CHAPITRE 9
S´
ERIES ENTI`
ERES
⊙
Brook Taylor d´ecouvrit en 1715 qu’une fonction suffisamment d´erivable au voisinage d’un point peut ˆetre approch´ee par une fonction polynomiale dont les coefficients d´ependent uniquement des d´eriv´ees de la fonction en ce point. Il convient n´eanmoins d’expliciter ou de majorer efficacement ce reste (la diff´erence existant entre la fonction et le polynˆome de Taylor).
Si on raisonne localement et `a un ordre fix´e, on obtient le th´eor`eme de Taylor-Young et la th´eorie des d´eveloppements limit´es : mais c’est local et limit´e !
Si on raisonne globalement et `a un ordre fix´e, on obtient le th´eor`eme de Taylor avec reste int´egral de Laplace, ou les ´egalit´es de Taylor-Lagrange ou Taylor-Cauchy avec les in´egalit´es qui en d´ecoulent, mais ¸ca reste limit´e !
Si on raisonne globalement et `a tout ordre pour une fonction `a valeurs r´eelles ind´efiniment d´erivable, on peut d´efinir la s´erie de Taylor associ´ee `a la fonction et `a un point de son ensemble de d´efinition mais se pose alors la question de la convergence de cette s´erie et, dans le cas de la convergence, de la correspondance entre la fonction et la somme de la s´erie : c’est la th´eorie des s´eries enti`eres.
Quand la fonction est localement ´egale `a la somme de sa s´erie de Taylor au voisinage de tous les points de son ensemble de d´efinition, on dit qu’elle est analytique, comme le sont la plupart des fonctions usuelles. La configuration est totalement diff´erente si on s’int´eresse aux fonctions de la variable complexe qui sont d´erivables (au sens complexe bien sˆur) : on dit qu’elles sont holomorphes. Dans ce cas, cette d´erivabilit´e entraˆıne miraculeusement l’aspect C∞ de la fonction et le fait qu’elle soit analytique. Cette fantastique propri´et´e fait des fonctions holomorphes un pilier de l’analyse complexe, et un pont vers la physique et les essentielles fonctions harmoniques.
TABLE DES MATI`
ERES
Partie 1 : convergence d’une s´erie enti`ere
- 1 : d´efinition et rayon de convergence. . . .page 124 - 2 : op´erations sur les s´eries enti`eres. . . .page 126
Partie 2 : somme d’une s´erie enti`ere
- 1 : modes de convergence et continuit´e de la somme. . . .page 127 - 2 : d´erivation et int´egration des s´eries enti`eres de la variable r´eelle. . . .page 128
Partie 3 : fonctions d´eveloppables en s´erie enti`ere
- 1 : s´erie de Taylor d’une fonction de la variable r´eelle. . . .page 128 - 2 : fonctions usuelles. . . .page 130 - 3 : m´ethodes de d´eveloppement en s´erie enti`ere. . . .page 131 ⊙
124 S ´ERIES ENTI `ERES
PARTIE 9.1 : CONVERGENCE D’UNE S´
ERIE ENTI`
ERE
9.1.1 : D´
efinition et rayon de convergence
D ´EFINITION 9.1 :
Une s´erie enti`ere de variable complexe est une s´erie de fonctions ∑
n>0un
telle qu’il existe une suite (an)n∈ N∈ CN pour laquelle : ∀z∈ C, ∀n∈ N, un(z) =anzn ; on la note alors par abus
∑
n>0anz n.
Les complexes an sont appel´es les coefficients de la s´erie enti`ere . Une s´erie enti`ere de variable r´eelle est une s´erie enti`ere ∑
n>0anx
n o`ux∈ R et (a
n)n∈ N∈ CN.
REMARQUE 9.1 : • Les sommes partielles des s´eries enti`eres sont des fonctions polynomiales. • En prenanta0=· · · =an0−1 pourn0>1on peut consid´erer des s´eries enti`eres not´ees
∑
n>n0
anzn.
• Pourz∈ C, en cas de convergence enz(par ex. siz=0), on note
+∑∞ n=0
anzn la somme de la s´erie. • L’ensemble des s´eries enti`eres de variable complexe est une alg`ebre commutative et int`egre pour :
(i) la loi externe λ.( ∑
n>0 anzn ) = ∑ n>0 (λan)zn, (ii) la somme( ∑ n>0 anzn ) +( ∑ n>0 bnzn ) = ∑ n>0 (an+bn)zn,
(iii) le produit de Cauchy( ∑
n>0 anzn ) ×( ∑ n>0 bnzn ) = ∑ n>0 ( ∑n k=0 akbn−k ) zn. • Les fonctions polynomiales sont des s´eries enti`eres particuli`eres (an =0pournassez grand).
EXEMPLE 9.1 : • S´erie g´eom´etrique :
+∑∞ n=0
zn= 1
1−z pour|z|< 1par calcul alg´ebrique.
• S´erie exponentielle : +∑∞
n=0
xn n! =e
x pour toutx∈ R par la formule de Taylor reste int´egral.
PROPOSITION DITE DU LEMME D’ABEL 9.1 :
Soit (an)n∈ N ∈ CN et ρ ∈ R+∗, si la suite (anρn)n∈ N est born´ee alors pour tout z∈ C tel que
|z|< ρ, la s´erie ∑
n>0
anzn converge absolument.
REMARQUE 9.2 : Soit (an)n∈ N∈ KN, l’ensembleE=E1=
{
ρ∈ R+| (anρn)n∈ Nest born´ee
}
est une partie non vide de R+ car0∈E: c’est mˆeme un intervalle de R+.
D ´EFINITION 9.2 :
Soit (an)n∈ N ∈ KN, on appelle rayon de convergence de la s´erie enti`ere
∑
n>0
anzn la borne sup´erieure
R>0 deEavec par extensionR= +∞ si En’est pas major´ee.
TH ´EOR `EME , CONDITIONS SUFFISANTES DE CONVERGENCE/DIVERGENCE 9.2 : Soit (an)n∈ N∈ CN et R le rayon de convergence de la s´erie enti`ere
∑
n>0anz
n, alors ∀z∈ C :
• si |z|< R alors la s´erie ∑
n>0
anzn est absolument convergente, • si |z|> R alors la s´erie ∑
n>0
anzn est grossi`erement divergente.
D ´EFINITION 9.3 :
Pour une s´erie enti`ere de la variable complexe ∑
n>0
anzn, on note :
• disque ouvert de convergence le disqueB(0, R) ={z∈ C |z|< R} de C.
• disque ferm´e de convergence le disqueBf(0, R) ={z∈ C |z| 6R} de C (adh´erence deB(0, R)). • cercle de convergence le cercle S(0, R) ={z∈ C |z| =R} (fronti`ere des deux pr´ec´edents).
Pour une s´erie enti`ere de la variable r´eelle ∑
n>0
anxn, on note : • intervalle ouvert de convergence l’intervalle ] −R;R[ de R.
• intervalle ferm´e de convergence l’intervalle [−R;R] (segment siR <+∞).
REMARQUE 9.4 : • Par d´efinitionR=R1=Sup
{ ρ∈ R+ ∃z∈ C, |z| =ρet (anzn)n∈ Nborn´ee } . • On a aussiR=R2=Sup{ρ∈ R+ ∃z∈ C, |z| =ρet ∑ n>0
anzn converge absolument}=Sup(E2). • On a aussiR=R3=Sup{ρ∈ R+ ∃z∈ C, |z| =ρet (anzn)n∈ Ntend vers0
} =Sup(E3). • On a aussiR=R4=Sup { ρ∈ R+ ∃z∈ C, |z| =ρet ∑ n>0 anzn converge } =Sup(E4).
REMARQUE FONDAMENTALE 9.5 : Avec les notations ci-dessus : • S’il existez0∈ C tel que (anzn0)n∈ Nest born´ee ou ∑
n>0
anzn0 converge : R> |z0|.
• S’il existez0∈ C tel que (anzn0)n∈ Nn’est pas born´ee ou
∑ n>0 anzn0 diverge : R6 |z0|. • ∀z∈B(0, R), ∑ n>0 anzn CVA et∀z /∈Bf(0, R), ∑ n>0
anzn DVG. Siz∈S(0, R), on ne peut rien dire de la convergence de ∑
n>0
anzn : il peut se passer n’importe quoi !
EXEMPLE 9.2 : • La s´erie ∑
n>1
zn
n4ln(n5+1) est de rayonR=1et converge si|z| =1. • La s´erie ∑
n>1
zn
n est de rayonR=1et converge pourz∈ U \ {1} par une transformation d’Abel.
• La s´erie ∑
n>0
nzn est de rayonR=1et diverge pour z∈ U.
TH ´EOR `EME DE COMPARAISON SUR LES RAYONS DE CONVERGENCE 9.3 : ∑
n>0anz
n et ∑ n>0bnz
n deux s´eries enti`eres de rayons de convergence respectifs R
a etRb :
(i) Si an =
+∞O(bn) (en particulier si ∀n∈ N, |an| 6 |bn|), alors Rb6Ra.
(ii) Sian ∼
126 S ´ERIES ENTI `ERES REMARQUE 9.6 : • Dans (i), on a la mˆeme conclusion (mais pas plus) sian=
∞o(bn). • Dans (i), on a la mˆeme conclusion s’il existe un rangn0tel que ∀n>n0, |an| 6 |bn|.
EXERCICE 9.3 : Quel est le domaine de convergence de ∑
n>0n (−1)n
zn ?
REMARQUE FONDAMENTALE 9.7 : Si ∑
n>0anz
nest une s´erie enti`ere, que∀n∈ N, a
n̸=0. Pour tout z∈ C∗, on ´etudie la suite(an+1zn+1 anzn ) n∈ N . Si lim n→+∞ an+1 an
=L∈ R+, avec la r`egle de d’Alembert
sur les s´eries num´eriques, on montre queR= 1
L avec les conventions 1
0 = +∞ et 1
+∞ =0.
EXEMPLE 9.4 : • Calculer le rayon de la s´erie enti`ere ∑
n>1
nn n!z
n.
• SoitFune fraction rationnelle sans pˆole entier, quel est le rayon de ∑
n>0
F(n)zn ?
EXERCICE 9.5 : D´eterminer le rayon de convergenceR′ de la s´erie enti`ere ∑
n>0dnz 2no`ud
n est le
nombre d’entiers naturels `anchiffres ne contenant pas le chiffre7.
9.1.2 : Op´
erations sur les s´
eries enti`
eres
PROPOSITION OP ´ERATOIRE SUR LES S ´ERIES, RAPPORT SUR LES RAYONS 9.4 : Soitλ∈ K∗ et ∑
n>0
anzn,
∑
n>0
bnzn deux s´eries enti`eres de rayons de convergence resp. Ra, Rb.
• ∑
n>0λanz
n a aussi pour rayon de convergence R a.
• ∑
n>0
(an+bn)zn a pour rayon de convergenceR>Min(Ra, Rb) avec ´egalit´e siRa̸=Rb.
REMARQUE 9.8 : SiRa=Rb, on ne peut rien dire de la valeur exacte deR a priori.
EXEMPLE 9.6 : ´Etudier ∑ n>1 ( 1 n− 1 n+1 ) zn ou ∑ n>1 ( 1 n + 1 n!− 1 n ) zn ou ∑ n>1 ( 1 n+ 1 2n − 1 n ) zn.
PROPOSITION : RAYON D’UNE S ´ERIE ENTI `ERE PRODUIT DE CAUCHY 9.5 : Soit les s´eries enti`eres ∑
n>0anz n et ∑ n>0bnz n de rayons respectifs R a et Rb. Le rayon R de leur produit de Cauchy ∑ n>0cnz n v´erifie R>Min(R a, Rb) (o`u∀n∈ N, cn= n ∑ k=0 akbn−k).
REMARQUE 9.9 : Mˆeme siRa̸=Rb, on peut avoir R̸=Min(Ra, Rb).
EXEMPLE 9.7 : Rayons de (1−z), de ∑ n>0 ( 1+ 1 3n+1 ) zn et de (1−z)× ∑ n>0 ( 1+ 1 3n+1 ) zn ?
PROPOSITION SUR LE RAYON DE LA S ´ERIE D ´ERIV ´EE OU PRIMITIVE 9.6 : Les s´eries enti`eres ∑
n>0anz n, ∑ n>0 (n+1)an+1zn et ∑ n>1 an−1 n z
n ont le mˆeme rayon de convergence.
REMARQUE 9.10 : • ∑
n>0
(n+1)an+1zn s’obtient en d´erivant terme `a terme la s´erie
∑ n>0anz n. • ∑ n>1 an−1 n z
n s’obtient en int´egrant terme `a terme la s´erie ∑ n>0
PARTIE 9.2 : SOMME D’UNE S´
ERIE ENTI`
ERE
9.2.1 : Modes de convergence et continuit´
e de la somme
PROPOSITION : CONVERGENCE NORMALE SUR TOUT COMPACT DE LA BOULE OUVERTE DE CONVERGENCE 9.7 :
Soit ∑
n>0
anzn une s´erie enti`ere de rayon de convergence R.
Si R > 0, la s´erie ∑
n>0anz
n converge normalement sur tout disque ferm´e B
f(0, ρ) pourρ < R.
REMARQUE 9.11 : Il n’y a pas convergence uniforme sur le disque ouvertB(0, R) ! Voir ∑
n>0
zn.
TH ´EOR `EME DE CONTINUIT ´E DE LA FONCTION ASSOCI ´EE `A UNE S ´ERIE 9.8 : Soit ∑
n>0
anzn une s´erie enti`ere de rayon R > 0. Alors S:x7→
+∑∞ n=0
anxn est continue sur ]−R;R[.
REMARQUE 9.12 : • SiR > 0, on admet la continuit´e deS:z7→
+∑∞ n=0
anzn surB(0, R). • Si la s´erie ∑
n>0anR
n est absolument convergente alors ∑ n>0anz
n converge normalement surB f(0, R)
doncS:x7→
+∑∞ n=0
anxn est continue sur [−R;R] (et mˆemeS:z7→
+∑∞ n=0
anzn surBf(0, R)).
PROPOSITION OP ´ERATOIRE SUR LES SOMMES DE S ´ERIES ENTI `ERES 9.9 : Soit deux s´eries enti`eres ∑
n>0
anzn et
∑
n>0
bnzn de rayon respectifs R > 0 et R′ > 0 et de sommes
f(z) = +∑∞ n=0 anzn etg(z) = +∑∞ n=0
bnzn l`a o`u elles sont d´efinies, alors si λ∈ K, on a les op´erations :
(i) ∀z∈B(0, R), +∑∞ n=0 ( λan)zn =λ. (+∑∞ n=0 anzn ) . (ii) ∀z∈B(0, Min(R, R′)), +∑∞ n=0 ( an+bn ) zn= (+∑∞ n=0 anzn ) + (+∑∞ n=0 bnzn ) . (iii) ∀z∈B(0, Min(R, R′)), +∑∞ n=0 ( ∑n k=0 akbn−k ) zn=( +∑∞ n=0 anzn ) ×(+∑∞ n=0 bnzn ) .
REMARQUE HP 9.13 : Classique : soit une s´erie enti`ere ∑
n>0
anzn de rayonR tel que 0 < R <+∞ et
qui v´erifie ∑
n>0
anRn converge, alors lim t→R− +∑∞ n=0 antn= +∑∞ n=0 anRn. EXEMPLE 9.8 : Le rayon de ∑ n>1 (−1)n−1zn
n est clairement R=1et on verra bientˆot la relation
∀x∈] −1;1[,
+∑∞ n=1
(−1)n−1xn
n =ln(1+x). D’apr`es le r´esultat pr´ec´edent :
+∑∞ n=1
(−1)n−1
128 S ´ERIES ENTI `ERES
9.2.2 : D´
erivation et int´
egration des s´
eries enti`
eres de la variable r´
eelle
⊙
On peut int´egrer une s´erie enti`ere sur un segment inclus dans son intervalle ouvert de convergence.
TH ´EOR `EME D’INT ´EGRATION TERME `A TERME D’UNE S ´ERIE ENTI `ERE SUR UN SEGMENT DE L’INTERVALLE OUVERT DE CONVERGENCE ( ´ENORME) 9.10 :
Soit (an)n∈ N∈ CN et
∑
n>0
anxn une s´erie enti`ere de la variable r´eelle de rayon de convergence
R > 0 etf sa fonction somme d´efinie sur ]−R;R[ (au moins) par∀x∈] −R;R[, f(x) =
+∑∞ n=0
anxn : (i) Pour tout (a, b)∈] −R;R[2, on a
∫
ba f(t)dt= +∑∞ n=0 an [ tn+1 n+1 ]b a .
(ii) La primitive F de fqui s’annule en 0 est somme sur ]−R;R[ d’une s´erie enti`ere : ∀x∈] −R;R[, F(x) =
∫
x 0 f(t)dt= +∑∞ n=1 an−1 n x n.EXEMPLE 9.9 : Trouver une s´erie enti`ere dont la somme vautln(1−x) pour x∈] −1;1[. ⊙
On peut aussi d´eriver une s´erie enti`ere sur son intervalle ouvert de convergence.
TH ´EOR `EME SUR LA CLASSE ET LES D ´ERIVEES SUCCESSIVES DE LA SOMME D’UNE S ´ERIE ENTI `ERE ( ´ENORME) 9.11 :
Soit (an)n∈ N∈ CN et ∑
n>0
anxn une s´erie enti`ere de la variable r´eelle de rayon de convergence
R > 0 etf sa somme sur ]−R;R[. Alorsf est de classe C∞ sur ]−R;R[ et si p∈ N, on a :
∀x∈] −R;R[, f(p)(x) = +∑∞ n=p n(n−1)· · · (n−p+1)anxn−p= +∑∞ n=p n! (n−p)!anx n−p= +∑∞ n=0 (n+p)! n! an+px n. En particulier, on a : ∀p∈ N, ap=f (p)(0) p! .
EXEMPLE FONDAMENTAL 9.10 : Mines PSI 2013 G´er´emy Soitp∈ N∗, calculer le d´eveloppement en s´erie enti`ere defp:x7→ ( 1
1−x)p.
PROPOSITION : UNICIT ´E DES COEFFICIENTS D’UNE S ´ERIE ENTI `ERE 9.12 : Soit ∑ n>0anz n, ∑ n>0bnz n etR > 0tels que∀x∈]−R;R[, +∑∞ n=0 anxn= +∑∞ n=0 bnxn. Alors,∀n∈ N, an=bn.
REMARQUE 9.14 : Autrement dit “les coefficients d’une s´erie enti`ere de rayonR > 0sont uniques”.
PARTIE 9.3 : FONCTIONS D´
EVELOPPABLES
EN S´
ERIE ENTI`
ERE
9.3.1 : S´
erie de
Taylord’une fonction de la variable r´
eelle
D ´EFINITION 9.4 :
Soit I un intervalle de R dont 0 est un point int´erieur, on dit que f:I → K est d´eveloppable en s´erie
enti`ere s’il existe r > 0et une suite (an)n∈ N∈ KN telle que ]−r;r[⊂I et∀x∈] −r;r[, f(x) =
+∑∞ n=0
REMARQUE 9.15 : • Alors le rayon de convergence de la s´erie enti`ere ∑
n>0anx
n est au moins ´egal `ar.
• Sifest paire et d´eveloppable en s´erie enti`ere alors∀n∈ N, a2n+1=0.
• Sifest impaire et d´eveloppable en s´erie enti`ere alors∀n∈ N, a2n=0.
• On noteraDSEpour “d´eveloppable en s´erie enti`ere”.
PROPOSITION OP ´ERATOIRE SUR LES FONCTIONS DSE 9.13 :
Soitr > 0,f etg deux fonctions d´eveloppables en s´erie enti`ere sur ]−r;r[ et λ∈ K :
(i) λf est DSE sur ]−r;r[ (stabilit´e par multiplication par un scalaire). (ii) f+gest DSE sur ]−r;r[ (stabilit´e par somme).
(iii) f×gest DSE sur ]−r;r[ (stabilit´e par produit).
REMARQUE 9.16 : Pour un r´eelr > 0, l’ensemble des fonctions d´eveloppables en s´erie enti`ere sur ]−r;r[ est une sous-alg`ebre de F(]−r;r[,K).
D ´EFINITION 9.5 :
SoitIun intervalle de R dont0est un point int´erieur etfune fonction de classeC∞sur I, on appelle s´erie de Taylor de f en 0la s´erie enti`ere de la variable r´eelle ∑
n>0
f(n)(0)
n! x
n.
EXEMPLE 9.11 : La s´erie de Taylor de la fonctioncosest ∑
n>0
(−1)nx2n
(2n)! .
REMARQUE 9.17 : SoitI un intervalle de R dont0est un point int´erieur,f∈F(I, K) etr > 0, alors : (
fest DSE sur ]−r;r[ ) ⇐⇒(f∈C∞(]−r;r[,K)et∀x∈] −r;r[, f(x) = +∑∞ n=0 f(n)(0) n! x n).
TH ´EOR `EME : CNS POUR ˆETRE DSE PAR TAYLOR RESTE INT ´EGRAL 9.14 : Soit I un intervalle de R dont 0est un point int´erieur,f∈F(I,K) etr > 0, alors :
(
f est DSE sur ]−r;r[ ) ⇐⇒(f∈C∞(]−r;r[,K) et∀x∈] −r;r[, lim n→+∞
∫
x 0 (x−t)n n! f (n+1)(t)dt=0).REMARQUE 9.18 : Il y a plusieurs restes de Taylor `a ne pas confondre : • Sifest de classeCn+1 surIcontenantx: Rn(x) =f(x)−
n ∑ k=0 f(k)(0) k! x k=
∫
x 0 (x−t)n n! f (n+1)(t)dt.• Sifest de classeC∞et si la s´erie de Taylor converge au pointx : fRn(x) = +∑∞ k=n+1
f(k)(0)
k! x
k.
Cependant, si fest d´eveloppable en s´erie enti`ere sur ]−r;r[, les deux restes sont ´egaux pour x∈] −r;r[ et tendent vers0quandntend vers +∞. Cependant, quelques bizarreries peuvent advenir :
• Il existe des fonctions fde classeC∞ sur R dont la s´erie de Taylor converge mais pas versf. • Il existe des fonctions de classeC∞ pour lesquelles la s´erie de Taylor est divergente pourx̸=0.
130 S ´ERIES ENTI `ERES
PROPOSITION : CONDITION SUFFISANTE POUR ˆETRE DSE 9.15 :
Soitr > 0et I=]−r;r[, montrer que f de classe C∞ sur I est d´eveloppable en s´erie enti`ere surI
si∀a∈]0;r[, ∃Ma> 0, ∀n∈ N, ||f(n)||∞,[−a;a]6Ma.
EXEMPLE FONDAMENTAL 9.12 : Soitf: R → R telle quef(x) =e− 1|x| six̸=0et f(0) =0. Alorsfest bien de classeC∞ sur R et pourtant pas d´eveloppable en s´erie enti`ere.
9.3.2 : Fonctions usuelles
TH ´EOR `EME : DSE DES FONCTIONS USUELLES ( ´ENORME) 9.16 :
Il faut connaˆıtre par cœur les d´eveloppements en s´eries enti`eres des fonctions usuelles de la variable r´eelle suivantes (pourα∈ R \ N) ainsi que le rayon de convergenceR de la s´erie :
∀x∈ R, ex = +∑∞ n=0 xn n! R= +∞ ∀x∈ R, ch(x) = +∑∞ n=0 x2n (2n)! R= +∞ ∀x∈ R, sh(x) = +∑∞ n=0 x2n+1 (2n+1)! R= +∞ ∀x∈ R, cos(x) = +∑∞ n=0 (−1)n x2n (2n)! R= +∞ ∀x∈ R, sin(x) = +∑∞ n=0 (−1)n x2n+1 (2n+1)! R= +∞ ∀x∈] −1;1[, 1 1−x = +∑∞ n=0 xn R=1 ∀x∈] −1;1[, 1 1+x = +∑∞ n=0 (−1)nxn R=1 ∀x∈] −1;1[, ln(1+x) = +∑∞ n=1 (−1)n+1 n x n R=1 ∀x∈] −1;1[, −ln(1−x) = +∑∞ n=1 xn n R=1 ∀x∈] −1;1[, Arctan(x) = +∑∞ n=0 (−1)nx2n+1 2n+1 R=1 ∀x∈] −1;1[, (1+x)α = +∑∞ n=0 α(α−1). . .(α−n+1) n! x n R=1 `
A savoir retrouver assez rapidement : ∀x∈] −1;1[, √ 1 1+x = +∑∞ n=0 (−1)n(2n)! 4n(n!)2 x n R=1 ∀x∈] −1;1[, √1+x = 1+ +∑∞ n=1 (−1)n−1(2n)! 4n(n!)2(2n−1)x n R=1 ∀x∈] −1;1[, Arcsin(x) = +∑∞ n=0 (2n)! 4n(n!)2(2n+1)x 2n+1 R=1
REMARQUE HP 9.19 : Les fonctions bijectives th : R →] −1;1[ et sh : R → R admettent des r´eciproques qu’on note respectivement Argth :]−1;1[→ R et Argsh : R → R. Les d´eriv´ees de ces fonctions v´erifient respectivement Argth′(x) = 1
1−x2 et Argsh
′(x) = √ 1
1+x2 ce qui nous permet de
d´eterminer leurs d´eveloppements en s´erie enti`ere : ∀x∈] −1;1[, 1 2ln ( 1+x 1−x ) = Argth(x) = +∑∞ n=0 x2n+1 2n+1 R=1 ∀x∈] −1;1[, ln(x+√1+x2) = Argsh(x) = +∑∞ n=0 (−1)n(2n)! 4n(n!)2(2n+1)x 2n+1 R=1 D ´EFINITION 9.6 :
Pour z∈ C, on pose exp(z) =ez=
+∑∞ n=0
zn n!.
REMARQUE 9.20 : Le rayon de convergence de cette s´erie exponentielle estR= +∞.
PROPOSITION SUR L’ ´EGALIT ´E DES DEUX EXPONENTIELLES 9.17 : Pour (z, z′)∈ C2, on a exp(z+z′) =exp(z)×exp(z′).
Ainsi si (x, y)∈ R2 etz=x+iy, on a exp(x+iy) =ex(cos(y) +i sin(y)) =exeiy=ez.
REMARQUE 9.21 : Cette fonction exponentielle est bien notre fonction exponentielle !
9.3.3 : M´
ethodes de d´
eveloppement en s´
erie enti`
ere
⊙
Certaines s´eries se reconnaissent en distinguant selon le signe dex.
EXERCICE 9.13 : Rayon de convergence et somme de ∑
n>0 (−1)nxn 2n+1 . ⊙ Les s´eries +∑∞ n=0
P(n)xn se calculent en d´ecomposant P∈ C[X] sous la formeP(X) =
+∑∞ k=0 ak k ∏ i=1 (X+i).
EXEMPLE 9.14 : Rayon de convergence et somme de ∑
n>0 (n2+1)xn. ⊙ Les s´eries +∑∞ n=0 P(n) n! x
n se calculent en d´ecomposantP∈ C[X] sous la formeP(X) =+∑∞ k=0
ak k∏−1
i=0
(X−i).
EXEMPLE 9.15 : Rayon de convergence et somme de ∑
n>0
n2−3 n! x
n.
⊙
Se ramener aux fonctions usuelles est la priorit´e.
EXERCICE CONCOURS 9.16 : Petites Mines PSI 2013 Camille
Rayon de convergence et somme de ∑
n>0
n2+n+1 n+1 x
n.
⊙
On peut aussi utiliser des d´erivations ou des int´egrations, ou la m´ethode de l’´equation diff´erentielle.
ORAL BLANC 9.17 : Soit f: x 7→ e−x2
x
∫
0
et2dt, trouver une ´equation diff´erentielle lin´eaire du premier ordre v´erifi´ee parf. En d´eduire le d´eveloppement en s´erie enti`ere def.
132 S ´ERIES ENTI `ERES
COMP´
ETENCES
• D´eterminer le rayon d’une s´erie enti`ere par la d´efinition avec les croissances compar´ees.
• Trouver le rayon d’une s´erie enti`ere par minoration/majoration en l’´etudiant en certains points. • D´eterminer le rayon d’une s´erie enti`ere par encadrement/´equivalent du module du coefficient. • Trouver le rayon d’une s´erie enti`ere par la r`egle de d’Alembert.
• Maˆıtriser les op´erations sur les s´eries enti`eres et les relations associ´ees sur les rayons. • Connaˆıtre la d´erivation ou l’int´egration de la somme d’une s´erie enti`ere l`a o`u c’est possible. • Utiliser l’aspectC∞ de la sommefd’une s´erie enti`ere et la relation entre ses coefficients et f. • D´eduire des relations entre suites de l’unicit´e des coefficients d’une s´erie enti`ere.
• Savoir montrer qu’une fonction est d´eveloppable en s´erie enti`ere par ´etude du reste int´egral. • ´Etablir qu’une fonction est d´eveloppable en s´erie enti`ere par op´erations et fonctions usuelles. • Connaˆıtre par cœur les11d´eveloppements en s´erie enti`ere des fonctions les plus usuelles.
• Maˆıtriser les techniques les plus courantes pour exprimer avec des fonctions usuelles les s´eries enti`eres. • Maˆıtriser les techniques les plus classiques pour d´evelopper en s´erie enti`ere des fonctions.