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La marge d'appréciation des cantons dans l'octroi d'autorisations de séjour pour "cas individuels d'une extrême gravité"

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La marge d'appréciation des cantons dans l'octroi d'autorisations de séjour pour "cas individuels d'une extrême gravité"

VALLIER, Camille

Abstract

En matière d'autorisation de séjour pour cas individuel d'une extrême gravité, les divergences cantonales sont extrêmement importantes. Pourtant, les conditions liées à l'octroi de ces titres de séjour découlent du droit fédéral, et la Confédération dispose d'un pouvoir de surveillance quant à la mise en œuvre de la loi fédérale sur les étrangers par les cantons. Le présent travail s'intéresse à ce hiatus : il vise d'une part à identifier les raisons susceptibles d'expliquer ces divergences de pratique, et d'autre part à déterminer la réelle marge de manœuvre des cantons dans l'octroi d'autorisations de séjour pour cas individuel d'une extrême gravité.

VALLIER, Camille. La marge d'appréciation des cantons dans l'octroi d'autorisations de séjour pour "cas individuels d'une extrême gravité". Master : Univ. Genève, 2016

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:88909

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(2)

L

A MARGE D

APPRÉCIATION DES CANTONS DANS L

OCTROI D

AUTORISATIONS DE SÉJOUR POUR

«

CAS INDIVIDUELS D

UNE EXTRÊME GRAVITÉ

»

 

           

camille.vallier@unige.ch

Travail de mémoire présenté dans le cadre du séminaire

« La politique migratoire de la Suisse. Aspects constitutionnels »

Supervision : Professeure Maya HERTIG RANDALL et Professeur Michel HOTTELIER

Semestre de printemps 2016

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TABLE DES MATIERES

I.   Introduction ... 1  

II.   Les compétences fédérales et cantonales ... 2  

A.   La répartition des compétences législatives en matière d’immigration ... 2  

B.   Les compétences d’exécution en vertu de la loi fédérale sur les étrangers ... 3  

1)   Le préavis cantonal ... 4  

2)   L’approbation fédérale ... 4  

III.  Le cas individuel d’une extrême gravité : une notion juridique indéterminée ... 6  

A.   La notion de cas individuel d’une extrême gravité ... 6  

B.   L’appréciation des critères légaux ... 8  

1)   Intégration ... 8  

2)   Respect de l’ordre juridique ... 11  

3)   Situation familiale ... 12  

4)   Situation financière ... 12  

5)   Durée de présence ... 13  

6)   Etat de santé ... 15  

7)   Possibilités de réintégration dans l’Etat de provenance ... 16  

C.   Synthèse ... 16  

IV.  Voie libre aux divergences cantonales ... 17  

A.   Le contrôle judiciaire des décisions cantonales ... 17  

B.   Le refus d’approbation du SEM ... 20  

C.   Le contrôle judiciaire des décisions fédérales ... 20  

D.   Synthèse ... 22  

V.   Inégalité de traitement ? ... 22  

VI.  Conclusion ... 23  

Bibliographie ... 25  

Annexes ... 29  

Annexe I : Statistiques du SEM – Permis délivrés pour cas de rigueur (art. 30 al. 1 le. b LEtr) entre 2010 et 2014 ... 29  

Annexe II : Récapitulatif des arrêts du TAF concernant l’art. 30 al. 1 let. b LEtr entre le 1er janvier 2015 et le 27 mai 2016 ... 34  

Annexe III : Attestation de prise en charge financière (formulaire O) - OCPM ... 35  

(4)

TABLE DES ABREVIATIONS

aLSEE Loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l’établissement des étrangers (RS 1.113)

aOLE Ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (RS 823.21)

CEDH Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (Convention européenne des droits de l’homme, RS 0.101)

CFM Commission fédérale pour les questions de migration Cst. Constitution fédérale du 19 avril 1999 (RS 101) DFJP Département fédéral de justice et police

Directives LEtr Directives et commentaires du Secrétariat d’Etat aux migrations d’octobre 2013, domaine des étrangers

Integrationgesetz/BL Baseler Gesetz vom 19. April 2007 über die Einführung der Integrationstimmungen des Bundesgesetzes über die Ausländerinnen und Ausländer (RS/BL 36.0394)

LAsi Loi fédérale du 26 juin 1998 sur l’asile (RS 142.31)

LEtr Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (RS 142.20)

LIETr/GE Loi genevoise du 28 juin 2001 sur l’intégration des étrangers (RS/GE A 2 55)

LIEPR/VD Loi vaudoise du 23 janvier 2007 sur l’intégration des étrangers et la prévention du racisme (RS/VD 142.52)

LN Loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l’acquisition et la perte de la nationalité suisse (RS 141.0)

LStup Loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (RS 812.121)

LTAF Loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (RS 173.32)

LTF Loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (RS 173.110) OASA Ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l’admission, au séjour et à

l’exercice d’une activité lucrative (RS 142.210)

OCPM Office cantonal de la population et des migrations (Genève)

(5)

ODFJP Ordonnance du Département fédéral de justice et police du 13 août 2015 relative aux autorisations soumises à la procédure d’approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers

(RS 142.201.1)

OIE Ordonnance du 24 octobre 2007 sur l’intégration des étrangers (RS 142.205)

PA Loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (RS 172.021)

SEM Secrétariat d’Etat aux migrations TAF Tribunal administratif fédéral

TF Tribunal fédéral

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En matière d’autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, les divergences cantonales sont extrêmement importantes. En effet, entre les années 2010 et 2014, 96% de ces autorisations ont été délivrées dans les cantons de Genève et Vaud, et seuls les cantons de Genève, de Vaud et de Fribourg ont délivré de telles autorisations chaque année depuis 20101. Pourtant, les conditions liées à l’octroi de ces titres de séjour découlent du droit fédéral, et la Confédération dispose d’un pouvoir de surveillance quant à la mise en œuvre de la loi fédérale sur les étrangers par les cantons.

Le présent travail s’intéresse à ce hiatus : il vise d’une part à identifier les raisons susceptibles d’expliquer ces divergences de pratique, et d’autre part à déterminer la réelle marge de manoeuvre des cantons dans l’octroi d’autorisations de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité.

La notion-même de « cas individuel d’une extrême gravité » est intéressante en ce qu’elle laisse aux autorités chargées de son application une double marge de manœuvre. Tout d’abord, elle détermine l’existence d’une telle situation en fonction de sept critères2, tous constitutifs de notions juridiques indéterminées, et par là même sujets à interprétation.

Ensuite, la délivrance d’une autorisation de séjour sur la base de ces critères ne représente pas un droit, mais une possibilité (Kannvorschrift)3. Ainsi, l’autorité dispose non seulement d’une latitude de jugement, mais également d’une liberté d’appréciation quant aux conséquences qu’elle entend rattacher à l’existence d’une telle situation.

Le nombre d’étrangers présents dans la population cantonale paraît de prime abord pouvoir constituer un facteur explicatif de ces divergences cantonales : plus le nombre d’étrangers est important, plus le nombre de titres de séjour délivrés devrait être élevé. Or, cette hypothèse n’est pas corroborée par les données cantonales : le canton de Genève occupe la troisième place du classement des cantons accueillant le plus grand nombre d’étrangers (159’440)4 et délivre le plus de permis de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité (1492 entre 2010 et 2014)5. A l’inverse, Zurich est le canton accueillant la plus grande population étrangère (277’982)6, mais n’a délivré que 16 autorisations de séjour de la sorte entre 2010 et 20147.

1 Statistiques SEM (cf Annexe I).

2 Art. 31 OASA.

3 L’art. 31 OASA prévoit qu’une autorisation de séjour « peut » être octroyée dans les cas individuels d’une extrême gravité.

4 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN, p. 30.

5 Statistiques SEM (cf Annexe I).

6 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN, p. 48.

7 Statistiques SEM (cf Annexe I).

(7)

Ainsi, l’on constate que les raisons démographiques ne permettent pas à elles seules d’expliquer les énormes différences entre cantons.

La Commission fédérale pour les questions de migration a analysé les politiques cantonales en matière d’immigration, et a observé que la composition de l’exécutif cantonal, ainsi que l’attitude des citoyens à l’égard de la migration influencent de manière importante les politiques migratoires cantonales8.

Au-delà de ces considérations politiques, nous tenterons de définir les mécanismes légaux qui permettent à une telle hétérogénéité de pratiques de se développer. A cette fin, nous examinerons dans un premier temps la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons en matière de droit des étrangers (II), puis la notion de « cas personnel d’une extrême gravité » et les critères qui la définissent (III). A ce titre, nous observerons qu’il existe une dichotomie entre la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral et l’appréciation des critères par les autorités administratives tant cantonales que fédérales.

Finalement, nous étudierons les voies de recours ouvertes contre les décisions cantonales et fédérales (IV), et tenterons de déterminer si le système actuel entraîne des violations du principe d’égalité de traitement (V).

II. LES COMPETENCES FEDERALES ET CANTONALES

A. La répartition des compétences législatives en matière d’immigration

En vertu de l’art. 121 al. 1 Cst., la compétence législative en matière d’entrée, de sortie, de séjour et d’établissement des étrangers appartient à la Confédération. Le fédéralisme d’exécution implique que les cantons mettent en œuvre le droit fédéral, tout en disposant d’une marge de manœuvre aussi grande que possible, afin de tenir compte de leurs particularités9.

La Confédération a fait usage de sa compétence législative en matière d’immigration, en adoptant la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers, laquelle a remplacé l’ancienne loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers (aLSEE). La LEtr est complétée par une série d’ordonnances, dont l’ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative.

8 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN, pp. 11 ss.

9 Art. 46 al. 1 et 3 Cst. ; MAHON, p. 115.

(8)

La doctrine est partagée quant à la nature de la compétence fédérale : alors que certains considèrent qu’il s’agit d’une compétence limitée aux principes10, d’autres sont d’avis qu’elle représente une compétence exclusive de la Confédération11. NGUYEN, lui, considère que la compétence fédérale en matière d’immigration est une compétence législative concurrente non limitée aux principes, en raison de la liberté dont disposent les cantons pour adopter des règles en matière d’organisation ou de procédure, et pour édicter des prescriptions dans certains domaines (par exemple le dépôt des papiers de légitimation, ou la déclaration d’arrivée et de départ en cas de changement d’adresse au sein du même canton ou de la commune)12.

Cette dernière conception nous parait convaincante. Tout d’abord, la compétence fédérale est concurrente, puisque les cantons ont le pouvoir de légiférer dans les domaines qui ne sont pas régis par des dispositions fédérales. A ce titre, l’on citera par exemple les lois cantonales en matière d’intégration des personnes migrantes13. Les Directives LEtr confirment d’ailleurs que « [t]out ce qui a trait à l’octroi ou au renouvellement des autorisations de séjour et qui n’est pas prévu par des ordonnances ou des directives relève de la compétence des cantons »14. De plus, la LEtr ne constitue pas une loi cadre, puisque les dispositions fédérales sont suffisamment précises et ne nécessitent pas d’être concrétisées par des normes cantonales.

Par conséquent, le système de répartition des compétences entre les cantons et la Confédération en matière d’immigration laisse aux cantons une certaine marge de manoeuvre en matière législative. Reste à établir leur réelle marge de manœuvre dans l’exécution des tâches qui leur sont confiées par la loi fédérale.

B. Les compétences d’exécution en vertu de la loi fédérale sur les étrangers

La LEtr institue un système relativement complexe d’attribution des tâches exécutives.

Le Secrétariat d’Etat aux migrations dispose d’une compétence résiduelle, et les cantons ne sont ainsi compétents pour l’exécution d’une tâche que lorsque la loi ou ses ordonnances d’application la leur confient expressément15.

10 MACHERET, pp. 88 ss.

11 RHINOW, p. 66.

12 NGUYEN (2003), p. 104.

13 Notamment la LIEtr/GE, la LIEPR/VD et la Integrationgesetz/BL.

14 Directives LEtr, ch. 1.2.1.

15 Art. 98 al. 1 LEtr et 89 al. 2 OASA.

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1) Le préavis cantonal

En matière d’octroi d’autorisations de séjour, les cantons sont compétents en vertu de l’art. 40 al. 1 LEtr. Ils sont chargés d’instruire les demandes et d’établir les faits, puis de se déterminer quant à la suite qu’ils entendent donner à la requête.

Un refus d’autorisation prononcé par un canton est définitif et l’autorité fédérale ne dispose pas de moyen d’intervenir 16.

En revanche, une décision positive de l’autorité cantonale ne constitue qu’un simple préavis, dont la portée est limitée par le pouvoir d’approbation que se réserve la Confédération17, notamment dans le cadre de dérogations aux conditions d’admission pour cas individuel d’une extrême gravité18. Pour ces catégories d’autorisations, le titre de séjour ne peut donc être établi que lorsque le SEM a donné son approbation19.

2) L’approbation fédérale

L’attribution formelle de la compétence d’approbation au SEM a fait l’objet d’un examen jurisprudentiel et d’un remaniement en 2015. Dans son ancienne teneur, l’art. 85 OASA prévoyait la compétence du SEM pour approuver l’octroi et le renouvellement des autorisations de séjour, lorsqu’il estimait qu’une procédure d’approbation était nécessaire pour certaines catégories de personnes afin d’assurer une pratique uniforme de la loi, ou lorsqu’il exigeait que l’approbation lui soit soumise dans un cas d’espèce20. Or le Tribunal fédéral a jugé dans un arrêt publié de 2015 que l’octroi de la compétence d’approbation par le biais de cette disposition était contraire à la délégation législative de l’art. 99 LEtr, et ne permettait pas au SEM de déterminer lui-même, par le biais de ses Directives, les cas qui devaient lui être soumis pour approbation21.

Suite à cet arrêt, la version modifiée de l’art. 85 OASA est entrée en vigueur le 1er septembre 2015 : elle contient désormais une clause de délégation plus précise, et charge le département fédéral de justice et police de déterminer, par voie d’ordonnance, « les cas dans lesquels les autorisations de courte durée, de séjour ou d'établissement ainsi que les décisions préalables des autorités du marché du travail doivent être soumises à la procédure d'approbation »22. L’ordonnance du DFJP relative aux autorisations soumises à la procédure

16 NGUYEN,p. 308.

17 Art. 99 LEtr.

18 Art. 85 OASA et 5 let. d ODFJP.

19 Art. 86 al. 5 OASA.

20 Ancien art. 85 let. a et b OASA (RO 2007 0993).

21 ATF 141 II 169, consid. 4.4.

22 Art. 85 al. 2 OASA.

(10)

d’approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers, entrée en vigueur à la même date, contient la liste des cas soumis à l’approbation du SEM.

L’octroi d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité requiert une telle approbation fédérale23. Ainsi, en cas de préavis cantonal positif, trois possibilités s’offrent au SEM, qui pourra approuver le préavis cantonal, refuser de l’approuver, ou en restreindre la portée en l’assortissant de conditions ou en proposant une admission provisoire24.

Le TAF insiste sur le caractère recommandationnel du préavis cantonal positif, en relevant dans chacune de ses décisions qu’ « [e]n vertu de la réglementation au sujet de la répartition des compétences en matière de droit des étrangers entre la Confédération et les cantons, si ces derniers ont certes la faculté de se déterminer à titre préalable au sujet de la délivrance, du renouvellement ou de la prolongation d’autorisations de séjour fondées sur l’art. 30 al. 1 let. b LEtr, la compétence décisionnelle en la matière (sous forme d’approbation) appartient toutefois à la Confédération, plus particulièrement au SEM […].

Il s’ensuit que l’autorité intimée et, a fortiori, le Tribunal ne sont pas liés par la décision de l’autorité cantonale de délivrer à X. une autorisation de séjour fondée sur l’art. 30 a. 1 let. b LEtr et peuvent donc parfaitement s’écarter de l’appréciation de cette dernière autorité »25.

La doctrine se montre critique face à ce système d’approbation fédérale, considérant qu’il transfère en réalité les compétences exécutives des cantons à la Confédération, dans une vision très centraliste de l’Etat, visant « l’uniformisation sur le plan fédéral de l’application du droit »26. LAMBERCY affirme même que la procédure d’approbation place les cantons sous une véritable tutelle fédérale27.

Deux remarques sont toutefois nécessaires à ce stade de l’analyse, et permettent de relativiser le poids à donner à ce qui apparaît à premier abord comme une lourde ingérence fédérale dans le pouvoir décisionnel des cantons.

Tout d’abord, comme indiqué ci-dessus, le SEM ne peut se prononcer qu’en cas de préavis cantonal favorable. Les préavis cantonaux défavorables échappent ainsi totalement à l’examen fédéral.

23 Art. 5 let. d ODFJP.

24 Art. 83 al. 1 LEtr et 86 al. 1 OASA.

25 TAF C-6768/2013, consid. 3.

26 NGUYEN, p. 105 et 113.

27 LAMBERCY, p. 121.

(11)

Deuxièmement, le taux de refus d’approbation par le SEM suite à un préavis cantonal favorable varie entre 15 et 3 % selon les années entre 2010 et 201428. Cet élément est extrêmement intéressant, puisqu’il permet d’observer que la Confédération suit dans une large mesure l’avis des cantons concernés, et n’impose ainsi que rarement des restrictions lorsque ces derniers sont disposés à délivrer l’autorisation requise.

Ainsi, l’objectif d’uniformisation de l’application de la LEtr n’est atteint que lorsque le SEM en vient à se prononcer à la suite d’un préavis cantonal positif, empêchant les cantons d’adopter une attitude trop permissive en matière d’autorisations de séjour. Il serait par conséquent plus judicieux de parler d’uniformisation négative. C’est alors uniquement dans ce cas de figure que le « droit de véto » du SEM – tel que mentionné dans le chapitre des Directives consacré aux relations entre les autorités cantonales compétentes et le SEM – semble trouver application29.

A l’inverse, la Confédération ne dispose pas d’outils lui permettant d’imposer aux cantons plus restrictifs d’assouplir leurs exigences.

La seule exception en la matière réside dans le fait que l’approbation fédérale reste valable en cas de changement de canton30 : dans cette hypothèse, le nouveau canton de résidence ne dispose alors pas de la possibilité de se prononcer sur l’octroi du titre de séjour. Le processus d’octroi d’autorisation de séjour, qui, selon le système examiné plus haut, peut être défini de

« bottom up », est ici inversé (« top down »), puisque le SEM peut, dans cette configuration, imposer l’octroi d’un titre de séjour à un canton.

III. LE CAS INDIVIDUEL DUNE EXTREME GRAVITE : UNE NOTION JURIDIQUE INDETERMINEE

A. La notion de cas individuel d’une extrême gravité

La dérogation aux conditions d’admission31, envisagée par l’art. 30 LEtr, permet notamment de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité32. Cette catégorie résiduelle permet d’envisager diverses situations qui ne sont pas couvertes par les autres dispositions de la LEtr, mais que le législateur a tout de même considérées comme dignes de protection33.

28 Statistiques SEM (cf Annexe I).

29 Directives LEtr, ch. 1.2.2.

30 Art. 86 al. 4 OASA.

31 L’on entend par là une dérogation aux conditions d’admission des art. 18 à 29 LEtr.

32 Art. 30 al. 1 let. b LEtr.

33 Les termes « cas de rigueur » ou « cas humanitaires » sont des synonymes du cas individuel d’une extrême gravité, et sont utilisés de manière indifférenciée.

(12)

L’appréciation par les autorités de l’existence d’un cas individuel d’une extrême gravité varie de manière importante en fonction de l’autorité appelée à se prononcer. En effet, certaines autorités cantonales ont tendance à l’admettre plus facilement, notamment dans le cadre de la régularisation de sans-papiers, alors que d’autres rejettent automatiquement toute demande de régularisation dans un tel cas de figure. Dans certains cantons, les associations de défense des droits des personnes migrantes indiquent même avoir renoncé complètement à introduire de telles demandes, tant les chances de succès sont inexistantes.

Le TAF souligne en effet le caractère exceptionnel de l’art. 30 al. 1 let. b LEtr, qui doit être envisagé comme une disposition dérogatoire34. Pour prétendre à une autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, les conditions de vie et d’existence de la personne,

« comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue »35.

Sept critères légaux doivent être pris en compte dans l’évaluation d’une situation individuelle d’une extrême gravité36. Ils ne sont pas cumulatifs et n’excluent pas la prise en compte d’autres éléments, mais ils doivent être examinés de manière restrictive37. En d’autres termes, les autorités doivent effectuer une pesée des intérêts, dans laquelle ces sept critères apparaissent comme des indices d’une situation personnelle d’extrême gravité.

Il s’agit ainsi, notamment, de tenir compte de l’intégration du requérant, de la conformité de son comportement à l’ordre juridique suisse, de sa situation familiale, de sa situation financière et de sa volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation, de la durée de sa présence en Suisse, de son état de santé, et des possibilités de réintégration dans son Etat de provenance. Le Tribunal fédéral a eu l’occasion de répéter que la jurisprudence développée en lien avec l’art. 13 let. f aOLE, qui contenait la même liste de critères, reste applicable38.

Comme indiqué plus haut, une double incertitude plane sur l’application de l’art. 30 al. 1 let. b LEtr. En effet, si l’énumération de notions juridiques indéterminées laisse à l’autorité une large latitude de jugement quant à leur interprétation, même en présence d’un cas individuel d’extrême gravité, l’autorité dispose d’une grande liberté d’appréciation quant à la délivrance d’une autorisation de séjour39.

34TAF C-516/2013, consid. 5.2.

35 TAF C-516/2013, consid. 5.2.

36 Art. 31 al. 1 OASA.

37 TAF C-6709/2013, consid. 4.1.

38 ATF 136 I 262, consid. 5.3.1.

39 NGUYEN, pp. 127 ss.

(13)

Cette situation, couplée à l’autonomie laissée aux cantons dans l’application du droit fédéral40, est à l’origine de grandes divergences de pratiques cantonales dans l’octroi d’autorisations pour cas individuels d’extrême gravité.

B. L’appréciation des critères légaux

La présente section vise à examiner la manière dont sont appliqués les sept critères légaux permettant d’établir l’existence d’un cas individuel d’une extrême gravité.

En raison de l’impossibilité d’accéder aux décisions administratives non-contentieuses, pour lesquelles le préavis cantonal favorable est suivi d’une approbation fédérale sans intervention judiciaire, nous sommes limités à présenter la position du TAF quant à l’analyse des situations constitutives de cas individuels d’une extrême gravité. Il sied toutefois de relever que la jurisprudence du TAF est plus restrictive que la pratique de certaines autorités administratives cantonales et fédérales, ce qui permet d’expliquer les minces chances de succès en cas de recours devant cette instance41.

1) Intégration

La notion d’intégration peut être comprise comme un droit-devoir : l’art. 2 OIE souligne que l’intégration est une notion pluridisciplinaire que les autorités doivent s’efforcer de mettre en œuvre afin d’établir l’égalité des chances entre Suisses et étrangers. L’art. 3 OIE, de son côté, indique que l’intégration est un devoir de la personne migrante, qui sera prise en compte de manière déterminante par les autorités dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation42. La tendance actuelle semble aller dans le sens d’un clair renforcement de l’intégration comme devoir43.

En effet, le critère de l’intégration tend à prendre de l’importance dans le domaine du droit des étrangers et de la nationalité : il apparaît en effet de plus en plus comme une exigence centrale, codifiée formellement dans les textes de loi44.

Or le fait que l’évaluation du niveau d’intégration d’une personne migrante soit de la compétence d’une autorité fédérale, alors que l’intégration comme tâche de l’Etat relève

40 Art. 46 al. 3 Cst.

41 Entre le 1er janvier 2015 et mi-mai 2016, seuls trois recours ont été admis, sur les 22 ayant été portés devant le TAF (cf Annexe II).

42 Voir aussi l’art. 4 al. 3 LEtr.

43 Voir en ce sens la révision de la LEtr (Intégration 13.030) et la nouvelle teneur des art. 11 let. a et 12 LN (FF 2010 1234).

44 FACHINETTI,pp. 69 ss.

(14)

principalement de la compétence des cantons45, soulève des questions d’égalité des chances.

En effet, l’on peut se demander s’il est équitable d’exiger un niveau d’intégration équivalent de deux personnes auxquelles des possibilités d’intégration différentes sont offertes46.

De manière générale, l’intégration comme devoir se manifeste par le respect de l’ordre juridique suisse et des valeurs de la Constitution, l’apprentissage de la langue nationale parlée sur le lieu de domicile, la connaissance du mode de vie suisse, et la volonté de participer à la vie économique et d’acquérir une formation47. En d’autres termes, le critère d’intégration fait référence à l’ancrage socio-professionnel en Suisse48.

Les exigences relatives au degré d’intégration varient selon le type d’autorisation, dans une sorte de gradation proportionnelle entre le niveau d’intégration et la stabilité du statut de séjour : alors que l’intégration n’a aucune influence pour l’octroi d’une admission provisoire, un niveau d’intégration élevé sera attendu pour la délivrance d’une autorisation d’établissement49, et une intégration maximale sera requise d’un candidat à la naturalisation50. Dans le cas de l’octroi d’un permis de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, les exigences en matière d’intégration sont particulièrement élevées : l’intégration doit revêtir un caractère exceptionnel51.

Sous l’angle professionnel, le TAF exige que la personne ait « acquis en Suisse des connaissances ou des qualifications si spécifiques que seule la poursuite de son séjour en ce pays pourrait lui permettre de mettre en œuvre »52. Les exigences liées à ce critère sont si élevées que le caractère exceptionnel de l’intégration professionnelle a par exemple été nié, dans le cas d’une personne ayant obtenu un diplôme bilingue d’assistante de direction et travaillant auprès du CICR au bénéfice d’un contrat à durée indéterminée53.

PETRY relève que cette exigence ne tient pas compte des contraintes liées à un séjour en situation irrégulière, qui restreignent passablement les possibilités de formation et d’ascension professionnelle. En effet, la majorité des sans-papiers travaille dans l’économie domestique

45 Art. 17A OIE ; L’on citera par exemple les possibilités de formation, les cours de langue gratuits, les possibilités d’emploi et les structures sociales.

46 Notamment MANATSCHAL, pp. 44 ss ; WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI- MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN, pp. 61ss. Contra : BIGLER, p. 236.

47 Art. 4 OIE.

48 PETRY, p. 293.

49 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN, pp. 60 ss.

50 HUDDLESTON/NIESSEN, p. 51 : selon une étude menée sur le plan européen, la loi sur la nationalité suisse est l’une des plus exigeantes d’Europe.

51 TAF C-6255/2013, consid. 5.2.4.

52 TAF C-516/2013, consid. 6.2.3.

53 TAF C-541/2015, consid. 7.2.

(15)

ou dans le domaine de la construction ou de la restauration54, domaines mal reconnus en termes d’ascension et de qualifications professionnelles.

A ce titre, la prise en compte des réalités et enjeux du marché parallèle du travail, ainsi que leurs conséquences sur la vie des travailleurs clandestins dans l’évaluation d’un cas individuel d’une extrême gravité ont été invoqués devant le TF. Ce dernier a rejeté ce grief, considérant que « [l]e marché illégal du travail, que l’intéressé compare à une forme « d’esclavage moderne », existe et subsiste uniquement parce qu’il permet la rencontre d’une certaine offre et d’une certaine demande, souvent du reste au détriment de la rationalisation de certains secteurs économiques » 55. Ainsi, le TF a clairement rappelé qu’il ne cautionnait pas le travail illégal, et n’entendait pas s’écarter d’une appréciation objective de l’intégration professionnelle exceptionnelle.

En sus de l’intégration professionnelle, l’intégration sociale doit également atteindre un niveau élevé: « […] les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité »56.

L’investissement dans la vie associative et culturelle, notamment la fréquentation de sociétés locales, représente un indice permettant de considérer que l’intégration sociale de la personne est particulièrement poussée57. Dans un arrêt de 2015, le TAF a reconnu l’intégration sociale exceptionnelle d’une personne investie dans plusieurs associations en qualité de bénévole (chorale d’une église, préparation de repas pour des personnes défavorisées, etc.)58. Notons toutefois que la requérante avait vécu à Genève pendant 8 ans, dans un milieu international relativement aisé, lui laissant ainsi le loisir de participer à ce genre d’activités.

Toutefois, les contraintes liées au séjour irrégulier ne laissent souvent pas aux personnes le temps, l’énergie, ou les moyens financiers pour s’adonner à des activités de loisir : Ainsi, exiger d’elles qu’elles participent à des activités associatives ou bénévoles représente souvent un obstacle insurmontable. De plus, si les relations d’amitié, de voisinage et de travail ne permettent pas de retenir une intégration sociale élevée, on a du mal à imaginer quel type de relation amènerait le TAF à admettre l’existence d’une intégration sociale réussie.

54 MORLOCK /OSWALD /MEIER/EFIONAYI-MÄDER/RUEDIN/BADER /WANNER, p. 42.

55 ATF 130 II 39, consid. 5.1.

56 TAF C-516/2013, consid. 6.2.2.

57 TAF C-541/2015, consid. 7.3.

58 TAF C-541/2015, consid. 7.3.

(16)

Finalement, le niveau de langue est également un indice de bonne intégration. Les Directives LEtr indiquent que la personne doit pouvoir comprendre et utiliser des expressions familières et quotidiennes ainsi que des énoncés très simples qui visent à satisfaire des besoins concrets.

Elle doit pouvoir se présenter et communiquer de façon simple si son interlocuteur parle lentement, distinctement et se montre coopératif. Le niveau A1 du Cadre européen commun de référence pour les langues constitue le niveau minimal. Or, rien n’empêche les cantons de se montrer plus stricts. Les attentes relatives à ce critère sont variables, en fonction du type d’autorisation et des exigences cantonales : certains cantons vont même jusqu’à requérir un niveau B159.

L’exigence du niveau de langue, si elle est certes compréhensible d’un point de vue pratique, tend à pénaliser certaines catégories de personnes, qui ont été empêchées d’apprendre la langue locale précisément par la situation justifiant leur besoin de protection. L’on peut citer à ce titre les femmes victimes de violences et recluses au sein du domicile familial, privées de tout contact avec l’extérieur.

2) Respect de l’ordre juridique

Le critère du respect de l’ordre juridique semble constituer l’un des critères les plus clairs.

Une violation grave ou répétée de prescriptions légales ou de décisions de l'autorité représente une atteinte à l’ordre juridique, tout comme le non-accomplissement volontaire d'obligations de droit public ou privé60, y compris le devoir de s’acquitter des impôts61.

Un casier judiciaire vierge n’est pas requis par le TAF, mais plusieurs cantons retiennent tout de même cette exigence62.

Notons que le TAF considère que le fait d’avoir séjourné illégalement sur le territoire suisse, en violation des prescriptions sur le séjour des étrangers, permet de retenir que le comportement de la personne n’est pas exempt de tout reproche : « bien qu’il ne faille pas exagérer l’importance des infractions aux prescriptions de droit des étrangers inhérentes à la condition de travailleur clandestin, il n’est néanmoins pas contradictoire de tenir compte de l’existence de telles infractions »63. Cette conception nous paraît justement contradictoire avec le but visé par l’art. 30 al. 1 let. b LEtr, à savoir la régularisation – pour divers motifs

« humanitaires » – de personnes se trouvant précisément en situation irrégulière. Tout

59 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN,p. 81.

60 Directives LEtr, ch. 5.6.4.1.3.

61 SPESCHA/KERLAND/BOLZLI, p. 204.

62 WICHMANN/HERMANN/D’AMATO/EFIONAYI-MÄDER/FIBBI/MENET/RUEDIN,p. 81 : Un casier judiciaire vierge est requis dans 15 cantons, et souhaité dans 10 autres.

63 TAF C-516/2013, consid. 6.2.2.

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d’abord, l’atteinte à l’intérêt public résultant du séjour illégal ne peut en aucun cas être comparé, dans son intensité et dans sa nature, avec l’atteinte résultant d’une infraction pénale à proprement parler. De plus, la criminalisation du séjour irrégulier dans le cadre d’une procédure de régularisation revient à poser une règle équivalente à la quadrature du cercle : pas d’infraction en cas de régularisation, et mais pas de régularisation en cas d’infraction.

3) Situation familiale

La présence d’enfants et l’âge de ceux-ci sont souvent des critères déterminants dans l’appréciation d’un cas individuel d’une extrême gravité. PETRY conclut même que les chances de régularisation sont uniquement ouvertes aux familles avec enfants ou adolescents64. Il faut encore que la scolarité ait revêtu une certaine durée, ait atteint un certain niveau, et ait été couronnée de succès65.

En effet, il est admis que la scolarisation accentue l’intégration. Les années d’adolescence sont déterminantes, mais au contraire, un enfant en bas âge qui a passé les premières années de sa vie en Suisse, et y a débuté sa scolarité n’est pas considéré comme intégré en Suisse de manière irréversible, de sorte qu’un retour dans son pays d’origine constituerait un déracinement complet66. Dans le cas d’un enfant de huit ans, le TAF a affirmé qu’« [i]l est en effet communément admis que des enfants de cet âge demeurent entièrement dépendants de leurs parents et imprégnés des us et coutumes propres au milieu dans lequel ils sont élevés, de sorte qu’ils sont généralement en mesure de s’adapter sans difficultés particulières à un nouvel environnement »67.

Soulignons que la présence d’enfants en âge d’être scolarisé depuis plusieurs années en Suisse facilite la régularisation des familles et constitue un critère qui revêt un poids particulier dans la jurisprudence du TAF. Toutefois, l’échec scolaire des enfants n’est jamais retenu comme critère éliminatoire.

4) Situation financière

Sauf circonstances particulières, l’indépendance financière est une condition nécessaire à l’octroi d’une autorisation de séjour. Il n’y a lieu d’y déroger que si la personne, en raison de son âge ou de son état de santé, a été empêchée de travailler68.

64 PETRY, p. 300.

65 ATF 123 II 125, consid. 4b.

66 ATAF 2007/16, consid. 5.3.

67 TAF C-5060/2013, consid. 5.6.

68 Art. 31 al. 5 OASA.

(18)

Ainsi, la condition de l’indépendance financière – en tant qu’elle est remplie – est souvent uniquement mentionnée brièvement par la jurisprudence, dans le cadre de l’analyse de l’intégration professionnelle.

L’on peut toutefois se demander si l’exigence d’indépendance financière implique une autonomie totale de la personne, ou une autonomie uniquement envers l’Etat.

En effet, l’institution d’un garant financier est une pratique qui semble prendre de l’ampleur dans le cadre des procédures de régularisation: les autorités cantonales, afin de s’assurer que la personne n’aura pas recours aux prestations d’aide sociale après l’octroi d’une autorisation de séjour, demandent qu’un proche – lui-même indépendant financièrement, ne faisant pas l’objet de poursuites et titulaire d’un titre de séjour – se porte garant, et assure la prise en charge financière de la personne pour une durée de cinq ans69. De cette manière, le requérant abandonne son droit à l’aide sociale pendant cette période.

Cette pratique est contestée par les associations de défense des droits des migrants, car elle introduit une discrimination envers une catégorie de la population, la privant de tout recours direct à l’aide sociale en cas de besoin, en violation de l’art. 12 Cst70. De plus, elle introduit une confusion entre le droit des étrangers et le droit des assurances sociales : la compétence des autorités de migration semble ainsi contestable pour imposer de telles obligations.

Les jeunes adultes dépendants de leurs parents, ou qui disposent du soutien financier de fondations privées pour terminer leurs études, ne sont pas non plus considérés comme financièrement indépendants, quand bien même ils ne dépendent pas de l’aide étatique71. Si l’intérêt public à limiter le nombre de personnes dépendantes de l’aide financière de l’Etat paraît justifié, l’on voit mal pour quelles raisons l’aide d’un proche ou d’une institution privée ne satisferait pas ces exigences. Il faudrait à notre avis reconnaître l’indépendance financière dès lors qu’aucune prestation étatique n’est versée.

5) Durée de présence

La question de la durée de présence en Suisse est controversée. Elle représente un critère déterminant, mais sa prise en compte et les conditions qui s’y rattachent restent floues.

Le TAF participe à entretenir cette ambigüité, puisqu’il commence toujours par examiner ce critère de manière séparée, comme s’il était à lui seul déterminant, avant de conclure qu’il ne l’est pas et ne justifie pas en lui-même l’octroi d’une autorisation de séjour72.

69 Formulaire O OCPM (cf Annexe III).

70 Il serait intéressant de savoir ce qu’il adviendrait du droit l’aide sociale à titre de personne dépendante, dans l’hypothèse où le garant lui-même aurait recours aux prestations d’aide sociale.

71 TAF C-5065, consid. 8.3.

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Bien que la durée de présence en Suisse soit déterminante, elle n’est pas seule décisive et n’offre pas de garantie73, car la loi et la jurisprudence ne contiennent pas de durée minimale ou maximale : chaque situation doit s’apprécier de manière individuelle, à la lumière de l’ensemble des circonstances et des autres critères établis par l’art. 31 al. 1 OASA74.

Dans un arrêt publié de 1998, le Tribunal fédéral avait tout de même admis qu’un « séjour d’au moins dix ans conduit en principe à l’octroi d’une exception aux mesures de limitation pour autant que l’étranger ait eu un comportement tout à fait correct, soit financièrement autonome et, de manière générale, bien intégré sur le plan social et professionnel »75. En revanche, les exigences semblent s’être durcies depuis lors, puisqu’il ne suffit plus aujourd’hui que les autres conditions soient simplement remplies, il faut qu’elles le soient de manière exceptionnelle.

Les Directives LEtr indiquent qu’une présence en Suisse de cinq ans peut être retenue comme valeur indicative pour les familles76. Dans le même sens, PETRY suggère de s’inspirer des règles relatives à la transformation d’une admission provisoire en autorisation de séjour après cinq ans77, qui pourraient permettre de considérer qu’une telle durée indique une bonne intégration78.

En outre, la prise en compte des années de séjour illégal en Suisse n’est pas non plus uniforme. Alors que le TF a affirmé que « la durée d’un séjour en Suisse n’est pas déterminante dans l’examen d’un cas de rigueur […] lorsque le dit séjour est illégal […], sinon, l’obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte récompensée »79, la réalité n’est pas si tranchée.

En effet, dans le cadre de la régularisation de personnes sans-papiers, qui ont – par définition – vécu de manière illégale en Suisse, la durée de leur séjour représente tout de même un critère déterminant. L’art. 31 al. 1 let. e OASA ne précise d’ailleurs pas que la présence en Suisse doive forcément être légale : ainsi NIDERÖST s’interroge à juste titre sur le caractère défendable de la jurisprudence fédérale accordant si peu d’importance aux années de séjour

72 Notamment TAF C-512/2016, consid. 6.2 ; C-6768/2013, consid. 5.2 ; C-2547/2014, consid. 6.3 ;

C-6709/2013, consid. 5.1 ; C-6726/2013, consid. 6.2 ; C-6255/2013, consid. 5.2 ; C-5414/2013, consid. 5.2.1 ; C-7467/2014, consid. 6.2.

73 PETRY, p. 297.

74 Directives LEtr, ch. 5.6.4.5.

75 ATF 124 II 110, consid. 3.

76Directives LEtr, ch. 5.6.4.5.

77 Art. 84 al. 5 LEtr et 14 al. 2 LAsi.

78 PETRY, p. 294.

79 ATF 130 II 39, consid. 3 et 5.3 ; ATAF 2007/16, consid. 5. 4.

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illégal80. Dans ce sens, notons que les Directives LEtr indiquent que le séjour illégal qui a été implicitement toléré par les autorités doit être favorablement pris en compte81.

De la même manière, dans sa jurisprudence constante, le TAF exclut les années de présence en Suisse au bénéfice d’une carte de légitimation, considérant que les personnes vivant en Suisse sous un tel statut doivent connaitre le caractère temporaire de leur séjour dans ce pays82. Or, l’on observe en pratique que cette règle souffre des exceptions : à titre d’exemple, citons le cas dans lequel le TAF a admis le recours d’une jeune femme, âgée de 26 ans au moment du recours et totalisant sept ans de séjour à Genève sous le régime d’une carte de légitimation83.

6) Etat de santé

L’Etat de santé constitue un critère particulier, en ce sens qu’il justifie de manière presque exclusive l’octroi d’autorisations de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité : si l’état de santé est considéré comme suffisamment grave, il justifie à lui seul l’octroi d’une autorisation. Il fait l’objet d’une vaste jurisprudence, selon le type d’atteinte à la santé envisagée84.

De manière générale, l’on peut affirmer que l’état de santé doit atteindre un certain niveau de gravité et requérir un traitement qui ne soit pas disponible dans le pays d’origine.

Les Directives LEtr mentionnent par exemple les maladies chroniques, le risque de suicide avéré, le traumatisme consécutif à une guerre ou les accidents graves85.

Il ne suffit toutefois pas que des soins aussi bons que ceux disponibles en Suisse ne puissent pas être accessibles dans le pays d’origine: l’impossibilité d’accéder aux traitements doit mettre la vie de la personne en danger de manière concrète86.

Or, dans la pratique, les cas de ce genre sont plutôt examinés sous l’angle de l’admission provisoire87 : en effet, les autorités, considérant que la personne ne remplit pas les conditions de l’art. 30 al. 1 let. b LEtr, prononce le renvoi de Suisse, mais le considère dans un deuxième temps comme non-raisonnablement exigible, en raison des motifs de santé et de l’impossibilité d’un accès effectif aux traitements dans le pays d’origine88.

80 NIDERÖST, p. 382.

81 Directives LEtr, ch. 5.6.4.

82 TAF C-5065/2014, consid. 8.1.

83 TAF C-541/2015.

84 Pour les cas de VIH/Sida, cf MOORE/DUARTE.

85 Directives LEtr, ch. 5.6.4.6.

86 ATF 128 II 200, consid. 5.3

87 Art. 83 ss LEtr.

88 ILLES/SCHREPFER/SCHERTENLEIB, pp. 233 et 249.

(21)

7) Possibilités de réintégration dans l’Etat de provenance

Les exigences relatives aux possibilités de réintégration dans l’Etat d’origine sont moins élevées dans le cadre de l’art. 30 al. 1 let. b LEtr que dans celui de l’admission provisoire, où le retour doit être impossible, illicite, ou ne pas être raisonnablement exigible89.

Il s’agit de comparer l’intégration et les attaches de la personne en Suisse et dans son pays d’origine. A ce titre, l’âge, les attaches familiales, les possibilités de réintégration professionnelle, les conditions de vie, les connaissances des us et coutumes ainsi que la maitrise de la langue locale, les problèmes de santé, les possibilités de formation et de scolarisation, et les conditions d’habitation sont à prendre en considération90.

Comme exposé ci-dessus91, les années d’enfance et d’adolescence, tout comme les premières années de la vie d’adulte, sont considérées comme déterminantes pour la formation de la personnalité, et l’intégration culturelle et sociale92.

Selon la jurisprudence constante, on ne saurait « tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles la personne concernée sera également exposée à son retour, sauf si celle- ci allègue d’importantes difficultés concrètes propres à son cas particulier, telle une maladie grave ne pouvant être soignée qu’en Suisse par exemple »93.

Le critère des possibilités de réintégration dans l’Etat de provenance n’est souvent pas décisif en lui-même, mais doit être compris comme une synthèse et une mise en balance des éléments identifiés dans l’examen des autres critères, dans une perspective globale de comparaison entre l’existence de ces éléments en Suisse et dans le pays d’origine. Dans l’hypothèse où l’impossibilité de réintégration dans le pays d’origine est déterminante, une admission provisoire pour cause d’impossibilité, d’illicéité ou de non-exigibilité du renvoi l’emportera souvent sur l’autorisation de séjour94.

C. Synthèse

L’on observe que certains des critères de l’art. 31 OASA revêtent une importance primordiale, alors que d’autres ne semblent être pris en compte que s’ils font défaut. Ainsi, l’on pourrait se demander l’utilité de ces critères, qui semblent plutôt revêtir le caractère de

89 Art. 83 LEtr.

90 Directives LEtr, ch. 5.6.4.7.

91 Cf supra, 3).

92 TAF C-6768/2013, consid. 5.2.4.

93 TAF C-6768/2013, consid. 5.2.4.

94 Art. 83 LEtr ; Cf par exemple TAF C-188/2014.

(22)

conditions éliminatoires, dont on ne tiendrait compte qu’en cas d’absence, mais qui ne joueraient pas particulièrement en faveur du requérant s’ils sont remplis.

Par exemple, le critère de l’intégration, comme celui de la durée de présence en Suisse, font l’objet de longues analyses dans la jurisprudence du TAF, alors que celle-ci ne s’attarde pas sur le respect de l’ordre juridique suisse ou l’indépendance financière. De plus, la position du TAF est ambiguë. Il souligne que l’apprentissage d’une langue nationale, tout comme l’indépendance financière et le fait d’avoir un bon comportement, est un comportement ordinaire, qui peut être attendu de tous95.

L’analyse de la jurisprudence du TAF permet de conclure que ce dernier considère que la régularisation de personnes séjournant en Suisse sans statut légal n’est à priori pas admissible à la lumière de l’art. 31 OASA, sauf circonstances absolument exceptionnelles. Or il apparaît dans la pratique que nombre de sans-papiers – dans certains cantons – voient leur situation régularisée après plusieurs années de présence en Suisse, s’ils ne font pas l’objet de poursuites pénales, qu’ils sont indépendants financièrement et qu’ils maitrisent la langue locale. Ces cas ne sont toutefois pas rendus publics, car ils ne font pas l’objet de jurisprudence, et ont tendance à être admis de manière relativement discrète par les autorités, qui ne semblent pas souhaiter qu’une quelconque « pratique » puisse se dégager de décisions individuelles.

Il s’agit ainsi d’examiner les mécanismes légaux permettant à de telles divergences de pratique de voir le jour.

IV. VOIE LIBRE AUX DIVERGENCES CANTONALES

Le présent chapitre examine, dans l’ordre chronologique des autorités appelées à se prononcer sur une requête d’autorisation, les cas dans lesquels la Confédération dispose d’un droit à revoir la décision concernée.

A. Le contrôle judiciaire des décisions cantonales

L’organisation judiciaire cantonale introduit des différences importantes dans le traitement des demandes d’autorisation de séjour. En effet, si la LEtr impose aux cantons de désigner les autorités administratives compétentes en matière de migration, la législation fédérale ne contient aucune exigence particulière quant aux voies de recours cantonales.

95 TAF C-516/2013, consid. 6.2.4.

(23)

Il en résulte que certains cantons prévoient qu’une décision des autorités cantonales de migrations peut être portée devant deux instances cantonales de recours, alors que d’autres prévoient un recours à une instance unique96.

De plus, la loi sur le Tribunal fédéral prévoit que les décisions cantonales de dernière instance concernant l’octroi d’autorisations de séjour en dérogation aux conditions d’admission ne peuvent pas être portées devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public97.

Dans ce contexte, la question se pose de l’admissibilité de l’exception introduite par l’art. 83 let. d ch. 5 LTF98. Dans son message concernant la révision de l’organisation judiciaire, le Conseil fédéral indiquait que cette disposition excluait pour la première fois des décisions cantonales du recours au Tribunal fédéral : « On peut faire confiance aux tribunaux cantonaux qu’ils seront conscients de leur responsabilité accrue dans ces domaines et qu’ils veilleront soigneusement au respect du droit fédéral »99. Or il n’est pas certain que les cantons fassent preuve de tant de retenue dans un sujet si sensible et politisé que celui des migrations.

Ainsi, dès lors qu’un tribunal cantonal est saisi, les autorités fédérales sont privées de la faculté de se prononcer sur un cas particulier. Les conséquences sont les mêmes, que l’instance cantonale de recours rejette ou admette l’existence d’un cas individuel d’une extrême gravité.

Tout d’abord, en cas de préavis négatif des autorités cantonales de migration, confirmé par les instances cantonales de recours, le cas ne passe jamais la barrière cantonale : dans cette hypothèse, le canton dispose d’un pouvoir décisionnel complet100. Ainsi, les cantons plus restrictifs en matière de politique migratoire ne sont jamais inquiétés par les autorités fédérales, qui ne disposent d’aucun droit de regard sur les décisions cantonales négatives.

La question de la compétence d’approbation du SEM suite à une décision positive rendue par une juridiction cantonale a occupé la jurisprudence ces dernières années. Selon l’ancienne pratique, lorsque le préavis cantonal favorable émanait d’un tribunal cantonal – et non de

96 A noter que depuis la révision du droit sur l’organisation judiciaire, les cantons ont désormais l’obligation de prévoir au moins une instance de recours cantonale (art. 130 al. 3 cum 86 al. 2 LTF).

97 Art. 83 let. c ch. 5 LTF ; AUBRY GIRARDIN, p. 907 : le recours en matière de droit public est tout de même recevable si le recourant invoque une violation de l’art. 8 CEDH.

98 Si l’art 191 al. 1 Cst. garantit en principe l’accès au Tribunal fédéral, l’alinéa 3 de cette disposition permet d’en exclure l’accès pour certains domaines déterminés.

99 FF 2001 4030.

100 NGUYEN, p. 308.

(24)

l’autorité cantonale de migration – le dossier était transmis au SEM pour approbation, selon la procédure d’approbation décrite précédemment101.

Or, dans un arrêt de principe de 2015, le Tribunal fédéral est revenu sur cette pratique, en privant le SEM de sa compétence d’approbation suite à une décision judiciaire cantonale.

Ainsi, le SEM, s’il entend s’opposer à la délivrance de l’autorisation de séjour, doit désormais recourir, soit en deuxième instance cantonale si une telle voie de droit est prévue102, soit au Tribunal fédéral par le biais d’un recours en matière de droit public103.

Toutefois, comme mentionné ci-dessus, les procédures visant l’octroi d’une autorisation de séjour pour situation personnelle d’une extrême gravité ne peuvent pas faire l’objet d’un tel recours au Tribunal fédéral104. Dans cette configuration, les cantons disposent d’une réelle compétence décisionnelle autonome, puisque l’autorisation de séjour doit être délivrée suite à la décision sur recours, sans que le SEM n’ait eu son mot à dire. En effet, même dans l’hypothèse où le SEM exerçait son droit de recours en deuxième instance cantonale, il n’aurait pas de pouvoir décisionnel, mais uniquement la qualité de partie à la procédure.

Le tribunal cantonal de dernière instance serait donc – dans ces deux hypothèses – la dernière instance de recours.

Dans les cantons plus permissifs, à l’instar de Genève, certaines voix du milieu associatif suggèrent que la stratégie offrant les meilleures chances de succès serait de présenter des dossiers incomplets aux autorités cantonales de migration afin de provoquer des préavis négatifs, pour ensuite faire valoir les arguments les plus convaincants dans le cadre d’un recours devant un tribunal cantonal. Cette manière de procéder permettrait d’obtenir une décision sur recours favorable et d’échapper ainsi à la « censure de Berne ».

En conclusion, les tribunaux cantonaux, qu’ils admettent ou rejettent le recours sur lequel ils sont appelés à se prononcer, disposent d’une autonomie totale et ont ainsi le pouvoir d’exercer pleinement la marge d’appréciation cantonale, sans que celle-ci ne soit limitée par un quelconque contrôle fédéral.

101 Cf supra II ; ATF 141 II 169, consid. 4.4.3 ; ATAF 2010/55.

102 Art. 111 LTF.

103 ATF 141 II 169, consid. 4.4.

104 Art. 83 let. c ch. 5 LTF.

(25)

B. Le refus d’approbation du SEM

En cas de préavis cantonal favorable délivré par les autorités cantonales de migration, le pouvoir d’approbation conféré au Secrétariat d’Etat aux migrations paraît à premier abord comme une prérogative incisive, qui attire les critiques de la doctrine105.

L’analyse des statistiques du SEM permet toutefois d’observer que ce dernier a tendance à suivre, dans une large mesure, les préavis cantonaux, qu’il ne refuse d’avaliser que dans 11%

des cas en moyenne106.

L’on s’attendrait à observer une corrélation entre le niveau d’exigences posé par les cantons et le taux d’approbation fédéral : des exigences cantonales strictes pour la reconnaissance d’un cas individuel d’une extrême gravité entraineraient de meilleures chances de voir les préavis positifs de ces cantons confirmés par le SEM. A l’inverse les préavis des cantons permissifs devraient être plus susceptibles d’être renversés par l’autorité fédérale.

Or, il apparaît que proportionnellement au nombre de demandes, les cantons de Genève et de Vaud n’ont pas essuyé plus de refus d’approbation que les autres cantons : en moyenne entre 2010 et 2014, ils se sont en effet vus contredire respectivement dans 11% et 8% des dossiers transmis pour approbation, ce qui correspond à la moyenne nationale.

Il est ainsi possible de conclure que le SEM tend à préserver la marge d’appréciation des cantons, en confirmant dans 90% des cas l’appréciation des autorités cantonales : le SEM n’oppose son refus que dans les cas qu’il estime dépasser les conditions légales de manière abusive. On peut supposer que l’organisation du Secrétariat d’Etat aux migrations par sections géographiques permet aux sections de s’adapter aux sensibilités régionales concernées107.

C. Le contrôle judiciaire des décisions fédérales

Seuls les cas ayant reçu un préavis cantonal positif en première instance, mais non l’approbation subséquente du SEM, peuvent être portés devant le Tribunal administratif fédéral108.

Le TAF peut revoir l’opportunité des décisions du SEM, et dispose ainsi d’un large pouvoir de cognition109. L’on observe toutefois qu’il n’exerce ce pouvoir qu’avec retenue : en effet,

105 Cf supra II.

106 Entre les années 2010 et 2014 (Statistiques SEM ; cf Annexe I).

107 Suisse romande I et Tessin, Suisse romande II, Suisse alémanique I et Liechtenstein, et Suisse alémanique II (Organigramme du SEM, disponible à l’adresse :

https://www.sem.admin.ch/dam/data/sem/ueberuns/organisation/organigramm-sem-f.pdf; consulté pour la dernière fois le 25 mai 2016).

108 Car ce dernier ne revoit que les décisions d’autorités administratives fédérales (art. 31 et 33 let. d LTAF).

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