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Le traitement des dispositifs d’intégration des demandeurs d’asile au Québec dans la littérature sociologique ou La désintégration théorique : une étude d’approche institutionnelle

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Academic year: 2021

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Le traitement des dispositifs d’intégration des

demandeurs d’asile au Québec dans la littérature

sociologique. Ou la désintégration théorique - Une

étude d’approche institutionnelle

Mémoire

Sara Abradi

Maîtrise en sociologie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

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LE TRAITEMENT DES DISPOSITIFS D’INTÉGRATION

DES DEMANDEURS D’ASILE AU QUÉBEC DANS LA

LITTÉRATURE SOCIOLOGIQUE. OU LA

DÉSINTÉGRATION THÉORIQUE

Une étude d’approche institutionnelle

Mémoire

Sara ABRADI

Sous la direction de :

Olivier Clain

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Résumé

L’objectif de cette recherche est d’étudier comment la sociologie québécoise traite les dispositifs institutionnels d’intégration des demandeurs d’asile, nous partons du constat que la situation des demandeurs d’asile était très peu traitée dans la sociologie québécoise malgré la richesse de la réflexion sur les dispositifs d’intégration pour les migrants. À ces fins, nous avons examiné les publications disponibles sur ces questions, ce qui nous a permis de proposer six analyses thématiques. La première a porté sur la description des dispositifs, les suivantes ont été l’approche épistémologique, l’approche phénoménologique, l’approche comparative, l’approche féministe et l’approche critique. Si les dispositifs économiques sont les plus développés et concernent surtout l’accès à l’emploi, les mesures sociales, culturelles et politiques, sont quant à elles limitées. Pour ce qui est des discours sur l’intégration, on observe des différences à plusieurs niveaux. Si au niveau fédéral canadien l’intégration renvoie au multiculturalisme, au Québec on lui préfère l’interculturalisme, compromis entre la volonté de préserver l’identité culturelle québécoise et l’attachement aux valeurs canadiennes de l’acceptation de la culture de l’autre. Quant au demandeur d’asile qui a, dans les temps anciens, bénéficié d’une aura positive avec une tradition d’accueil du demandeur d’asile comme valeur nationale, il est désormais confronté à un arsenal de mesures restrictives et dissuasives complexifiant dès lors son intégration. Les demandeurs d’asile ne sont pas toujours passifs face à ces discours normatifs sur l’intégration. Ils en ont leur propre entendement au regard de leur expérience et de leur projet de vie dans le pays d’accueil. La démarche comparative a permis de confronter les modèles d’intégration québécois, canadien, français et américain. Les premières comparaisons des sociologues portent sur les modèles classiques français et américains. Toutefois l’importance que prend le phénomène d’immigration dans ces sociétés conduit à s’en éloigner pour proposer des concepts dans l’objectif de représenter le mieux possible cette réalité. L’approche sur l’intégration au féminin met en lumière la situation d’intersectionnalité dans laquelle les femmes se trouvent, tandis que l’approche critique met en évidence des discriminations dans le processus d’intégration et ses dispositifs, notamment dans la dimension d’intégration sociale.

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Abstract

The aim of this research is to study how Quebec sociology deals with the institutional measures for the integration of asylum seekers. The research was based on the observation that there are few studies on the integration of asylum seekers in Quebec sociology whereas the reflection on the matter is widely explored elsewhere. After analysing sociological texts on the topic, six themes have been proposed: the measures, the epistemological approach, the phenomenological approach, the comparative approach, the feminist approach and the critical approach. Economic measures are the most developed and they mostly concern job seeking. However, a few social, cultural and political measures do exist. As for the discourses on integration, there are differences on several levels. If at the Canadian federal level, integration refers to multiculturalism, in Quebec it deals with interculturalism, a compromise between the desire to preserve Quebec's cultural identity and the attachment to Canadian values of acceptance of the culture of the other. In the past, if the asylum seeker benefited from a positive aura with a tradition of welcoming the asylum seeker as a national value, he is now confronted with an arsenal of restrictive and dissuasive immigration measures that makes integration difficult for him. On the other hand, asylum seekers have their own perceptions and discourses on integration. The comparative approach made it possible to compare Quebec, Canadian, French and American integration models. In the past, the first comparisons of sociologists focused on French and American classical models. However, the importance of the phenomenon of immigration in these societies leaded them to find and propose other concepts in order to represent as much as possible this reality. The feminist approach shows the situation of intersectionality of women. The critical approach highlights discrimination in the process of integration and its measures which are mainly related to the issue of social integration.

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Table des matières

Résumé ... ii

Abstract ... iii

Table des matières ... iv

Liste des figures, tableaux, illustrations ... vi

Liste des abréviations, sigles, acronymes ... vii

Remerciements ... ix

Introduction ... 1

A. Cadre théorique ... 1

A.1 L’intégration ... 1

A.2 Le cas du Québec ... 5

A.4 Le dispositif en question ... 8

B. Problématique ... 11

C. Cadre méthodologique ... 12

Chapitre 1 Les dispositifs ... 13

1.1 Présentation générale ... 13

1.2 Dispositifs sociaux ... 15

1.3 Dispositifs économiques ... 17

1.4 Dispositifs culturels ... 20

1.5 Dispositifs politiques ... 20

Chapitre 2 Approche épistémologique ... 22

2.1. Présentation générale ... 22

2.2 L’intégration ... 23

2.2.1 Une sociologie générale de l’intégration ... 23

2.2.2 L’intégration au Québec ... 25

2.2.3 Le cas de la France ... 28

2.3 L’intégration du demandeur d’asile ... 30

2.3.1 La notion d’asile et le demandeur d’asile ... 30

2.3.2 La condition de demandeur d’asile au Québec et au Canada ... 31

Chapitre 3 Approche phénoménologique ... 35

3.1 Présentation générale ... 35

3.2 Au Québec ... 36

(6)

Chapitre 4 Approche comparative ... 50

4.1 Présentation générale ... 50

4.2 Les modèles classiques : le modèle européen versus le modèle américain ... 50

4.3 Les nouveaux modèles versus l’ancien modèle ... 52

4.4 La comparaison infraétatique : Québec versus Canada ... 52

4.5 Canada versus France ... 54

4.6 Québec versus France ... 54

Chapitre 5 L’intégration au féminin ... 60

5.1 Présentation générale ... 60

5.2 L’intégration féminine ... 60

5.3 L’intégration sociale ... 62

5.4 L’intégration économique ... 64

Chapitre 6 Approche critique ... 69

6.1 Présentation générale ... 69

6.2 L’intégration en question ... 70

6.3 L’intégration sociale ... 72

6.3.1 Stigmatisation, discriminations et outsiders ... 72

6.3.2 Les obstacles des demandeurs d’asile ... 75

6.3.3 Les obstacles pour l’accès aux services sociaux et aux services de santé ... 77

6.3.4 Déclassement, pauvreté et exclusion sociale ... 79

6.4 L’intégration économique ... 80

6.4.1 Discriminations ... 80

6.4.2 Les difficultés à intégrer le marché du travail ... 82

6.5 L’intégration culturelle ... 84

6.6 L’intégration politique ... 85

Conclusion ... 88

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Liste des figures, tableaux, illustrations

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Liste des abréviations, sigles, acronymes

CISR : Commission de l’Immigration du Statut de Réfugié du Canada CIUSSS : Centre Intégré Universitaire de Santé et de Services Sociaux CSF : Conseil du Statut de la Femme

DPJ : Direction de la Protection de la Jeunesse

F.T.Q : Fédération des Travailleuses et des Travailleurs du Québec IRCC : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

MICC : Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles MIDI : Ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Économique

PAFILI : Programme d’Aide Financière pour l’Intégration Linguistique des Immigrants PILI : Programme d’Intégration Linguistique des Immigrants

PRAIDA : Programme Régional d’Accueil et d’Intégration des Demandeurs d’Asile

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L’humanité

ne se développe pas sous le régime d'une uniforme monotonie, mais à travers

des modes extraordinairement diversifiés de sociétés et de civilisations cette diversité

intellectuelle, esthétique, sociologique, n'est unie par aucune relation de cause à effet à celle

qui existe, sur le plan biologique, entre certains aspects observables des groupements

humains elle lui est seulement parallèle sur un autre terrain.

Claude Lévi-Strauss, Race et histoire (1952), p.11

La diversité des cultures est derrière nous, autour de nous et devant nous. La seule exigence

que nous puissions faire valoir à son endroit (créatrice pour chaque individu des devoirs

correspondants) est qu'elle se réalise sous des formes dont chacune soit une contribution à

la plus grande générosité des autres.

Claude Lévi-Strauss, Race et histoire (1952), p.85

Le but de la civilisation, c'est la culture et le luxe. Une fois ce but atteint, la civilisation se

gâte et décline, suivant en cela l'exemple des êtres vivants.

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Remerciements

Dans un premier temps, je tiens à exprimer mes plus sincères remerciements à Guy Fréchet,

mon directeur de mémoire, pour son aide précieuse, sa confiance, son acharnement, ses remarques

pertinentes et sa bienveillance tout au long de la réalisation de ce travail de recherche. Je lui suis des

plus reconnaissante pour sa présence au cours de ce voyage intellectuel.

Je témoigne ma gratitude à Mr. Olivier Clain sans qui ce mémoire n’aurait pas pu aboutir.

Je remercie mes parents, mes frères qui, même outre Atlantique, n’ont jamais cessé de

penser à moi et de m’encourager. Votre satisfaction est la plus belle des réussites. Que dieu vous

garde longtemps après nous. Je vous aime.

À mon grand amour qui se reconnaîtra ! Ton soutien, ton aide précieuse, tes conseils et tes

prières m’ont renforcée comme jamais tu ne pourras l’imaginer. Tu es une véritable source d’inspiration

pour moi. Merci infiniment. Je t’aime.

(11)

Introduction

Le titre de notre sujet de mémoire de maîtrise en sociologie est Le traitement des dispositifs

d’intégration des demandeurs d’asile au Québec dans la littérature sociologique. Ou la désintégration théorique,

et a pour sous-titre Une étude d’approche institutionnelle. Nous effectuons cette étude au département de sociologie de l’Université Laval sous la direction du professeur Guy Fréchet. Les intérêts de recherche du docteur Guy Fréchet portent entre autres sur les dynamiques d'inclusion et d'exclusion sociales, ainsi que les inégalités sociales et la pauvreté, des thématiques par ailleurs abordées dans notre champ d’étude sur l’intégration. Notre objet de recherche concerne l'intégration des demandeurs d’asile, plus particulièrement les discours sociologiques au regard des dispositifs d’intégration mis en place par les autorités publiques et s’adressant aux demandeurs d’asile.

L’objet de recherche intégration des demandeurs d’asile se trouve dans son traitement au croisement de la sociologie de l’immigration et de l’action publique, de la sociologie générale, des travaux sur l’insertion. Ainsi, notre réflexion se nourrira des apports de chacune de ces disciplines. Les concepts et notions soulevés par le sujet que sont « intégration », « dispositif » et « demandeurs d’asile » constituent le cœur de la réflexion que nous explicitons ci-après.

A. Cadre théorique A.1 L’intégration

Pour ce qui est de l’intégration, notons l’importance de distinguer le sens émique et le sens étique. En effet, dans le domaine de l’immigration, dans une perspective politique et aussi bien dans celle du sens commun, l’intégration possède une dimension particulière. Tout d’abord, la notion renvoie à un rapport d’altérité entre l’étranger perçu comme un outsider par l’insider. En France, la définition qu’en donne le Haut conseil à l’intégration en 1993, atteste de cette connotation :

L’intégration consiste à susciter la participation active à la société toute entière de l’ensemble des femmes et des hommes appelés à vivre durablement sur notre sol en acceptant sans arrière-pensée que subsistent des spécificités notamment culturelles, mais en mettant l’accent sur les ressemblances et les convergences dans l’égalité des droits et des devoirs, afin d’assurer la cohésion de notre tissu social. (Haut Conseil à l’Intégration 1993, 8)

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Comme on peut le constater, l’intégration dans son sens émique1 endosse des dimensions politiques, sociales et sociétales variant en fonction des États. Schnapper (2007) fait le même constat. Elle explique à ce sujet que c’est parce que le terme intégration appartient à la fois au langage politique et à celui de la sociologie qu’il est particulièrement ambigu. Tel qu’il a été mentionné ci-dessus, il semble que les connotations diffèrent selon les sociétés et les cultures. Par exemple en France, il est négativement connoté comme nous le verrons plus bas, parce qu’il est associé aux anciens rapports de dominants-dominés de la période coloniale, entre anciens colons français et anciens colonisés désormais immigrés (voir à ce sujet Sayad 1994 ; Dewitte 1994). Tandis qu’au Québec, la notion d’intégration est moins controversée. Effectivement, l’intégration québécoise s’entend dans le sens de la communauté culturelle, expression apparue avec la création du ministère des Communautés culturelles et de l’Immigration du Québec en 1981 (Labelle, Field et Icart, 2007). Selon Labelle, Field et Icart (Ibid.) cette acceptation est unique à la société québécoise et englobe historiquement diverses catégories de population pour désigner les membres des minorités ou groupes ethniques.

Pour le sens étique, il faut remonter à Durkheim qui serait le premier à avoir eu recours à ce terme dans une perspective sociologique. C’est à travers ses analyses dans De la Division du travail social et Le

Suicide qu’il mobilise l’intégration en tant que concept renvoyant au rapport entre l’individu et le système social

auquel il appartient et dans la capacité de ce dernier à l’inclure en son sein (Durkheim 1893 et 1895) : Mais dire d'un groupe qu'il a une moindre vie commune qu'un autre, c'est dire aussi qu'il est moins fortement intégré ; car l'état d'intégration d'un agrégat social ne fait que refléter l'intensité de la vie collective qui y circule. Il est d'autant plus un et d'autant plus résistant que le commerce entre ses membres est plus actif et plus continu. La conclusion à laquelle nous étions arrivé peut donc être complétée ainsi : de même que la famille est un puissant préservatif du suicide, elle en préserve d'autant mieux qu'elle est plus fortement constituée. (Durkheim 1895, 214)

Dans Le Suicide, en se basant notamment sur le cas de la société française, Durkheim démontre un lien fort entre le degré d’intégration de la société française et le taux de suicide (Durkheim 1895). Pour Durkheim, dans les sociétés modernes, moins un groupe est intégré, plus le taux de suicidité des membres du groupe est élevé. On notera cependant que Durkheim ne parle pas de risque de suicide mais de coefficient de préservation des membres du groupe en regard des courants suicidogènes qui le traversent (Durkheim 1895 et Schnapper 2007). Nous pouvons dès lors comprendre que chez Durkheim,

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l’intégration renvoie à une certaine cohésion sociale s’opposant par-là à la différenciation, comme on peut l'observer dans De la division du travail social :

Mais comment procéder à cette vérification ? Nous n'avons pas simplement à rechercher si, dans ces sortes de sociétés, il existe une solidarité sociale qui vient de la division du travail. C'est une vérité évidente, puisque la division du travail y est très développée et qu'elle produit la solidarité. Mais il faut surtout déterminer dans quelle mesure la solidarité qu'elle produit contribue à l'intégration générale de la société : car c'est seulement alors que nous saurons jusqu'à quel point elle est nécessaire, si elle est un facteur essentiel de la cohésion sociale, ou bien, au contraire, si elle n'en est qu'une condition accessoire et secondaire. (Durkheim 1893, 28)

Notons que pour Schnapper (2007), c’est Durkheim qui le premier pose le problème même de l’intégration. Aussi, explique-t-il que la seule citoyenneté commune, définie par l’égalité des droits civils, juridiques et politiques, ne suffit pas pour assurer concrètement le lien social (voir aussi Durkheim 1893). De ce fait la solidarité abstraite née de la citoyenneté doit être aussi fondée sur l’ensemble des échanges entre les individus, et c’est plus particulièrement en s’interrogeant sur ces relations s’établissant entre eux et sur les manières dont ils peuvent former une société que l’on peut comprendre la société moderne, fonctionnant désormais plus sur le mode de la différentiation (Schnapper 2007 ; Durkheim 1893). En effet, dans cette nouvelle organisation sociale, la société n’est plus assurée par la similitude des hommes ou la solidarité mécanique. L’intégration de la société moderne est une intégration organique, car elle concerne aussi bien la société nationale que tous les groupes particuliers qui la composent. Ainsi, dans les sociétés modernes, plus les individus participent à une société intégrée, que cette intégration soit d’origine religieuse, domestique ou politique, moins le suicide y est élevé (Schnapper, 2007 ; Durkheim 1893 et 1895).

Notons que cette définition durkheimienne se rapproche du sens d’origine du terme. En effet, provenant du latin integrare, intégrer signifie faire entrer une partie dans un tout, et le suffixe ion renvoie quant à lui à l’idée de processus. Pour Sayad (1994), ce processus a la particularité d’être un processus dont on ne parle qu’après coup en termes d’échec ou de réussite. Ce processus social consiste idéalement dans le passage de l’altérité la plus radicale à l’identité la plus totale ou voulue comme telle (Ibid.). En outre, d'après le sociologue, il ne peut pas forcément être orienté, dirigé, volontairement favorisé, mais il peut être contrarié par des forces extérieures. Surtout c’est une illusion entretenue par les partenaires impliqués notamment institutionnels que de croire que ce processus est harmonieux et indemne de tout conflit. Derrière cette croyance se cachent les intérêts propres se manifestant à travers

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le lexique mobilisé, qui dans l’imaginaire social est une « fabricatrice d’identité ». Propos qui rejoignent en outre ceux de Dewitte (1994).

Dewitte (Ibid.) écrit qu’on enjoint aux immigrés d’adopter les codes, les normes, les morales qui régissent les rapports dans les sociétés d’accueil, à savoir de s’intégrer. Cependant, ces sociétés d’accueil ne s’imposent pas elles-mêmes un code éthique d’intégration. Il conclut que cette absence de code régissant les rapports de la société globale à l’altérité se fait ressentir, et ce d’autant plus que les immigrés sont issus de sociétés qui n’ont pas entretenu de rapports tranquilles ni égalitaires avec les sociétés d’immigration.

La polysémie de la notion renvoyant à des enjeux identitaires englobe des expressions comme adaptation, assimilation, insertion. Si l'adaptation est une vieille expression s’accompagnant d’élans ethnocentriques, l’assimilation garde les traces d’un passé colonial, elle est même pour Sayad (Ibid.) la métaphore de l’anthropophagie. Dans le contexte français, l’anthropophagie consisterait d’après Sayad (Ibid.) à vouloir tout assimiler, individus, groupes, ethnies, cultures, langues, nations, etc., comme acte de consommation gloutonne. Quant à l’insertion, pour lui elle serait un substitut de l’assimilation, terme désormais trop usé. L’insertion vise un plus large public dans la mesure où elle est moins connotée puisqu'elle n’a pas été marquée à un moment donné par une utilisation particulière. Le terme est donc plus neutre et surtout sans grande résonance idéologique ou ethnico-idéologique.

Cela rappelle aussi l’usage fait de la notion d’intégration par Dewitte (1996). Sur un ton incisif, Dewitte (1996) explique que l’intégration doit avoir des objectifs plus ambitieux, à savoir ne plus seulement se réduire aux populations étrangères ou d’origine étrangère, car les populations locales ne sont pas toujours intégrées. L’intégration est alors pour Dewitte aussi : « “le retour parmi nous” des

populations du quart-monde de toutes origines, et parmi elles de ces familles “autochtones” qui sont littéralement désintégrées » (Dewitte 1996, 1).

Les réflexions de Sayad peuvent être complétées par celle de Gaillard (1997). Elle explique que les termes assimilation, intégration et ethnique ont vu le jour sur le continent américain dans leur acception sociologique ; toutefois, ils ne recouvrent pas toujours les mêmes significations en France

qu'aux États-Unis (Ibid.). Garnier (Ibid.) précise qu’en France, ces termes sont plus souvent porteurs d'une idéologie que le résultat d'une réflexion scientifique. En abordant l’École de Chicago, à l’origine de la sociologie de l’immigration, l’auteur revient sur la genèse de l’usage sociologique de ces notions pour mieux mettre en évidence leur évolution épistémologique. L’École de Chicago a été le premier courant qui s’est attaché à étudier en profondeur le problème politique et social de l'immigration et de l’assimilation des immigrants aux États-Unis (Ibid., voir aussi Réa et Tripier 2003). Selon Garnier (Ibid.),

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le concept d’assimilation a été élaboré, en même temps que ceux de désorganisation, marginalité et

minorités ethniques, lorsque le courant étudia les flux des populations migrantes qui au début du 19e

siècle s’installaient dans les bas quartiers du centre-ville de Chicago pour progressivement émigrer, au rythme de leur fusion dans la société américaine, vers la périphérie de la ville. Ici l’assimilation est entendue comme une démarche individuelle, un processus psychologique par lequel les individus peuvent s’émanciper de leur communauté d’origine, qui durant la période de transition maintient les liens entre l’ancienne appartenance et la nouvelle en émergence. Cette forme d’assimilation repose sur les institutions communautaires d’immigrants pour maintenir la cohérence et la continuité de la vie des individus dans le contexte social nouveau qu’est la société d’accueil.

Schnapper (2007) précise que c’est cette définition de l’assimilation qui est retenue aussi bien aux États-Unis qu’en France, au cours de la période de la formation de la sociologie, des années 1880 aux années 1950, pour désigner le processus par lequel les nouveaux immigrés devenaient progressivement des membres de la société d’installation. Pour Schnapper (Ibid.) des articles du droit de la nationalité française, et l’utilisation du terme par Durkheim ou les chercheurs de l’École de Chicago témoignent de cet usage. L’auteur poursuit et précise que le terme d’intégration était réservé par Durkheim, comme nous avons pu le constater au problème de la société dans son ensemble.

A.2 Le cas du Québec

Pour commencer, il faut préciser que dans le contexte québécois et canadien, la majorité des textes sur l’intégration concerne les immigrants volontaires et le cas des réfugiés, à savoir des individus ayant le statut de réfugié. Ajoutons aussi qu’au Canada la politique d’immigration est sous la responsabilité conjointe du gouvernement fédéral et provincial. C’est à partir de 1968 que le Québec se dote d’un ministère de l’Immigration, en réponse à l’intégration massive des immigrants à la minorité anglophone, soit plus de 90 pour cent (Latouche 1987). Parmi les autres problèmes relevés de l’intégration au Québec, les chercheurs ont été nombreux à soulever le cas des difficultés d’adaptation des réfugiés d’Asie du Sud-Est notamment au marché du travail (Dorais 1987). Les problèmes d’adaptation de cette population s’observent aussi dans le reste du Canada. Plusieurs de ces réfugiés ont souffert de déclassification professionnelle et nombreux sont ceux qui vivent sous le seuil de pauvreté (Ibid.). Les chercheurs mettaient aussi en évidence dans les années 1980 le problème de l’insertion linguistique des migrants et ce d’autant plus que 92 pour cent des immigrés du Québec se concentraient à Montréal (Labelle et Lescop 1987). L’immigration des années qui ont précédé, font alors ressurgir la question de l’intégration linguistique des immigrants qui finalement n’avait pas été réglée avec la Loi 101, à savoir la Charte de la langue française du Québec adoptée en 1977 (Ibid.).

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Cependant, deux décennies plus tard, Mc Andrew (2006), constate au Québec des progrès significatifs atteints en matière de francisation des immigrants et des allophones. Par ailleurs, ces constatations s’accompagnent de l’augmentation de la fréquentation de l’école française par les enfants d’immigrants, passant de 73 pour cent en 1991 à 84 pour cent en 2001 avec un niveau de maîtrise considéré globalement comme

appréciable (Ibid.).

A.3 Le demandeur d’asile versus le réfugié

Lochak (2002) nous apprend qu’à l’origine l’asile désigne un lieu où une personne poursuivie peut trouver refuge et échapper ainsi au danger pesant sur sa vie, sa liberté ou sa sécurité. Ce lieu est inviolable parce qu’il est sacré. C’est la raison pour laquelle, l’asile a été dans les civilisations anciennes, grecque, romaine et hébraïque, une institution religieuse ayant pour but de protéger contre l’arbitraire ou la cruauté du pouvoir temporel (Ibid.). D’ailleurs, jusqu’au Moyen Âge, l’asile était entre les mains de l’Église. En 1946, l’assemblée générale des Nations Unies reconnaît le caractère international de la question des réfugiés, suivi par la création de l’Organisation internationale des réfugiés. En 1951, l’adoption de la Convention de Genève donne naissance au statut normatif et international de réfugié. Selon Lochak (Ibid.), elle traduit un changement important de problématique avec le passage d’une conception collective dans laquelle le réfugié se définissait par l’appartenance à un groupe déterminé, à une conception individuelle du réfugié. Cette dernière met au premier plan la crainte de persécutions et implique que l'éligibilité au statut passe par un système de détermination au cas par cas. En outre bien que cette définition du réfugié soit internationale, la procédure de reconnaissance du statut est laissée à la compétence des États.

Lochak (Ibid.) propose également de dissiper la confusion entourant l’usage des termes asile, droit d’asile et réfugié. Aussi précise-t-elle que l’asile est la protection qu’un État accorde sur son territoire, à savoir l’asile territorial, ou exceptionnellement dans une ambassade, c’est-à-dire l’asile diplomatique, à un individu fuyant des persécutions ou des menaces pesant sur sa vie ou sa liberté. L’asile se traduit par l’autorisation d’entrer et de séjourner sur ce territoire et peut se compléter par d’autres droits, tels que le droit au travail ou des droits sociaux qui permettent à la personne bénéficiant de l’asile de subsister. Quant au droit d’asile, il constitue pour la chercheuse une expression trompeuse, puisqu’il n’est pas un droit. L’asile est régi par le principe de la souveraineté des États. Par ailleurs, il existe peu de dispositions de droit interne ou de droit international qui obligent les États à accorder l’asile.

Pour ce qui est du Canada, sur ses pages Internet consacrées aux Réfugiés et demandes d’asile, le gouvernement canadien explique le fonctionnement de son système de protection des réfugiés, dans lequel il fait la distinction entre immigrant et réfugié, entre le Programme de réinstallation des réfugiés et des personnes

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2017). Pour les Services d’Immigration Canada, un réfugié est différent d’un immigrant, car l’immigrant est une personne qui choisit de s'établir de façon permanente dans un autre pays, tandis que le réfugié est forcé de fuir (Ibid.).

Quant au système canadien de protection des réfugiés, il comporte deux volets. Le premier volet est le

Programme de réinstallation des réfugiés et des personnes protégées à titre humanitaire, il est destiné aux

personnes situées à l’extérieur du Canada et qui ont besoin de protection (Ibid.). Les réfugiés devant être réinstallés sont désignés par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, de concert avec des répondants du secteur privé, ou par des signataires d’entente de parrainage, à savoir des organismes du privé qui ont signé des ententes de parrainage avec le gouvernement du Canada afin d’aider les réfugiés de l’étranger à se réinstaller au Canada (Ibid.). Le deuxième volet, nommé le Programme d’octroi de l’asile au Canada, concerne les personnes qui présentent une demande d’asile alors qu’elles se trouvent au Canada et qui soit craignent avec raison d’être persécutées ou risquent d’être victimes de tortures ou de peines cruelles ou inusitées dans leur pays d’origine (Ibid.).

D’après les informations sur les pages Internet du programme (Gouvernement de Canada, 2019), la demande d’asile se fait soit à un point d’entrée qui peut être un aéroport, un port maritime ou un poste frontalier terrestre, ou à un bureau d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). Dans le premier cas, c’est l’agent auprès de qui la demande est faite qui détermine si celle-ci est recevable, à savoir si elle peut être soumise à la Commission de l’immigration du statut de réfugié du Canada (CISR). Lorsque la demande est recevable, un document expliquant que la demande a été déférée à la CISR est transmis au demandeur. Ce dernier aura alors quinze jours pour remplir tous les formulaires de la trousse de demande dans lesquels il faut décrire ses antécédents et sa famille et pourquoi est-ce que l’on demande l’asile, avant de les transmettre à la CISR. Dans le deuxième cas, lorsque l’on s’adresse à un bureau IRCC, il faut s’y présenter avec tous les formulaires de la trousse de demande remplis afin d’obtenir une date d’entrevue avec un agent d’immigration, qui déterminera la recevabilité de la demande. Si la demande est recevable, l’agent donne alors une date pour l’audience à la CISR.

Sur les questions de l’effacement du statut de demandeur d’asile face à celui de réfugié, Wihtol de Wenden (1996) dans sa revue de littérature du droit d’asile, soulève les réflexions un droit d'asile occulté par le droit des réfugiés, et ce dans un contexte de crise des demandes d’asile (voir Brachet 2002 ; Lapalme 2013). C’est dans cette perspective que Lapalme (2013), s’est également intéressée au cas récent des demandeurs d’asile mexicains, se détournant des États Unis pour le Canada, du fait d’aléas diplomatiques. En 2009, les demandeurs d’asile mexicain se sont vus taxer de « faux réfugiés » par le gouvernement canadien de l’époque (Ibid.). Prétexte utilisé pour justifier l’instauration d’un visa pour accéder au territoire canadien. Le ministre

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canadien justifia cette action en arguant que « trop de Mexicains » demandaient l’asile au Canada et qu’ils constituaient des « faux » réfugiés. Selon le ministre, les demandeurs d’asile provenant de ce pays étaient des migrants économiques n’ayant pas besoin de protection et procédaient de cette façon à un abus du système d’asile canadien. Par conséquent la majorité de ces demandes a été jugée comme non légitime.

Dans ces perspectives, où les migrants économiques sont accusés d’être de « faux » réfugiés, parce qu’ils ne recherchent pas la protection, mais un meilleur niveau de vie, Lapalme (Ibid.) retient une définition du demandeur d’asile, qui se comprend ici en tant que synonyme de revendicateur du statut de réfugié. Il s’agit de l’individu se trouvant dans le processus de convaincre le pays hôte que sa situation correspond bien à la définition du réfugié établie par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés. Tandis que le réfugié, est quant à lui, la personne qui a réussi à persuader le pays hôte que sa condition coïncidait avec cette définition et se voit conséquemment accorder ce statut. Si l’asile est accordé, l’individu a le droit de demeurer dans le pays d’accueil et, éventuellement, d’accéder à la citoyenneté, il sera cependant renvoyé dans son pays d’origine, si elle est refusée.

Plus récemment, Amazan (2015) a décrit l’expérience des réfugiés haïtiens arrivés à Montréal du fait des désastres causés par le tremblement de terre de 2010. De là, elle a dressé un portrait type de l’immigrant ayant plus de chances de réussir à s'intégrer économiquement au Québec. Amazan montre que le français ne suffit plus, il faut aussi maîtriser l’anglais avoir une connaissance, si possible, antérieure du Québec, connaître les rouages du marché du travail, posséder un réseau large et diversifié, avoir un diplôme reconnu sur le marché et avoir déjà acquis une expérience de travail au Québec. Un autre aspect que pointe Amazan est que très peu de ses répondants ont abordé la question de la discrimination, qu’elle explique par leur profil socio-économique et la perception qu’ils en ont. Ce sont d’après elle des individus qualifiés, croyant que leurs formations et leurs compétences personnelles et professionnelles constituent les principaux outils leur permettant d’accéder au marché du travail.

A.4 Le dispositif en question

Papazoglou (2005) a étudié les principaux dispositifs juridiques, administratifs et institutionnels en matière d’intégration des réfugiés reconnus et des demandeurs d’asile recevables en Wallonie. L’auteur (Ibid.) a analysé quelques dispositifs pertinents en vigueur en Belgique et leur impact sur l’intégration des réfugiés et des demandeurs d’asile recevables. Dans le contexte belge, ces dispositifs sont relatifs à la citoyenneté, à la vie quotidienne, à l’accès au statut de réfugié et au séjour, au logement, à l’emploi, et à l’enseignement. Si l’on regarde le domaine de la vie quotidienne de façon détaillée, on constate que cela porte entre autres sur le mariage, la famille, l’aide sociale soulevé par le droit à l’intégration sociale, la sécurité sociale, à savoir le droit

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aux prestations familiales, l’assurance pour les soins de santé et les indemnités, les allocations de chômage et les pensions, l’égalité des chances, la non-discrimination, le racisme et l’intégration.

Papazoglou met en relief les dispositifs en lien avec les constats du premier rapport annuel sur la migration et l’intégration de l’Union Européenne datant de 2004. Ce rapport indique que le principal obstacle à l’intégration des étrangers dans les pays membres est l’impossibilité d’accéder au marché du travail alors que des lignes directrices pour l’emploi avaient été adoptées en 2003 pour améliorer l’insertion des immigrants sur le marché du travail, resserrer l’écart entre les ressortissants de l’Union Européenne et les immigrés en matière de chômage, et transformer le travail non-déclaré des immigrés en emplois légaux. Ces mesures se sont accompagnées de la création d’un portail européen pour la mobilité de l’emploi. Parmi les facteurs de non-intégration auxquels les dispositifs européens doivent pallier le rapport énumère le manque de connaissance linguistique et la difficulté de faire reconnaître des compétences et qualifications professionnelles, l'inaccessibilité aux activités proposées à l'ensemble de la population.

Ces dispositifs doivent également faire des efforts pour améliorer le niveau d’éducation et de formation, car les migrants rencontrent des obstacles les empêchant de profiter des apprentissages tout au long de la vie. Ils doivent aussi mettre l’accent sur l’éducation civique grâce à une information sur les droits et les devoirs fondamentaux des citoyens, le principe de l’égalité homme femme, les normes et les valeurs de base de la société. Ces mesures doivent inciter à la participation des nouveaux migrants au processus de prise de décision politique. Si les dispositifs d’inclusion sociale visent la réduction de la pauvreté et de l’exclusion sociale parmi les migrants et les minorités ethniques, les mesures prises pour combattre la discrimination et le racisme doivent être suffisamment reliées aux stratégies d’intégration. Sur le plan financier, il existe un certain nombre d'instruments comme le Fonds Social Européen soutenant des activités en lien avec l’intégration des migrants, le programme Equal, du Fonds Européen pour les Réfugiés, le projet INTI, le Grundtvig action sous l’égide du programme Socrate.

Quant à Targosz et Lauvaux (2005), elles se sont plus particulièrement consacrées aux dispositifs en faveur des réfugiés reconnus et des demandeurs d’asile recevables, relevant des acteurs institutionnels et des opérateurs de terrain. Dans leur analyse, elles font la distinction entre Des actions ciblées et des interventions

spécifiques et Des actions et interventions plus généralistes. Notons que les auteurs observent que sur le terrain,

la frontière entre l’accueil des réfugiés et des demandeurs d’asile, et l’intégration n’est pas clairement lisible, parce qu’ils partagent des domaines d’intervention communs tels que le logement, l’emploi, les problèmes administratifs, etc. En fait, c’est au cours de la phase d’accueil du réfugié et du demandeur d’asile, relevant de la compétence fédérale que selon les chercheures les infrastructures, les dispositifs et les mesures semblent mieux identifiés, tandis que la phase d’insertion s’appréhende moins bien et est diluée dans le champ de l’action

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sociale et plus particulièrement le secteur de l’intégration des personnes étrangères ou d’origine étrangère qui est de compétence régionale.

Les intervenants de ce secteur se sont spécialisés dans la problématique des réfugiés et demandeurs d’asile ou se sont adaptés à ce public, car il n’existe aucun dispositif une fois la reconnaissance du statut de réfugié obtenu. En outre, d’autres opérateurs de type généraliste offrent des services à l’insertion à travers des actions plus globales et larges liées à l’action sociale, l’éducation permanente, l’insertion socioprofessionnelle mais aussi dans le secteur de l’intégration des personnes étrangères ou d’origine étrangère.

Parmi les dispositifs d’actions ciblées et des interventions spécifiques, on compte ceux des ministères et administrations comme la Direction Générale Action Sociale et Santé, les initiatives locales de développement social et les Projets spécifiques développés à l’aide du Fonds Européen pour les Réfugiés dans le domaine de l’accueil linguistique et de la santé mentale, ceux du monde associatif, du secteur de l’insertion socioprofessionnelle, des opérateurs militants et des communes. Pour ce qui est des actions et interventions plus généralistes, les auteurs notent les programmes des partis politiques démocratiques francophones en matière d’intégration et d’interculturalité, les ministères et administrations, les opérateurs d’éducation permanente ou les services aux femmes (Vie Féminine).

Gsir et Kagné (2005) ont également étudié les dispositifs d’intégration pour les réfugiés et demandeurs d’asile en Wallonie. Ils ont, par ailleurs, relevé des dispositifs dans les domaines du logement, du travail, de l’éducation et la formation, la santé, la participation citoyenne, la politique d’intégration, la position des opérateurs, sur la nécessité d’une politique d’intégration des réfugiés et des demandeurs d’asile, les mesures et actions pour une meilleure politique d’intégration, et pour finir sur les nouvelles structures ou ressources.

Ajoutons qu’en France, où l’intégration des étrangers constitue un véritable enjeu politique, l’intégration est même un contrat. En effet, le parcours d’intégration commence avec le dispositif du contrat d’Accueil et d’Intégration faisant partie des politiques dites d’intégration et que doit signer le primo arrivant comme un contrat d’engagement à s’intégrer entre lui et l’État français.

Au Canada, les nouveaux arrivants, les réfugiés inclus, bénéficient d’un programme d’établissement qui a pour objectif de les aider à s’établir et à s’adapter à la vie au Canada (Gouvernement du Canada, 2017). Ces services sont offerts en partenariat avec les provinces et les territoires, des fournisseurs de services ainsi que d’autres partenaires et intervenants. Ces services d’établissement sont offerts jusqu’à l’obtention de la citoyenneté canadienne. Parmi les dispositions, nous pouvons mentionner la mise à disposition des services dans leur communauté, des offres de cours de langues en français et en anglais, l’aide à la recherche d’emploi

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et des services de soutien pour la garde d’enfants, l’aide au transport, la traduction et l’interprétation, l’aide pour les personnes handicapées et pour gérer des situations difficiles.

Quant au gouvernement québécois, il propose plus spécifiquement au demandeur d’asile durant la période d’examen de sa demande d’asile, et ce dès son arrivée une panoplie de services (Gouvernement du Québec 2017 et 2019). Le demandeur d’asile peut bénéficier d’hébergement temporaire, d’une aide à la recherche d’un logement permanent, des séances d’information sur la vie au Québec, de l’aide financière de dernier recours, de l’éducation préscolaire et l’enseignement primaire et secondaire, de services de garde non subventionnés et les activités de halte-garderie communautaires, des services universels d’emploi, de cours de français, de l’aide juridique pour la préparation de la demande d’asile, notamment, des services sociaux (PRAIDA et CIUSSS) avec une aide psychosociale et des soins de santé préventifs et de première ligne adaptés aux besoins des personnes qui demandent l’asile.

B. Problématique

Ce bilan littéraire montre la richesse de la réflexion sur les dispositifs d’intégration en direction des migrants. Les apports sont bénéfiques pour cerner au mieux ce phénomène. Toutefois, on peut constater que la situation des demandeurs d’asile est très peu traitée ou se noie dans la confusion entre demandeur d’asile, réfugié ou migrant. De plus, l’intégration est souvent abordée du point de vue des migrants, à savoir que chacun d’eux a la charge de sa propre intégration qui passe par la mobilisation de son capital social, culturel et économique pour construire son cheminement vers son insertion dans la société d’accueil. Il s’agit d’une approche vue d’en bas. Or les approches vues d’en haut, à savoir institutionnelles sont souvent écartées. Ce qui sous-entend que la recherche interroge peu les mécanismes propres de la société d’accueil, qui sont souvent revendiqués comme l’intégration. Elle interroge encore moins le regard scientifique qu’elle-même porte sur ces mécanismes sociaux.

Le manque d’étude sur les demandeurs d’asile est également constaté par Lapalme (2013) dans le cas des Mexicains, où il existe de nombreuses études sur la migration mexicaine. Nous pouvons apporter comme explication à cette carence la situation de l’entre-deux du demandeur d’asile se trouvant entre la position d’immigré sans statut légal et dans l’attente de celui de réfugié.

C’est pour pallier toutes ces lacunes que nous proposons d’étudier comment la sociologie québécoise traite les dispositifs institutionnels d’intégration des demandeurs d’asile. Et ce d’autant plus qu’il s’agit d’un objet très fortement d’actualité et dans les discours politiques. Pensons aux nombreux articles quotidiens sur les intégrations réussies des uns, ou au contraire sur les difficultés d’intégration d’autres (voir Huffington Post 2009

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C. Cadre méthodologique

Nous envisageons pour cette étude théorique d’examiner les publications disponibles sur ces questions par des analyses textuelles, puis discursives. De là nous en tirerons une analyse historique et contextuelle. Nous effectuerons une opération de codage à partir des catégories que nous avons prédéfinies et présentées ci-après. L’opération de codage nous permettra par la suite l’analyse thématique et comparative à l’intérieur de la thématique et entre les thématiques. Nous proposons six analyses thématiques. La première portera sur la description des dispositifs en commençant par une présentation générale. Il s’agira dans la suite de décrire les dispositifs selon leur nature ou domaine d’action, à savoir social (social, santé, etc.), économique, culturel et politique.

L’approche épistémologique sera consacrée au débat épistémologique qui sous-tend toute la réflexion sur l’intégration, que nous avons amorcée dans cette présentation. Quant à l’approche phénoménologique, elle abordera le traitement sociologique de ces dispositifs au regard de leurs effets sur les demandeurs d’asile. Puis l’approche comparative permettra de voir ce que la méthode comparative de plus en plus mobilisée dans les études apporte au traitement sociologique. Nous finirons avec d’un côté l’approche féministe et de l’autre l’approche critique.

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Chapitre 1 Les dispositifs

1.1 Présentation générale

Dans ce chapitre, nous avons relevé les dispositifs adressés aux réfugiés que nous avons regroupés en quatre catégories, à savoir sociale, économique, culturelle et politique. L’objectif est d’identifier, de connaître succinctement ces dispositifs, dans le but de cerner le discours sociologique dont ils sont l’objet.

Précisons que les quatre catégories de dispositifs proposées (sociale, économique, culturelle et politique), incluant les aspects d’apprentissage linguistique par exemple, correspondent au découpage du concept d’intégration, c’est-à-dire les critères renvoyant à des domaines de champ social que l’immigré doit remplir pour atteindre une intégration complétée. En outre, le découpage en quatre dimensions du concept d’intégration constituant des catégories thématiques et de champs sociaux est plus ou moins similaire à celui qui est opéré généralement par les chercheurs. Par exemple, Labelle (2015 ; voir aussi Labelle, Field et Icart 2007) découpe le concept d’intégration en trois dimensions que sont la dimension linguistique et culturelle de

l'intégration, la dimension économique de l'intégration, la dimension sociale, civique et politique de l'intégration.

Dans la dernière dimension Labelle (Ibid.) combine les dimensions sociale et politique. La dimension politique inclut d’ailleurs les aspects civiques.

Nous pouvons aussi citer le modèle théorique d’intégration de Kunz (2005 ; voir aussi le schéma de la figure 1) Exemple de transitions dans la vie d'un immigrant adulte accompagné de sa famille, se fondant sur le parcours d’intégration canadien. Ainsi, ce modèle en quatre étapes, à savoir « Avant l’immigration,

Établissement, Adaptation et Intégration », contient plusieurs sous-catégories. L’étape Établissement se

compose des sous-catégories « Langue, Logement, Emploi, École, Culture, Communauté et Réseaux ». Quant à Adaptation, elle contient Amélioration des compétences linguistiques, des emplois, de sa connaissance du

Canada, du sentiment d’identité, et des réseaux. Pour ce qui est d’Intégration, on retrouve d’un côté Citoyenneté,

et de l’autre Participation accrue à la société, à l’économie, à la vie politique et à la vie civique.

Par ailleurs, dans notre modèle ces sous-catégories sont aussi transversales comme l’apprentissage du français qui est présent aussi bien dans les programmes économiques pour l’emploi que pour l’intégration sociale et culturelle.

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Figure 1 : Exemple de transitions dans la vie d'un immigrant adulte accompagné de sa famille

Source : Kunz (2005)

Nous avons identifié les dispositifs en recensant tous les textes traitant de cet objet. Notons que si le ministère de l’Immigration fait la différence entre immigrant et réfugié, dans les textes sociologiques, la différence n’est pas aussi nette. La plupart des textes sur les dispositifs d’intégration des immigrants incluent les réfugiés et les demandeurs d’asile. D’ailleurs, les deux dernières sous-catégories s’y confondent. Le travail d’analyse textuelle nous a permis de vérifier cette observation, à savoir qu’à chaque emploi du terme immigrant il incluait les demandeurs d’asile qui sont eux-mêmes compris dans la sous-catégorie réfugiés. Rares sont les textes pour le cas du Québec qui se concentrent uniquement sur la question des demandeurs d’asile, voire des réfugiés et traitent des dispositifs qui leur sont adressés comme c’est le cas pour la Belgique (voir aussi Papazoglou 2005 ; Targosz et Lauvaux 2005 ; Gsir et Kagné 2005). La structure de l’analyse consistera dans un premier temps à observer le cas spécifique du Québec qui nous intéresse ici, puis à regarder à l’échelle fédérale et internationale pour observer lorsque cela est possible d’autres dispositifs en dehors du contexte québécois, afin de compléter l’analyse.

Les dispositifs peuvent être identifiés sous différents vocables, dans les textes nous avons trouvé les expressions « dispositif, ressources, mesure, initiative, services d’aide », etc. Plus généralement, nous entendons par dispositif, des services offerts par les institutions, auxquels les demandeurs d’asile ont directement accès et dont ils bénéficient. Ce sont des services qui sont mis à leur disposition relativement à leur statut de demandeur d’asile. Ajoutons aussi que ces dispositifs sont des actions publiques, à savoir des actes émanant des institutions publiques. Elles se comprennent au sens de la sociologie de l’action comme une des variables du modèle de Jones, celles des institutions (Lascoume et Le Galès 2018). Les dispositifs

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correspondent dans la variable institutions aux normes, aux règles et aux procédures, qui d’ailleurs orientent les interactions des acteurs (Ibid.).

1.2 Dispositifs sociaux

Nous avons vu que le gouvernement du Québec proposait des mesures pour l’accueil des demandeurs d’asile. Ainsi le demandeur d’asile peut bénéficier d’hébergement temporaire, d’aide à la recherche d’un logement permanent, de séances d’information sur la vie au Québec, d’aide financière de dernier recours, de services de garde non subventionnés et d’activités de haltes-garderies communautaires. À cela, il faut aussi ajouter l’aide juridique pour la préparation de la demande d’asile, les services sociaux (PRAIDA et CIUSSS), incluant une aide psychosociale, des soins de santé préventifs et de premières lignes adaptées aux besoins des personnes qui demandent l’asile (Gouvernement du Québec 2017 et 2019).

Le gouvernement a mis en place des dispositifs d’accès à l’information qui se mettent en œuvre dès l’arrivée sur le territoire. Pellerin (2013) présente une typologie de ces dispositifs d’accès à l’information qui s’applique aux migrants volontaires. Nous verrons les situations dans lesquelles ils peuvent s’appliquer aux demandeurs d’asile. Elle distingue d’un côté les dispositifs d’informations procédurales et les dispositifs d’informations d’intégration de l’autre se divisant en deux sous-catégories, à savoir les dispositifs d’intégration sociale et citoyenne et ceux d’intégration en emploi. Les dispositifs d’informations procédurales concernent l’ensemble des informations précisant les démarches administratives à entreprendre pour obtenir le statut d’immigrant économique (résident permanent), pour s’installer dans un nouveau pays d’accueil et enfin pour trouver un emploi. Dans le cas des demandeurs d’asile, il s’agira de l’ensemble des informations précisant les démarches administratives à entreprendre pour obtenir le statut de demandeur d’asile, au moment où se fait la demande d’asile à un point d’entrée, ou à un bureau IRCC.

Les dispositifs d’information d’intégration sociale et citoyenne portent sur la connaissance de la culture du pays d’accueil. Ces informations concernent alors les modes et la qualité de vie, le logement, les droits fondamentaux, les systèmes de valeurs, les traditions et coutumes, les systèmes éducatifs et de santé, les mécanismes de financement, etc. Pour le cas des demandeurs d’asile dans les services offerts au demandeur d’asile durant la période d’examen de sa demande d’asile, le gouvernement québécois propose des séances d’information sur la vie au Québec. Et du côté du gouvernement fédéral, on peut citer le programme d’établissement qui a pour objectif de les aider à s’établir et à s’adapter à la vie au Canada (Gouvernement du Canada, 2017). Les informations sur les dispositifs d’intégration en emploi apportent des connaissances sur les données du marché du travail, par exemple le taux de chômage, les secteurs en pénurie de main-d’œuvre, les niveaux des salaires, les organismes d’aide à l’emploi, les lois du travail, la mise à jour des compétences, la

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reconnaissance de diplômes. Ces aspects seront détaillés dans la sous-partie consacrée aux dispositifs économiques. Pellerin (2013) précise en outre que les informations d’intégration peuvent être objectives, explicites et facilement vérifiables, par exemple « le taux de chômage en Estrie », mais peuvent aussi être subjectives et tacites, donnant un large espace à diverses interprétations.

Quant à Boulet (2016), elle relève dans les programmes du ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion (MIDI) des programmes d'intégration dédiés aux aspects sociaux, notamment deux programmes d’intégration linguistique et d’aide financière. Le Programme d’intégration linguistique des immigrants (PILI) et le Programme d’aide financière pour l’intégration linguistique des immigrants (PAFILI) ont pour objectif de favoriser l’intégration sociolinguistique et culturelle des immigrants en leur offrant des cours de français et du soutien financier. Par ailleurs, les institutions se sont associées à des partenaires communautaires offrant, dans le cadre de programmes d’intégration des immigrants, de l'accueil, de l’aide de première ligne et la francisation. Ces partenaires communautaires sont par exemple La Maisonnée, L’Hirondelle et PROMIS.

Nous avons déjà abordé à l’échelle fédérale le Programme d’établissement des nouveaux arrivants s'adressant aussi bien aux migrants volontaires qu’aux réfugiés, y compris les demandeurs d’asile. Ce programme consiste en la mise à disposition de services dans leur communauté, de services de soutien pour la garde d’enfants, d’aide au transport, de traduction et d’interprétation, et d’aide pour les personnes handicapées et pour gérer des situations difficiles.

À l’échelle internationale, nous avons pu relever notamment les dispositifs belges. En Belgique, les dispositifs sociaux pour le cas des réfugiés et demandeurs d’asile concernent la vie quotidienne, l’accès au statut de réfugié et au séjour, au logement, la santé (Papazoglou 2005 ; Gsir et Kagné 2005). Pour ce qui est de la vie quotidienne, cela porte sur le mariage, la famille, l’aide sociale relative au droit à l’intégration sociale, la sécurité sociale, à savoir le droit aux prestations familiales, l’assurance pour les soins de santé et les indemnités, les allocations de chômage et les pensions et l’égalité des chances, la non-discrimination, le racisme et l’intégration. Selon Targosz et Lauvaux (2005), le champ de l’action sociale se rapporte surtout plus à la phase d’insertion que d’accueil. Notons qu’il n’existe pas en Belgique de dispositif une fois la reconnaissance du statut de réfugié obtenu, ce sont donc les intervenants du champ d’action sociale, qui se sont spécialisés dans la problématique des réfugiés et demandeurs d’asile ou se sont adaptés à ce public, qui prennent le relais.

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1.3 Dispositifs économiques

Pour ce qui est des dispositifs économiques, ils concernent surtout l’insertion professionnelle. Précisons que l’accès au marché du travail est réservé aux citoyens, aux étrangers résidents permanents et aux étrangers bénéficiant d’un permis de travail délivré par le MICC, à savoir le ministère fédéral de l'Immigration (Crépeau 1996a). Ainsi, seuls les demandeurs d’asile ne pouvant pas subvenir à leurs besoins autrement peuvent bénéficier d’un permis de travail et avoir accès au marché du travail (Ibid.). De nombreux travaux ont été réalisés sur l’intégration économique, nous pouvons citer ceux de Chicha et Charest (2008), de Larochelle et Lapointe (2006), d’Asselin (2012), de Pellerin (2013), d’Amazan (2015), de Boulet (2016), de Lechaume et Deslauriers (2015), d’Héroux (2018). Le demandeur peut aussi bénéficier dans le cadre du Programme fédéral d’établissement des nouveaux arrivants de l’aide à la recherche d’emploi.

Depuis 2004, le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC) partage avec Emploi-Québec des responsabilités de l’intégration au marché du travail des nouveaux immigrés (Chicha et Charest 2008 ; Boulet 2016). Si Emploi-Québec a la charge d’offrir des services de préemployabilité et d’employabilité, quant au MICC, il a pour mission d’offrir des services d’adaptation au marché du travail. Les programmes d’employabilité ont pour objectif de pallier la méconnaissance des pratiques de recrutement et de sélection des entreprises au Québec. Ils offrent la possibilité de développer des compétences personnelles et professionnelles pour intégrer le marché du travail et se maintenir en emploi. Cette connaissance du marché du travail concerne à la fois des éléments formels comme les lois encadrant le marché du travail, et d’autres éléments plus informels, à savoir des compétences interpersonnelles (soft skills). Ces dernières renvoient à la façon de se présenter ou d’interagir dans un contexte social défini tel que lors de l’entrevue de sélection ou dans le cadre du travail en équipe. Ces dispositifs prennent la forme de documents informatifs et de séances d’information.

Le gouvernement met à disposition des migrants pour qu’ils se familiarisent au contexte légal et juridique du marché du travail, une série de fascicules expliquant les caractéristiques et les valeurs du marché du travail québécois, les normes minimales du travail, les droits des salariés, la syndicalisation et le fonctionnement des syndicats, les programmes sociaux, etc. Ainsi, les organismes communautaires organisent des séances d’information relatives aux normes du travail, à l’assurance-emploi, aux droits de la personne, à la santé et la sécurité au travail. En outre, la Ville de Montréal en partenariat avec le MICC a mis en place le programme Contact emploi, qui vise à aider 120 personnes récemment arrivées à Montréal en promouvant le développement des compétences interpersonnelles.

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Par ailleurs, on trouve un volet employabilité dans l’offre de service de la plupart des organismes communautaires consistant en des séances de formation portant sur des conseils pratiques sur la rédaction du curriculum vitae ou sur les techniques efficaces de recherche d’emploi. Par exemple, le Service d’aide et de liaison pour immigrants La Maisonnée offre des ateliers dédiés à ces formations. Un autre exemple, est le Centre des femmes de Montréal qui a développé le programme FEMA s’adressant aux femmes immigrées avec pour objectif de faciliter l’accès à un emploi correspondant à leurs compétences professionnelles et personnelles. L’Agence montréalaise pour l’emploi (AMPE-CITI), qui a pour mission est de contribuer à l’intégration des nouveaux arrivants francophones, offre des ateliers intensifs de recherche d’emploi où les participants reçoivent l’aide de conseillers et ont accès à un espace de travail avec ordinateurs, téléphones et télécopieurs. Tyndale St. Georges–Centre d’emploi de la Petite-Bourgogne offre des formations visant au développement de compétences de base, comme le travail sur l’estime de soi. D’autres formations offertes par d’autres organismes ont une approche de counselling interculturel prenant en considération le parcours migratoire individuel de chaque participant, ou encore une approche personnalisée auprès des entreprises dans le but de faire tomber les barrières systémiques, les préjugés et les craintes liées à l’inconnu. Les intervenants des organismes jouent ainsi un rôle de facilitateurs, ou de médiateurs entre les nouveaux arrivants cherchant un emploi et les potentiels employeurs.

À ce sujet nous avons déjà mentionné dans les services d’accueil pour les demandeurs d’asile, les services universels d’emploi. Ajoutons que selon Amazan (2015), les ressources d'aide à l'emploi mises sur pied par le gouvernement ou par les organismes communautaires fournissent des informations, des activités et des services aux nouveaux arrivants cherchant à intégrer le marché du travail québécois, notamment sur la rédaction d’un CV québécois, sur comment se conduit un entretien d’embauche au Québec. C’est notamment la fréquentation de centre local d'emploi et/ou d'organismes communautaires qui leur fournit des renseignements notamment sur la connaissance de la culture québécoise dont ils ont besoin pour s’adapter au monde du travail, aux normes du travail au Québec, etc., et des techniques comme la conception d'un CV, passation de l’entrevue, etc.). Ces éléments selon Amazan (Ibid.) peuvent grandement contribuer à leur intégration professionnelle. Chicha et Charest (2008) distinguent huit catégories dans les programmes du marché du travail destinés aux immigrés, l’accueil et aide de première ligne, la formation linguistique, le développement de l’employabilité, la reconnaissance des études et de l’expérience étrangères, la formation en emploi et stages, l’interdiction de la discrimination en emploi, les programmes d’accès à l’égalité les initiatives de gestion de la diversité. Ces programmes peuvent être ponctuels ou à long terme, ils peuvent être destinés à un très grand nombre d’immigrés, tandis que d’autres s’adressent à une clientèle très restreinte.

Les programmes de formation linguistique sont tous offerts par le MICC à l’exception des cours d’anglais, qui sont donnés par des institutions d’enseignement, organismes communautaires. Ils se composent

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de la formation de base en français, à temps partiel, la formation intensive en français, à plein temps, la formation spécialisée en français ainsi que formation en anglais. En outre la formation de base en français peut être réalisée en milieu de travail ou en ligne. Les programmes d’information et d’évaluation sont principalement proposés par le MICC, ils consistent notamment en l’information sur les équivalences entre les diplômes étrangers, les diplômes québécois, les métiers réglementés et en l’autoévaluation en ligne soit par le MICC soit par l’ordre des métiers.

Les initiatives et les programmes (voir aussi Morin 2015) visant à faciliter la reconnaissance des acquis par les ordres professionnels se composent des permis spéciaux délivrés par les ordres professionnels, la préparation aux examens par le collège des médecins et les universités et pour finir, les formations d’appoint proposées pour les infirmiers (par exemple par le MICC, Emploi-Québec, le Cégep du Vieux-Montréal), infirmiers auxiliaires (par l’École des métiers du Faubourg, le MICC par exemple), les ingénieurs (l’Ordre des ingénieurs du Québec ; École polytechnique de Montréal ; Emploi-Québec), les agronomes (par Carrefour-BLE) et les orthophonistes (par l’Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec).

Il existe également des programmes de formation en emploi, de mentorat et de stages proposés aussi bien par Emploi-Québec, le MICC, Mentorat Québec, les organismes communautaires, les employeurs, tels que PRIIME également délivré par Investissement Québec. Le PRIIME fait partie entre autres du programme d’aide à l’intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi, il a trois objectifs, à savoir inciter les PME québécoises à embaucher des travailleurs immigrés et des personnes issues des minorités visibles, permettre aux nouveaux arrivants d’acquérir une première expérience de travail dans leur domaine de compétence et faciliter leur intégration socioéconomique et linguistique, et pour finir favoriser le maintien en emploi des personnes ainsi embauchées. Il faut toutefois signaler que ce dispositif s’adresse aux personnes des minorités visibles ayant obtenu la résidence permanente depuis moins de deux ans.

Des mesures législatives ont été élaborées pour l’intégration professionnelle des migrants. Ces dispositions législatives à l’intégration des immigrés reposent sur la Charte des droits et libertés de la personne, qui inclut l’interdiction de discriminer, les programmes d’accès à l’égalité en emploi recommandés par la Commission ou imposés par un tribunal, les programmes d’accès à l’égalité en emploi dans les ministères et organismes, les programmes d’accès à l’égalité en emploi volontaires, les programmes d’accès à l’égalité en emploi découlant d’une obligation contractuelle ainsi que les programmes d’accès à l’égalité en emploi dans des organismes publics.

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1.4 Dispositifs culturels

Nous avons relevé très peu de mesures culturelles. Les quelques-unes que nous avons pu observer sont surtout relatives à l’apprentissage du français, aux séances pour acquérir des connaissances sur les cultures et les sociétés canadienne et québécoise (voir aussi Pellerin 2013). Selon Pellerin (2013), les mesures qui informent sur les modes et la qualité de vie, les systèmes de valeurs, les traditions et coutumes, les systèmes éducatifs font partie entre autres dispositifs d’information d’intégration sociale et citoyenne. Pour le cas des demandeurs d’asile dans les services offerts au demandeur d’asile durant la période d’examen de sa demande d’asile, nous avons vu que le gouvernement québécois proposait des séances d’information sur la vie au Québec, des cours de français et l’éducation préscolaire et l’enseignement primaire et secondaire.

On retrouve la même offre au niveau fédéral avec le programme d’établissement qui a pour objectif d’aider à s’adapter à la vie au Canada (Gouvernement du Canada, 2017), les cours de langues en français et en anglais et l’éducation préscolaire et l’enseignement primaire et secondaire. Toutefois, précisons qu’il existe quelques initiatives, comme celles de certains organismes communautaires ayant pour but de faire connaître aux immigrants la culture québécoise. C’est le cas de Casa Latina Americana qui organise des événements où des intervenants viennent accueillir des immigrants et leur parler de la culture québécoise. Il existe aussi des initiatives locales comme ceux des gouvernements locaux, par exemple le programme de médiation culturel de la ville de Montréal ou les activités pour les migrants de la ville de Québec, ou des associations culturelles locales. Nous pouvons aussi ajouter la décision récente des musées du Québec de se donner pour objectif de favoriser l’inclusion des immigrants avec diverses initiatives qui sont admissibles à un financement comme Le

nouvel appel de projets : Culture et inclusion.

La faible quantité des dispositifs culturels est assez manifeste, nous l’expliquons par le fait qu’ils soient peu mis en avant, car ils ne sont pas prioritaires, contrairement à l’intégration économique. En effet dans la perspective multiculturelle dans laquelle s’inscrit l’intégration au Canada et au Québec, le culturel semble relever de la sphère privée, à savoir de l’individu et de la communauté à laquelle il appartient.

1.5 Dispositifs politiques

De même que nous avons pu l’observer pour les dispositifs culturels, les dispositifs politiques sont limités parce qu’ils relèvent de la citoyenneté. En effet, c’est par l’obtention de la citoyenneté qu’on accède aux dispositifs politiques comme le droit de vote. Pour obtenir la citoyenneté, le demandeur doit d’abord obtenir sa résidence permanente et totaliser trois ans de résidence permanente au cours des quatre années qui ont précédé sa demande. Le requérant doit avoir des connaissances suffisantes du Canada, du statut de citoyen,

Figure

Figure 1 : Exemple de transitions dans la vie d'un immigrant adulte accompagné de sa famille

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