terres-rares, on peut réaliser un profil spectral en forme de peigne comme représenté sur la figure 1.1. C’est ce que l’on appelle un AFC. En pratique, on peut préparer un AFC par pompage optique sur une largeur spectrale voulue qui détermine la bande passante (BW) de la mémoire. Ce peigne est donc constitué de plusieurs dents distribuées de manière périodique dans la bande passante de la mémoire. On notera ∆ la période de l’AFC et Ndents son nombre de dents. Le détail de la préparation d’un AFC dans un cristal est détaillé dans la section 2.3. Si l’on considère le cas limite où chaque dent de l’AFC est infiniment fine en fréquence, la position relative de l’atomei dans la largeur inhomogène s’écrit :

δωi = 2πni∆ (1.1)

avecniun entier désignant le numéro de la dent de l’ioni. L’état de l’ensemble atomique un instantt après l’absorption d’un photon s’écrit :

|Φi=

N

X

i=1

e−j2πni∆t|g1g2..eigi+1..gNi (1.2) avec N le nombre d’ions impliqués dans l’état collectif, |gii l’état fondamental de l’atomei et|eiison état excité.

Ainsi, un instant t=1/∆ après l’absorption du photon, la phase relative de l’ion i s’écrit

φi = 2πni∆1

∆ = 2πni (1.3)

Les atomes sont donc de nouveau en phase, un écho AFC est alors émit à l’instant t=1/∆ dans la direction de propagation respectant ainsi la condition d’accord de phase spatialk~ink~out =~0. L’efficacité de la mémoire est régit par ˜d, la profondeur optique moyennée sur la BW :

ηAF C = ˜d2ed˜ (1.4)

Γ Δ Profondeur optique

δ BW

d

Δ

Figure 1.1 – Profil spectral d’un AFC en forme de dents carrées, de profondeur optique maximaled, de périodicité ∆, de largeur de dent Γ et de bande passanteBW.

IN

OUT

Temps 1/∆

Figure 1.2 – Protocole AFC : Un écho est émis un temps 1/∆ après l’entrée.

Dans le cas réel, il n’est pas possible d’obtenir des dents infiniment fines. Celles-ci ont donc un profil spectral ainsi qu’une largeur que l’on notera Γ. On définit la finesse de l’AFC F par le rapport de la périodicité du peigne sur la largeur d’une dent : F = ∆/Γ. La profondeur optique moyennée sur la BW s’exprime, pour des dents carrés : ˜d =d/F. Le photon d’entrée dont la largeur spectrale couvre plusieurs dents, est absorbé selon cette valeur moyennée mais n’a pas la résolution pour voir la structure de peigne. La largeur de la dent va causer un déphasage supplémentaire qui ne sera pas compensé par l’AFC. En effet, l’AFC permet aux différentes dents de revenir en phase les unes par rapport aux autres mais ne compensent pas le déphasage entre les atomes d’une même dent. Bonarota et al. ont démontré que le profil carré est le profil spectral optimal de dent [21] pour un d donné. Le déphasage créé par une largeur de dent carré provoque une baisse d’efficacité d’un facteur sinc2(π/F), carré de la transformée de Fourier inverse d’une dent au temps t=1/∆. L’efficacité pour un AFC constitué de dents carrés s’écrit finalement :

ηAF C = ˜d2ed˜sinc2(π

F) (1.5)

Même dans le cas d’une très grande profondeur optique disponible, les formules 1.4 et 1.5 présentent une limite théorique pour l’efficacité de 54 %, à cause de la

ré-absorption de l’écho dans le cristal. Une profondeur optique grande augmente l’absorp-tion et la ré-émission du photon mais augmente également la ré-absorpl’absorp-tion de l’écho dans le milieu. D’autre part, une grande finesse F permet de limiter le déphasage et ainsi d’augmenter l’efficacité. Pour une profondeur optique d très élevée, il convient donc d’augmenter la finesse afin de diminuer la ré-absorption et de limiter le dépha-sage. Néanmoins, si ˜d diminue, l’absorption et la ré-émission du photon diminue. Pour une profondeur optique disponible donnée d, il existe donc une finesse optimum Fopt qui s’exprime [21] :

Fopt = π

arctan (2π/d) (1.6)

D’autre part, le temps de stockage du protocole est limité par le temps de cohé-rence T2 de la transition optique |gi ↔ |ei. La bande passante pouvant être choisie arbitrairement (modulo les limites fondamentales du système atomique), augmenter le nombre de modes à stocker n’affecte pas l’efficacité. En effet, la durée minimale d’un mode est grosso-modo donnée par l’inverse de la bande passanteτm = 1/BW. On peut remarquer que la bande passante s’exprime en fonction de ∆ et deNdents :

BW =Ndents∆ (1.7)

Or le nombre de modes que l’on peut stocker pour un temps de stockage 1/∆ est deNmodes = 1/(τm∆). La formule 1.7 devient donc :

Nmodes = BW

∆ =Ndents (1.8)

Le nombre de modes pouvant être stockés est donc donné par le nombre de dents total de l’AFC.

Ce protocole est donc très bien adapté aux expériences de stockage dans les cris-taux terres-rares. Le stockage de 64 modes utilisant l’AFC a été démontré en 2010 [22]. D’autre part, l’émission de l’écho ne requière aucune manipulation après l’ab-sorption du photon. Il s’agit là d’un avantage certain car aucune source de bruit ne viendra en principe polluer l’écho AFC. De ce fait, la démonstration d’une intrication photon-cristal [19] ou même cristal-cristal [23] a pu être réalisée à l’aide d’une source de paires de photons. Néanmoins, la ré-émission de l’écho AFC étant prédéterminée depuis la création du peigne, l’AFC ne peut émettre l’écho sur demande. Un protocole de mémoire quantique sur demande basé sur l’AFC est présenté dans la section 1.2.2.

Couplage à une cavité

L’absorption de certains cristaux terres-rares est particulièrement faible. C’est no-tamment le cas des cristaux dopés Europium, les dipôles des transitions optiques perti-nentes étant très faibles. Afin de résoudre ce problème d’absorption faible, le cristal peut

être placé dans une cavité bien choisie pour que l’absorption du système cristal-cavité atteigne 100% [24, 25]. Le principe est de placer le cristal dans une cavité asymétrique constitué d’un miroir de réflectivitéR2=100% et un miroir de réflectivitéR1 adaptée à l’absorption du cristal. Pour un cristal de profondeur optique moyenne ˜d, l’adaptation est réalisée lorsque la transmission dans le cristal lors d’un cycle de cavité est égale à la réflectivité du miroir, soit R1 = exp(−2 ˜d) [25]. En d’autres termes, pour chaque tour de cavité, la perte due au miroir R1 doit être égale aux pertes générées par l’absorp-tion du cristal, tout comme une cavité Fabry-Pérot classique où les pertes sur chacun des miroirs sont équilibrées. L’efficacité résultante du système cristal-cavité est donc uniquement donnée par la finesse finie de l’AFC [24, 25] :

ηcav = sinc2(π

F) (1.9)

en considérant qu’il n’y a pas de perte intra-cavité.

Dans l’article correspondant de cette thèse (appendice B page 91), nous avons fait une analyse de l’effet causé par une perte intra-cavité par tour de cavité. Pour une perted˜1, l’efficacité devient [26] :

ηcav = sinc2(π/F)

(1 + 4 ˜d)4 '(1−

d˜) sinc2(π/F) (1.10) Il faut donc réduire au maximum le rapport ˜

d afin de ne pas dégrader l’efficacité par les pertes intra-cavité. Pour une profondeur optique d disponible, il faut en fait trouver un bon compromis entre une finesse élevée pour limiter le déphasage et un ˜d important pour combattre les pertes.

Nous avons réalisé expérimentalement ce système cristal-cavité. Les résultats obte-nus sont détaillés dans la partie 3.1 et dans l’article correspondant page 91.

1.2.2 Stockage AFC dans l’état de spin : Une mémoire sur