• Aucun résultat trouvé

Oncologie : Article pp.37-39 du Vol.9 n°1 (2015)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Oncologie : Article pp.37-39 du Vol.9 n°1 (2015)"

Copied!
3
0
0

Texte intégral

(1)

ARTICLE ORIGINAL /ORIGINAL ARTICLE DOSSIER

Un partenariat original entre psychologues pour le soutien des soignants en oncologie

An Innovative Partnership between Psychologists to Support the Nursing Staff in Oncology Departments

N. Jacquot-Aug · M.C. Berthomier

Reçu le 7 janvier 2015 ; accepté le 15 février 2015

© Lavoisier SAS 2015

RésuméAu sein de notre hôpital, nous avons initié un par- tenariat entre psychologues du travail et d’équipe mobile de soins palliatifs. Cet article témoigne du travail élaboré pour la prévention de l’épuisement professionnel et le soutien des soignants en oncologie. À partir de deux situations cliniques, nous abordons l’apport et les limites de ce partenariat tant dans la prise en charge individuelle que lors de groupes d’échanges. Ce travail commun de coconstruction nous per- met de développer chacune nos missions spécifiques, tout en inventant de nouvelles ressources.

Mots clésÉpuisement professionnel · Soutien · Groupe · Souffrance des soignants

AbstractWe initiated a partnership within our hospital bet- ween occupational psychologists and palliative-care mobile- unit psychologists. This article sets out the systems we put in place in the context of this partnership, to prevent staff bur- nout and to support oncology practitioners. Two simulated clinical situations were used to identify the benefits and the limits of this partnership, both through individual activi- ties and group sessions. This work was one of collaboration and co-construction which allowed the authors to each deve- lop their own missions while creating new resources and techniques.

KeywordsBurnout · Support · Group · Suffering of caregivers

Au fil des années de partage s’est créé un lien particulier entre psychologue du travail et psychologue d’équipe mobile d’accompagnement et de soins palliatifs (EMA). Pro- gressivement, une réflexion s’est tricotée permettant de

construire des interventions communes et/ou complémen- taires auprès des soignants.

Quoique de missions originellement différentes, nous nous rejoignons dans notre rôle de tiers auprès des profes- sionnels. Le psychologue du travail s’intéresse aux inter- actions et aux transactions entre l’individu, son travail et son environnement ; ilœuvre pour la qualité de vie au travail des professionnels. Le psychologue d’équipe mobile de soins palliatifs est attentif aux soignants, dans les répercus- sions des accompagnements en soins palliatifs, au cœur du lien soignant–soigné.

Notre partenariat s’est initié de manière graduelle dans des échanges répétés qui nous ont amené à réfléchir à des interventions pour renforcer le soutien aux soignants. Pour illustrer ces propos, nous vous présentons deux interventions communes.

En service d’oncologie

Au cours de l’une des réunions mensuelles entre le service et l’EMA, une soignante (que nous nommerons Caroline) avait alerté l’attention de la psychologue de l’EMA : elle se dési- gnait comme «maltraitante» vis-à-vis de certains patients.

Nous avions pu, en équipe, échanger sur les difficultés de prise en charge et les difficultés de fonctionnement du ser- vice ; cette soignante restait persuadée de «ne pas faire son travail correctement». Quelques jours plus tard, ce sont des transmissions de Caroline dans le dossier d’un patient qui interpellent la psychologue de l’EMA : Caroline y écrit son impossibilité à accompagner une patiente «trop exigeante et insupportable». Quelques semaines plus tard, la psycholo- gue de l’EMA recroise enfin Caroline qui lui exprime sa souffrance «je ne peux pas faire correctement mon travail dans ces conditions…», « côtoyer la mort au quotidien, j’ai l’impression que ça me bousille et ça bousille ma famille».

Elle évoque alors un changement de service.

N. Jacquot-Aug (*) · M.C. Berthomier

Centre hospitalier intercommunal de Meulan-Les-Mureaux, 1, rue du Fort, F-78250 Meulan-en-Yvelines, France e-mail : nathalie.jacquot@chimm.fr

Psycho-Oncol. (2015) 9:37-39 DOI 10.1007/s11839-015-0506-6

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-pson.revuesonline.com

(2)

Quel rôle la psychologue de l’EMA peut jouer dans ce contexte où soins palliatifs et souffrance au travail sont si intimement liés ? La possibilité de faire appel à la psycho- logue du travail est évoquée au cours de la conversation, ce dont Caroline se saisit.

Caroline contacte la psychologue du travail pour évoquer, dit-elle, un projet de changement de service et l’hésitation à confirmer ce changement. Bien qu’elle arrive le sourire aux lèvres, en ponctuant son récit d’éclats de rire, Caroline appa- raît très vite comme épuisée et en grande souffrance. Elle reconnaît être à bout et demande explicitement de l’aide. Elle est tiraillée entre son désir de rester auprès de ses collègues et celui de partir du service. Elle explique clairement ne plus pouvoir continuer, ne plus supporter de soigner et d’accom- pagner les patients. Au fil de l’entretien, elle évoque des pensées suicidaires. Face à son appel au secours très expli- cite, la psychologue du travail lui propose de rencontrer en urgence un médecin.

Caroline est arrêtée quelques jours puis prend la décision de quitter le service d’oncologie, avec l’appui de l’encadre- ment et de la direction pour faciliter les démarches.

Au-delà de l’urgence passée qui consistait à retirer la professionnelle de la situation contribuant à sa souffrance, d’autres aspects sont à considérer : l’accompagnement de la professionnelle doit se poursuivre (le changement de poste n’est pas une réponse en soi suffisante). Alertée par cette professionnelle et deux autres du service qui demandent à voir la psychologue du travail, cette dernière s’interroge sur le travail des aides-soignantes. Elle envisage donc une réunion et contacte la cadre du service et le médecin respon- sable de l’unité, qu’elle rencontre.

Après quelques semaines, une date est posée pour rencon- trer les aides-soignantes. Lors de cet échange, peu de profes- sionnels sont présents. Le rapport aux patients n’est pas abordé, la plainte tourne autour du statut et du temps de tra- vail. Une inquiétude s’exprime concernant les réorganisa- tions à venir dans le secteur (déménagement, service scindé).

Serait-il possible de transformer cette plainte (et éviter l’écueil de « panser » les souffrances exprimées) en un vrai processus de réélaboration de l’activité de travail par le col- lectif ? Une demande du service pourrait-elle alors émerger notamment en lien avec les réorganisations à venir ? Il nous paraîtrait essentiel de pouvoir réfléchir autour des restructu- rations à venir, car l’impact que celles-ci ont sur le fonction- nement d’une équipe, sur la relation aux patients et à leurs proches et sur la fonction-soin est manifeste [1].

Le psychologue du travail reste attentif au travail et sur- tout aux conditions dans lesquelles il se réalise. Le travail ne s’effectue pas par une somme d’individus, mais par un groupe qui s’inscrit au cœur d’un service, d’un pôle, d’une structure ayant une histoire, des valeurs fondatrices et une organisation donnant vie à ses valeurs. Considérer le travail dans son aspect collectif permet d’envisager ce passage de

l’individuel au collectif. Tout processus de changement passe à la fois par une modification des structures « extérieu- res » et par un travail effectué par les personnes membres de l’organisation sur leurs propres représentations et sur les valeurs dont elles sont porteuses [2].

Caroline a été le « soignant-symptôme », révélateur de la souffrance d’une équipe, dans ses (dys)fonctionnements.

Elle a été le signal d’alarme qui a permis ce passage de relais entre psychologues, afin de prendre en compte la globalité de la situation, sans stigmatiser un professionnel.

En SSR

En service de soins de suite et réadaptation à orientation oncologique et soins palliatifs, la cadre du service a inter- pelé l’EMA : au cours des évaluations annuelles, les soi- gnants de nuit lui ont évoqué des difficultés liées aux accompagnements des patients en phase palliative s’entre- mêlant avec des difficultés liées au fonctionnement du service la nuit.

Cette demande relevait-elle de l’EMA ou de l’institution- nel, et donc de la psychologue du travail ?

Après discussion avec la psychologue du travail, nous avons proposé aux équipes de nuit une rencontre commune (psy EMA, psy du travail) pour échanger sur leur(s) demande(s). Nous avons rencontré chaque binôme pendant une heure : un binôme exprime le souhait d’avoir un espace de partage avec l’autre équipe de nuit.

Nous décidons alors de proposer un dispositif qui réuni- rait ces deux équipes à fréquence régulière. Nous faisons l’hypothèse que cela pourrait être soutenant de créer du lien et participerait à une forme de prévention. Nous pensons et écrivons les modalités d’un dispositif que nous communi- quons aux cadres et aux professionnels. L’objectif étant d’ouvrir un espace d’échanges pour les soignants de nuit, dans une démarche multidimensionnelle « portée » par deux protagonistes.

Finalement, lors de la première rencontre qui était prévue pour les deux équipes, une équipe seulement était présente.

Par la suite, aucune rencontre n’a pu être possible faute de professionnels présents.

La demande émanait de la cadre du service, et nous étions animées par l’idée que les échanges entre professionnels pouvaient prévenir l’épuisement. Il semblerait que nous nous soyons laissé porter par notre désir. Peut-être nous aurait-il fallu prendre le temps d’explorer davantage les demandes ? Peut-être n’était-ce pas le « bon » moment ou le « bon » dispositif ? Quelles représentations et expériences les professionnels soignants ont-ils des espaces de parole et d’échanges [3] ?

Autant de pistes qui nous restent à réfléchir et à dessiner…

38 Psycho-Oncol. (2015) 9:37-39

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-pson.revuesonline.com

(3)

Notre partenariat a ouvert des pistes afin de :

repérer plus tôt l’épuisement professionnel et la souf- france au travail par la présence quotidienne de la psycho- logue de l’EMA dans les services ;

favoriser le relais avec la psychologue du travail lorsque la psychologue de l’EMA repère des problématiques de fonctionnement dans un service ;

permettre aux soignants de solliciter les dispositifs pro- posés et conduits par les « psy » au sein de l’institu- tion (et identifier ce temps de parole comme temps de travail) ;

développer un travail de coopération et d’élaboration par- ticipant à la prévention des risques professionnels avec les cadres ;

participer au décloisonnement, notamment dans les rela- tions entre psychologues au sein de l’institution.

Au-delà de l’objectif premier qui reste le soutien aux soi- gnants, ce partenariat en perpétuelle coconstruction nous permet de maintenir une énergie nécessaire afin de ne pas nous épuiser dans les difficultés rencontrées, dans une res- source partagée.

Liens d’intérêts :les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Références

1. Gaillard G (1999) Restructurations, réorganisations dans le secteur hospitalier : mise en crise des soignants. Objectifs soins 77:22-24 2. Rouchy JC, Soula Desroche M (2004) Institution et changement.

Érès, Toulouse

3. Kessar Z (2009) D’une commande de formation à une démarche dintervention en milieu hospitalier. Connexions 92:118

Psycho-Oncol. (2015) 9:37-39 39

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-pson.revuesonline.com

Références

Documents relatifs

On entend là la souffrance au travail : sans mettre en ques- tion la légitimité de ces plaintes et — encore moins la véra- cité de leur contenu — nous nous devons de questionner

Notre hypothèse est que le PSE est protecteur du burn-out : le soi- gnant qui partage son vécu émotionnel avec ses proches serait moins à risque de burn-out que celui qui garde

Cette analyse révèle que le sens que les médecins donnent à l ’ annonce et à leur rôle est déterminant dans leur vécu émotionnel de l ’ annonce.. Ces résultats amènent

Et surtout, le dispositif a convaincu la direction du CGFL de pérenniser un groupe théâtre comme moyen de prévention de l ’ épuisement professionnel, avec prise en compte du

Les résultats nous ont montré que les soignants consomment beaucoup de café et certains du thé, tous deux bien connus pour leurs vertus magiques et sacrées.. Le café apporterait l

Ainsi, ce groupe de parole s ’ inscrit dans un cadre plus global, notamment celui d ’ une pratique de psy- chologue dont la mission principale est précisément insti- tutionnelle

Conclusions : The findings of this study provide data that will help in identifying gaps in the knowledge regarding the signs and symptoms of cancer and how it is linked to

Jacob Moreno a toute sa place comme fondateur de la psychothérapie de groupe et de la sociométrie (relations d’affinité qui se développent entre les membres du groupe) ; sa