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LE TRAITEMENT JURIDIQUE D'UNE SINGULARITÉ TERRITORIALE : LA ZONE CÔTIÈRE. ÉTUDE EN DROIT INTERNATIONAL ET DROIT COMPARÉ FRANCO ITALIEN.

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LE TRAITEMENT JURIDIQUE D’UNE

SINGULARITÉ TERRITORIALE : LA ZONE

CÔTIÈRE. ÉTUDE EN DROIT INTERNATIONAL ET

DROIT COMPARÉ FRANCO ITALIEN.

Julien Rochette

To cite this version:

Julien Rochette. LE TRAITEMENT JURIDIQUE D’UNE SINGULARITÉ TERRITORIALE : LA ZONE CÔTIÈRE. ÉTUDE EN DROIT INTERNATIONAL ET DROIT COMPARÉ FRANCO ITAL-IEN.. Droit. Université de Nantes, 2007. Français. �tel-00172410�

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UNIVERSITÉ DE NANTES - FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES POLITIQUES - CENTRE DE DROIT MARITIME ET OCÉANIQUE - ÉCOLE DOCTORALE DROIT ET

SCIENCES SOCIALES

UNIVERSITÀ DEGLI STUDI DI MILANO

2007 No attribué par la bibliothèque !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !

THÈSE

Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE NANTES

Discipline : Droit public

Et

DOCTEUR DE RECHERCHE DE L’UNIVERSITÉ DE MILAN

Discipline : Droit international

Présentée et soutenue publiquement par

Julien ROCHETTE

Le 10 juillet 2007

Le traitement juridique d’une singularité territoriale : la zone

côtière. Étude en droit international et droit comparé

franco-italien.

Directeurs de thèse :

M. André-Hubert MESNARD, Professeur émérite, Université de Nantes.

M. Tullio TREVES, Professeur, Université de Milan.

Jury.

M. Maurizio ARCARI, Professeur, Université de Milan Bicocca.

M. Jean-Pierre BEURIER, Professeur, Université de Nantes.

M. Jean-Marie PONTIER, Professeur, Université Paul Cézanne Aix-Marseille III,

Rapporteur.

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UNIVERSITÉ DE NANTES - FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES POLITIQUES - CENTRE DE DROIT MARITIME ET OCÉANIQUE - ÉCOLE DOCTORALE DROIT ET

SCIENCES SOCIALES

UNIVERSITÀ DEGLI STUDI DI MILANO

2007 No attribué par la bibliothèque !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !_ !

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DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE NANTES

Discipline : Droit public

Et

DOCTEUR DE RECHERCHE DE L’UNIVERSITÉ DE MILAN

Discipline : Droit international

Présentée et soutenue publiquement par

Julien ROCHETTE

Le 10 juillet 2007

Le traitement juridique d’une singularité territoriale : la zone

côtière. Étude en droit international et droit comparé

franco-italien.

Directeurs de thèse :

M. André-Hubert MESNARD, Professeur émérite, Université de Nantes.

M. Tullio TREVES, Professeur, Université de Milan.

Jury.

M. Maurizio ARCARI, Professeur, Université de Milan Bicocca.

M. Jean-Pierre BEURIER, Professeur, Université de Nantes.

M. Jean-Marie PONTIER, Professeur, Université Paul Cézanne Aix-Marseille III,

Rapporteur.

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Remerciements.

Une thèse est une aventure personnelle qui ne peut se vivre sereinement qu’avec le soutien des autres. Aussi, je tiens à remercier l’ensemble des personnes qui, de près ou de loin, m’ont permis de mener ces recherches dans des conditions satisfaisantes.

Mes remerciements les plus sincères vont d’abord au professeur Mesnard, directeur de thèse qui, au-delà de ses conseils avisés, a toujours fait preuve d’un soutien constant et d’une gentillesse rare.

Je remercie également le professeur Treves pour m’avoir fait l’honneur de co-diriger ces recherches, ainsi que le professeur Scovazzi pour sa disponibilité et ses conseils éclairés.

Que soit ici remercié le Centre de droit maritime et océanique de la Faculté de droit de Nantes, lieu de travail et de rencontre. J’adresse mes remerciements particuliers à Madame Proutière-Maulion, sa directrice, et mes pensées amicales aux camarades doctorants avec lesquels j’ai partagé ces années.

Je remercie également l’Institut de droit international de l’Université de Milan, particulièrement le professeur Pedrazzi, pour la confiance accordée lors de ces recherches.

Mes remerciements vont également à Emmanuel Cadeau, Maître de conférences à la Faculté de droit de Nantes, Caroline Demartini, shadow advisor, et Christophe Levisage, délégué adjoint pour la façade maritime (DIREN Bretagne), pour l’intérêt qu’ils ont bien voulu accorder à mon travail.

Mes remerciements amicaux vont à Alain Rausch pour sa relecture attentive et Henri Helmot pour m’avoir fait découvrir l’intérêt des sciences humaines.

Merci également à tous ceux que j’ai pu rencontrer durant ces années - juristes, scientifiques, géographes, économistes, citoyens... - qui, me faisant partager leur passion pour la mer et ses rivages, ont contribué à alimenter ma réflexion.

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SOMMAIRE.

INTRODUCTION 1

PARTIE I : VERS UNE RECONNAISSANCE JURIDIQUE DE LA ZONE

CÔTIÈRE EN DROIT RÉGIONAL MÉDITERRANÉEN 25

- TITRE I - LE RECOURS NÉCESSAIRE À UNE RÉGIONALISATION NORMATIVE POUR LE TRAITEMENT JURIDIQUE DE LA ZONE CÔTIÈRE 31

Chapitre I. Zones côtières et droit international : une association inopérante 33 Chapitre II. Le système régional méditerranéen, cadre propice à l’adoption d’un instrument juridique propre à l’espace littoral 87 - TITRE II - VERS L’ADOPTION D’UN PROTOCOLE MÉDITERRANÉEN RELATIF

À LA GESTION INTÉGRÉE DES ZONES CÔTIÈRES 147

Chapitre I. Une initiative ambitieuse 149

Chapitre II. Une mise en œuvre incertaine 191

Conclusion Partie I 243

PARTIE II : UNE APPROCHE DISTINCTE DE LA SPÉCIFICITÉ DU

TERRITOIRE LITTORAL : LES EXEMPLES FRANÇAIS ET ITALIEN 247 TITRE I : UNE EMPRISE DIFFÉRENTE DE L’ÉTAT SUR LE TERRITOIRE

CÔTIER 251

Chapitre I. Une différence originelle de traitement juridique 253 Chapitre II. Une différence consécutive de stratégie nationale 313 TITRE II : UNE STRUCTURATION DISTINCTE DES ACTEURS DE LA POLITIQUE

LITTORALE 397

Chapitre I. Des appproches différentes dans la gestion décentralisée du territoire

côtier 399

Chapitre II. Une même exigence de remodelage des architectures juridiques et

institutionnelles consacrées à l’espace littoral 463

Conclusion Partie II 541

CONCLUSION GÉNÉRALE 547

BIBLIOGRAPHIE 553

ANNEXES 623

INDEX 765

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SIGLES, ACRONYMES ET ABRÉVIATIONS

ACCOBAMS Accord sur la conservation des cétacés de la mer Noire, de la Méditerranée et de la zone atlantique adjacente

ADMA Annuaire de droit maritime et aérien ADMO Annuaire de droit maritime et océanique AEE Agence européenne pour l’environnement AFDI Annuaire français de droit international Aff. Affaire

AIZC Aménagement intégré des zones côtières AJDA Annuaire juridique de droit administratif AMP Aire marine protégée

ANEL Association nationale des élus du littoral

APAL Agence tunisienne de protection et de l’aménagement du littoral APAT Agenzia per la protezione dell’ambiente e per i servici tecnici ARPA Agenzia regionale per la protezione dell’ambiente

ASCOBANS Accord sur la conservation des petits cétacés de la mer Baltique et de la mer du Nord

ASPIM Aire spécialement protégée d’importance méditerranéenne

Ass. Assemblée

BEI Banque européenne d'investissement

BJDU Bulletin de jurisprudence de droit de l’urbanisme BM Banque mondiale

BOME Bulletin officiel du Ministère de l’équipement BOMT Bulletin officiel du Ministère du travail Bull. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation CA Cour d’appel

CAA Cour administrative d’appel CAR Centre d’activités régionales

CAR/ASP Centre d'activités régionales pour les aires spécialement protégées CAR/INFO Centre d'activités régionales spécialisé dans l’information et la

communication

CAR/PAP Centre d'activités régionales du programme d'actions prioritaires CAR/PB Centre d'activités régionales du Plan Bleu

CAR/PP Centre d'activités régionales pour une production propre CAR/TDE Centre d'activités régionales pour la télédétection en matière

d’environnement

CBN Conservatoire botanique national CDB Convention sur la diversité biologique CE Conseil d’État

CEDAM Casa editrice Dottore Antonio Milani

CELRL Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres CGCT Code général des collectivités territoriales

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CIACT Comité interministériel d’aménagement et de compétitivité des territoires

CIADT Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire

CIAT Comité interministériel d’aménagement du territoire CIDD Comité interministériel pour le développement durable CIJ Cour internationale de justice

CIMER Comité interministériel de la mer

CIPE Comitato interministeriale per la programmmazione economica CJCE Cour de justice des Communautés européennes

CLE Commission locale de l’eau

CMDD Commission méditerranéenne du développement durable

CNADT Conseil national d’aménagement et de développement du territoire CNFPT Centre national de la fonction publique territoriale

CNL Conseil national du littoral CNM Conseil national de la montagne

CNPN Conseil national de protection de la nature

CNUDM Convention des Nations Unies sur le droit de la mer COP Conférence des parties

CPER Contrat de plan/projets État-Région CPJI Cour permanente de justice internationale

CRADT Conférence régionale de l’aménagement et du développement du territoire

CREN Conservatoire régional des espaces naturels

CROSS Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage CTC Collectivité territoriale de Corse

DA Droit administratif

DAMGEM Direction des affaires maritimes et des gens de mer

DATAR Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale DDAF Direction départementale de l'agriculture et de la forêt

DDASS Direction départementale des affaires sanitaires et sociales DDE Direction départementale de l’équipement

DGA Diritto e gestione dell’ambiente DGIL Dotation de gestion intégrée du littoral

DIACT Délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires

DIREN Direction régionale de l’environnement DMF Droit maritime français

DPCM Decreto del Presidente del consiglio dei ministri DPM Domaine public maritime

DPMA Direction des pêches maritimes et de l’aquaculture DPR Decreto del Presidento della Republica

DRIRE Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement

DTA Directive territoriale d’aménagement

DTMPL Direction du transport maritime, des ports et du littoral ED Enciclopedia del diritto

EIE Étude d’impact sur l’environnement

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ENEA Ente per le nuove tecnologie, l’energia e l’ambiente ENS Espace naturel sensible des départements

EPA Établissement public à caractère administratif

EPCI Établissement public de coopération intercommunale EPIC Établissement public à caractère industriel et commercial EPFR Établissement public foncier régional

ESN Enjeu stratégique national

FAO Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation FEM Fonds pour l’environnement mondial

Gaz. Pal. Gazette du palais

GIL Gestion intégrée du littoral GIP Groupement d’intérêt public GIZC Gestion intégrée des zones côtières

GRIDAUH Groupement de recherche sur les institutions et le droit de l'aménagement, de l'urbanisme et de l'habitat

GU Gazzetta ufficiale della Republica italiana

Ha Hectare

ICAM Integrated coastal area management

ICRAM Istituto centrale per la ricerca scientifica e tecnologica applicata al mare

ICZM Integrated coastal zone management IFEN Institut français de l’environnement

IFREMER Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer IJMCL International journal of marine and coastal law

INDEMER Institut du droit économique de la mer JO Journal officiel de la République française JOCE Journal officiel des Communautés européennes LAU Loi d’aménagement et d’urbanisme

LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence LPA Les petites affiches

LR Legge regionale

MAB Programme de l’UNESCO pour l’homme et la biosphère MAP Mediterranean action Plan

MEDD Ministère de l’écologie et du développement durable

MEDPOL Programme de surveillance continue de la pollution en Méditerranée METAP Programme environnemental d'assistance technique pour la

Méditerranée

MNHN Muséum national d’histoire naturelle

OCDE Organisation de coopération et de développement économique ODIL Ocean development and international law

OEC Office de l’environnement de Corse

OME Organisation mondiale pour l’environnement OMI Organisation maritime internationale

ONF Office national de la forêt

ONG Organisation non gouvernementale ORP Organisation régionale de pêche PAC Programme d’aménagement côtier

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PAM Plan d’action pour la Méditerranée PAP Programme d’actions prioritaires

PASER Projet d’action stratégique de l’État en région PDDL Plan de développement durable du littoral PEID Petit État insulaire en développement PFN Points focaux nationaux

PLU Plan local d’urbanisme PNB Produit national brut PNR Parc naturel régional

PNUD Programme des Nations Unies pour le développement PNUE Programme des Nations Unies pour l’environnement POS Plan d’occupation des sols

PRG Piano regulatore generale PSSA Particulary sea sensitive area

PTCC Piano territoriale di coordinamento della costa PTCP Piano territoriale di coordinamento paesistico PTR Piano paesaggistico regionale

PUF Presses universitaires de France PUR Presses universitaires de Rennes

RCADI Recueil des cours de l’académie de droit international RDI Revue de droit immobilier

RDP Revue de droit public

Rec. Recueil Lebon des arrêts du Conseil d’État REDE Revue européenne de droit de l’environnement

REMPEC Centre régional méditerranéen pour l'intervention d'urgence contre la pollution marine accidentelle

REP Réseau écologique paneuropéen Req. Requête

RFDA Revue française de droit administratif RFRC Réseau français de recherche côtière RGA Rivista giuridica dell’ambiente

RGDIP Revue générale de droit international public RGE Rivista giuridica dell’edilizia

RGU Rivista giuridica di urbanistica

RITD Revue internationale de la théorie du droit RJE Revue juridique de l’environnement RMC Rhône Méditerranée Corse

RNR Réserve naturelle régionale

ROCC Centre régional méditerranéen de lutte contre la pollution par les hydrocarbures

RSA Recueil des sentences arbitrales RTDP Rivista trimestriale di diritto pubblico

SAGE Schéma d’aménagement et de gestion des eaux SAUM Schéma d’aptitude et d’utilisation de la mer SCOT Schéma de cohérence territoriale

SD Schéma directeur

SDAGE Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux SDAU Schéma directeur d’aménagement urbain

SGAR Secrétariat général aux affaires régionales SGMer Secrétariat général de la mer

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SHOB Surface hors œuvre brute SHON Surface hors œuvre nette SIC Site d’intérêt communautaire

SIG Système d’information géographique SIL Schéma interrégional du littoral

SMACOPI Syndicat mixte d’aménagement de la côte picarde

SMAP Programme d'actions prioritaires à court et moyen termes pour l’environnement

SMCO Syndicat mixte de la Côte d’Opale

SMDD Stratégie méditerranéenne pour le développement durable SNDD Stratégie nationale de développement durable

SMVL Schéma de mise en valeur du littoral SMVM Schéma de mise en valeur de la mer SO Supplemento ordinario

SRADT Schéma régional d’aménagement et de développement du territoire SRIT Schéma régional des infrastructures et de transport

SRL Schéma régional du littoral

SRU Solidarité et renouvellement urbains SSC Schéma de service collectif

TA Tribunal administratif

TAR Tribunale amministrativo regionale

TDENS Taxe départementale des espaces naturels sensibles TU Testo unico

UE Union européenne

UICN Union internationale pour la conservation de la nature

UNESCO Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture

UT Urbanistica e territorio ZEE Zone économique exclusive

ZICO Zone importante pour la conservation des oiseaux ZMPS Zone maritime particulièrement sensible

ZNIEFF Zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique ZPE Zone de protection écologique

ZPS Zone de protection spéciale ZSC Zone spéciale de conservation

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(22)

Dans ce bassin où jouent Des enfants aux yeux noirs Il y a trois continents Et des siècles d'histoire Des prophètes des dieux Le Messie en personne Il y a un bel été

Qui ne craint pas l'automne En Méditerranée

Il y a l'odeur du sang Qui flotte sur ses rives Et des pays meurtris

Comme autant de plaies vives Des îles barbelées

Des murs qui emprisonnent Il y a un bel été

Qui ne craint pas l'automne En Méditerranée

Il y a des oliviers

Qui meurent sous les bombes Là où est apparue

La première colombe Des peuples oubliés Que la guerre moissonne Il y a un bel été

Qui ne craint pas l'automne En Méditerranée

Dans ce bassin je jouais Lorsque j'étais enfant J'avais les pieds dans l'eau Je respirais le vent

Mes compagnons de jeux Sont devenus des hommes Les frères de ceux-là Que le monde abandonne En Méditerranée

Le ciel est endeuillé Par-dessus l'Acropole Et liberté ne se dit plus En espagnol

On peut toujours rêver D'Athènes et Barcelone Il reste un bel été

Qui ne craint pas l'automne En Méditerranée

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INTRODUCTION

-1- Au début du XVIIIe siècle, l’ingénieur du roi Claude Masse (1652-1737), établissant une « Carte générale des côtes du païs d’Aunis et du Médoc », représente le littoral en relevant uniquement des informations topographiques. « La mer, toujours verte et vide, est séparée de la terre, masse blanche et vide, par la bordure du rivage. Aucun réseau de communication, aucune trace de vie n’y figure1 ». Si la singularité du territoire littoral est ainsi révélée, son appréhension géographique et sociale n’est pas celle qu’on lui connaît actuellement. Le trait de côte représente alors la frontière entre une terre encore sauvage et un espace marin, symbole du lointain, tout juste évoqué par le cartographe.

-2- Aujourd’hui, le littoral n’est plus le « territoire du vide2 » que l’on décrivait jadis. Le linéaire côtier ne sépare plus deux milieux distincts et indépendants mais unit un même espace sur lequel l’homme intervient de manière décisive. Le littoral ainsi conquis, ses contours sont redessinés par les activités humaines qui s’y exercent : il devient le produit de facteurs naturels et de pressions anthropiques3. Dès lors, le géographe ne peut occulter la dimension identitaire de l’espace qu’il représente : le territoire est en effet une « appropriation (...) économique, idéologique et politique (sociale, donc) de l'espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d'eux-mêmes, de leur histoire, de leur singularité4 ». Une telle conception implique qu’au sein même d’un État coexistent plusieurs « territoires » qui, au-delà de leurs différences physiques, sont porteurs d’enjeux particuliers et d’identités propres. Or, l’organisation politique et sociale autour d’un pouvoir étatique empêche longtemps la reconnaissance juridique de la diversité des territoires. En droit international comme en droit interne, la notion de territoire renvoie en

1

LIEPPE (D), « La représentation cartographique du rivage occidental de la France aux XVIIe et XVIIIe siècles », Comité de documentation historique de la Marine, Communications 1993-1994, Service historique de la Marine, Vincennes, 1995, p.335.

2

CORBIN (A), Le territoire du vide, l’Occident et le désir de rivage, 1750-1840, Flammarion, 1998, 407p.

3 MESNARD (A-H) « Le droit du littoral » in BEURIER (J-P) (Sous la direction de), Droits maritimes,

Dalloz, 2006, pp.523-524.

4 DI MEO (G), « Que voulons-nous dire quand nous parlons d’espace ? » in LEVY (J), LUSSAULT (J)

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effet à un espace monolithique, caractérisé par une exclusivité étatique : toute reconnaissance juridique d’une singularité géographique est donc exclue dès lors que la diversité du territoire national n’est pas elle-même appréhendée par le droit. La représentation et l’appréhension juridique d’un espace original tel que le littoral évoluent donc concomitamment à la notion même de territoire. Ainsi, depuis peu, l’exclusivité des rapports entre l’État et le territoire est contestée à double échelle, internationale et nationale, s’opposant par là même à sa perception unitaire (Section I). Seul ce double mouvement, conduisant à une reconnaissance de la diversité territoriale, peut permettre une prise en compte de spécificités géographiques telles que le littoral (Section II).

- Section I - De la diversité des territoires.

-3- Le lien puissant établi entre l’État et son territoire (§1) a longtemps freiné la reconnaissance de la diversité territoriale (§2), empêchant par là même le traitement juridique de singularités géographiques comme la zone côtière.

-§1- Le territoire et le droit.

-4- « Condition même de toute puissance étatique5 », le territoire est considéré comme l’un des éléments constitutifs de l’État6, par les théoriciens du droit du début du XXe siècle7 comme par la doctrine internationaliste contemporaine8. Si le vocable trouve ses racines étymologiques dans le latin terra (terre), le territoire étatique s’étend, quant à lui, au-delà de la seule surface terrestre et comprend des éléments aquatiques, aériens et souterrains.

5 CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l’État, Tome I, Recueil Sirey, 1920, p.2. 6 Notons que le « territoire » désigne également l’espace sur lequel « les populations ne s’administrent pas

encore complètement elles-mêmes » et qui demeure donc dépourvu de la qualité d’État : Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, Chapitre XI.

7 CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l’État, Tome I, Recueil Sirey, 1920, p.2 ;

KELSEN (H), Théorie générale du droit et de l’État suivi de La doctrine du droit naturel et le positivisme juridique, traduit par Béatrice Laroche et Valérie Faure, introduction de Stanley L. Paulson, LGDJ, 1997, pp.260-270 ; SANTI ROMANO, L’ordre juridique, Réédition présentée par P. Mayer, Dalloz, 2002, p.64. L’opinion contraire reste très isolée : SCELLE (G), Précis de droit des gens. Principes et systématiques, Sirey, Paris, 1932, Vol. I, p.76.

8

ALLAN (D), Droit international public, PUF, 2000, p.102 ; CARREAU (D), Droit international, Pedone, 8e Édition, 2004, p.21 ; COMBACAU (J), SUR (S), Droit international public, Montchrestien, 7e Édition, 2006, pp.275-276 ; DAILLIER (P), PELLET (A), Droit international public, LGDJ, 7e Édition, 2002, pp.412-415 ; DUPUY (P-M), Droit international public, Précis Dalloz, 8e Édition, 2006, p.34 ; SHAW (MN), International law, Fourh Edition, Cambridge University Press, 1997, pp.331-368.

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-5- Les modes d’occupation du territoire ont profondément évolué au fil des siècles. Contrairement aux pratiques anciennes - d’ailleurs antérieures à la création de l’État moderne9 - la guerre ou l’annexion ne constituent plus aujourd’hui un mode d’acquisition du territoire juridiquement efficace10. Le droit au respect de l’intégrité territoriale11 est à ce point protégé qu’il semble même pouvoir justifier, lorsque la survie de l’État est en cause, la menace ou l’emploi d’armes nucléaires12. La course à l’extension territoriale a en outre conduit à la création de concepts juridiques nouveaux destinés à étendre, sur terre comme sur mer, sinon la souveraineté13 du moins l’emprise territoriale étatique14. La délimitation des territoires constitue donc une problématique fondamentale des relations internationales contemporaines15. En témoigne l’attention avec laquelle les États s’attachent à établir leurs frontières respectives et les nombreux conflits qui en résultent16. Car s’il représente à la fois un élément constitutif et un attribut de l’État, le territoire s’impose également comme l’assise géographique couvrant le champ de ses compétences17. La délimitation du

9 RIGAUDIERE (A), Introduction à l’étude du droit et des institutions, Économica, 2001, p.269.

10 Article 2§4 de la Charte des Nations Unies. Au regard du droit international, l’annexion d’un État est donc

dépourvue de tout fondement juridique et, par conséquent, « nulle et non avenue » : Résolution 662 (1990) du Conseil de sécurité du 9 août 1990 relative à l’annexion du Koweït par l’Irak.

11 Sentence arbitrale du 4 avril 1928, Affaire de l’île de Palmas, Pays-Bas / États-Unis, RSA, Vol. II, p.829. 12 CIJ, Avis consultatif du 8 juillet 1994, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, Rec. CIJ,

p.268.

13

Ainsi sur terre, le concept de territoire sans maître - terra nullius - forgé à partir du XVIIe siècle, demeurera longtemps un fondement juridique à la colonisation de terres occupées par des peuples mais dotées d’une organisation sociale ne relevant pas de la forme étatique. La CIJ, dans un avis consultatif rendu en 1975 dans l’Affaire du Sahara occidental, proposera une définition restrictive du concept : CIJ, Avis consultatif du 16 octobre 1975, Sahara occidental, Rec. CIJ, p.6. En mer, les eaux archipélagiques représentent un nouvel espace de souveraineté étatique reconnu par l’article 49 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) de 1982.

14 La création, lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, d’une Zone

économique exclusive (ZEE) sur laquelle l’État riverain dispose de droits exclusifs en est une illustration majeure.

15 KOHEN (MG), Possession contestée et souveraineté territoriale, PUF, 1997, 579p ; LAFOURCADE (M)

(Textes réunis par), La frontière des origines à nos jours, Actes des journées de la société internationale d’histoire du droit, tenue à Bayonne les 15, 16, 17 mai 1997, Presses universitaires de Bordeaux, 1998, 519p ; Société française pour le droit international, La frontière, Actes du XIIIe colloque de la société française pour le droit international, Poitiers, 17-19 mai 1979, Pedone, 1980, 304p ; WECKEL (P) (Sous la direction de), Le juge international et l’aménagement de l’espace : la spécificité du contentieux territorial, Actes de la première journée méditerranéenne sur le contentieux international réalisée à l’Université de Montpellier I, le 7 mai 1997, Pedone, 1998, 229p.

16 C’est particulièrement le cas en matière maritime et la raison pour laquelle le Tribunal international du

droit de la mer, lors de sa vingt-troisième session de mars 2007, a adopté une résolution instituant une chambre spéciale permanente chargée de connaître des différends relatifs aux délimitations maritimes. Cette chambre sera ainsi « chargée de connaître des différends relatifs à la délimitation maritime que les parties conviendront de lui soumettre concernant l’interprétation ou l’application de toute disposition de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et de tout autre accord conférant compétence au Tribunal » : Tribunal international du droit de la mer, Communiqué de Presse, ITLOS/Press 108, 16 mars 2007. Pour un aperçu des délimitations maritimes en mer Méditerranée, voir Annexe II, Section IV.

17 KELSEN (H), Théorie générale du droit et de l’État suivi de La doctrine du droit naturel et le positivisme

juridique, traduit par Béatrice Laroche et Valérie Faure, introduction de Stanley L. Paulson, LGDJ, 1997, p.261.

(27)

territoire répond donc à un enjeu majeur d’attribution des souverainetés territoriales18 : au-delà de ses aspects matériels, une frontière internationale constitue ainsi la « ligne de contact des domaines spatiaux de validité de deux ordres juridiques étatiques19». Jadis associée à la notion de dominium20, droit de propriété, la relation juridique liant l’État à son territoire est désormais rattachée à l’imperium, puissance de commandement : « l’État n’a pas sur son sol une propriété, mais seulement une puissance de domination, à laquelle on donne habituellement (...) le nom de souveraineté territoriale21 ». Le territoire correspond donc à l’espace sur lequel se déploie la puissance étatique et ainsi, une limite spatiale de validité des normes.

-6- Fondement même de l’organisation de la communauté internationale22, le principe de souveraineté territoriale connaît néanmoins certaines limites. Ainsi l’État n’est-il libre sur son territoire que dans la limite des exigences imposées par le droit international. La souveraineté territoriale doit donc « fléchir devant toutes les obligations internationales, qu’elle qu’en soit la source23 ». Le respect de l’intégrité territoriale implique ainsi, par exemple, « l’obligation pour tout État de ne pas laisser utiliser son territoire aux fins d’actes contraires aux droits d’autres États24 ». Plus largement, observons que le territoire,

18

ALLAN (D), RIALS (S) (Sous la direction de), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p.1475.

19 Sentence arbitrale, 13 octobre 1995, Affaire de la laguna del Desierto, Chili / Argentine, RGDIP, 1996,

T.2, p.592. En ce sens, voir également : CIJ, Arrêt du 3 février 1994, Différend territorial Jamahiriya arabe libyenne / Tchad, Rec. CIJ, p.6 ; Sentence arbitrale du 31 juillet 1989, Frontière maritime entre le Sénégal et la Guinée-Bissau, RSA, Vol. XX, p.144 ; CIJ, Arrêt du 19 décembre 1978, Plateau continental de la mer Égée, Rec. CIJ, p.3.

20 Héritée de l’ancien régime, période au cours de laquelle le souverain disposait de son domaine comme

d’un objet patrimonial, cette conception ne disparaît pas pour autant avec l’organisation étatique moderne. Au souverain se substitue l’État qui exerce alors sur son territoire un droit réel similaire à celui d’un propriétaire sur une chose. En ce sens, DONATI (D), Stato e territorio, Roma, 1934, pp.16-123 ; FAUCHILLE (P), Traité de droit international public, 8ème Édition, 1922, Tome I, p.450. Le professeur Barberis note que « cette conception a eu une influence remarquable sur la terminologie et sur la systématisation de tout ce qui concerne le territoire en droit des gens. En effet, on parle de cession, d’abandon ou d’acquisition du territoire comme on le fait lorsqu’il s’agit de la propriété privée » : BARBERIS (JA), « Les liens juridiques entre l’État et son territoire : perspectives théoriques et évolution du droit international », AFDI, XLV, 1999, p.137.

21

CARRE DE MALBERG (R), Contribution à la théorie générale de l’État, Tome I, Recueil Sirey, 1920, p.2.

22 « Entre États indépendants, le respect de la souveraineté territoriale est une des bases essentielles des

rapports internationaux » : CIJ, Arrêt du 9 avril 1949, Affaire du détroit de Corfou, Royaume Uni / Albanie, Rec. CIJ, p.4. Cela interdit toute intervention étatique qui méconnaîtrait l’intégrité territoriale d’un autre État. D’abord reconnu par la CIJ comme un principe coutumier (CIJ, Arrêt du 26 novembre 1984, Affaires des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua, Rec. CIJ, p.14), ce principe est aujourd’hui considéré comme un principe de jus cogens : DUPUY (P-M), Droit international public, Précis Dalloz, 8e Édition, 2006, p.116.

23 Sentence arbitrale du 16 novembre 1957, Lac Lanoux, Espagne / France, RSA, Vol. XII, p.285.

24 CIJ, Arrêt du 9 avril 1949, Affaire du détroit de Corfou, Royaume Uni / Albanie, Rec. CIJ, p.4. D’un point

de vue environnemental, cela exige une utilisation non dommageable du territoire : cette règle, issue notamment de la Sentence arbitrale du 11 mars 1941, Fonderie du Trail, États-Unis / Canada (RSA, Vol. III,

(28)

dégagé de l’emprise étatique exclusive, s’inscrit de plus en plus dans des espaces supranationaux et constitue ainsi le siège de plusieurs sphères de compétence. Il est en outre parfois soumis à l’exercice de plusieurs puissances étatiques25 ou, dans une région précise, à la « suprématie territoriale26 » d’un autre État27. Dans certaines hypothèses, les États peuvent même bénéficier d’une compétence extraterritoriale28. À cet égard, si l’on a un temps admis que le navire constituait « une partie détachée du territoire29 », cette fiction d’extraterritorialité n’est plus admise aujourd’hui : « le droit reconnu à un État d’exercer sa juridiction sur ses navires dans l’océan résulte simplement du fait qu’il s’agit là de biens se trouvant en un endroit où il n’existe pas de juridiction locale30 ». C’est là, plus largement, une évolution majeure du droit international qui tend à soustraire certains territoires de toute emprise étatique. Cette « internationalisation31» du territoire concerne non seulement la haute mer32 mais également l’espace aérien international33, la zone internationale des fonds marins34 ou encore l’espace extra-atmosphérique35.

p.1907), n’est plus aujourd’hui limitée aux seuls États frontaliers. Établie par plusieurs instruments universels de droit de international, l’obligation de veiller à ce que toute activité respecte l’environnement des autres États « fait maintenant partie du corps de règles du droit international de l’environnement » : CIJ, Arrêt du 25 septembre 1995, Affaire du projet Gabcikovo-Nagymaros, Hongrie / Slovaquie, Rec. CIJ, p.5, §53.

25 C’est le cas, par exemple, dans le cadre des protectorats ou des condominiums. Plus contestable selon nous

est la position considérant l’État fédéral, et ses rapports avec les États fédérés, comme une exception à l’exclusivité territoriale : JELLINEK, L’État moderne et son droit, II, p.21, cité par DELBEZ (L), « Du territoire dans ses rapports avec l'État », RGDIP, 1932, p.725.

26 BARBERIS (JA), « Les liens juridiques entre l’État et son territoire : perspectives théoriques et évolution

du droit international », AFDI, XLV, 1999, pp.142-146.

27

Et ce, à travers la présence de bases militaires notamment.

28

Ainsi, un sujet de droit peut ne pas être soumis à la compétence de l’État sur le territoire duquel il se trouve mais demeurer sous la compétence de l’État dont il est ressortissant. Sur l’inviolabilité des ambassades, principe de droit international coutumier : DUPUY (P-M), Droit international public, Précis Dalloz, 8e Édition, 2006, p.134.

29 Sentence arbitrale, 13 février 1897, Affaire du baleinier Costa Rica Packet ; CPJI, Arrêt du 7 septembre

1927, Lotus, Série A, No9.

30 PEARCE HIGGINS (A), « Le régime juridique des navires de commerce en haute mer en temps de paix »,

RCADI, T5, 1929, p.12.

31 ALLAN (D), RIALS (S) (Sous la direction de), Dictionnaire de la culture juridique, PUF, 2003, p.1477. 32 Ainsi, selon l’article 89 de la CNUDM, « aucun État ne peut légitimement prétendre soumettre une partie

quelconque de la haute mer à sa souveraineté ». Sur l’histoire de la liberté des mers : GAURIER (D), Histoire du Droit international. Auteurs, doctrines et développement de l’Antiquité à l’aube de la période contemporaine, PUR, 2005, pp.272-283.

33 Article 87 de la CNUDM. 34 Partie XI de la CNUDM. 35

Le Traité du 27 janvier 1967 sur les principes régissant les activités des États en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la lune et les autres corps célestes, affirme ainsi en son article 2 : « L’espace extra-atmosphérique, y compris la lune et les autres corps célestes, ne peut faire l’objet d’appropriation nationale par proclamation de souveraineté, ni par voie d’utilisation ou d’occupation, ni par aucun autre moyen ».

(29)

-7- Ainsi le territoire, « espace à trois dimensions36 », est-il un concept clef du droit international, fondant l’existence même de ses sujets et assurant leur nature souveraine. En droit interne, le territoire est d’abord l’objet d’une appropriation foncière, publique ou privée. Si « le territoire français est le patrimoine commun de la nation37 », le régime juridique de ses différentes fractions dépend avant tout de la qualité de leur propriétaire. Dans les États fédéraux comme dans les États unitaires, le territoire désigne également l’« assise géographique38 » des différentes collectivités infra-étatiques39.

-8- Si sa définition reste incertaine40 et objet de nombreux débats doctrinaux41, les auteurs ne relèvent qu’exceptionnellement un critère spatial dans la définition du droit. À de rares exceptions - comme le droit de la nationalité42 et l’application du jus soli43 - le territoire ne constitue pas un critère substantiel de définition des différentes branches du droit. Ainsi, le champ d’application territoriale des dispositions juridiques adoptées est-il le plus souvent occulté. Pourtant, « sans les limites imposées par le phénomène de l’espace, le droit n’aurait aucune raison d’être44 ». Toutefois, le caractère général et impersonnel de la norme impose son application de principe sur l’ensemble du territoire étatique. Comme l’observe Kelsen, la norme entend généralement « valoir partout et toujours45 ». Le droit de l’urbanisme et de l’aménagement s’attache pourtant à appréhender la spécificité de certaines fractions du territoire national, la dimension spatiale de ses dispositions juridiques étant d’ailleurs le fondement même de leur pertinence46.

36 DELBEZ (L), « Du territoire dans ses rapports avec l'État », RGDIP, 1932, p.715. 37

Article L 110 du Code de l’urbanisme.

38

CORNU (S) (Sous la direction de), Vocabulaire juridique, PUF, 7ème Édition, 2005, p.901.

39 Les Länder allemands disposent ainsi de leur propre territoire au titre de la Loi fondamentale de 1949. De

même, la Constitution italienne de 1947 reconnaît-elle un territoire aux communes, provinces, cités métropolitaines et régions.

40 Dans La critique de la raison pure, Kant observe dès 1787 que les juristes cherchent encore une définition

pour leur concept du droit. Deux cent ans plus tard, répondant à un exercice proposé par la revue Droits, le doyen Vedel déclare : « Voilà des semaines et même des mois que je "sèche" laborieusement sur la question, pourtant si apparemment innocente (...) : "Qu’est-ce que le droit ?" » : VEDEL (G), « Indéfinissable mais présent », Droits, 11, 1990, p.67.

41 On se référera particulièrement aux contributions proposées par la revue Droits en 1989 et 1990.

42 Le lien entre nationalité et territoire a d’ailleurs été établi par la CIJ, Arrêt du 6 avril 1955, Affaire

Nottebohm, Rec. CIJ, p.23.

43

Le jus soli ou droit du sol est la règle de droit accordant la nationalité à toute personne née sur le territoire national, quelle que soit la nationalité de ses parents.

44 ROCHER (JC), Philosophie du droit, Méthodologie et perspectives, Éditions Fac 2000, 1999, p.47. 45

KELSEN (H), Théorie pure du droit, Traduction française de la 2e Édition de la « Reine Rechtslehre » par C. Eisenmann, Dalloz, 1962, p.17.

46 Ce n’est donc pas un hasard si, comme le souligne le professeur G. Dupuis, l’aménagement du territoire a

constitué un « facteur » de la décentralisation : DUPUIS (G), Le centre et la périphérie en France. Essai historique et juridique, LGDJ, 2000, p.35.

(30)

-9- Ainsi, comme le relève le professeur Madiot, les concepts de « droit et territoire s’opposent. Alors que le premier, dans sa conception libérale, a vocation à l’universalisme, le second, plus concret, est nécessairement clos. Le premier tend vers l’unité et le second est diversité47 ». Cette antinomie explique le processus de centralisation inhérent à la construction de l’État moderne48. La réunion de différentes puissances autour d’un pôle unique constitue en effet l’origine même du fédéralisme, un « fédéralisme par association49 ». Lorsque, dans un arrêt Marbury versus Madison de 1803, la Cour suprême des États-Unis proclame la suprématie de la Constitution50, c’est d’abord l’unité de l’État nouvellement institué qu’elle entend préserver, donnant ainsi tout son sens à la notion de fédéralisme, terme provenant du latin foedus signifiant « alliance ».

-10- Dans des formes et selon des procédés différents, la création de l’État unitaire procède d’une logique similaire. En France, le territoire national - d’abord morcelé en multiples circonscriptions administratives, fiscales et judiciaires - se structure en mode unitaire depuis la création de l’État monarchique51 jusqu’à la Révolution de 1789. L’idéologie jacobine diffuse alors « un discours politique qui ignore superbement le local et ses particularismes52 ». L’abolition des privilèges lors de la nuit du 4 août conduit à la proclamation d’un « droit commun de tous les français ». « De l’organisation du territoire on attend désormais qu’elle devienne le garant de cette représentation égalitaire de la nation que les découpages anciens rendaient impossible53 ». Communes et départements sont ainsi institués en vue d’incarner « l’universalité des citoyens français54 ». La première Constitution proclame alors l’unité et l’indivisibilité de la République55 tandis que la loi du 28 pluviôse an VIII impose la centralisation comme « modèle institutionnel56 ». De la

47

MADIOT (Y), « Vers une territorialisation du droit », RFDA, 1995, p.946.

48 Sur cette notion, voir notamment BEAUD (O), La puissance de l’État, PUF, 1994, pp.42-68.

49 Ou fédéralisme « par agrégation » : QUERMONNE (J-L), Les régimes politiques occidentaux, Seuil, 5ème

Édition, 2006, p.280.

50

« Si la Constitution est un droit supérieur, suprême, inaltérable par des moyens ordinaires (…) alors une loi contraire à la Constitution n’est pas du droit » : Marbury v. Madison, 1803, in ZOLLER (E), Grands arrêts de la Cour suprême des États-Unis, PUF, 2000, p.102. En établissant le contrôle de constitutionnalité des lois des États fédérés, la Cour suprême renforce l’unité de l’État nouvellement institué autour de la Constitution.

51

RIGAUDIERE (A), Introduction à l’étude du droit et des institutions, Économica, 2001, pp.282-318.

52

MABILEAU (A), « Variations sur le local » in MABILEAU (A) (Sous la direction de), À la recherche du local, L’Harmattan, 1993, p.22.

53 BURGUIERE (A), REVEL (J) (Sous la direction de), Histoire de la France, Seuil, 1989, p.133. 54

PASTOREL (J-P), « Réflexions sur l’aménagement du territoire : vers l’intégration interrégionale européenne », RFDA, mars avril 2005, p.270.

55 Constitution française de 1791, Titre II, article 1 : « Le royaume est un et indivisible ».

56 SOLEIL (S), JAUME (L), « Centralisation / décentralisation : retour sur quelques certitudes historiques »,

(31)

même manière, la création tardive de l’État italien57 a longtemps favorisé une forte centralisation de l’action publique et des dispositions juridiques. L’unité fragile du pays oblige alors à préférer l’uniformité du système aux aspirations autonomistes de certains territoires58. Ainsi, la création de l’État moderne implique d’abord l’appréhension du territoire sur un mode unitaire et un gommage des disparités de toute sorte, sources potentielles d’un affaiblissement du pouvoir étatique.

-11- En droit international comme en droit interne, la conception traditionnelle du territoire renvoie donc à un espace monolithique, soumis à une souveraineté étatique. Le territoire, espace fermé sous l’emprise d’un pouvoir exclusif, se conjugue uniquement au singulier, au risque de compromettre la puissance qui s’y exerce. La reconnaissance juridique de singularités territoriales ne peut donc émerger de ce cadre politique et juridique au sein duquel l’uniformité est « une marque de rationalité et un gage d’efficacité59 ». Cette conception rigide du territoire s’est pourtant estompée au cours des dernières décennies, conduisant le droit à reconnaître la diversité des territoires (§2).

-§2- Les territoires et le droit.

-12- Appréhender le territoire à échelle universelle ne permet pas de refléter fidèlement la diversité de la communauté internationale ; c’est la raison pour laquelle l’on procède traditionnellement à une classification des États qui la composent au regard de considérations géopolitiques, économiques, sociales... De même, considérer le territoire comme la seule surface sur laquelle s’exerce la puissance étatique ne permet pas de rendre compte des mécanismes particuliers propres à la scène internationale. D’un point de vue juridique, un même constat s’impose. La conception « planétaire » du territoire reste beaucoup trop large pour décrire précisément les relations juridiques inter-étatiques. Ainsi, les outils conventionnels nés du droit international ne portent pas systématiquement sur

57 Le « Risorgimento » - littéralement la résurrection - période au cours de laquelle la péninsule italienne est

unifiée, s’achève avec l’annexion de Rome le 20 septembre 1870. Toutefois, l’on retient classiquement la date du 17 mars 1861, jour où un Parlement national réuni à Turin proclame le roi de Piémont-Sardaigne, Victor Emmanuel II, « Roi d’Italie par la grâce de Dieu et la volonté de la nation ». Sur l’histoire de l’unité italienne, voir notamment : BEALES (D), BIAGINI (EF), BASSI (ML), Il Risorgimento e l'unificazione dell'Italia, Universale paperbacks, 489, 2005, 260p ; GUICHONNET (P), L’unité italienne, Que sais-je ? No942, 1996, 128p.

58 Le « Statuto Albertino », Charte octroyée le 4 mars 1848 par le roi Carlo Alberto à ses sujets du Royaume

de Sardaigne, constituera la Constitution de l’État italien jusqu’en 1947.

59

(32)

l’ensemble des espaces nationaux. De même, la conception purement étatique du territoire exclut de fait certains espaces qui, bien que non soumis à une souveraineté exclusive, sont l’objet de dispositions juridiques particulières. Certains auteurs y voient d’ailleurs le fondement d’une distinction possible entre les notions de territoire et d’espace60, distinction que nous exclurons de cette étude, faute d’être transposable en droit interne. En outre, le terme « espace » est aujourd’hui largement utilisé pour définir des territoires sur lesquels s’exercent précisément des puissances étatiques - l’on parle ainsi communément d’« espace Schengen », d’« espace judiciaire européen », d’« espace communautaire » - et nous emploierons donc les deux termes comme synonymes.

-13- Certes, la communauté internationale s’organise autour de principes universellement reconnus. La place de la coutume, des principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées et des normes de jus cogens au sein de l’ordre juridique international en témoigne. Elle partage également nombre de préoccupations, de la préservation de l’environnement à la régulation de l’économie mondiale, du maintien de la paix à la protection des droits de l’homme. Néanmoins, l’unité de l’ordre juridique international ne doit pas faire illusion61. La complexité de la société internationale, la diversité de ses sujets et la disparité de ses problématiques façonnent une communauté plurielle aux relations multiples. Comme la professeure Delmas-Marty le démontre, « la mondialisation du droit multiplie les situations de plurijuridisme62 » et conduit à un « paysage bouleversé où les règles de droit semblent surgir de partout, à tout moment, en tout sens63 ». Dès lors, le phénomène de régionalisation, « amorcé dès le XIXe siècle, annoncé par la Charte de

60

Ainsi, pour le professeur de La Pradelle, « c’est par opposition au concept de territoire mais en relation directe avec celui-ci, que le concept et les éléments d'approche d'une définition autonome de l'espace ont été identifiés par la doctrine et acceptés dans le droit des traités, pour qualifier de nombreuses dépendances de l'ordre géophysique terrestre échappant par nature, à la dépendance de contrainte d'une autorité étatique » : DE LA PRADELLE (P), « Notion de territoire et d'espace dans l'aménagement des rapports internationaux contemporains », RCADI, 1977, Vol IV, T.157, p.419.

61 ALLAN (D), « De l’ordre juridique international », Droits, 35, 2002, pp.79-101 ; DUPUY (P-M), « Sur le

maintien ou la disparition de l’unité de l’ordre juridique international » in BEN ACHOUR (R), LAGHMANI (S), Harmonie et contradictions en droit international, Rencontre internationale de la faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, 11-13 avril 1996, Pedone, 1996, pp.17-54 ; VALTICOS (M), « Pluralité des ordres juridiques internationaux et unité du droit international » in Essays in honour of K. Skubiszewski, La Haye, Kluwer, 1996, pp.301-322.

62

DELMAS-MARTY (M), « Plurijuridisme et mondialisation : vers un pluralisme ordonné » in BERGEL (J-L) (Sous la direction de), Le plurijuridisme, Actes du 8e congrès de l’Association internationale de méthodologie juridique, Aix en Provence, 4-6 septembre 2003, Presses Universitaires d’Aix Marseille, 2005, p.359.

63

(33)

l’ONU et qui s’est considérablement développé depuis lors64 », procède de la quête du « pluralisme ordonné » cher à cette auteure.

-14- L’unité du droit international est ainsi ébranlée non seulement par la souveraineté étatique, fondement et limite traditionnelle du droit international, mais également par une régionalisation croissante des relations inter-étatiques. Réunis autour de problématiques communes65, les États créent ordres et espaces normatifs66 au sein desquels la proximité géographique constitue le ciment majeur des relations établies, quelle que soit la discipline source de coopération67. Loin d’assurer l’unité de l’ordre juridique international, la mondialisation aboutit donc à une juxtaposition d’ensembles régionaux68. Si l’Union européenne (UE) - « ordre juridique propre69 (...) » - en constitue aujourd’hui l’exemple le plus abouti, le droit international de l’environnement n’échappe pas au phénomène. Se développent ainsi des systèmes conventionnels unissant les États d’une même région autour de problématiques environnementales partagées. Or, qui mieux que l’élément aquatique, symbole d’alliance par excellence70, peut ainsi créer le lien entre les différentes puissances étatiques qu’il sépare naturellement71 ? Depuis les années 1970, se multiplient donc des systèmes de protection des mers régionales, cadre juridique unissant les États riverains d’un espace marin qu’il considère comme « patrimoine commun72 ». De manière symbolique73, le retour à la conception patrimoniale du territoire - qui prévalait sous les

64

DELMAS-MARTY (M), Les forces imaginantes du droit. Le pluralisme moderne, Seuil, 2006, p.139.

65 L’on parle également d’« objets » (Ibidem, p.140) ou de « partenariats thématiques » (TENIER (J),

Universalisme et régionalisme : les chemins du partenariat, Questions internationales, 11, L’ONU à l’épreuve, La documentation française, Janvier 2005, p.72).

66

TIMSIT (G), Thèmes et systèmes de droit, PUF, Les voies du droit, 1986, 205p.

67

La professeure Delmas-Marty observe d’ailleurs que ces espaces régionaux s’organisent « non pas à partir d’un grand projet fondateur, mais, plus concrètement, autour d’objets circonscrits (...) le plus souvent économique, plus rarement éthique, parfois sécuritaire, sanitaire ou écologique (...) qui se transforment parfois au fil du temps en un véritable projet » : DELMAS-MARTY (M), Les forces imaginantes du droit. Le pluralisme moderne, Seuil, 2006, pp.141-142.

68 BADIE (B), La fin des territoires. Essai sur le désordre international et sur l’utilité sociale du respect,

Fayard, Paris, 1995, p.215.

69

CJCE, 15 juillet 1964, Costa c/ ENEL, Affaire C-6/64, Rec. 1964, p.1141.

70 D’une manière générale, les religions accordent à l’eau des pouvoirs de purification spirituelle et de lien

entre les hommes et le Créateur. Dans la religion chrétienne, le sacrement du baptême en est un exemple majeur. Le judaïsme et l’islam comportent également de nombreuses cérémonies de purification par ablution. De même, l’eau est un élément particulièrement présent dans les religions orientales (hindouisme, shintoïsme, bouddhisme...).

71 Relevant l’importance de l’élément aquatique, la professeure Delmas-Marty observe d’ailleurs que les

formes de la régionalisation sont « redessinées par le cours des grands fleuves (Rhin, Danube, Niger, Sénégal, Mékong) ou le pourtour des mers (Méditerranée, mer des Caraïbes, mer de Chine, mer Noire, mer Caspienne, voire golfe arabo-persique ou océan Pacifique ou Indien) ».

72 Convention sur la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée, Préambule.

73 Et non pas juridique. Sur la notion juridique de patrimoine commun de l’humanité, voir notamment : KISS

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monarchies absolues à travers la notion de dominium - s’effectue non pas dans un dessein d’appropriation par une puissance étatique exclusive mais dans une logique de gestion concertée de l’écosystème qu’il enferme. La régionalisation du droit international permet donc de dépasser l’approche traditionnelle du territoire, siège de la puissance étatique, pour redessiner les contours d’une coopération autour d’un espace géographique particulier et ainsi appréhender la diversité des territoires.

-15- Sur le plan interne, la conception unitaire du territoire évolue d’une manière relativement identique. La construction de l’État moderne impose, nous l’avons observé, une centralisation politique et juridique qui emporte une négation de la diversité territoriale. De plus, le principe d’égalité auquel, relève Tocqueville dès 183574, la France est particulièrement attachée, impose le respect d’une uniformité qui « a lourdement pesé sur l’histoire de l’administration territoriale75 ». Ainsi, au-delà d’une reconnaissance constitutionnelle de la libre administration des collectivités locales en 194676, la France reste un État particulièrement centralisé jusqu’au milieu des années 1980. À travers les lois de décentralisation77 et sous l’impulsion notable de l’UE78, s’engage alors une irrésistible ascension des forces locales. Les années 1990 sont ainsi marquées par une restructuration de l’architecture territoriale, non seulement par la révolution de l’intercommunalité mais également par la logique de contractualisation qui s’impose alors peu à peu dans l’aménagement du territoire79. Progressivement, l’étau étatique se desserre et la prise en compte de la diversité territoriale devient un fondement de la politique d’aménagement. Ainsi, l’article 1er de la loi du 4 février 1995 dispose-t-il : « la politique d'aménagement et de développement du territoire (...) a pour objet la mise en valeur et le développement équilibré du territoire de la République. À cet effet, elle corrige les inégalités des conditions de vie des citoyens liées à la situation géographique (...) et vise à compenser les

74 Voir l’introduction de TOCQUEVILLE De (A), De la démocratie en Amérique, Volume 1. 75 DUPUIS (G), Le centre et la périphérie en France. Essai historique et juridique, LGDJ, 2000, p.17. 76 Constitution du 27 octobre 1946, article 87 et Constitution du 4 octobre 1958, article 72.

77

Loi N°82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, JO du 3 mars 1982 ; Loi No83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, JO du 9 janvier 1983 ; Loi N°83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi N°83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, JO du 23 juillet 1983.

78 LANORD (M), « La prise en compte du territoire par le droit : évolution et prospective », Revue de la

recherche juridique. Droit prospectif, 2004-2 (1), p.1074 ; PASTOREL (J-P), « Réflexions sur l’aménagement du territoire : vers l’intégration interrégionale européenne », RFDA, mars avril 2005, p.272.

79

(35)

handicaps territoriaux80 ». La vision unitaire du territoire qui prévalait jusqu’alors s’éloigne ainsi peu à peu. De plus, si le principe d’indivisibilité de la République, proclamé à l’article 1er de la Constitution de 1958, reste protégé par la jurisprudence81, celle-ci en assouplit le caractère rigide et desserre progressivement le « verrouillage juridique du territoire82 ». Ainsi le Conseil d’État permet-il de déroger au principe d’égal accès au service public sur la base d’un critère territorial83 tandis qu’est reconnue constitutionnelle la prise en compte par le droit de situations géographiques particulières84. D’un espace assimilé à l’État, le territoire devient donc un patrimoine environnemental à préserver et à gérer de manière durable ; il n’est plus seulement le cadre des compétences étatiques mais devient l’objet d’une politique spécifique, appréhendant son hétérogénéité.

-16- La prise en compte de la diversité de l’espace national et la « territorialisation du droit85 » qui en résulte est d’autant plus marquée dans les États les plus décentralisés86. C’est ce qui nous incite à fonder une partie de notre étude sur les régimes français et italien, différant sensiblement en ce domaine. Pour des raisons conjoncturelles liées à l’équilibre des forces politiques, l’Italie s’est d’abord contentée de mettre en place un fédéralisme administratif87 avant de consacrer constitutionnellement la voie décentralisatrice, aujourd’hui particulièrement prononcée. Tout en affirmant l’unité et l’indivisibilité de la République en son article 5, la Constitution italienne reconnaît ainsi les communes, provinces, villes métropolitaines et régions comme entités constitutives de

80 Loi No95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire, JO

No31 du 5 février 1995 p.1973.

81

Conseil constitutionnel, Décision No82-138 DC, 25 février 1982, Loi portant statut particulier de la Région Corse, Rec. p.41 ; Conseil constitutionnel, Décision No82-137 DC, 25 février 1982, Loi relative aux droits des libertés des communes, des départements et des régions, Rec. p.38 ; Conseil constitutionnel, Décision No91-290 DC, 9 mai 1991, Loi portant statut de la collectivité territoriale de Corse, Rec. p.50 ; Conseil constitutionnel, Décision No93-329 DC, 13 janvier 1994, Révision de la loi Falloux, Rec. p.9 ; Conseil constitutionnel, Décision No96-373 DC, 9 avril 1996, Loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française, Rec. p.43 ; Conseil constitutionnel, Décision No2001-454 DC du 17 janvier 2002, Loi relative à la Corse, Rec. p.70.

82

CAILLOSSE (J), « Le local, objet juridique » in MABILEAU (A) (Sous la direction de), À la recherche du local, L’Harmattan, 1993, p.126.

83 CE, 13 mai 1994, Commune de Dreux, Req. No116549, AJDA, 1994, p.652, note H. Hecquard-Théron. 84 Ainsi, selon le Conseil constitutionnel, la limitation du champ d’application des DTA « à certaines parties

du territoire national répond à la prise en compte de situations différentes et ne saurait par suite méconnaître le principe d'égalité non plus que porter atteinte au principe d'indivisibilité de la République » : Conseil constitutionnel, Décision No94-358 DC, 26 janvier 1995, Loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, JO du 1er février 1995 p.1706.

85

Nous reprenons ici l’expression utilisée par le professeur Madiot : MADIOT (Y), « Vers une territorialisation du droit », RFDA, 1995, pp.946-960.

86 Et a fortiori dans les États fédéraux caractérisés par un principe de superposition des niveaux juridiques

fédéral et fédéré.

87

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l’État. De plus, suivant un « processus très long et ardu88 » dont la loi constitutionnelle du 18 octobre 2001 constitue un certain aboutissement89, l’Italie a progressivement placé la région au cœur du système juridique et institutionnel, lui conférant une compétence législative de droit commun. Ainsi la collectivité régionale constitue-t-elle aujourd’hui le support territorial d’un droit spécifique.

-17- En France, la question de l’organisation verticale des pouvoirs ressurgit en 2003 à travers l’acte II de la décentralisation. Par la constitutionnalisation de l’expérimentation normative90, le législateur opère une rupture fondamentale dans l’appréhension du territoire national et dans la conception rousseauiste de la loi qui prévalait jusqu’alors. Le nouvel alinéa 4 de l’article 72 - disposition qui « a attisé les craintes de ceux qui craignent de voir notre pays basculer du côté des États fédéraux et abandonner son caractère de République une et indivisible91 » - reconnaît aux collectivités territoriales et à leurs groupements la possibilité de « déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences ». Il s’agit là d’une disposition incontestablement novatrice qui autorise l’ensemble des entités infra-étatiques - et non plus seulement certaines d’entre elles92 - à élaborer, sous certaines conditions, « la norme juridique la plus adéquate à ses besoins93 ». Comme l’observe le professeur Drago, l’expérimentation concerne, de par sa nature même, « une zone géographique définie ou une matière définie94 ». Ainsi, la diversité territoriale française peut-elle aujourd’hui être traduite par et dans le droit. L’évolution juridique récente tend donc vers ce que le professeur Madiot appelait de ces vœux, c'est-à-dire, « sinon (...) une disparition, du moins (...) une remise en cause du principe de l’unité d’application du droit sur l’ensemble du territoire national95 ».

88 MERLONI (F), « Italie : du centralisme de l’État à la République des autonomies territoriales » in

DELCAMP (A), LOUGHLIN (J), La décentralisation dans les États de l’Union européenne, Notes et études documentaires, La Documentation française, novembre 2002, p.215.

89

Legge costituzionale 18 ottobre 2001, No3, Modifiche al titolo V della parte seconda della Costituzione, GU No248 del 24 ottobre 2001.

90 Loi constitutionnelle N°2003-276 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République,

JO N°75 du 29 mars 2003 p.5568, article 5.

91

PONTIER (J-M), « La loi organique relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales », AJDA, 2003, pp.1715-1723.

92 DEBBASCH (R), « Droit constitutionnel local. L’indivisibilité de la République et l’existence de statuts

particuliers en France », RFDC, No30, 1997, p.359.

93

BAGHESTANI-PERREY (L), « Le pouvoir d’expérimentation normative locale, une nouvelle conception partagée de la réalisation de l’intérêt général », LPA, 17 mars 2004, p.7.

94 DRAGO (R), « Le droit de l’expérimentation » in L'avenir du droit : Mélanges en hommage à François

Terré, Dalloz, 1999, p.231.

95

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