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P armi les vivants de la terre, les plus actifs à porter la vie toujours plus loin sont les végétaux immobiles. Massacrés, brûlés, sciés, labourés, il

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Academic year: 2022

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P armi les vivants de la terre, les plus

actifs à porter la vie toujours plus loin sont les végétaux immobiles. Massacrés, brûlés, sciés, labourés, ils reviennent un jour réoccuper les villes détruites, effacer les civilisations écroulées, éten- dre de nouveau sous la lumière leur grand manteau obstinément, inlassa- blement raccommodé.

Parce que nous rencontrons tou- jours à la même place l'olivier cente- naire, nous le voyons figé comme un rocher, mais de quelques centimètres par an, depuis deux ou trois siècles, peut-être plus, avec des nœuds et des fractures, il se hisse vers le bleu du ciel.

Et les noyaux de ses olives, mangées par des migrateurs, ont germé de l'autre côté de la mer.

Les végétaux voyagent sans se dépla- cer, ce sont leurs graines qui volent, leurs stolons qui rampent. Les spores des fougères, emportées par les vents,

vont, de sous-bois en sous-bois, tapisser toutes les forêts d'un continent qui conviennent à leur aise.

Et dans le moindre brin d'herbe, des millions de formidables usines sont au travail. Minutieuses, précises, compli- quées, efficaces, les cellules végétales accomplissent une tâche magique dont la science humaine est incapable. Elles font la synthèse du matériel et de l'im- matériel, de la lumière et de la terre, de l'eau et de l'air, réunissent les quatre éléments inanimés pour en faire leur propre chair vivante. Le caillou, le vent, la pluie, le rayon de soleil, dans le brin d'herbe, sont devenus vie. Un agneau passe, le brin d'herbe est brouté, digéré.

La vie qu'il contenait change de forme.

Un cosmonaute mange une côtelette d'agneau et une feuille de laitue, s'en- ferme dans sa fusée et s'envole. Il est une graine de l'arbre de vie emportée par le vent des étoiles.

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Alchimistes fermés sur leur secret, le fétu de mousse, le séquoia haut c o m m e une colline, l'im- mense forêt amazonienne, la graminée, l'arbre fruitier, les multitudes innombrables des blés de l'Ukraine ou du Minnesota sont occupés à la même mission : assembler la terre, l'eau, l'air, et le feu du soleil, et, de leur mélange mystérieux et précis, fabriquer la vie.

Le végétal est la source perpétuelle de la vie.

Sans l'herbe et l'arbre, tout le règne animal dispa- raîtrait, y compris l'homme. Par les tiges et les troncs, la vie surgit du non-vivant et se répand. Le m o m e n t miraculeux de cette expansion est celui de l'amour : la floraison. La fleur est l'amour parfait.

A quelques exceptions près, toutes les espèces animales sont tranchées en leur milieu par la sépa- ration des sexes. Mâles d'un côté, femelles de l'autre, passent leur existence à se rechercher p o u r recons- tituer de leurs deux moitiés une unité momentanée à travers laquelle le courant vital pourra passer.

Chaque race complique à sa façon cette quête de l'union. Saisons infécondes, rivalités, combats, coquetteries, appels et refus, les rites de la repro- duction constituent une sorte de danse sur des épi- nes à laquelle l'homme, par des considérations reli- gieuses et des règles sociales, a su donner ses figures les plus enchevêtrées.

Rien de semblable chez les végétaux. Sauf en de rares cas, une plante qui fleurit n'a pas besoin d'une autre plante p o u r se reproduire. Elle est entière et se suffit.

Pour que la vie continue, la nature a pris des pré- cautions extraordinaires. Là où un seul grain de pollen est nécessaire p o u r provoquer le mûrisse- m e n t d'un ovule, elle en fabrique cent millions, que les vagues de l'air et la circulation des insectes em- portent loin de leurs étamines d'origine, dans une valse poudreuse et dorée, océan de fécondation qui submerge au printemps les prés et les forêts. Et qui nous donne le r h u m e des foins...

Chaque fleur baigne dans cette marée tourbillon- nante qu'elle contribue à alimenter. Mais, en règle générale, elle dédaigne les apports étrangers. Elle a tout ce qu'il lui faut, et elle sait ce qu'elle a à faire en elle m ê m e : l'amour. Aux premiers jours du prin- temps, vous rencontrez un arbre éblouissant, cou- vert de fleurs blanches : il est en train de faire l'amour un million de fois.

Et ses millions d'amours deviendront des cerises.

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Et puis,

épuisé d'avoir tiré de lui-même, vers le ciel désiré et inatteignable,

tant de fusées épanouies, le pétunia

voit se flétrir ses feuilles, se dessécher ses tiges,

tandis que ses graines se répandent et qu'un moineau mange sa dernière corolle.

C'est de nouveau l'automne, puis l'hiver.

Et l'hiver de nouveau passera.

Mais avant même qu'il soit passé,

une main affectueuse m'envoie de mon pays le premier brin de mimosa

dont chaque fleur est un soleil.

Merci.

Merci à tout.

Merci pour tout.

Achevé d'imprimer sur les presses de la S.E. Imprimerie Lescaret, à Paris, le 5 octobre 1978.

Dépôt légal : 4e trimestre 1978 Numéro d'éditeur : 3977 ISBN 2-258-00457-8

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