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Mémoire épisodique et identité : élaboration et exploration d'une nouvelle méthode d'évaluation intégrant des conceptions théoriques actuelles

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Mémoire épisodique et identité : élaboration et exploration d'une nouvelle méthode d'évaluation intégrant des conceptions théoriques

actuelles

GALLERNE, Elisa

Abstract

En clinique, les outils disponibles pour évaluer la mémoire épisodique sont élaborés à partir d'anciens modèles théoriques. Ceux-ci ne tiennent pas compte de facteurs clés impliqués dans le fonctionnement mnésique tels que les liens avec l'identité. L'objectif de cette recherche est (1) d'élaborer et (2) d'explorer un nouveau test de mémoire épisodique, le Test de la Mémoire en lien avec l'Identité (TMI). Ce test est basé sur un modèle théorique actuel de la mémoire épisodique et autobiographique, le « Self-Memory System » de Conway (2005), mettant en avant les relations entre mémoire, identité et buts de l'individu. Nous avons pris en considération des critères méthodologiques, récemment relevés dans la communauté scientifique (Pause, 2013) pour l'élaboration de ce test...

GALLERNE, Elisa. Mémoire épisodique et identité : élaboration et exploration d'une nouvelle méthode d'évaluation intégrant des conceptions théoriques actuelles. Master : Univ. Genève, 2014

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41274

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MÉMOIRE ÉPISODIQUE ET IDENTITÉ : ÉLABORATION ET EXPLORATION D’UNE NOUVELLE MÉTHODE D’ÉVALUATION

INTÉGRANT DES CONCEPTIONS THÉORIQUES ACTUELLES

MÉMOIRE RÉALISÉ EN VUE DE L’OBTENTION DE LA MAITRISE UNIVERSITAIRE EN PSYCHOLOGIE

ORIENTATIONS

PSYCHOLOGIE COGNITIVE PSYCHOLOGIE CLINIQUE

PAR

Élisa GALLERNE

elisa.gallerne@etu.unige.ch

DIRECTEUR DU MÉMOIRE Martial Van der Linden

JURY

Martial Van der Linden Caroline Bendahan Matthias Kliegel

GENÈVE, août 2014

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

FACULTÉ DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION SECTION PSYCHOLOGIE

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Remerciements

Je tiens à remercier vivement toutes les personnes qui ont contribué, d’une manière ou d’une autre, à la réalisation de ce projet.

Je remercie Caroline Bendahan, pour l’encadrement et la disponibilité dont elle a fait preuve au cours de ces deux dernières années ainsi que pour ses encouragements dans la conduite de ce projet, le Professeur Martial Van der Linden pour ses précieux conseils, ainsi que le Professeur Matthias Kliegel qui me fait l’honneur de faire partie du jury.

Merci à toutes les personnes qui ont accepté d’être photographiées pour apparaître sur les stimuli, en particulier ma mère et mon père, mon beau- frère, mon frère et sa femme, mon neveu et mes nièces, ainsi que les messieurs du Café de la Place.

Je remercie également les membres de mon entourage qui m’ont activement aidée dans la recherche des participants, en particulier Marie- Anne, ainsi que toutes les personnes qui ont accepté de participer à l’étude et sans qui ce projet n’aurait pu aboutir.

Et finalement, merci à ma famille et mes proches, qui ont su être présents en toutes circonstances durant ma formation universitaire. Merci à ma sœur Mélanie, ainsi qu’à mes amies Alice, Prune, Marta, et Maddalena pour leur soutien constant, leur écoute, et surtout pour m’avoir rendu le sourire dans les moments difficiles.

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Résumé

En clinique, les outils disponibles pour évaluer la mémoire épisodique sont élaborés à partir d’anciens modèles théoriques. Ceux-ci ne tiennent pas compte de facteurs clés impliqués dans le fonctionnement mnésique tels que les liens avec l’identité. L’objectif de cette recherche est (1) d’élaborer et (2) d’explorer un nouveau test de mémoire épisodique, le Test de la Mémoire en lien avec l’Identité (TMI). Ce test est basé sur un modèle théorique actuel de la mémoire épisodique et autobiographique, le « Self-Memory System » de Conway (2005), mettant en avant les relations entre mémoire, identité et buts de l’individu. Nous avons pris en considération des critères méthodologiques, récemment relevés dans la communauté scientifique (Pause, 2013) pour l’élaboration de ce test. Il est ainsi caractérisé par (1) un encodage incident de (2) matériel significatif et écologique pouvant être mis en lien avec le self, (3) un seul essai d’apprentissage, (4) une récupération non attendue, aussi bien de l’information cible que de (5) détails contextuels, en rappel immédiat et (6) différé à 7 jours.

Le TMI a été testé sur une population de 40 personnes âgées de 60 à 77 ans et permet de mettre en évidence à la fois les effets classiques de variables telles que le genre sur la mémoire épisodique, mais également des profils très différents pouvant être interprétés en termes de correspondance (capacité à garder un souvenir proche de l’expérience vécue) et de cohérence (capacité à garder un souvenir qui soit en accord avec les valeurs, croyances et buts de l’individu). Les limites du TMI et perspectives futures sont discutées.

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Table des matières

1. Introduction ... 1

2. Cadre théorique ... 2

2.1. La mémoire épisodique ... 2

2.1.1. Définition ... 2

2.1.2. Facteurs influençant la mémoire épisodique ... 4

2.1.3. L’effet d’autoréférence ... 5

2.2. Une nouvelle conception de la mémoire épisodique ... 6

2.2.1. Définition du self ... 6

2.2.2. Le Self-Memory System de Conway (2005) ... 7

2.2.3. Dissociations au sein du Self-Memory System ... 10

2.3. La mémoire épisodique en clinique ... 11

2.3.1. Les troubles de la mémoire épisodique ... 11

2.3.2. L’évaluation classique de la mémoire épisodique ... 12

2.3.3. Critères pour les nouveaux tests de mémoire épisodique ... 13

2.4. Problématique, objectifs et hypothèses théoriques ... 14

3. Méthodologie ... 15

3.1. Méthodologie de l’élaboration du TMI ... 15

3.1.1. Élaboration des stimuli ... 16

3.1.2. Élaboration des consignes ... 18

3.2. Méthodologie de l’expérimentation ... 23

3.2.1. Population ... 23

3.2.2. Matériel... 24

3.2.3. Procédure ... 27

3.2.4. Recrutement ... 29

3.2.5. Analyses statistiques ... 30

4. Résultats ... 31

4.1. Statistiques descriptives sur le TMI ... 31

4.2. Liens entre les scores au TMI et les variables sociodémographiques ... 36

4.3. Liens entre les scores au TMI et les questionnaires d’insomnie, d’auto- efficacité, d’inquiétude et de dépression ... 36

4.4. Liens entre les scores au TMI et les autres mesures de mémoire et mesure globale du fonctionnement cognitif ... 37

4.5. Liens entre rappel des détails et qualité de l’imagerie ... 37

4.6. Liens entre le rappel des détails et le fait d’être imageur ou verbalisateur 38 4.7. Comparaison de profils ... 38

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5. Discussion ... 42

5.1. Limites et perspectives futures ... 46

5.2. Implications cliniques ... 49

5.3. Conclusion ... 50

Bibliographie ... 51

Annexes ... 57

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1. Introduction

L’altération du fonctionnement de la mémoire épisodique constitue une plainte très régulièrement rapportée par les patients, en particulier adultes. Cette altération peut être consécutive à un accident (traumatisme crânien par exemple), une maladie (comme l’épilepsie), une hygiène de vie mal adaptée (citons le syndrome amnésique de Korsakoff) ou encore au vieillissement cérébral (par exemple chez les patients ayant reçu un diagnostic de

« démences »).

La mémoire épisodique permet de se souvenir et de prendre conscience des événements personnellement vécus, et de voyager mentalement dans le temps (Tulving, 2002). Dès lors, un trouble de la mémoire épisodique a des répercussions importantes, affectant directement l’adaptation des personnes dans leur vie quotidienne. Une réduction significative de l’autonomie est ainsi souvent observée chez les personnes qui souffrent de problèmes de mémoire épisodique (Van der Linden, 2014), ainsi qu’un sentiment d’identité et de continuité de l’existence plus difficile à construire.

L’évaluation des troubles de la mémoire épisodique est donc une tâche importante pour les psychologues cliniciens. Cette évaluation doit non seulement mettre en évidence des déficits s’ils existent, mais également renseigner le clinicien sur les processus mnésiques qui font défaut. Les outils d’évaluation actuellement disponibles présentent des lacunes dans leurs deux missions. Ainsi, ils ne parviennent pas à dépister les personnes qui présentent des oublis à long terme. En effet, leurs performances sont normales au rappel différé de 30 minutes, mais déficitaires lorsque ce délai est augmenté à plusieurs semaines (Wroe, Breen, & McCarthy, 2000). De plus, ces outils sont basés sur des conceptions anciennes de la mémoire épisodique.

Ils ne permettent donc pas d’évaluer des opérations mnésiques récemment reconnues comme étant impliquées dans la mémoire épisodique. Par exemple, Conway (2005) a élaboré un modèle de la mémoire épisodique qui prend en considération l’importance de l’identité, des valeurs et des buts de l’individu dans la construction des souvenirs. Enfin, ils évaluent les compétences de la mémoire épisodique dans des conditions très éloignées de la vie de tous les jours, rendant difficile de conclure par rapport au fonctionnement de la personne au quotidien.

Dans le cadre de ce mémoire, nous avons créé un nouveau test de la mémoire épisodique, destiné à une population adulte. Ce test est basé sur un modèle théorique actuel, le Self-Memory System de Conway (2005), et permet d’évaluer les fonctions de correspondance (capacité à garder un souvenir proche de l’expérience vécue) et de cohérence (capacité à

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garder un souvenir qui soit en accord avec les valeurs, croyances et buts de l’individu) de la mémoire épisodique. Il a également été élaboré en fonction de critères méthodologiques récemment relevés dans la littérature (Pause et al., 2013).

Suite à l’élaboration, nous avons exploré les caractéristiques de ce test en le faisant passer à une population non clinique de personnes âgées. La population des personnes âgées a été choisie, car elle présente une variabilité importante dans ses performances en mémoire épisodique (Astin, Simon, Kurth, Collette, & Salmon, 2013). Les premiers résultats nous permettent de conclure quant aux propriétés psychométriques du test, ainsi qu’aux liens existants entre ce test et d’autres variables connues dans la littérature pour influencer la mémoire épisodique.

Ce mémoire s’inscrit donc dans une volonté de fournir aux psychologues cliniciens des outils d’évaluation mieux adaptés. Il constitue les étapes d’élaboration et d’exploration d’une nouvelle tâche permettant d’évaluer la mémoire épisodique. Suite à ce travail, des adaptations vont pouvoir être proposées afin de rendre cet outil, à terme, disponible à l’utilisation des cliniciens dans une population clinique adulte.

2. Cadre théorique

2.1. La mémoire épisodique

2.1.1. Définition

Selon la conception des systèmes de mémoire multiples (Schacter, Wagner, &

Buckner, 2000), la mémoire épisodique fait partie du système plus général de mémoire à long terme, tout comme la mémoire sémantique, la mémoire procédurale et les systèmes de représentation perceptive. Elle permet de se souvenir et de prendre conscience des événements personnellement vécus, dans un contexte spatial et temporel particulier (Tulving, 2002). Elle permet également de voyager mentalement dans le temps, c’est-à-dire à la fois de revivre les expériences passées et de se projeter dans le futur, dans un état particulier de conscience (appelé conscience autonoétique). Le fait de pouvoir effectuer ces voyages mentaux dans le temps contribue grandement au sentiment d’identité et de continuité de l’expérience d’un individu.

Pour Klein, German, Cosmides et Gabriel (2004), il existe au moins trois capacités nécessaires afin de ressentir un contenu mnésique comme étant épisodique. La première

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capacité est la réflexion sur soi, c’est-à-dire le fait de pouvoir réfléchir sur ses propres états mentaux. La seconde capacité est le sentiment d’agentivité personnelle, qui correspond à la croyance d’être la cause de ses propres pensées et actions, associée à un sentiment de propriété personnelle (sentiment que mes pensées et mes actions m’appartiennent). La troisième capacité est le fait de pouvoir prendre conscience de la dimension temporelle de ses propres expériences.

Ainsi la mémoire épisodique nous permet de récupérer des souvenirs épisodiques. Les souvenirs épisodiques sont des enregistrements de moments psychologiques de réalisation de buts à court terme, portant sur des périodes d’une durée allant de quelques secondes à quelques heures (Conway, 2009). Ce sont des résumés proches de l’expérience vécue, qui contiennent à la fois une information cible en lien avec la réalisation d’un but, mais également des détails phénoménologiques, à savoir des détails sensoriels, perceptifs, affectifs, et contextuels (Conway, 2009). Ils sont pour la plupart formés automatiquement, en dehors du contrôle intentionnel. Selon Conway (2009), les souvenirs épisodiques s’expriment fréquemment sous forme d’images mentales visuelles.

Pour que la mémoire épisodique fonctionne correctement, il faut que les événements personnellement vécus ou épisodes soient d’abord encodés, puis consolidés et enfin récupérés efficacement. Nous rappelons maintenant brièvement le fonctionnement de ces trois processus fondamentaux de la mémoire épisodique.

Encodage. L’encodage est le processus par lequel les caractéristiques d’un stimulus ou d’un événement sont traitées et converties en une trace mnésique (Van der Linden, 2014).

La qualité de cette trace mnésique dépend de la profondeur du traitement (plus l’information est traitée sémantiquement, mieux elle est rappelée) (Craik & Lockart, 1972), mais aussi de l’élaboration et du caractère distinctif du souvenir (Lockart & Craik, 1990). Ainsi, la trace mnésique peut être plus ou moins forte selon les opérations de traitement qui sont effectuées durant l’encodage. Cette trace mnésique inclut à la fois l’information cible, mais également les détails concernant le contexte dans lequel cette information a été encodée (Van der Linden, 2014).

Consolidation. La consolidation est la stabilisation graduelle d’une trace mnésique.

Pour être utilisable, le souvenir d’un épisode doit être consolidé. La première consolidation est synaptique : les changements induits par l’épisode sont stabilisés au niveau neuronal. La

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seconde consolidation est liée au nombre de réactivation de l’épisode : plus il y a de réactivations, plus la trace est stable. En effet, chaque réactivation de la trace mnésique crée une nouvelle trace qui indexe en partie le réseau de la trace initiale (théorie des traces multiples ; Nadel & Moscovitch, 1997).

Récupération. La récupération est le processus qui permet d’avoir accès aux traces mnésiques. Notons que les indices contextuels encodés en même temps que l’information cible peuvent servir d’indices de récupération.

Les phénomènes d’encodage, de consolidation et de récupération sont extrêmement dépendants d’autres facteurs, que nous allons maintenant développer.

2.1.2. Facteurs influençant la mémoire épisodique

Un premier facteur qui influence la mémoire épisodique de plusieurs manières est l’activation émotionnelle. En effet, l’activation émotionnelle influence l’encodage en permettant une focalisation émotionnelle de l’attention et ainsi un encodage plus élaboré (Brendan, Holland, & Kensinger, 2013). La consolidation des épisodes émotionnels est également modulée par des mécanismes neurobiologiques spécifiques tels que la libération d’hormones et l’activation amygdalienne influençant les processus hippocampiques (Brendan et al., 2013). Enfin, la récupération des souvenirs émotionnels est également facilitée, car ceux-ci sont rendus plus accessibles (Brendan et al., 2013).

Le sommeil semble également avoir un rôle privilégié quant à la consolidation des souvenirs. En effet, durant le sommeil, les souvenirs non pertinents sont « effacés » (Hardt, Nader, & Nadel, 2013) alors que les autres sont maintenus et réactivés (Born & Wilhelm, 2012), favorisant ainsi leur consolidation. Une méta-analyse datant de 2012 montre d’ailleurs que les personnes qui souffrent d’insomnie ont des performances significativement inférieures en mémoire épisodique que des sujets contrôles qui ne présentent pas de difficulté de sommeil.

De même, les ruminations ou les inquiétudes, souvent présentes dans les tableaux cliniques anxieux ou dépressifs, peuvent affecter l’encodage (moins de ressources attentionnelles disponibles) et la consolidation (en ayant un effet d’interférence avec le souvenir qui doit être consolidé) (Van der Linden, 2014). Une étude de Pietrzak et collaborateurs (2012) montre que les personnes qui présentent plus d’inquiétudes ont de

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moins bonnes performances en mémoire épisodique au moment du rappel différé, les performances au rappel immédiat étant similaires à celles de sujets contrôles moins inquiets.

Un autre facteur qui influence les performances cognitives, y compris celles de mémoire épisodique, est le sentiment d’auto-efficacité. En effet, les croyances quant à sa propre efficacité influencent l’accomplissement des objectifs puisque les individus ont tendance à s’engager dans les tâches qu’ils se sentent capables de réussir (Schunk & Pajares, 2010). Le sentiment d’auto-efficacité influence également l’effort qui va être fourni pour atteindre un objectif. Plus particulièrement, le sentiment d’efficacité de sa propre mémoire est positivement lié à ses véritables performances (personnelles) en mémoire (Beaudoin &

Desrichard, 2011). Ce lien est toutefois modéré par la difficulté de la tâche, de sorte que ce lien est plus fort dans les tâches de rappel libre (considérées plus difficiles) que dans les tâches de reconnaissance. La force de ce lien dépend également de la façon dont l’auto- efficacité de la mémoire est évaluée : elle diminue lorsque ce sont les capacités de mémoire de manière générale qui sont considérées par rapport aux capacités effectives pour réaliser une tâche de mémoire. Enfin, il a été montré qu’une intervention visant le sentiment d’auto- efficacité de la mémoire permet d’améliorer les performances mnésiques des personnes âgées (West, Bagwell, & Dark-Freudeman, 2008).

Nous avons déjà vu que la qualité de la trace mnésique dépendait entre autres des processus de traitement mis en place au moment de l’encodage. Nous allons maintenant revenir plus en détail sur un de ces processus de traitement, qui est l’encodage en référence à soi.

2.1.3. L’effet d’autoréférence

Décrit pour la première fois dans la littérature par Rogers, Kuiper et Kirker (1977), l’effet d’autoréférence rend compte d’une probabilité plus grande de rapporter les épisodes encodés en référence à soi par rapport à d’autres types d’encodage. Dans leur procédure, les auteurs proposent aux participants quatre conditions d’encodage : structurel (jugement de la taille des lettres), phonémique (jugement de rime), sémantique (jugement de synonymie) et autoréférentiel (jugement de la qualité autodescriptive de l’adjectif) pour les mêmes adjectifs.

Ils rapportent que les adjectifs encodés en référence à soi sont mieux mémorisés que les autres.

Depuis cette étude princeps, d’autres auteurs se sont plus récemment intéressés à cet effet. Serbun et Gutchess (2011) ont comparé les performances mnésiques suite à un

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encodage en référence à soi par rapport à un encodage en référence à un proche ou en référence à Bill Clinton (est-ce que j’achèterai cet objet / ma mère achèterait cet objet / Bill Clinton achèterait cet objet ?). Ils ont mis en évidence que les objets encodés en référence à soi ou en référence à un proche étaient mieux reconnus que les objets encodés en référence à Bill Clinton. Grilli et Glisky (2010) ont étudié des patients avec des déficits en mémoire épisodique suite à des troubles neurologiques (traumatisme craniocérébral pour la plupart).

Les participants étaient soumis à une tâche de reconnaissance de phrases suite à différents types d’encodage. Les auteurs montrent que les meilleures performances sont observées suite à l’encodage autoréférentiel durant lequel les participants devaient s’imaginer être physiquement présents dans la scène décrite par la phrase. Enfin, Lalanne, Grolleau et Piolino (2010) rapportent différentes études indiquant que l’effet bénéfique de l’encodage en référence à soi semble également être présent chez des personnes ayant reçu le diagnostic de Maladie d’Alzheimer. Notons que l’encodage en référence à soi est une stratégie d’encodage à la fois familière, naturelle et conservée dans le vieillissement.

Ainsi, ces études confirment l’effet bénéfique sur la mémoire épisodique de la référence à soi et nous indiquent que le self est un élément particulièrement pertinent à prendre en considération dans l’évaluation de la mémoire épisodique en clinique. Ainsi, dans la suite de ce travail nous allons nous focaliser plus particulièrement sur le self et les liens qu’il entretient avec la mémoire épisodique.

2.2. Une nouvelle conception de la mémoire épisodique

2.2.1. Définition du self

Il n’existe pas de définition consensuelle du « self » dans la littérature, celle-ci est encore très morcelée selon différentes approches (Duval, Eustache, & Piolino, 2007). Dans le cadre de ce mémoire, nous retiendrons comme définition générale du self la représentation mentale personnelle de sa propre personnalité ou identité (Kihlstrom et al., 1988), ou en d’autres termes, la conception que nous avons de nous-mêmes. Le self est donc notre sentiment d’identité et de continuité de l’existence, qui se construit étroitement en lien avec le récit de vie et les expériences personnelles vécues dans le passé (Van der Linden, 2014).

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2.2.2. Le Self-Memory System de Conway (2005)

Dans le cadre de la compréhension des liens qui existent entre la mémoire épisodique et l’identité, le modèle le plus abouti actuellement décrit dans la littérature est le Self-Memory System, développé par Conway (2005). Une version schématique de ce modèle, adapté de Van der Linden (2014) est proposé dans la Figure 1.

Figure 1. Représentation schématique du Self-Memory System de Conway (2005), adapté de Van der Linden (2014).

Selon Conway (2005), la mémoire épisodique doit pouvoir répondre à deux exigences principales en compétition : la correspondance et la cohérence (Conway, Singer, & Tagini, 2004). Le principe de correspondance exige de garder un souvenir proche de l'expérience vécue lors de la réalisation d'un but à court terme. Ainsi la correspondance permet d’avoir des souvenirs épisodiques très précis et détaillés des activités récentes, sur un délai de quelques minutes à quelques jours, afin notamment de ne pas répéter les actions déjà effectuées.

Le principe de cohérence permet de maintenir un enregistrement sur le long terme qui soit cohérent avec l’identité du sujet. Ainsi la mémoire épisodique ne fait pas qu’enregistrer de manière passive chaque épisode que nous vivons au quotidien. Un grand nombre de souvenirs épisodiques sont formés chaque jour, mais seule une partie restreinte pourra être récupérée sur le long terme. La plupart des événements routiniers et non pertinents que nous vivons sont rapidement rendus peu accessibles à la récupération. Au contraire, les événements pertinents pour notre identité, en lien avec nos buts et nos valeurs, vont rester plus facilement

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accessibles sur le long terme. Mais le souvenir qui va nous rester de ces événements n’est pas un copié-collé parfait de la réalité. Ce souvenir sera bien basé sur des fragments de l’expérience vécue, mais il sera également adapté en fonction de nos croyances, buts, et valeurs actuels. Par exemple, je dois me souvenir très précisément avoir fermé la porte de ma maison à clé ce matin, si ce n’est pas le cas je risque de vérifier de façon répétée que cette action a bien été réalisée (fonction de correspondance). De même, un échec à un examen est un souvenir qui n’est cohérent ni avec mes buts actuels ni avec mon identité. Sur le long terme, je me souviendrai peut-être avoir échoué à cause de la difficulté de l’examen plutôt que de mon manque de préparation (fonction de cohérence).

Le Self-Memory System (Conway, 2005) comporte trois systèmes en interaction qui permettent de générer des souvenirs autobiographiques et de répondre à ces deux exigences de correspondance et de cohérence. Nous allons maintenant détailler chacun de ces trois systèmes.

Le système de mémoire épisodique. Le système de mémoire épisodique permet de répondre à la fonction de correspondance. Il contient des souvenirs épisodiques, qui, rappelons-le, sont des enregistrements « résumés », proches de l’expérience vécue, des détails sensoriels, perceptifs, cognitifs et affectifs des événements personnellement vécus durant un épisode. Ces enregistrements sont principalement constitués automatiquement, en dehors de tout contrôle intentionnel. Conway (2009) souligne que les souvenirs épisodiques sont souvent représentés sous forme d’images mentales (visuelles) et la perte de la capacité à former des images mentales peut entraîner une amnésie rétrograde (amnésie qui touche les faits qui se sont produits avant l’installation de la lésion cérébrale) (Greenberg, Eacott, Brechin, & Rubin, 2005). Ainsi les images mentales sont particulièrement importantes pour la mémoire épisodique. Toutefois, sur tous les épisodes qui sont encodés en une journée, seuls quelques-uns (ceux qui sont pertinents avec les buts et les valeurs) seront maintenus accessibles après un délai d’environ 24 heures. C’est-à-dire que l’information stockée dans le système de mémoire épisodique est rapidement « oubliée » si elle n’est pas mise en relation avec le self à long terme.

Le self à long terme. Le self à long terme est divisé en deux modules : la base de connaissances autobiographiques et le self conceptuel. La base de connaissances

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autobiographiques regroupe les connaissances personnelles générales sur sa vie, qui sont hiérarchisées en trois niveaux de plus en plus concrets : les schémas de récit de vie (c’est-à- dire la compréhension qu’une personne a de la construction de son récit de vie), les périodes de vie (qui renvoient à des buts très généraux, comme mes études de psychologie à l’université de Genève par exemple) et les événements généraux. Quant au self conceptuel, il est composé des connaissances sémantiques personnelles (qui ne font pas référence à un événement précis dans le temps) qui permettent de générer les croyances sur soi, sur autrui, sur le monde, les attitudes et les valeurs. Ce dernier module est connecté à la base de connaissances autobiographiques ainsi qu’au système de mémoire épisodique, ce qui permet d’illustrer une connaissance sémantique sur soi par l’exemple d’un épisode précis. Le self à long terme a plutôt une fonction de cohérence.

Le self de travail. Le self de travail est une composante de la mémoire de travail, qui est la mémoire qui sert à maintenir et traiter une quantité restreinte d’information afin de réaliser des activités cognitives complexes (Baddeley & Logie, 1999). La principale fonction du self de travail est de gérer la réalisation des buts à court terme. Il est ainsi constitué de processus de contrôle dirigés par les buts actuels du sujet. Il intervient à la fois dans l’encodage des épisodes et dans la construction des souvenirs, en modulant l’accessibilité des représentations en fonction de leur pertinence pour le self. Il permet donc un équilibre entre les fonctions de cohérence et de correspondance : la trace maintenue doit correspondre à l’expérience réellement vécue tout en permettant une représentation de l’interaction entre soi et le monde stable et cohérente.

Les souvenirs autobiographiques. Les souvenirs autobiographiques émergent ainsi de l’interaction de ces trois systèmes : le système de mémoire épisodique, le self à long terme et le self de travail. Ce sont des constructions mentales transitoires constituées de souvenirs épisodiques et de connaissances sémantiques sur sa vie et sur soi. Les souvenirs autobiographiques ne sont pas figés, mais constamment renouvelés en fonction des buts actuels de l’individu. Il existe deux types de récupération pour les souvenirs autobiographiques : une récupération stratégique et cyclique et une récupération directe. La récupération stratégique dépend des buts actuels du sujet, elle fait suite à l’élaboration d’un indice de récupération, l’accès à des connaissances autobiographiques, puis à des événements concrets, jusqu’à l’épisode précis. Ce qui est récupéré est d’abord évalué et un autre cycle de

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récupération peut éventuellement être mis en place ou la récupération se termine. Les processus de contrôle qui sous-tendent cette récupération sont intentionnels. Contrairement à la récupération stratégique et cyclique, la récupération directe est spontanée (non intentionnelle). Elle fait suite à un indice de récupération externe suffisamment spécifique pour activer un souvenir particulier.

L’observation des cliniciens, ainsi que des études de cas, tendent à montrer qu’il existe différents tableaux de troubles mnésiques liés à l’atteinte d’un (ou plusieurs) module du Self- Memory System ou de leur déconnexion. Nous nous intéressons à différentes dissociations objectivées au sein du modèle de Conway dans la section suivante.

2.2.3. Dissociations au sein du Self-Memory System

Deux patients dont les symptômes permettent de mettre en évidence des dissociations au sein du Self-Memory System ont été décrits dans la littérature. Le cas d’AC, un homme de 38 ans, présentant une amnésie sévère suite à un accident (Van der Linden, Brédart, Depoorter, & Coyette, 1996) permet de mettre en évidence l’indépendance entre le système de mémoire épisodique et le self à long terme. AC présente une incapacité à rappeler des épisodes spécifiques datant de différentes périodes, y compris concernant sa vie contemporaine. Toutefois, les informations sémantiques personnelles de la base de connaissances autobiographiques sont relativement préservées, même pour les informations acquises après la lésion cérébrale.

Le cas de CR, une patiente de 47 ans décrite par Loveday et Conway (2010), soutient l’hypothèse des deux voies de récupération. CR souffre d’une vaste lésion cérébrale de l’hémisphère droit suite à une encéphalite herpétique. Elle présente une amnésie profonde concernant les vingt-cinq dernières années, et une amnésie significative concernant son enfance et adolescence. CR présente également une amnésie antérograde l’empêchant de récupérer spontanément des événements qui se sont produits il y a plus de quelques jours.

Toutefois, avec l’aide d’indices de récupération suffisamment spécifiques, comme des photographies prises avec la SenseCam, CR parvient à fournir des descriptions beaucoup plus détaillées de ses souvenirs (la SenseCam est un appareil photo qui se porte autour du cou et qui prend des photographies à intervalles réguliers et d’un point de vue personnel). Cette étude suggère donc l’existence d’un problème de connexion entre la mémoire épisodique et le self à long terme.

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Différents tableaux cliniques illustrent donc l’intérêt du modèle de Conway dans la compréhension des processus mnésiques pouvant être préservés ou atteints chez certains patients. Nous allons maintenant nous intéresser à la mémoire épisodique en clinique et à la manière dont elle est actuellement évaluée, nous verrons en quoi cette évaluation présente des lacunes, et quels sont les critères que devront respecter les futurs tests de mémoire épisodique.

2.3. La mémoire épisodique en clinique

2.3.1. Les troubles de la mémoire épisodique

Les problèmes de mémoire épisodique sont relativement fréquents dans la mesure où l’encodage et la récupération des épisodes sont sensibles à d’autres facteurs que nous avons déjà évoqués tels que l’activation émotionnelle ou le sommeil, ainsi que d’autres facteurs plus généraux, comme la vitesse de traitement, les ressources disponibles en mémoire de travail et les capacités d’inhibition (Van der Linden, Meulemans, Belleville, & Collette, 2000). De même, un vaste réseau cérébral est impliqué dans les processus sous-tendant la mémoire épisodique (régions préfrontales, temporales, diencéphaliques et pariétales) (Guillery-Girard, Quinette, Piolino, Desgranges, & Eustaches, 2008). Ceci explique que les troubles de la mémoire épisodique soient également très fréquents suite à une lésion cérébrale.

Nous avons déjà vu que la mémoire épisodique était influencée par la qualité du sommeil et les inquiétudes. Un tableau clinique qui est souvent associé à des difficultés de sommeil et des pensées répétitives telles que les ruminations ou les inquiétudes est la dépression. Ainsi, il apparaît que les symptômes dépressifs sont souvent accompagnés de difficultés en mémoire épisodique (Söderlund et al., 2014).

Les troubles de mémoire épisodique sont également prépondérants dans le vieillissement problématique, notamment chez les patients ayant reçu le diagnostic de Maladie d’Alzheimer, mais apparaissent aussi dans le vieillissement normal (Taconnat &

Isingrini, 2008). En effet, dans la population tout-venant, il existe une variabilité importante des capacités de mémoire épisodique chez les personnes âgées (Astin, Simon, Kurth, Collette,

& Salmon, 2013). Chez les personnes pour qui la mémoire épisodique décline, on observe souvent une diminution de l’autonomie en parallèle, ainsi qu’une réduction des capacités d’insertion (Van der Linden, 2014). C’est en partie pourquoi les déficits de mémoire épisodique constituent une plainte fréquemment émise par les personnes âgées ou leur entourage. L’évaluation des troubles de la mémoire épisodique est donc une tâche extrêmement importante pour les cliniciens.

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2.3.2. L’évaluation classique de la mémoire épisodique

Les tâches d’évaluation de la mémoire épisodique se divisent traditionnellement en deux étapes. La première étape consiste en une phase d’encodage du matériel faisant l’objet dudit test. La seconde étape a lieu après un délai variable et constitue la phase de récupération, durant laquelle il est explicitement demandé de rappeler le matériel précédemment encodé. La phase de récupération peut se décliner en rappel libre, rappel indicé ou reconnaissance. En rappel libre, on demande simplement à la personne de rappeler le plus d’items possible, dans n’importe quel ordre. Dans une tâche de rappel indicé, on fournit à la personne un indice de récupération lié à l’item cible. Enfin, dans une tâche de reconnaissance, la personne ne doit pas produire l’item, contrairement au rappel, mais le reconnaître parmi une série de distracteurs, à savoir des items proches des items cibles.

Bien que la conception de la mémoire épisodique ait beaucoup évolué au cours des dernières décennies, l’évaluation de la mémoire épisodique est souvent effectuée grâce à l’utilisation d’épreuves que nous qualifierons de « classiques », issues de la tradition psychométrique (Van der Linden, Meulemans, Belleville, & Collette, 2000). Ces tâches présentent l’intérêt d’avoir des normes par genre, pour différentes tranches d’âge, et parfois par niveaux socioculturels (établis grâce au nombre d’années d’études réussies). En effet, ces trois variables sociodémographiques peuvent influencer les performances en mémoire épisodique. Plus particulièrement, les femmes obtiennent de meilleures performances en mémoire épisodique (Herlitz, Nilsson, & Bäckman, 1997), les capacités de mémoire épisodique déclinent avec l’âge (Taconnat & Isingrini, 2008), et les personnes de niveau socioculturel plus faible ont tendance à avoir de moins bons résultats (Dessi et al., 2009). Ces tâches classiques permettent ainsi de situer l’individu par rapport à son groupe de référence.

Toutefois, elles présentent certains désavantages que nous allons expliciter. Quelques exemples de ces tâches classiques incluent le test d’apprentissage d’une liste de quinze mots de Rey (Rey, 1966) ou la tâche de rappel libre / rappel indicé 16 items (Grober & Buschke, 1987).

Au niveau méthodologique, ces épreuves font appel à un encodage intentionnel, ce qui signifie qu’au moment de l’encodage, le sujet sait qu’il doit mémoriser l’information en vue d’un rappel ultérieur. Il nous paraît intéressant de relever ici que dans la vie quotidienne, nous encodons la plupart des épisodes de manière incidente.

Quant aux stimuli, il s’agit pour les tâches précitées, de listes de mots. Comme nous l’avons vu, l’identité des personnes est un facteur très important à prendre en considération

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lorsqu’on s’intéresse à la mémoire épisodique. Ce genre de matériel est critiquable puisqu’il ne véhicule pas de signification pour les participants qui y sont soumis. De plus, ce matériel est peu écologique, à savoir que nous ne rencontrons que rarement ce genre de stimuli dans la vie quotidienne.

Le rappel libre / rappel indicé 16 items (Grober & Buschke, 1987) et la tâche des quinze mots de Rey (Rey, 1966) proposent un rappel différé, mais celui-ci n’a pas lieu au-delà de 40 minutes. Comme nous l’avons vu dans le modèle du Self-Memory System (Conway, 2005), seuls les épisodes intégrés au self sont maintenus à long terme. Ce processus prend toutefois du temps, et un délai de 40 minutes seulement paraît limiter les conclusions possibles quant au maintien de l’information sur le long terme.

Enfin, ces tests classiques, relativement anciens, ne tiennent pas compte des conceptions théoriques actuelles de la mémoire épisodique, en particulier de ses liens étroits avec l’identité et les buts, ni du caractère phénoménologique des souvenirs épisodiques, puisqu’ils ne permettent d’évaluer que les informations cibles.

Plusieurs auteurs ont ainsi souligné l’inadéquation des tests de mémoire épisodique classiques et édité des critères pour les nouveaux tests (Pause et al., 2013), que nous développons dans le paragraphe suivant.

2.3.3. Critères pour les nouveaux tests de mémoire épisodique

Dans un article de 2013, Pause, Zlomuzica, Kinugawa, Mariani, Pietrowsky et Dere ont ainsi énuméré sept critères méthodologiques auxquels doivent répondre les nouveaux tests de mémoire épisodique. Ces critères sont résumés ci-après. Le premier critère est d’induire les souvenirs épisodiques en laboratoire. En effet, pour être en mesure d’évaluer les souvenirs épisodiques, il faut pouvoir les contrôler. Le deuxième critère est de ne pas donner aux participants l’instruction explicite de mémoriser les informations épisodiques. Contrairement aux tests classiques de mémoire épisodique, les nouveaux tests doivent en effet proposer un encodage incident. Rappelons que pour Conway (2005), les connaissances épisodiques sont mises en place en dehors d’un contrôle intentionnel. De plus, comme nous l’avons déjà vu, les situations de la vie quotidienne sont largement caractérisées par un encodage incident. Le troisième critère concerne la valence émotionnelle des souvenirs épisodiques. En effet, les événements pertinents pour une personne, en lien avec ses valeurs et ses buts, suscitent des émotions (Scherer, 2001). Selon le quatrième critère, les participants ne doivent être soumis qu’à un seul essai d’apprentissage. Plus la présentation de l’information est répétée, plus il y a

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de risque d’impliquer la mémoire sémantique. Le cinquième critère spécifie que les épisodes doivent contenir des informations concernant le « quoi, où et quand ». C’est-à-dire que les épisodes ne doivent pas se résumer à une information cible, mais proposer également un contexte spatial et un contexte temporel. Ces différents aspects du souvenir épisodique peuvent également être testés. Le sixième critère spécifie que le test de mémoire doit être inattendu. C’est-à-dire qu’à la fin de l’encodage incident, le participant ne doit pas être prévenu qu’il sera testé par la suite. De même, si la récupération inclut une phase de rappel différé, le participant ne doit pas se douter qu’il sera à nouveau testé. Enfin, le septième et dernier critère concerne les intervalles de rétention. Pause et collaborateurs recommandent d’utiliser un intervalle d’au moins soixante minutes pour que les souvenirs puissent être considérés comme intégrés à la mémoire à long terme. À ce propos, notons que certains patients épileptiques obtiennent des performances normales aux tests classiques de mémoire, mais se plaignent néanmoins de difficultés mnésiques. Une étude de Blake, Wroe, Breen et McCarthy (2000) révèle que les patients épileptiques (lobe temporal gauche) présentent des performances normales suite à un délai de trente minutes, mais déficitaires après un intervalle de huit semaines, ce qui met en évidence l’intérêt de proposer un rappel à plus long terme.

2.4. Problématique, objectifs et hypothèses théoriques

Nous faisons donc état d’un manque de conformité des tests utilisés en clinique, en regard de la littérature récente (encodage intentionnel, type de stimuli, non prise en compte des liens entre mémoire, identité et buts, rappel différé à une quarantaine de minutes seulement, etc.). L’objectif de cette recherche est donc (1) d’élaborer un nouveau test de la mémoire épisodique qui soit basé sur le modèle du Self-Memory System (Conway, 2005), c’est-à-dire qui intègre l’identité et les buts de la personne et permette d’apprécier les fonctions de correspondance et de cohérence ; et (2) de l’explorer dans la population des personnes âgées. L’élaboration de ce test se veut aussi fondée méthodologiquement, en respectant les critères explicités dans la littérature par Pause et collaborateurs (2013).

Ainsi, nous avons baptisé ce nouveau test le « Test de Mémoire en lien avec l’Identité » (TMI). Il se veut basé sur des situations plus proches de la vie quotidienne, en proposant un encodage incident et multimodal d’un matériel significatif et écologique (des photos d’activités de la vie quotidienne) qui puisse être mis en lien avec le self, un seul essai d’apprentissage, une récupération non attendue, aussi bien de l’information cible que de détails contextuels, en rappel immédiat et différé à sept jours. Le choix d’un délai de sept

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jours est principalement logistique. En effet, la plupart des bilans cognitifs sont effectués lors d’au moins deux entretiens qui sont fixés à une semaine d’intervalle.

Nous allons tout d’abord nous intéresser aux caractéristiques du TMI : scores au rappel immédiat et au rappel différé, temps d’encodage, questions de contrôle (comme le fait de s’être douté qu’il s’agissait d’un test de mémoire) et aux liens entre ces variables et les scores observés au TMI. Nous vérifierons entre autres que la tâche soit suffisamment sensible, que toutes les activités soient potentiellement rappelées et que chaque photo permette de rappeler un nombre équivalent de détails. Nous faisons l’hypothèse que le TMI permettra de mettre en évidence les effets classiques de l’âge, du genre et du niveau de formation sur la mémoire épisodique. Nous postulons également un lien entre les scores au TMI et la qualité du sommeil, le sentiment d’auto-efficacité généralisée et d’auto-efficacité de la mémoire, ainsi que le niveau d’inquiétude (en particulier au rappel différé) et de dépression. Ensuite, nous nous attendons à ce que la qualité de l’image visuelle mentale prédise la qualité du souvenir épisodique. Puisque les souvenirs épisodiques s’expriment fréquemment sous forme d’images visuelles mentales, nous faisons aussi l’hypothèse d’un lien entre le fait d’avoir l’habitude de se représenter les pensées sous forme d’images mentales et la qualité des souvenirs. Enfin, nous nous intéresserons aux différents profils mnésiques que permet de mettre en évidence le TMI.

Dans la suite de ce travail, nous présentons d’une part la méthodologie qui a été mise en place afin d’élaborer le TMI (élaboration à la fois des stimuli et des consignes), et d’autre part la méthodologie qui concerne la partie expérimentale de cette recherche, à savoir l’exploration du TMI dans une population de personnes âgées.

3. Méthodologie

3.1. Méthodologie de l’élaboration du TMI

Le TMI a beaucoup évolué au cours de ces deux dernières années. Toutefois, sa structure globale est restée inchangée : encodage incident de stimuli (photos d’activités de la vie quotidienne avec titre de l’activité), phase interférente de quelques minutes, rappel immédiat (des activités et des détails des photos), rappel différé (des activités et des détails des photos) à sept jours. Le rappel des activités consiste à rappeler librement le nom d’un

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maximum d’activités et le rappel des détails consiste à rappeler librement un maximum de détails qui apparaissait sur la photo. Nous proposons dans la section suivante un récapitulatif des principales évolutions qu’a subi le TMI. Ces changements se sont souvent faits en parallèle, mais nous les présentons ici de manière sérielle afin de faciliter la compréhension.

3.1.1. Élaboration des stimuli

Choix des activités. Les stimuli du TMI sont des photographies qui représentent toutes des mises en scène d’activités de la vie quotidienne. Le choix des activités a été effectué en tenant compte de plusieurs critères. Tout d’abord nous avons choisi des activités qui représentent la vie quotidienne, mais qui ne sont toutefois pas trop routinières (contrairement à l’activité « Se brosser les dents » par exemple), et que tout un chacun est susceptible d’avoir déjà effectuées. Nous avons donc essayé de sélectionner des activités qui soient relativement indépendantes de l’âge et du genre (contrairement à l’activité « Jouer au basket-ball » que les jeunes effectuent probablement plus que les personnes âgées, et l’activité « Préparer un dessert » qui est en général davantage effectuée par les femmes que par les hommes, pour citer deux exemples). Étant donné que ce test est destiné à une population adulte, présenter des activités plus familières pour les jeunes adultes versus les âgés ou pour les femmes versus les hommes comporte un biais. En effet, les personnes risquent potentiellement de mieux se rappeler des activités qu’elles ont l’habitude d’effectuer (en lien avec l’agentivité personnelle). Dans la version finale du TMI que nous avons utilisée dans le cadre de ce mémoire, nous avons retenu comme activités : « Jouer avec des enfants », « Trier les déchets », « Lire le journal », « Parler au téléphone », « Dîner en famille », « S’occuper d’un animal », « Jouer aux cartes », « Arroser les plantes », « Boire un café avec un ami », « Faire les courses », « Se promener dans la nature », « Regarder la télévision », « Acheter des habits », « Offrir un cadeau », « Faire sa toilette » et « Fêter un anniversaire ».

Photographies. Les photographies ont été prises par Caroline Bendahan, Michalina Radomska et moi-même. Nous avons utilisé différents appareils photo, aux caractéristiques similaires, prêtés par l’atelier multimédia de l’Université de Genève, à Uni Mail. Au moment de réaliser les mises en scène de chaque photographie, nous avons fait attention d’inclure un ou plusieurs acteurs (en train de faire l’activité en question), un contexte, un lieu, et des éléments de détails qui ne soient pas « devinables », afin d’éviter le rappel de connaissances sémantiques et non pas épisodiques. Par exemple, « une coupe de fruits » n’est pas un élément

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sémantiquement lié à l’activité « Jouer aux cartes », contrairement à « des cartes » (un exemple de stimulus incluant cette photographie est montré plus loin dans la Figure 2).

Il était important que les photographies soient de complexité équivalente (chaque stimulus devant contenir à peu près la même charge de détails), ceci afin de s’assurer que le nombre de détails rapporté pour chaque photographie soit équiprobable. Nous avons par ailleurs exclu les photographies trop émotionnelles, en particulier celles jugées négativement puisque les stimuli négatifs ont pour effet d’améliorer le rappel des détails du souvenir (Kensinger, 2007). Pour ce faire, nous avons présenté vingt-cinq de nos photographies à vingt sujets (âge : M = 27.8, ET = 9) et leur avons demandé de les juger, en terme de complexité et de valence émotionnelle. La complexité était évaluée sur une échelle de Likert en neuf points, allant de « pas du tout détaillée » à « extrêmement riche en détails » ; et la valence émotionnelle sur une échelle de Likert en neuf points, allant de « émotions très négatives » à

« émotions très positives ». Cette procédure nous a permis d’exclure les photos jugées trop complexes ou trop peu complexes et les photos émotionnellement négatives. Nous avons refait a posteriori un ensemble de photos en prêtant attention à ces deux critères.

Nous avons essayé de balancer le genre (56.7% de femmes), ainsi que l’âge (5 enfants, 13 adultes et 12 personnes âgées) des acteurs apparaissant sur les photographies. En effet, ce test est destiné à une population d’adultes dès 18 ans et nous voulions éviter un effet d’identification aux acteurs du même genre et du même âge facilitant un encodage en référence à soi. Il est à noter que la plupart des acteurs sont des membres de nos familles respectives ou de notre entourage, qui ont signé un formulaire de consentement nous autorisant à utiliser leur image dans le cadre du TMI.

Afin de déterminer l’ordre de présentation des photos dans la procédure du TMI, nous avons tenu compte de différents critères : nous avons essayé de balancer le genre des acteurs (alterner entre une photo mettant en scène un homme puis une photo mettant en scène une femme), leur âge (alterner entre une photo mettant en scène une personne jeune puis une personne âgée), les photos prises en extérieur / à l’intérieur ainsi que le caractère social de la photo (alterner entre une photo « sociale » comme « Jouer avec des enfants » puis une photo sans caractère social comme « Trier les déchets »).

Présentation des photographies. Les photographies ont été imprimées sur un support papier (Premium NeverTear indéchirable) assez épais (155 g), au format A4 (21 x 29.7 cm).

Une seule photo par page apparaissait aux dimensions de 16.5 x 22 cm (en orientation

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paysage). Le titre de l’activité était inscrit au-dessus de la photo de manière à être bien lisible : police Calibra, taille 44 points, gras et centré. Un exemple de stimuli en taille réelle est présenté dans la Figure 2. Une version en taille réduite de chaque stimulus est proposée en Annexe I.

Nombre de stimuli. Nous avons d’abord testé notre tâche sur six sujets (âge : M = 37, ET = 17) en proposant douze stimuli lors de l’encodage. Les résultats mettant en évidence un effet plafond (rappel immédiat : score Min = 7, score Max = 11, Md = 9.5 ; rappel différé : score Min = 7, score Max = 12, Md = 9), nous avons décidé d’augmenter le nombre de stimuli à 16 afin d’améliorer la sensibilité de notre tâche.

3.1.1. Élaboration des consignes

L'élaboration des consignes a été une tâche ardue. Nous les avons régulièrement prétestées sur un nombre restreint de participants, la plupart du temps jeunes, avant de les modifier en fonction de nos observations et des remarques des participants.

Cover story. Puisque nous effectuons un encodage incident, les participants ne doivent pas savoir qu’ils sont soumis à un test de mémoire. Toutefois, nous leur faisons bien passer un test, qu’il faut dès lors justifier. Afin d’introduire la tâche, nous avons donc dû mettre au point une cover story, qui explique aux participants dans les grandes lignes en quoi consiste la tâche, en évitant d’éveiller leurs soupçons. Nous avons élaboré différentes cover story, pour n’en garder qu’une, qui se voulait à la fois simple et directe :

« Ce qui m’intéresse, c’est de mieux connaître vos habitudes et l’importance que vous accordez à certaines activités dans votre vie quotidienne. Je vais vous montrer différentes photos d’activités et vous devrez m’expliquer quelle est l’importance que ces activités ont dans votre vie actuelle ou ont eue dans votre vie passée. C’est vraiment votre avis personnel qui m’intéresse, c’est pourquoi il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse ».

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Figure 2. Exemple du stimulus « Jouer aux cartes » en taille réelle.

Jouer aux cartes

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Consignes données lors de l’encodage. De même, nous voulions que nos participants observent les stimuli (sans savoir qu’ils devaient les mémoriser), et soient en mesure de faire un lien entre ces stimuli et leur identité (en activant leur Self-Memory System).

Observation. Afin de garantir l’exploration visuelle des photos, nous avons d’abord demandé aux participants de dénommer deux éléments qui leur plaisaient dans la photo. Ils nous ont massivement donné comme retour que cette unique consigne ne leur permettait pas suffisamment d’explorer les photos. Il y avait également régulièrement des personnes qui n’arrivaient tout simplement pas à trouver deux éléments qui leur plaisaient dans la photo.

Nous avons donc fait évoluer cette consigne en une phase d’observation simple, où la consigne était de regarder la photo pendant quelques secondes. Durant les prétests que j’ai effectués, il m’a semblé que les personnes ne respectaient pas toujours cette consigne. Dès la seconde photo, ils savaient que j’allais ensuite leur poser des questions concernant l’importance qu’ils accordent à cette activité. Au moment de la présentation de la photo, j’avais le sentiment qu’ils étaient déjà en train de penser à leurs réponses concernant les questions suivantes plutôt que d’observer la photo. Je comprends qu’ils aient agi ainsi puisque l’action d’observer passivement la photo n’était pas pertinente pour eux dans la compréhension qu’ils avaient de la tâche (mieux connaître leurs habitudes de vie).

Nous avons donc décidé de modifier encore cette phase d’observation en supprimant le titre des photos. Les participants devaient observer la photo, puis dire de quelle activité il s’agissait selon eux. Ainsi il fallait qu’ils observent activement les photos pour produire eux- mêmes les noms des activités. Rappelons ici que le rappel consiste d’abord à récupérer le nom d’un maximum d’activités. Cette consigne rendait donc la tâche difficile pour le clinicien, qui devait prendre note des réponses de chaque personne lors de l’encodage, puis faire le lien avec les réponses données au moment du rappel, qui pouvaient être différentes. Cela impliquait également beaucoup de variabilité entre les participants et de confusion. Par exemple, un participant a donné comme nom d’activité « Le dimanche en famille » pour l’activité « Jouer avec des enfants », qui peut ensuite facilement être confondu avec l’activité

« Dîner en famille ».

Pour finir, nous avons choisi de couvrir le titre de la photo durant la phase d’observation, en commençant par demander au participant de décrire ce qu’il observait.

Après cette description succincte de la scène, nous découvrons le titre, avant de le lire : « il s’agit de l’activité « … » ». Ainsi la phase d’observation est mieux contrôlée. Les participants

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doivent observer la scène un minimum pour la décrire verbalement, sans se contenter de lire le titre de l’activité qui est caché. Cette procédure permet également aux participants d’avoir le même indice de récupération (puisque le nom des activités est le même pour tous).

Lien avec le self. Notre objectif était que les participants encodent les stimuli en référence à soi. Nous avons donc réfléchi à différentes manières de les pousser à créer un lien entre ces photos et leur identité. Pour cela nous leur avons d’abord demandé d’exprimer sur une échelle de Likert (en cinq points, allant de « pas du tout » à « extrêmement ») à quel point faire cette activité était important pour eux ; et à quel point cette photo leur rappelait des souvenirs personnels (sur la même échelle de Likert). Il nous est apparu qu’en demandant de faire des liens avec le self uniquement via des réponses sur des échelles, les participants n’avaient pas l’opportunité d’effectuer un traitement suffisamment profond. Au contraire, ils désignaient parfois une réponse sur l’échelle sans paraître se poser véritablement la question, et ce traitement nous semblait trop superficiel. Pour y remédier, nous avons introduit des questions ouvertes, permettant aux participants d’élaborer leur réponse et exigeant aussi d’eux un traitement plus poussé.

Ainsi, nous avons d’abord demandé aux participants de nous dire, en une phrase ou deux, s’il y avait des éléments dans cette photo qui leur évoquaient des choses qu’ils avaient personnellement vécues. Cette consigne avait l’avantage de contraindre le participant à regarder la photo tout en faisant un lien avec sa propre identité. Mais les réponses que nous obtenions étaient souvent insatisfaisantes. En effet, cette consigne donnait souvent lieu à des réponses sémantiques très générales telles que « j’aime les animaux » ou encore « c’est bien de faire le tri ».

Dès lors, nous avons repris la question de l’importance, en demandant aux participants à quel point l’activité est importante pour eux (échelle de Likert en cinq points, allant de « pas du tout » à « extrêmement », voir Annexe II). Après avoir fait leur choix sur l’échelle, les participants devaient expliquer en quelques mots pourquoi ils avaient fait ce choix. Il s’agit donc pour la personne de juger une activité par rapport à l’importance qu’elle lui accorde (pertinence par rapport au self) puis de dire pourquoi (traitement profond et lien avec le self).

Si la réponse du participant est trop générale, peu claire ou non reliée à son identité, l’expérimentateur intervient et lui demande de préciser sa réponse, l’incite à donner un avis personnel, à dire ce qu’il pense. Cette procédure permet de maximiser les chances d’obtenir des réponses en lien avec le self.

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Il est à noter ici que nous avons envisagé d’introduire une question concernant les émotions dans nos consignes d’encodage. Nous n’avons finalement pas retenu cette possibilité, mais voici un petit résumé de notre réflexion sur ce sujet. Les émotions ayant un rôle important dans la mémorisation des épisodes, nous avons essayé de demander aux participants si la photo leur évoquait des émotions (toujours sur une échelle de Likert en cinq points, allant de « pas du tout » à « extrêmement »). Ensuite, nous leur demandions d’indiquer la valence de l’émotion ressentie (sur une échelle composée de cinq figurines représentant une graduation entre un visage très triste et un visage très joyeux). Étant donné que nos photos ne suscitaient pas d’émotions négatives, nous avons d’abord abandonné la question de la valence, puis celle de l’émotion. En effet, nous avions fait attention de ne sélectionner que des photos qui dégageaient à peu près la même intensité émotionnelle, ce qui rendait cette question peu pertinente.

Contrôle du temps d’encodage. Certaines questions posées durant la phase d’encodage ont également été supprimées ou adaptées en fonction du temps qu’elles nécessitaient. Durant les premiers prétests, le temps d’encodage pouvait être très variable d’un individu à l’autre (entre 9 et 18 minutes, ET = 3). Ceci pose problème dans la mesure où les effets observés ensuite sur le rappel peuvent être liés au temps consacré à encoder les stimuli, en partant du principe qu’une personne qui passe plus de temps à encoder aura de meilleures performances.

Il était donc important pour nous de pouvoir contrôler au maximum ce temps d’encodage.

Pour ce faire, nous avons déterminé le temps approximatif nécessaire au participant pour donner sa réponse. Une incitation est prévue si la réponse donnée est trop brève. Ainsi, pour la phase d’observation, une réponse d’environ dix secondes concernant la description de la scène est attendue. Si le participant s’arrête avant, l’expérimentateur l’incite systématiquement en lui demandant : « quoi d’autre ? ». De même, une réponse d’environ quinze secondes est attendue pour la justification de l’importance. Si la réponse est trop brève, le participant est invité à élaborer sa réponse : « dites-m’en un peu plus ». En cas de réponses trop longues, nous avons interrompu le participant afin de lui signifier que sa réponse était suffisante. Ainsi, la durée approximative d’encodage pour chaque photo est d’une minute, soit 16 minutes pour les 16 photos.

Compréhension des consignes / essai. Afin de nous assurer que les participants comprennent bien les consignes de la phase d’encodage (quelle est l’importance de l’activité

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et pourquoi), nous avons inclus un essai au début de la passation du TMI. En effet, après avoir donné les consignes et avant de montrer la première photo, le participant doit répondre aux deux questions d’encodage avec l’exemple de l’activité « Aller au cinéma ». Encore une fois, le participant ne voit pas de photo lors de cet essai, il doit simplement indiquer à quel point l’activité « Aller au cinéma » est importante pour lui puis dire pourquoi en quelques mots. Cet essai permet d’illustrer la consigne et est souvent l’occasion d’insister sur l’importance de donner des réponses personnelles et pas trop générales.

La version définitive des consignes utilisées dans le cadre de ce mémoire durant la phase d’encodage est proposée en Annexe III.

Consignes de rappel. Les consignes données pour le rappel libre et le rappel des détails apparaissent en Annexe IV pour la session 1 (rappel immédiat) et Annexe V pour la session 2 (rappel différé). Le temps accordé au rappel libre des activités a été fixé à deux minutes, et à approximativement trente secondes pour le rappel des détails de chaque photo.

Nous avons décidé de ne procéder au rappel des détails que pour les activités qui ont été rappelées lors du rappel libre de la séance en cours.

3.2. Méthodologie de l’expérimentation

3.2.1. Population

Nous avons recruté 41 participants. A posteriori, nous avons exclu un des participants, qui présentait des troubles cognitifs avérés suite à un AVC. Nous présentons ici les caractéristiques de notre échantillon après l’exclusion de ce sujet. L’échantillon est donc finalement composé de 40 individus tout-venant âgés de 60 à 77 ans (M = 67.5 , ET = 4.6), parlant couramment le français (c'est-à-dire de langue maternelle ou avec une très bonne expression / compréhension). Nous avons essayé de constituer un échantillon composé d’autant d’hommes que de femmes, mais au final le nombre d’hommes diffère significativement du nombre de femmes (40% d’hommes contre 60% de femmes, χ2(1) = 4.00, p = 0.045). Nos participants ont effectué entre 8 et 19 années d’études (M = 13.0, ET = 2.8). Seulement six d’entre eux (15%) exercent encore actuellement une activité professionnelle et quatorze ont une activité bénévole significative (35%).

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