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Intégration communautaire des populations marginalisées par le conflit interne colombien en milieu rural caribéen, 2016-2019

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Intégration communautaire des populations

marginalisées par le conflit interne colombien en milieu

rural caribéen, 2016-2019

Mémoire

Irina Dziura

Maîtrise en sciences géographiques - avec mémoire

Maître en sciences géographiques (M. Sc. géogr.)

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Résumé

Depuis plus de cinquante ans, la Colombie connaît un conflit interne ayant de grandes répercussions sur l'ensemble du pays. Ce conflit, opposant le gouvernement à la principale guérilla du pays, les Forces armées révolutionnaires de Colombie, Armée du peuple (FARC-ep), a engendré le déplacement d'un grand nombre de citoyens, vivant dans des milieux ruraux ou des situations précaires. La mise en place des accords de paix en 2016 connaît alors de nombreuses failles tant des points de vue économiques, que politiques ou sociaux. Mis à part le fait que la durabilité des communautés des vétérans des FARC-ep est incertaine, il est possible de constater que les populations civiles se trouvent elles aussi victimes de l’échec des accords étant donné que ceux-ci devaient également leur être bénéfiques. La question à laquelle cette recherche tente de répondre est : En quoi les populations vulnérables de Colombie peuvent-elles participer à leur propre établissement durable à l’échelle de leur communauté, des milieux et des individus ? Les méthodes d’analyse des données recueillies sur le terrain dans la région Caribe incluent l’analyse de discours et de contenu. L’analyse a permis de comprendre, du moins en partie, que les instances gouvernementales nationales et infranationales ne parviennent pas, par manque d’implication, de décentralisation du pouvoir et de volonté de favoriser la participation citoyenne, à mettre en place les bases démocratiques pour le maintien de la paix et la réintégration des anciens combattants dans le tissu de la société colombienne rurale et urbaine.

Mots clés : Colombie, (Dé) Centralisation, Développement durable, Éducation pour la paix, Établissement durable, FARC, Guérilla, Intégration, Marginalisation, Organisation territoriale, Populations vulnérables.

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Abstract

For more than fifty years, Colombia has experienced an internal conflict with broad repercussions affecting the entire country. This conflict, opposing the government and the main guerilla group in the country, the Revolutionary Armed Forces of Colombia, People’s Army (FARC-ep), has resulted in the displacement of a large number of people, living in rural areas or in precarious situations. There are many flaws in the implementation of the peace agreements signed in 2016, both from an economic, political and social point of view. Apart from the fact that the sustainability of the communities of FARC-ep veterans is uncertain, it is possible to observe that the civilian populations also find themselves victims of the failure of the agreements since these were also intended to be beneficial to them. The question this research attempts to answer is: How can the vulnerable population groups in Colombia participate in their own sustainable settlement at the level of their community, environments and individuals? Analysis methods field data in the Caribe region include discourse and content analysis. The analysis enabled to understand, at least in part, that national and subnational government bodies fail, due to a lack of involvement, decentralization of power and the desire to promote citizen participation, to put in place the democratic foundations for the maintenance of peace and the reintegration of ex-combatants into the fabric of Colombian rural and urban society.

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Resumen

Durante más de cincuenta años, Colombia ha experimentado un conflicto armado interno con varias repercusiones en todo el país. Este conflicto, al oponerse el gobierno a la principal guerrilla del país, las Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia, Ejército Popular (FARC-ep), resultó el desplazamiento de una gran cantidad de personas, que viven en zonas rurales o en situaciones precarias. La implementación de los acuerdos de paz de 2016 ha conocido muchas fallas, desde el punto de vista económico, político o social. Aparte el facto que la durabilidad de las comunidades de los veteranos de las FARC-ep es incierto, es posible de observar que las poblaciones civiles en este país están también victimas del fracaso de los acuerdos ya que también se pretendía beneficiarlos. La cuestión de investigación a la que esta investigación intenta de responder es: En que las poblaciones vulnerables de Colombia pueden participar a sus propios establecimientos sostenible al nivel de sus comunidades, de los medios y de los individuos. Los métodos de análisis de datos de campo en la región del Caribe incluyen análisis de contenido y discurso. El análisis permitió comprender, al menos en parte, que los órganos de gobierno nacional y subnacional fracasan, por falta de implicación, descentralización del poder y la voluntad de promover la participación ciudadana, para sentar las bases democráticas para el mantenimiento de la paz y la reintegración de los excombatientes al tejido de la sociedad rural y urbana colombiana.

Palabras claves : Colombia, (De) Centralización, Desarrollo sostenible, Establecimiento sostenible, Educacion para la paz, Guerrilla, FARC, Integración, Marginación, Organización territorial

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Tables des matières

Résumé ... ii

Abstract ... iii

Resumen ... iv

Liste des figures ... vii

Liste des tableaux ... viii

Liste des sigles ... ix

Remerciements ... xi

Introduction ... 1

Problématique ... 1

Territoire à l'étude et période d'analyse ... 3

Désaccord idéologique à l'origine du conflit interne ... 5

Répercussions socio-économiques et territoriales ... 7

Accords de paix de 2016 ... 10

Question de recherche ... 12

Objectifs de recherche ... 13

Hypothèse de recherche ... 13

Intérêts de la recherche ... 13

Limites et difficultés de la recherche ... 14

1. Méthodologie de cueillette et d'analyse des données ... 17

1.1. Techniques de collecte de données primaires ... 18

1.1.1. Recrutement ... 19

1.1.2. Entretiens semi-dirigés ... 19

1.1.3. Conférences ... 20

1.1.4. Séjour d'observation et conversations spontanées ... 22

1.2. Techniques de collecte de données secondaires ... 24

1.2.1. Littérature gouvernementale et scientifique ... 24

1.2.2. Étude de cas ... 25

1.2.3. Actualités ... 26

1.3. Traitement et analyse des données ... 26

1.3.1. Triangulation des données ... 26

1.3.2. Analyse de discours ... 27

Cadre opératoire ... 29

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2.1. Établissement humain ... 32

2.1.1. Habitat durable ... 33

2.1.2. Espace vécu ("l'Habiter") ... 34

2.2. La gouvernance territoriale ... 38

2.2.1. La territorialité ... 38

2.2.2. La gouvernance locale ... 39

2.2.3. Le vivre-ensemble ... 41

2.3. La durabilité ... 45

2.3.1. L'éducation pour la paix ... 45

2.3.2. Le développement durable ... 47

3. Mise en contexte et présentation du territoire ... 50

3.1. Caractéristiques environnementales et sociales de la zone étudiée ... 50

3.1.1. Caractéristiques biogéophysiques de la zone d'étude ... 50

3.1.2. Diversité culturelle et ethnique ... 55

3.2. Éléments de contexte pour comprendre la pacification en Colombie ... 57

4. Présentation des résultats ... 62

4.1. Mécanismes gouvernementaux en faveur de l'établissement durable des populations marginalisées ... 62

4.1.1. Adéquation des provisions de l'État avec les besoins des populations marginalisées .. 64

4.1.2. Réforme rurale intégrale (RRI) ... 67

4.1.3. Zones de transition et de normalisation ... 74

4.2. Intérêt et implication citoyenne dans le processus de gouvernance territoriale ... 80

4.2.1. L’éducation ... 81

4.2.2. Le tourisme durable et le développement économique et territorial ... 86

5. Interprétation des résultats ... 96

5.1. Dynamique sociopolitique globale influençant l’insertion des populations marginalisées ... 97

5.2. Le tourisme durable comme outil de préservation de la paix et d'intégration communautaire et territoriale ... 101

Conclusion ... 104

Bibliographie ... 108

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Liste des figures

Figure 1 Carte de localisation de la Colombie et des régions à l'étude ... 4

Figure 2 Localisation de la République de Marquetalia ... 7

Figure 3 Juan Manuel Santos et Timoleon Jimenez se serrent la main, concluant les accords de paix historiques à La Havane ... 12

Figure 4 Photo prise lors de l'une des conférences données durant la "Catedra Europa" ... 21

Figure 5 Une "tienda" de Minca (Magdalena) ... 24

Figure 6 Intégration, insertion, inclusion ... 45

Figure 7 Objectifs de développement durable ... 49

Figure 8 Schéma du développement durable ... 49

Figure 9 Départements de la région caribéenne de Colombie ... 53

Figure 10 Dispersion des migrants vénézuéliens en 2009 en Colombie ... 54

Figure 11 Évolution de la guérilla des FARC-ep entre 1998 et 2005 dans la région Caribéenne colombienne ... 55

Figure 12 Sentiment d'appartenance ethnique en Colombie ... 56

Figure 13 Population habitant en milieux urbain ou rural selon leur appartenance ethnique ... 57

Figure 14 Territoires directement touchés par le conflit armé interne ... 61

Figure 15 Taux d'abstention lors des élections présidentielles de 2018 en Colombie ... 64

Figure 16 Logique d'implantation des groupes armés illégaux ... 73

Figure 17 Zones et camps de transition et de normalisation temporaires ... 75

Figure 18 Quartier périphérique de la ville de Medellín ... 76

Figure 19 Maison dans un bidonville proche de Cucuta (Norte de Santander, près de la frontière vénézuélienne ... 77

Figure 20 Banlieue précaire en périphérie de Ciudad Bolivar (Bogota) ... 77

Figure 21 Criminalité et économie parallèle en Colombie ... 79

Figure 22 Carte de localisation de Barrancabermeja ... 83

Figure 23 Étudiants dans la salle de cours de l'EIT ... 85

Figure 24 Carte des aires protégées de Colombie ... 90

Figure 25 Nombre estimé de migrants en provenance du Venezuela en Colombie, par département (2019) ... 94

Figure 26 Cercle vertueux de la paix ... 95

Figure 27 Schéma conceptuel de la recherche ... 97

Figure 28 Migrations internes récentes : interdépartementale ... 101

Figure 29 Carte physique de Colombie ... 122

Figure 30 Carte des climats de Colombie ... 123

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Liste des tableaux

Tableau 1 Technique de collecte de données ... 18 Tableau 2 Stratégie d'identification et de recrutement ... 19 Tableau 3 Cadre opératoire de la recherche ... 29 Tableau 4 Tableau comparatif entre les prévisions en adéquation avec les Accords de paix et les faits ... 65

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Liste des sigles

ARN Agence pour la réincorporation et la normalisation BACRIM Bandes criminelles émergentes

CIA Agence centrale du renseignement CICR Comité international de la Croix-Rouge

CINEP Centre d’investigation et d’éducation populaire CIPDH Comité international pour les droits de l’Homme

CNLE Centre national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale

CNTRL Centre national de ressources textuelles et lexicales DANE Département administratif national des statistiques EIT École internationale de tourisme

ELN Armée de libération nationale

FARC Forces armées révolutionnaires colombiennes

FARC-ep Forces armées révolutionnaires colombiennes – Armée du peuple IRIS Institut de relations internationales et stratégiques

M-19 Mouvement du 19 avril

ODD Objectifs de développement durable

OMD Objectifs du millénaire pour le développement ONG Organisation non gouvernementale

ONU Organisation des Nations unies

PDET Programme de développement avec approche territoriale PDPMM Programme de développement et de paix du Medio Magdalena PND Plan national de développement

PNNC Parcs nationaux naturels de Colombie

PNUE Programme des Nations unies pour l’environnement PTN Points de transition et de normalisation

RRI Réforme rurale intégrale

SIAC Système d’information environnementale de Colombie SINAP Système national des aires protégées

UNESCO Organisation des Nations unies pour l’éducation, les sciences et la culture URSS Union des républiques socialistes soviétiques

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« Aux habitants-citoyens qui, chaque jour, inventent l’idée de justice et la font vivre » J. Lévy, 2018

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Remerciements

Je tiens à remercier tout particulièrement :

La professeure Nathalie Gravel, ma directrice de recherche, qui m’a donné la grande opportunité de pouvoir réaliser ce projet et qui m’a fait ouvrir les yeux quant à mes capacités d’adaptation et de travail.

Le deuxième membre de mon comité de direction, Étienne Berthold, qui a été d’une très grande aide quant à cette recherche ainsi que d'un soutien moral très apprécié.

Encore tout particulièrement Étienne, pour avoir eu les mots justes, ce dont j’avais besoin pour aboutir ce projet.

Ma famille, et notamment ma maman, qui m’ont permis de venir étudier à l’Université Laval, et qui m’a soutenue plus que quiconque.

Mes amis, Jonathan, Émilie, Julie, Camille et Daniel, qui m’ont aidée et guidée tout au long de mon processus de recherche.

Et pour finir, les professeurs de l’Universidad del Norte de Barranquilla, notamment Angel Tuiran, Luis Trejos, Sara Elena Plata, Fernando Giraldo Garcia et Jairo Agudelo Taborda du département de sciences politiques et relations internationales, ainsi que la société colombienne qui m’ont accueillie à bras ouverts, et que j’affectionne désormais comme une deuxième famille.

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Introduction

Lorsqu'un État est en conflit armé avec un autre État ou encore, dans une situation de conflit interne, les premières victimes sont toujours les civils. Ainsi, que ce soit en milieu rural, périurbain ou urbain, les populations déjà marginales, du fait de leurs origines, de leurs ethnies, de leurs religions ou encore de leurs classes économiques et sociales, se voient être prises dans un cercle vicieux de la précarité. Dans le cadre du conflit armé colombien entre le Gouvernement et les FARC-ep1, il sera expliqué dans cette recherche quelles en ont été les

premières victimes ainsi que les défis auxquels ces dernières ont été et sont encore aujourd'hui confrontées. Pour ce faire, les accords de paix signés en 2016 entre les deux parties serviront de guide quant aux objectifs à atteindre pour le maintien de la paix, ainsi qu'à un certain niveau de durabilité quant à l'établissement communautaire et l'intégration de ces populations vulnérables. Par "établissement", on entend ici le fait de s'établir quelque part, durablement, en respectant les principes de dignité humaine et en respectant l'environnement (UNESCO, n.d.).

Problématique

Le conflit interne colombien a des caractéristiques similaires avec d'autres conflits armés dans le monde, de par les répercussions qu'il a eu sur l'ensemble de sa société. D'après Catherine Withol de Wenden, directrice de recherche émérite au CNRS et spécialiste des migrations et politiques migratoires, la présence d'un conflit interne dans un pays engendre le déplacement des populations, pour une question de sécurité, leur infligeant ainsi de faire face à des situations socio-économiques précaires (Wihtol de Wenden, 2016 : 16). À titre d'exemple, les conflits internes mondiaux auraient engendré le déplacement de près de 32,3 millions de personnes en 2014 (ibid), et particulièrement en Colombie, où deux millions de personnes entre 1985 et 2000 ont dû se réétablir, parfois même plusieurs fois, soit 2,5 pour 1 Forces armées révolutionnaires de Colombie, Armée du peuple, principale guérilla en Colombie, d'idéologie marxiste, bolivariste, nationaliste de gauche. Communément appelées "FARC", mais le sigle exact est FARC-ep.

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cent de la population nationale (Meertens, 2001 : 120). L'organisme Human Rights Watch lui, estimait qu'en 2013 le nombre de la population déplacée par le conflit interne colombien à près de cinq millions depuis le début du conflit, et admettait l'idée que 150 000 personnes en moyennes fuyaient encore chaque année les violences (Human Right Watch, 2014 : 1). Ceci en fait la seconde population de déplacés mondiale après la population syrienne (UNHCR, 2019a). Seulement pour l'année 1999, le nombre de déplacés par la violence en Colombie était estimé à 290000 personnes (Meertens, 2001 : 120). Le nombre s'élevait à 315000 pour l'année 2000 (ibid). Dans de telles situations, les populations les plus vulnérables vivant dans des milieux ruraux ou dans des situations précaires en sont le plus souvent les premières victimes et doivent plusieurs fois au cours de leur vie se ré-établir, et ce, dans des conditions allant à l'encontre de la durabilité et de leur bien-être (Wihtol de Wenden, 2016). Selon Angela Consuelo Carrillo, du Comité international de la Croix-Rouge, entre trois et quatre millions de personnes étaient déplacés à l'intérieur du pays, et 500000 autres se sont réfugiées dans les pays voisins depuis le début du conflit en 2009 (Consuelo Carrillo, 2009 : 529). Cependant, d'après Amnistie Internationale, l’unité chargée de l'assistance et de la réparation pour les victimes du conflit en Colombie décompterait plus de sept millions de personnes contraintes de quitter leur foyer, dont 400000 depuis la signature des accords de paix (UNHCR, 2019 : 100 ; Amnistie Internationale, 2019 :1). Ces déplacés sont majoritairement issus des peuples autochtones, des communautés de petits paysans et d'origine afro-colombienne, vivant dans des zones pauvres et dangereuses (UNHCR, 2019). Ces chiffres permettent de faire état de l'ampleur du phénomène qu'est le déplacement interne en Colombie, mais laissent aussi deviner les impacts que celui-ci peut avoir sur les milieux non seulement ruraux, mais aussi urbains. Concernant les milieux ruraux, ces impacts s'illustrent principalement par leur désertification ainsi que par leur contrôle par d'autres groupes armés illégaux comme l'armée de libération nationale (ELN) (Lamarre-Bolduc, 2015 : 47). Quant aux milieux urbains, on peut remarquer une densification non contrôlée, ou mal gérée, avec l'émergence de "barrios2" précaires et/ou de bidonvilles, ainsi qu'une

augmentation de la violence et de la pauvreté. De plus, la proximité avec la frontière vénézuélienne est à prendre en considération. Les contextes sociopolitique et économique de

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ce pays engendrent un très grand nombre de migrations vers la Colombie, ce qui amplifie les complications qu'impliquent déjà les migrations internes dans cette région.

Donny Meertens3 écrivait sur ce qu'engendraient ces déplacements dans les centres

urbains en insistant sur le "réaménagement territorial et de croissance vertigineuse et désordonnée [...] dans un pays dans lequel les villes hébergeaient déjà plus de 70 pour cent de la population nationale" (Meertens, 2001 : 120). Compte tenu des déplacements forcés souvent répétitifs, il est pertinent d'étudier la question de la durabilité des établissements humains au sein du pays.

Territoire à l'étude et période d'analyse

La période d’analyse pour ce projet de recherche couvre approximativement de 1950 à nos jours, dans le but de comprendre les origines du plus grand et long conflit interne armé en Amérique Latine. Cependant, il traitera particulièrement de la situation actuelle en Colombie, notamment depuis la réelle volonté de l’ancien Président Juan Manuel Santos4 de

pacifier le pays pour arriver à la signature finale des accords de paix entre le gouvernement colombien et l’ancienne guérilla des FARC le 24 novembre 2016.

Le territoire à l’étude quant à lui se concentre sur la partie nord-est du pays, c’est-à-dire la partie caribéenne, et précisément les départements de l’Atlantico, du César, du Magdalena et de la Guajira entourés en rouge sur la carte suivante (Figure 1). Cette zone a été prédéfinie dans le cadre de la préparation de la recherche en pensant à l’enquête sur le terrain, parce que c’est une région où il se trouvait auparavant des combattants des FARC. Aussi plusieurs zones de transition et campements temporaires étaient relativement proches de l’Université d’accueil (Universidad del Norte de Barranquilla) où il était initialement prévu de se rendre. Si cette zone a été choisie, c’est également car c’est une région 3 Donny Meertens est une docteure en sciences politiques et sociales qui étudie les nombreuses problématiques en Colombie

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relativement sécuritaire notamment grâce à l’expansion du tourisme, malgré la proximité avec la frontière vénézuélienne qui reste dangereuse.

Afin d’assurer le bon déroulement de la recherche, un premier séjour exploratoire a eu lieu en mai-juin 2018, puis un deuxième de mars à mai 2019.

Figure 1 Carte de localisation de la Colombie et de la région à l'étude

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Désaccord idéologique à l'origine du conflit interne

Pendant presque plus de six décennies, sans aucune véritable interruption, la Colombie a connu une grande violence. L'État colombien, tout comme le Centre national de la mémoire historique,considèrent que le conflit a commencé en 1958 (Sauvain, 2014 : 1). Cependant, cette affirmation est largement discutée dans le monde de la recherche. Certains auteurs auraient quant à eux, plutôt tendance à dire que ce dernier aurait trouvé racine en 1948, date à laquelle débute la Violencia, guerre civile entre les libéraux et les conservateurs (Pécaut, 2008).

L'assassinat du leader du Parti libéral colombien, Jorge Eliécer Gaitan, en avril 1948 a provoqué une sédition armée, surnommée en Colombie "Bogotazo" (coup de Bogota). À la vue de sa popularité auprès des classes moyennes colombiennes du fait de son désir d'instaurer de grandes réformes sociales en tant que défenseur de causes populaires, Gaitan avait énormément d'opposants (parti conservateur, parti communiste, CIA, oligarques colombiens). C'est pourquoi, même si l'identité de l'assassin a été rendue publique, celle du commanditaire du meurtre ne sera certainement jamais résolue (Sauvain, 2014 ; UNESCO, n.d.).

La Violencia, qui aura duré de 1948 à 1960 environ, a engendré la mort de plus de 250000 personnes selon le Centre international pour la paix et les droits de l’homme (UNESCO, n.d.). Parallèlement à cette insurrection armée et aux émeutes ayant eu lieu dans diverses parties du territoire, une première vague de radicalisation d'opposition au gouvernement colombien en place a vu le jour (Dufort, 2007). En plus de cette guerre civile, la Guerre froide (1945-1991) qui éclata principalement entre les États-Unis et l'URSS eut pour conséquences de mettre plus ou moins fin à la Violencia en 1957 de par un pacte politique entre le parti libéral et le parti conservateur, appelé "El Frente Nacional" (le Front

National) par peur de l'arrivée au pouvoir d'un parti communiste, schéma qui apparaît dans

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communisme, se voyant ainsi exclus de la vie politique ont de ce fait été les acteurs et les causes d'une seconde vague de radicalisation en réponse au bipartisme institutionnalisé et aux inégalités de la globalité des facteurs socio-économiques (UNESCO, n.d.).

Face à cette nouvelle insurrection, suite à l'arrêt officiel de la Violencia, les gouvernements successifs ont choisi de suivre un modèle de développement économique accéléré (Celis, 2008). Ce modèle consistait à industrialiser les campagnes et à exproprier les terres des Autochtones et des petits paysans au profit des grands propriétaires terriens et des grandes firmes multinationales, incitant ainsi au conflit (idem). L'agrobusiness6, largement

prédominant concernant la gestion économique de l'agriculture en Colombie, est très largement rejeté par les expropriés, du fait de l'inégale distribution des terres agraires et de l’utilisation systématique de la violence par les paramilitaires pour s’accaparer les terres (France Culture, 2019). Ainsi, la redistribution de celles-ci est au cœur du conflit politico-social colombien, et permet l’émergence d’une autodéfense civile dont la République de

Marquetalia fut un des exemples des plus connus. Cette dernière était une zone dans le

sud-ouest de Bogota, proche de la municipalité de Planadas, dans le département del Tolima qualifiée d’enclave de guérilleros libéraux, ou encore de territoire autonome, constituée en 1958 (Figure 2). Ce territoire servait de camp de « base » pour les guérilleros libéraux antigouvernementaux et servait également de refuge pour les populations fuyantes, victimes des violences infligées par les paramilitaires toujours dans le processus de développement du secteur agroalimentaire (CiudadCCS, 2014). En 1964, l’armée colombienne parvint à reprendre la République de Marquetalia, et autres territoires autonomes dans le but de réguler la croissance du nombre de guérilleros en Colombie, seulement certains d’entre eux réussirent à s'enfuir dans les territoires forestiers, et formèrent quelque deux années plus tard les Forces armées révolutionnaires de Colombie en 1966 (CIPDH, 2008).

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Figure 2 Localisation de la République de Marquetalia

Source : CiudadCCS, 2014

Forcément, ces quelques guérilleros qui ont réussi à s'évader et à se regrouper dans des endroits sûrs ont essayé par tous les moyens de financer leur lutte, ce qui a engendré de nombreuses répercussions sociales, économiques et territoriales en Colombie.

Répercussions socio-économiques et territoriales

Dès le début des années 1970, le marché de la drogue et notamment de la marijuana se voit être le plus avantageux quant au financement de la guérilla. Même si au départ, les FARC étaient réticentes quant à la culture et à la consommation de drogues du fait qu’elles l’associaient à la « petite bourgeoisie », ces dernières se sont aperçues que c’était une source de financement intéressante, surtout à une époque où les guérilleros n’avaient que peu de moyens (Gandilhon, 2011). Les principes initiaux de bases de la guérilla inspirés d'idées marxistes et stalinistes qui visaient à valoriser l'autosubsistance paysanne par les cultures vivrières ont été rapidement laissés de côté (idem). L’ELN7 va par ailleurs également bannir

dans un premier temps l’utilisation de tels procédés quant à leur financement, et tuera même

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les paysans qui ne respecteraient pas le non-droit à cultiver, transformer ou vendre tous dérivés de la cocaïne. Dès la fin des années 1970, ils se sont tournés vers la production de cocaïers, qui représentait un trafic bien plus lucratif. Il s’agissait dans un premier temps de transformer la pâte de coca dans les villes, puis, d’installer massivement des cultures de coca dans les régions colombiennes reculées, là notamment où ils exerçaient une plus grande influence sur les populations locales, à majeure partie paysanne, notamment via d’expropriation des terres (Gandilhon, 2011). Durant cette période, environ 80 pour cent des cultures de coca (environ 10000 ha) se trouvaient dans les régions contrôlées par la guérilla des FARC (idem : 145). De ce fait, les paysans trouvaient une source de revenus supplémentaire à leurs activités principales.

Grâce à l’essor considérable du commerce de la cocaïne, vouée notamment à être commercialisée en Europe et en Amérique du Nord, les FARC ont vu leurs bataillons renforcés, passant ainsi de cinq fronts8 à 24 en l’espace de sept années, ce qui pour eux et

pour leurs revendications, était absolument remarquable. Pour maintenir cet essor, les guérilleros ont proposé leur protection aux cultivateurs et trafiquants de coca, en échange de financement, grâce à quoi, ils ont pu retrouver leur rôle de protecteur des classes les plus populaires face aux oligarques agraires et aux narcotrafiquants (idem : 148).

Ainsi, les territoires les plus largement dominés par les guérillas étaient les plus stratégiques quant à l’exploitation des ressources nécessaires cultivables, en milieux ruraux. Et s’ils étaient dominés par les guérillas, cela n’enlève pas pour autant la forte présence des narcotrafiquants, de l'oligarchie agraire, des paramilitaires et autres bandes criminelles qui avaient tout autant d’avantages à être localisés dans ces zones. L’insécurité liée à tout ce commerce et à la présence de groupes armés illégaux est devenue une contrainte à la prospérité économique. En effet, selon Cardenas (2007 : 222), le PIB annuel de Colombie a diminué de 2 points de pourcentage entre 1980 et 2000, conséquence directe de la présence de cette violence. De ce fait, l’investissement fait par le gouvernement dans le budget pour la sécurité et la défense a nettement augmenté et a eu pour répercussions directes la diminution des budgets des secteurs dont la population du pays était directement bénéficiaire,

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comme la santé, l’éducation, les infrastructures, etc. Par exemple, durant le mandat d’Alvaro Uribe, président conservateur, le budget de 2008 de la défense et de la sécurité nationale équivalait à 6,5% du PIB, soit la somme des budgets alloués à l’éducation, la santé et à l’environnement (ibid). Aussi, à partir du mandat du prédécesseur de Uribe, Andres Pastrana, une lutte contre le narcotrafic a été instaurée avec l'appui des États-Unis (dirigé par Bill Clinton à l'époque), dans le cadre du Plan Colombia en 2000 (Gravel, 2009). Même si initialement, ce pacte avait pour but d'investir dans les aides sociales et le développement des institutions, les États-Unis ont "massivement investi dans les opérations militaires contre le narcotrafic" en cherchant à éradiquer les plans de cocaïers et en finançant à hauteur de plus d’1,3 milliard de dollars US pour les deux premières années du programme pour renforcer et moderniser les forces militaires du pays, dénaturant ainsi les véritables intentions de Pastrana (idem : 228, Lamarre-Bolduc : 6). On peut donc en déduire que les populations ont dans tous les cas été victimes du narcotrafic et du conflit. Car en plus des répercussions économiques que l’on pourrait qualifier d’indirectes pour les populations locales (investissement économique du gouvernement dans tel ou tel secteur), celles-ci ont été victimes de la diminution de la productivité de leurs terres du fait qu’elles devaient partager les rentes avec les groupes armés illégaux qui les contrôlaient (Gandilhon, 2011). En plus de ces coûts sociaux, le Plan Colombia a largement eu des effets sur l'environnement, notamment par la fumigation aérienne des plants de cocaïers (Gravel, 2009).

Difficilement quantifiables, nous ne pouvons qu’imaginer les répercussions psychologiques que le conflit a pu avoir sur les populations locales sans cesse partagées, à savoir qui les protégera le mieux des autres. D’un côté, les guérilleros essayaient de recruter le plus souvent de force de nouveaux partisans, de l’autre, les paramilitaires9 semés la terreur,

sans compter les militaires qui, souvent corrompus, se servaient de leur position pour faire chanter les locaux. S’ils ne parvenaient pas à avoir ce qu’ils voulaient, ils accusaient les 9 Les paramilitaires sont le résultat d'une stratégie politique de l'État colombien afin de contrer les insurrections armées (guérillas). C'est à partir des années 1960 que le gouvernement commence à créer des groupes paramilitaires, au départ sous l'égide de l'armée pour répondre à des problématiques locales. Ces groupes armés étaient de ce fait, légitimés, constitutionnalisés et légaux. Selon certains spécialistes, les paramilitaires étaient financés par l'élite traditionnelle, et pour d'autres, le narcotrafic est à considérer. À partir des années 1993 jusqu'au début des années 2000, les paramilitaires s'octroient certains pouvoirs de par les puissances économiques et politiques qu'ils incarnent grâce au narcotrafic qui leur offre grand nombre de ressources et leurs permettent de se distancer des élites traditionnelles les finançant (Duffort, 2007 : 2 à 5).

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personnes d’être affiliées de près ou de loin aux guérillas pour les emprisonner (Célis, 2012). De ce fait, les habitants ne pouvaient pas réellement compter sur une liberté d’expression, par peur de représailles de peu importe le groupe armé se trouvant face à eux. La Colombie a ainsi dû jongler entre les nombreux différends au sein de la société, qui ont engendré la violence partisane des années 1940, la violence des guérillas des années 1960, la violence du narcotrafic des années 1980 et celle du paramilitarisme des années 1990 (idem : 243). Tous ces conflits s'entremêlant, n'en formèrent qu'un seul au final.

Ajoutons à cela les enlèvements contre rançons ou pour de nouvelles recrues, vols, extorsions, meurtres, viols, disparitions, recrutement de mineurs sous la contrainte, etc., qui n’ont fait que perpétuer les sentiments de peur. Nous pouvons parler ici, concernant le cas de la Colombie, de violence structurelle, théorie élaborée par Johan Galtung. La violence structurelle est celle « qui empêche les individus de réaliser leur plein potentiel en leur enlevant les moyens pour y parvenir. Elle n’est pas forcément exercée par un individu en particulier, ni forcément contre une personne, mais par une structure ou une dynamique contre un groupe social » (idem : 245).

Accords de paix de 2016

C’est finalement en novembre 2016 que le gouvernement colombien et l’ancienne plus importante guérilla du pays sont parvenus à s’entendre quant à la pacification du pays (Figure 3) (ministère des Relations extérieures, gouvernement de Colombie, 2016 : 7). En effet, après plus de cinquante ans de conflit, cet accord de paix signé mit fin aux affrontements armés entre le gouvernement et les FARC. Cet accord cherchait à sa signature à concentrer tous les efforts dans le but de construire une paix durable et stable pour l’ensemble des Colombiens. Dans cet accord, les FARC se sont engagées à déposer leurs armes et à cesser toutes les activités illégales, sous la supervision de l'Organisation des Nations unies. Il inclut aussi un plan de développement agricole intégral de par un accès

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Grâce à cet accord, les FARC devaient être soutenues quant à leur réinsertion à la vie en société et les civils avaient pour garantie leur sécurité, la fin des hostilités en milieu rural ainsi qu’une réelle opportunité de développement économique sans avoir recours au narcotrafic. L'accord se constitue principalement des points suivants (Traduction libre, ministère des Relations extérieures, gouvernement de Colombie, 2016 : 8-9):

- Les FARC déposent les armes et cessent les affrontements.

- Il y aura un système de justice pour le rétablissement de la vérité, la réparation aux victimes, ainsi que des peines judiciaires.

- L’accord vise également à briser l’abîme qui existe entre la ville et la campagne, et ainsi mettre fin à la pauvreté de millions de Colombiens qui ont été pris entre le conflit et l’illégalité. Un plan d’investissement pour la campagne a été convenu avec des programmes d’accès à la terre, aux biens, aux services et aux infrastructures pour donner de réelles opportunités de développement et de qualité de vie aux agriculteurs.

- Pour s’attaquer au problème du trafic de drogue, un programme est mis en place pour les producteurs de coca qui proposera des options légales de subsistance.

- Les membres des FARC, désarmés, pourront participer à la politique10.

En clair, cet accord de paix inclut de : - Mettre fin au conflit interne ;

- Offrir vérité, justice et réparation aux victimes ; - Lutter contre le narcotrafic ;

- Offrir de meilleures opportunités dans les milieux ruraux ;

10 Las FARC dejan las armas y cesan los enfrentamientos ; - Habrá un sistema de justicia para que los

responsables cuenten la verdad, reparen a sus víctimas y sean sancionados. Las sanciones incluyen resticciones efectivas de la libertad. Si no reconocen responsabilidad, irán a la cárcel ordinaria hasta por 20 años ; - El acuedo busca igualmente romper el absimo que existe entre el campo y la ciudad, y así acabar con la pobreza en que viven millones de colombianos quienes por el abandono y la falta de oportunidades se han visto atrapados entre el conflicto y la ilegalidad. Se acordó un plan de inversiones para el campo con programas de acceso a tierras, a bienes, a servicios productivos y a infraestructura para darles a los campesinos oportunidades reales de desarrollo y calidad de vida ; Para atacar el problema del narcotráfico, se establece un programa para los campesinos cultivadores de coca a quienes se les ofrecerán opciones legales de subsistencia con un nuevo programa de substitución de cultivos ilícitos y se harán inversiones en las regiones golpeadas por la guerra para que todo el país se beneficie de ello. Las FARC se comprometieron a acabar sus vínculos con el narcotráfico y a apoyar los esfuerzos del Estado para combatirlo ; - Las FARC, sin armas, podrán participar en política. Además, se promoverá la participación y se derán garantías a los movimientos sociales para que hagan política ; Esta es una oportunidad de todos los colombianos para transformar asuntos primordiales que durante décades no han podido ser solucionados y que por el conflicto armado se han visto frenados.

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- Soutenir à la participation politique et à la démocratie, et - La consolidation de la paix et le respect des accords.

Le respect ou non-respect de ces six points principaux sera discuté au cours de ce travail de recherche.

Figure 3 Juan Manuel Santos et Timoleon Jimenez se serrent la main, concluant les accords de paix historiques à La Havane

Source : Acosta (AFP), 2016

Question de recherche

Ce qui conduit donc à la question de recherche qui est la suivante : En quoi les populations vulnérables de Colombie peuvent-elles participer à leur propre établissement durable à l’échelle de leur communauté, des milieux et des individus ?

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Objectifs de recherche

Dans le but de répondre au mieux à cette question de recherche, l’objectif principal de ce travail est d’analyser la dynamique sociopolitique influençant l’insertion dans la société civile des populations marginalisées depuis les accords de paix en milieu rural colombien, tout particulièrement dans la région caribéenne.

Les objectifs spécifiques quant à eux s’agissent :

- D’étudier les mécanismes gouvernementaux à différentes échelles agissant en faveur de l’établissement durable des populations rurales colombiennes marginalisées ;

- D’évaluer l’adéquation des différentes provisions des gouvernements avec les besoins des populations marginalisées mises en œuvre pour faciliter leur établissement durable (respect de l’environnement, sécurité, accès à la terre, accès à l’habitat permanent), et

- De vérifier le degré d’intérêt et d’implication des populations cibles dans le processus de gouvernance locale.

Hypothèse de recherche

L’hypothèse de ce travail de recherche est que la gouvernance rurale héritée des années de conflit en Colombie a favorisé une centralisation du pouvoir et, de là, a limité les opportunités d’implications citoyennes quant à la gestion des petites et moyennes collectivités, nuisant ainsi à l’établissement durable des communautés marginalisées et conduisant à un retour probable de la violence.

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Tout d’abord, cette recherche demeure pionnière dans le sens où les accords de paix en Colombie restent récents et discutables. Dans les quelques études qui ont été réalisées à ce sujet, rares sont celles qui traitent de près ou de loin des impacts socio-économiques des accords de paix concernant les anciens combattants des FARC-ep, du point de vue de leur habitat et de leur intégration sociale.

De plus, la question était d’autant plus intéressante du fait du changement de gouvernement en 2018, passant d’un gouvernement « proaccords » vers un autre plus conservateur et plus exigeant quant à certains points des accords.

C’est pourquoi cette question suscite un réel intérêt pour la communauté scientifique, en tant qu’apport, très humble, pour la recherche.

Limites et difficultés de la recherche

En premier lieu, je pense qu’il paraît évident de mentionner les difficultés linguistiques auxquelles j’ai été confrontée. En effet, n’ayant que de simples bases en espagnol en commençant ma maîtrise, et ayant pour volonté de ne pas avoir recours à un interprète, j’ai dû pour commencer à suivre un cours d’espagnol à l’université. Bien entendu, une fois sur le terrain, l’apprentissage s’est fait beaucoup plus rapidement, mais a néanmoins été difficile à toujours comprendre, du fait de la manière de parler (accent, mots différents...) changeante selon l’endroit où je me trouvais. En effet, durant les conférences auxquelles j’ai eu la chance d’assister à Bogota pour le Ted X sur la Résilience ou encore à l’Universidad del Norte de Barranquilla dans le cadre de plusieurs évènements, la compréhension des intervenants était relativement facile du fait de leur espagnol limpide. Cependant, lorsqu’il s’agissait d’étudiants parlant notamment le « costenho11 », qui intervenaient pour présenter

leurs recherches, ou encore témoigner de leur vécu, il a été parfois très difficile de comprendre. J’ai alors donc dû enregistrer et décortiquer leurs paroles pour être certaine d’avoir une bonne compréhension de ce qui était dit.

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Il est arrivé également à plusieurs reprises de me sentir frustrée face à certains répondants, ne sachant pas comment réagir à leurs dires, soit par manque de vocabulaire, par manque de confiance en ma capacité à m’exprimer ou encore simplement par peur de les offusquer étant donné le contexte difficile de ma recherche.

Deuxièmement, une des difficultés auxquelles j’ai été confrontée et certainement la plus frustrante a été qu’il fut difficile de pouvoir me faire une place en tant que chercheuse. Du fait de ma moindre expérience en recherche, il a été compliqué pour moi de pouvoir rencontrer des acteurs clés, qui soit ne prenaient pas la peine de répondre à mes courriels et/ou appels, ou qui alors me répondaient qu’ils me rencontreraient, mais ne me donnaient plus de nouvelles par la suite. De ce fait, le recrutement a été très formateur quant à ma capacité de résilience et d’adaptation face aux contraintes. En effet, j’avais prévu de me rendre dans les zones de transition où se trouvaient les anciens combattants des FARC-ep, mais malheureusement cela était impossible pour les raisons énoncées précédemment et également par contraintes de sécurité personnelle, étant donné qu’il était impossible de m’y rendre seule. Le gouvernement canadien avait par ailleurs émis à cet effet concernant la frontière entre la Colombie et le Venezuela, proche de la région à l'étude.

Aussi, j’ai été confrontée à ce que j’interprèterais comme de la méfiance. Fréquemment, j’ai pu constater que certains répondants me répondaient d’une manière beaucoup trop réfléchie ou prudente, sûrement dû au fait de la peur des représailles. Avec la perpétuation des assassinats de leaders sociaux ou politiques, il se pourrait que les répondants aient pensé que je les espionnais ou bien que je cherchais à leur soutirer des informations dans le but de les dénoncer.

Pour terminer, la sécurité est un des points importants à également soulever. En effet, j’aurais pu contacter plus d’acteurs clés qui auraient pu m’aider à me rendre dans d’autres ZVTN mais malheureusement, la dissidence de la part de certains guérilleros, la présence accrue du narcotrafic ou encore des bandes criminelles (BACRIM) dans ces régions-là aurait fait l’objet d’un trop grand danger à mon égard. C’est pourquoi j’ai quand même préféré rester dans la région Caribe, qui reste relativement bien protégée de ces perturbateurs, du fait

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de la présence du tourisme notamment. J’aurais également pu me rendre dans les villes et villages aux alentours de ces zones de transitions de moi-même pour pouvoir rencontrer des locaux, cependant, le corps enseignant avec qui j’étais en lien à l’Universidad del Norte de Barranquilla me l’ont fortement déconseillé, pas parce qu’il me serait forcément arrivé quelque chose à cause de la présence des anciens combattants ou des dissidents, mais plutôt pour éviter un quelconque problème avec notamment les migrants vénézuéliens extrêmement présents dans cette région, qui par désespoir, s’en prennent quelques fois aux civils.

Il m’a donc fallu pour affronter toutes ces difficultés nécessitant une certaine adaptation, m’armer de patience. En effet, j’ai pu constater que malgré tout, nous pouvons toujours obtenir des données malgré le manque d’accessibilité des données, puisque ce manque-là représente un fait, est expliqué par un contexte et de potentielles conséquences. Cela a également permis de faire en sorte que la recherche s’adapte bien au terrain, et soit le reflet de la réalité. Ainsi, une recherche théorique sera plus appropriée et appliquée.

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1. Méthodologie de cueillette et d'analyse des données

Cette recherche est de type hypothético-déductif et va reposer sur des données qualitatives recueillies sur le terrain et sur des articles scientifiques lus au préalable, ce qui constitue la littérature grise, qui inclut également des données statistiques et des documents gouvernementaux. Il faut garder à l'esprit que celle-ci est exploratoire et que même si des données empiriques ont été recueillies au sein des communautés scientifiques, des productions locales ou internationales, ainsi que la littérature gouvernementale ont été les plus significatives quant au questionnement de la recherche.

Nous pouvons la comparer à une étude de cas explicative, qui cherche entre autres à prendre en compte le contexte dans lequel le phénomène étudié évolue " afin d'en faire une étude intégrée" (Gravel, 2011a : 19). À travers celle-ci, le chercheur observe les relations entre les différentes variables étudiées, ce qui en permet donc une représentation authentique (idem).

Cette méthodologie s’est avérée être la plus significative quant au sujet de recherche du fait qu’une telle problématique ne pouvait être étudiée que par le ressenti vécu sur le terrain, en tant que chercheuse, mais surtout pour retranscrire au mieux la réalité vécue par les habitants et par les répondants. Tenant compte également de la particularité de chaque phénomène dépendamment du milieu, des individus, cultures, histoire qui lui sont propre, cette étude de ce type-là est des plus adéquates (Gagnon, 2011 : 21).

Compte tenu de la récente signature des accords de paix en Colombie et du manque d'études réalisées à ce sujet, les informations les plus importantes et les plus significatives relèvent des données primaires, c'est-à-dire des données scientifiques déjà existantes, ainsi que des données secondaires, recueillies sur le terrain, dont les discours qui ont été analysés. Il s'agit donc d'une étude plutôt exploratoire, qui implique de pouvoir d'adapter aux réalités du terrain.

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1.1. Techniques de collecte de données primaires

Les données primaires utilisées pour ce projet de recherche ont été essentiellement celles récoltées sur le terrain, par le biais d’entretiens semi-dirigés, d’assistance à des conférences et de conversations spontanées.

Tableau 1 Technique de collecte de données

Options de collectes de données Sources et méthodes Sujets et/ou répondants

Objectifs Traitement des données Collecte de données auprès d'individus - Données primaires - Entretiens semi-dirigés (allant de 30 à 60 minutes) - Observations participantes - Conférences - Acteurs clés des communautés -Représentants des ministères compétents - Chercheurs et scientifiques - Déplacés - Entrepreneurs - Étudiants - Analyser les différentes perceptions de la dynamique sociopolitique colombienne - Étudier les mécanismes gouvernementaux en faveur des établissements humains durables - Guide d'entretien -Enregistrements et retranscriptions - Analyse de discours - Prise de notes Données et textes existants - Données secondaires - Littérature scientifique -Témoignages -Actualités /Journaux locaux - Littérature et rapports gouvernementaux - Littérature et rapports d'ONG - Statistiques - Études de cas - Situation politique, sociale et économique du pays et de la région spécifique à l'étude - Contexte dans lequel évolue le conflit - Conflits internes - Guérillas - Programmes de développement - Entrepreneuriat durable - Vérifier le degré d'intérêt et d'implication des populations par le processus de gouvernance territoriale - Évaluer l'adéquation des provisions avec les besoins des populations

- Analyse de contenu

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1.1.1. Recrutement

Pour ce projet de maîtrise, deux enquêtes sur le terrain ont été nécessaires. Un premier, du 20 juin au 15 juillet 2018 pour amener à de premiers contacts avec les professeurs ou potentielles recrues pour les entrevues. Un deuxième, du 20 mars au 20 mai 2019, où cette fois les entrevues avec les répondants ont toutes été réalisées.

Le recrutement des répondants a été influencé par les connaissances faites lors du premier séjour en Colombie, notamment les professeurs de l’Universidad del Norte de Barranquilla ainsi que Nathalie Gravel, directrice de recherche de ce mémoire.

Tableau 2 Stratégie d'identification et de recrutement

Type de participants Nombre de participants Stratégies d'identification Stratégies de recrutement Dates des

rencontres Lieux Activités Professeurs (Sciences politiques, Relations internationales, Anthropologie) 6 - Universidad del Norte - Conseils - Courriel - Demande en personne de rendez-vous - Mai à juin 2018 - Mars à mai 2019 - Barranquilla - Santa Marta -Entretiens semi-dirigés -Observation participante Acteurs clés, Conférenciers, Spécialistes 14 - Universidad del Norte - Ted X Bogota - Auditoire - Février 2019 - Mars à mai 2019 - Québec - Barranquilla - Bogota -Entretiens semi-dirigés (2) -Conférences (12) Entrepreneurs 3 - Presse - Réseaux sociaux - Courriel - WhatsApp - Skype - Mars à mai 2019 - Santa Marta - Paris - Bogota -Entretiens semi-dirigés Déplacés 3 - Conseils - Presse - Connaissances - Courriel - WhatsApp - Avril et mai 2019 - Santa Marta - Barranquilla - Québec -Entretiens semi-dirigés -Observation participante 1.1.2. Entretiens semi-dirigés

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L’outil principal de collecte de données pour mener à bien cette recherche a été de réaliser des entrevues semi-dirigées auprès d’individus touchés directement ou indirectement par le conflit armé et les accords de paix entre le gouvernement et les anciens combattants de la guérilla des FARC en Colombie caribéenne.

Au total, onze personnes ont accepté de réaliser des entrevues semi-dirigées, ce qui est peu, mais il a été très difficile de recruter des participants, qui restaient toujours flous dans leurs réponses pour d’éventuelles rencontres, sûrement du fait du climat sociopolitique compliqué et potentiellement dangereux. Les entretiens avec les professeurs se sont toujours déroulés au sein de l’Universidad del Norte, dans leurs bureaux ou bien dans la cafétéria de leur département. Concernant les entrepreneurs, ils ont été réalisés à distance par le biais de l’application Skype ou encore dans des lieux publics (café, parc urbain). Puis, pour ce qui est des déplacés, premières victimes du conflit, les rencontres ont également eu lieu dans des lieux publics (cafés dans des centres commerciaux).

1.1.3. Conférences

Pour compléter la cueillette de données, assister à des conférences au sein de l’Universidad del Norte de Barranquilla, portant sur les mémoires et enjeux du conflit et des accords aura été un grand soutien (Figure 4).

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Figure 4 Photo prise lors de l'une des conférences données durant la "Catedra Europa"

Crédit photo : Irina Dziura, Barranquilla, 2019

La participation dans l’auditoire au Ted X de Bogota sur la résilience du conflit aura également permis d’étoffer de nombreuses données et d’en récolter davantage par le biais de témoignages des participants (Figure 4).

Dans le cadre du Ted X de Bogota, les conférences étaient tenues par :

- Efrén Martinez, docteur en psychologie, entrepreneur social ayant ouvert des centres pour lutter contre la toxicomanie ;

- German Corzo, biologiste marin, qui a consacré sa vie à démontrer la grande richesse écosystémique, et se bat pour la prise en compte de la pertinence de conservation et de préservation de la biodiversité ;

- Estrellas del Caribe, groupe de musiciens de San Basilio de Palenque créer en 1975 qui cherche à sauvegarder leur héritage culturel. C’est un exemple de la résilience qui a permis à cette ville de conserver les racines constituant son identité ;

- Pastora Mira, né dans le département de Antioquia très touché par le conflit, et a été lui-même ainsi que plusieurs générations de sa famille, à plusieurs reprises victimes du conflit armé. Il défend l’importance de préserver le travail de réconciliation et de réparation pour la paix en Colombie ;

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- José Luis Bonilla, ancien toxicomane vivant à Bogota qui s’en est sorti grâce à la culture et l’art et est maintenant directeur de sa propre école de musique ;

- Las Cantadoras de Bojaya, groupe de chanteuses nées dans la région de Bojayaa (Antioquia), qui à travers leurs chants dénoncent la violence qui s’abat sur leur communauté depuis le début du conflit armé ;

- Jineth Bediya, survivante d’un enlèvement et de séquestration du fait de sa profession de journaliste ;

- Jaime Toro, médecin spécialiste en neurologie ;

- Santiago Uribe Rocha, directeur du Bureau de la Résilience de Medellín, œuvrant pour la garantie d’une stratégie de politique publique générant développement et innovation sociale ; - Lurangeli Franco, chef du secteur de la coordination internationale et de défense de l’Unité

de police pour la consolidation de la paix (UNIPEP) ;

- Sofia Gomez, apnéiste et ingénieure civile de profession, fervente défenseuse de l’environnement, et ;

- Tupac Mantilla, également musicien et entrepreneur, d'origine autochtone.

Le public était principalement composé d'étudiants de diverses universités de la ville, ainsi que de journalistes et de professeurs. Ce Ted X avait pour objectif principal de mettre de l'avant les différentes manières dont la société colombienne pouvait s'inspirer quant à la manière de surmonter l'adversité et les conflits qui régnaient, et règnent encore aujourd'hui, en Colombie. À travers les différentes personnalités invitées et leurs connaissances, cette édition voulait faire rendre compte de la richesse culturelle du pays, de la richesse en termes de biodiversité, et de la richesse entrepreneuriale qui demeurent dans la société colombienne et qui permettraient de donner un souffle nouveau à tous les citoyens, après ces décennies de conflits.

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Dans le cadre de cette recherche, la "thick description12" aura été une tactique de

cueillette de données qui n'était pas initialement espérée. Cependant, cette méthode qui s'inscrit dans une démarche interdisciplinaire s'est présentée de manière tout à fait opportune pour le bon déroulement de la recherche. Généralement, un des objectifs principaux de l'observation est de permettre au chercheur, et donc indirectement au lecteur, de connaître le terrain de recherche dont il est question, ainsi que la réalité sociale qui en ressort (Hilgers, 2013). La thick description, "description épaisse" en français, et une technique de collecte de données généralement utilisée en anthropologie ou encore en ethnologie. Toutefois, cette méthode peut servir à tous les champs des sciences sociales. C'est pourquoi elle aura été des plus pertinente dans le cadre de ce travail de recherche. Celle-ci fut dans ses prémices élaborée par Gilbert Ryle. Toutefois, Clifford Geertz l'a rendue célèbre. La thick description est une technique de description de recherche qualitative qui permet de donne des descriptions et des interprétations détaillées de situations culturelles complexes observées (Ponterotto, 2006). À travers ces descriptions et ces interprétations, des informations sont données aux lecteurs afin de les aider à comprendre la pertinence des intentions et significations que sous-tendent les interactions sociales analysées (idem). En d'autres termes, cette technique de collecte de données fait référence au travail que doit faire le chercheur, c'est-à-dire décrire et interpréter l'action sociale ou le comportement observé dans un contexte en particulier (idem : 543).

De ce fait, l'immersion est absolument nécessaire pour mener à bien cette méthode de recherche. Durant l'enquête sur le terrain, de nombreuses conversations spontanées auront été d’une grande aide. En effet, plusieurs étudiants des universités de Barranquilla, Bogota, Medellín et Santa Marta, étudiant dans toutes sortes de domaines (sciences politiques, économie, administration), auront permis d’obtenir les avis nuancés des populations locales de diverses origines sociales, économiques et géographiques. J’ai également eu la chance de pouvoir avoir des conversations sur le conflit, et tout ce qui en est lié avec de nombreux chauffeurs de taxi, migrants vénézuéliens ainsi que des propriétaires de « tiendas », des petites épiceries au sein des quartiers dans lesquels je résidais (Figure 5). L'observation participante a donc été prédominante durant tout le séjour d'étude et s'est principalement déroulée dans les rues de Barranquilla, dans les taxis ou les transports, dans les « tiendas », 12 Thick description signifie "description épaisse"

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etc. L'enregistrement de conversation avec l'accord de l'interlocuteur a également été apprécié, dans le but notamment d'être certain de capter tous les détails qui s'avéraient être importants, ainsi que la prise de photo, à peu de reprises cependant.

Figure 5 Une "tienda" de Minca (Magdalena)

Crédit photo : Irina Dziura, 2018

1.2. Techniques de collecte de données secondaires

Dans le but de compléter et d’étoffer au maximum les données récoltées sur le terrain, la littérature gouvernementale et scientifique, des études de cas similaires, ainsi que des articles ou reportages de la part des médias locaux ont été d’une forte utilité. En effet, cela aura permis de se rendre compte des différents discours et différentes manières de traiter le conflit interne colombien ainsi que d’analyser les différentes perceptions des propositions pour la résolution du conflit.

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La littérature gouvernementale et scientifique apportant des données statistiques ou qualitatives sur le sujet de recherche a été utilisée pour répertorier différents aspects territoriaux et sociaux de la Colombie rurale, et notamment dans la région caribéenne. Les ministères compétents qui ont publié les données sont entre autres le ministère des relations extérieures colombien, le ministère de la Santé de Colombie, les Nations unies, le DANE, le SIAC, l'UNESCO, le Haut-commissariat des réfugiés des Nations unies, l'Agence de rénovation du territoire de Colombie, le CIPDH, le RISAL et le SINAP.

Ces données, primordiales, étant donné la tournure qu'a prise le terrain de recherche, ont également permis de comprendre et de contextualiser l'évolution dans le temps des variables de développement humain. Même s'il est important de tenir compte du manque de fiabilité de ces données, entre autres à cause de la corruption et du désir du gouvernement à redorer leur image, celles-ci sont tout de même assez représentatives, et ont fait preuve d'un apport significatif dans le cadre de cette recherche. En ce sens, les entités institutionnelles internationales, comme l'ONU, sont quant à elles des sources que l'on peut considérer comme étant "neutres" comparativement au ministère des relations extérieures colombien par exemple.

1.2.2. Étude de cas

Selon Yves-Chantal Gagnon (2008), une étude de cas « s’intéressent surtout aux particularités des phénomènes » et « s’applique à des recherches qui ont des problématiques plus ou moins exploratoires » comme dans le cas de cette recherche. Cette méthode s’inscrit dans la continuité du post-modernisme où l’existence d’une seule méthode, théorie, discours, tradition, est remise en question (Richardson et Saint-Pierre, 1994). En effet, une méthode d’analyse qualitative, ici l’étude de cas, permet de rendre compte de l’observation et de l’analyse concrète des phénomènes en tant que tels, sans en généraliser les résultats (Gagnon, 2008 : 2). Dans le cadre d’une étude de cas, les informations utilisées concernant la recherche sont recueillies sur le terrain, grâce à l’intervention d’acteurs locaux (Hamel, 1997). Dans sa conception l’étude de cas à une visée de démarche exploratoire et non de méthode (Idem). De ce fait; le terrain d’étude en Colombie se présente comme étant une étude de cas

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spécifique qui s’inscrit dans la tendance des méthodes de recherches employées dans ce travail de recherche.

1.2.3. Actualités

Afin de mener à bien ce travail de maîtrise ainsi que l'enquête sur le terrain qui en a résulté, il a été absolument nécessaire de suivre de près les actualités, et notamment les journaux locaux. Étant donné que cette recherche traite d’un sujet qui reste encore d’actualité aujourd’hui, la presse locale et internationale a permis de réajuster le mémoire en fonction de ce qui arrivait sur place et permettait de se tenir informé de la situation en Colombie, mais également dans la région caribéenne. En effet, l'instable situation sociopolitique et économique du Venezuela engendrant des déplacements de populations dans la région subcontinentale en Amérique du Sud pourrait être prise en considération dans le cadre de cette recherche, ou encore, l'appel à reprendre les armes par un des leaders FARC.

1.3. Traitement et analyse des données

Dans cette section seront abordées les techniques de triangulation des données, ainsi que l'analyse de discours.

1.3.1. Triangulation des données

La triangulation des données est une notion issue des approches qualitatives en sciences humaines et sociales. C’est une procédure qui vise à assurer la rigueur dans un travail de recherche, ainsi que la validité des données fournies (Martineau, 2012). Elle regroupe un

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ensemble de techniques qui visent à « assumer une réalité fixe qui peut être connue objectivement » (Gravel, 2011b : 6).

Il existe plusieurs manières de faire usage de ce procédé, cependant, dans le cadre de cette recherche la triangulation théorique – qui consiste à prendre en compte plusieurs aspects théoriques – et la triangulation des outils de cueillette – qui renvoie à l’usage de plusieurs outils – sont les plus pertinents (idem).

L'utilisation de différentes techniques de recherche permet d'objectiver toute observation qui pourrait être subjective pour parvenir à valider les avancées de la recherche (Pinard, Potvin, Rousseau, 2004 : 70). Elle se définit comme l'emploi de plusieurs méthodes, qui combinées entre elles, permettent de tirer des conclusions valables pour le même phénomène (Ibid). Dans cette perspective, la triangulation des données tient compte de quatre aspects bien distincts : "le temps, l'espace, la personne et les sources" (Ibid). La triangulation des théories quant à elle, fait en sorte que le chercheur soit constamment en relation avec le cadre théorique de la recherche déjà établie, voire remodeler, afin de mettre en exergue des relations de correspondance, de dépendance et d'opposition (Ibid).

1.3.2. Analyse de discours

Les différents discours, des populations locales, du gouvernement, des médias, et autres acteurs clés ont dû être analysés avec une grande finesse du fait que le contexte sociospatial dans lequel ont été rapportés ces éléments a pu prédéterminer certaines réponses. C’est pourquoi l’analyse de discours conduira à mettre en valeur les différentes intentions et sous-entendus des différents discours.

D’après Mucchielli (1991), analyser le contenu d’un discours, c’est faire une recherche de toutes les informations qui s’y trouvent, d’en dégager le sens de celles-ci et de classer tout le contenu du document pour en faire une analyse. Il existe néanmoins deux genres de contenu, le manifeste, explicitement exprimé, et le latent, qui lui est implicite. Pour

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étudier le manifeste, il est nécessaire de faire ressortir les thèmes les plus souvent abordés pour les justifier. En ce qui concerne le contenu latent, il s’agit de mettre en lumière la signification de la place accordée à chaque thème ou bien dans le cas contraire, la signification de l’absence d’autres thèmes.

L’objectif de l’analyse de contenu est donc d’expliquer le raisonnement de la personne qui s’exprime quant à ses préférences thématiques, position idéologique, attitude (langage du corps...), etc. C’est une technique de recherche pour décrire objectivement le contenu des communications dans le but de les interpréter (Ghiglione et Matalon, 2008).

Mucchielli (1991) met l’accent sur trois modes d’analyse de contenu. Il y a premièrement ce qu’il appelle l’analyse « logico-esthétique » qui étudie la structure du discours en relation avec ses effets de sens (forme de communication, état d’esprit du locuteur, idéologies). Deuxièmement, il y a l’analyse sémantique structurale, qui veut définir le champ des significations de l’objet étudié dans un ensemble. Cette technique tend à mettre en évidence les principes qui organisent les éléments du discours, de manière indépendante du contenu même de ces éléments. Pour finir, il y a l’analyse logico-sémantique, qui s’en tient seulement au manifeste et se décompose elle-même en trois parties : l’analyse fréquentielle (fréquence à laquelle le locuteur aborde un thème, et intensité), l’analyse de positionnement (mesure de la distance idéologique du locuteur par rapport à ce qu’il dit) et l’analyse thématique (déterminer les thèmes principaux dans le discours). Dans le cadre de cette recherche, c’est notamment le troisième mode d’analyse qui s’est montrée instinctivement des plus adaptés, du fait qu’il fallait évidemment bien prendre en compte le portrait du locuteur : éducation, origine sociale, classe économique... Cependant, les trois modes d’analyse présentés par Mucchielli sont tout de même liés. En effet, dans l’analyse sémantique structurale, on peut remarquer si le locuteur est prédisposé à penser et à s’exprimer de par son éducation par exemple, ou son origine sociale. Quant à l’analyse logico-esthétique, on pourrait penser que c’est déjà une manière de s’exprimer plus réfléchie dans le sens, où la forme du contenu est pensée d’avance.

Figure

Figure 1 Carte de localisation de la Colombie et de la région à l'étude
Figure 2 Localisation de la République de Marquetalia
Figure  3  Juan  Manuel  Santos  et  Timoleon  Jimenez  se  serrent  la  main,  concluant  les  accords de paix historiques à La Havane
Tableau 1 Technique de collecte de données
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