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Étude des erreurs commises par des élèves thaïlandais du secondaire dans leurs productions écrites en français

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Texte intégral

(1)

SAOWANIT CHAIMUSIG

ÉTUDE DES ERREURS COMMISES PAR DES ÉLÈVES THAÏLANDAIS DU SECONDAIRE DANS LEURS PRODUCTIONS ÉCRITES EN FRANÇAIS

Thèse présentée à l'école des gradués de l'Université Laval

pour l'obtention

du grade de philosophiae Doctor (Ph.D.)

FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION UNIVERSITÉ LAVAL

QUÉBEC

MAI 1990

(2)

Mes remerciements s'adressent tout particulièrement à mon directeur de thèse, Monsieur Jean-Pierre BÉLAND, professeur au département de didactique, à la faculté des Sciences de l'éducation de l'université Laval, pour son appui constant, ses suggestions judicieuses et surtout pour sa disponibilité à mon égard, tout au long de la rédaction de cette recherche.

Je voudrais exprimer ma profonde gratitude à Monsieur Jean-Claude GAGNON, au même département, qui a bien voulu trouver le temps, malgré son programme extrêmement chargé, de lire ma thèse, d'y apporter des corrections, des suggestions importantes et des remarques précieuses. Je ne le remercierai jamais assez.

Ma reconnaissance s'adresse également au ministère de l'Education de la Thaïlande de m’avoir donné l'occasion de pousuivre cette recherche.

Et que les responsables du Service d'accueil aux étudiants étrangers du Gouvernement du Québec trouvent ici l'expression de mes sincères remerciements pour toute l'aide qu’ils ont déployée pour me permettre de travailler dans de bonnes conditions.

(3)

Résumé

Cette recherche présente une analyse détaillée des difficultés qu’éprouvent 122 élèves thaïlandais du secondaire dans leur apprentissage du français écrit Deux types de rédactions nous ont servi à dresser l’inventaire de ces difficultés : un texte libre et une composition dirigée. Nous avons posé comme hypothèse que les connaissances et les habitudes langagières que les élèves ont des structures du thaï, langue maternelle, et de l'anglais, première langue étrangère apprise à l'école, exerçaient une forte influence sur l'apprentissage de la langue française.

Après avoir fait un bref historique de la notion d'erreur en didactique des langues étrangères et après avoir comparé les systèmes morphologique, syntaxique, lexical et graphique du thaï et du français, nous avons analysé : la phrase, le groupe nominal, le groupe verbal, le groupe prépositionnel, le lexique et l'orthographe d'usage. Cet examen nous a permis de constater qu'un grand nombre de difficultés morphosyntaxiques sont attribuables à des caractéristiques structurelles intrinsèques au thaï et que plusieurs erreurs lexicales sont dues à l'interférence de l'anglais.

Nous avons aussi étudié le contenu des manuels de la méthode La France en Direct : Adaptation pour la Thaïlande, Enfin, nous avons formulé des propositions didactiques visant à accroître, chez nos élèves, la prise de conscience de certaines particularités du thaï pendant l'apprentissage de leur deuxième langue étrangère.

(4)

Dans cette recherche, nous avons analysé 122 rédactions d'élèves thaïlandais de 5e et 6e années du secondaire de cinq écoles de Bangkok afin de connaître les difficultés qu'ils éprouvent dans leur apprentissage du français écrit. Deux types de rédactions nous ont servi à dresser l’inventaire des erreurs commises par ces élèves. Le premier se compose de rédactions d'une page sur un thème au choix; le second, d'un récit à construire à partir d'une série d'images portant sur un événement

Nous avons posé comme hypothèse que les connaissances et les habitudes langagières que les élèves ont des structures du thaï, langue maternelle et de l'anglais, première langue étrangère apprise à l’école, exerçaient une forte influence sur l'apprentissage de la phrase française.

Avant d'examiner dans le détail toutes les fautes de français écrit de nos élèves, nous avons fait un bref historique de la notion d'erreur en didactique des langues étrangères. Nous avons de plus comparé les différents systèmes morphologique, syntaxique, lexical et graphique du thaï et du français de manière à bien faire ressortir les éléments linguistiques qui sont susceptibles de créer des difficultés importantes dans l’apprentissage du français.

Pour chacune des rédactions de notre corpus, nous avons analysé les paramètres suivants : la phrase (avec présentatif, avec proposition relative, avec le verbe "être", etc.), le groupe nominal (déterminants, noms, adjectifs), le groupe verbal (conjugaison, concordance des temps, adverbes), le groupe prépositionnel, le lexique et l'orthographe d'usage. Cet examen nous a permis de confirmer nos hypothèses; en effet, nous avons observé qu’un grand nombre de difficultés morphosyntaxiques sont attribuables à des caractéristiques intrinsèques à la langue thaï et que plusieurs erreurs lexicales sont dues à l'interférence de l'anglais.

Nous avons aussi étudié le contenu des manuels scolaires en usage La France en Direct. Adaptation pour la Thaïlande, afin de déterminer l'importance qu'on attribue aux notions qui créent le plus de difficulté en apprentissage du français écrit.

(5)

iv

A partir des résultats obtenus dans l’analyse de notre corpus et de l’étude des manuels scolaires, nous avons formulé des propositions didactiques visant à accroître, chez nos élèves, la prise de conscience de certaines particularités du thaï pendant l'apprentissage de leur deuxième langue étrangère, ce qui suppose d’autres choix méthodologiques et d’autres stratégies didactiques.

(6)

Remerciements...

i

Résumé...

ii

Sommaire...

iii

Table

de

matières...

I

Liste

des tableaux

...VH

Liste

des

figures

...

Vm

Introduction

Introduction...

1

Chapitre

I

1.

PROBLEMATIQUE...

4

1.1 Bref survol historique...6

1.2 Le développement de la notion d’erreur et les applications pédagogiques de leur analyse... 8

1.3 Les objectifs de la recherche...26

1.4 Les hypothèses de la recherche...27

(7)

n

1.6 Définitions...29 1.6.1 L’interférence...29 1.6.2 La compétence... 34 1.6.3 La performance...36 1.6.4 L'erreur...36 1.7 Conclusion...37

Chapitre

II

2. Le français en contexte scolaire thaïlandais... 38

2.1 La situation de l'enseignement et de l'apprentissage du français en Thaïlande...38

2.2 Le système éducatif de la Thaïlande : les régimes pédagogiques et les modalités de l'enseignement... 40

2.3 La méthode utilisée pour l'enseignement du français en Thaïlande" la France en Direct" (Adaptation)... 44

2.4 Quelques différences entre les deux langues en présence... 49

2.4.1 Caractéristiques structurelles du thaï...50

2.4.1.1 Le groupe nominal...52

2.4.1.2 Le groupe verbal... 54

2.4.1.3 Le groupe prépositionnel...59

(8)

2.4.2 Caractéristiques structurelles du français... 61 2.4.2.1 Le groupe nominal...63 2.4.2.2 Le groupe verbal... 65 2.4.2.3 Le groupe prépositionnel... 71 2.4.2.4 L’orthographe...72 2.5 Conclusion ...73

Chapitre

III

3 . METHODOLOGIE

...

74 3.1 Le corpus libre...79 3.2 Le corpus dirigé...79

3.3 Les instruments utilisés... 83

3.4 L'analyse des copies...85

3.5 L'inteiprétation des données... 87

3.6 La grille d’analyse...89

3.7 L’étude des manuels scolaires...90

(9)

IV

Chapitre IV

4.

L

’analyse

des

données

...

92

4.1 Les modalités de l'analyse... 92

4.2. Etude du corpus libre ... 95

4.2.1 La phrase... 95

4.2.1.1 Phrases à présentatif... 96

4.2.1.2 Les phrases avec des propositions relatives... 99

4.2.1.3 Les emplois de l’interrogation indirecte "si"... 100

4.2.1.4 Les structures équivalentes à celles du thaï... 100

4.2.1.5 Les phrases construites avec "être"... 107

4.2.2 Le groupe nominal...111

4.2.2.1 Les déterminants...111

4.2.2.2 Les noms... 120

4.2.2.3 Les adjectifs qualificatifs...122

4.2.3 Le groupe verbal...125

4.2.3.1 Les erreurs de conjugaison... 125

4.2.3.2 L’emploi de verbes pronominaux...128

4.2.3.3 L'emploi du temps convenable et de la concordance des temps verbaux... 131

4.2.3.4 Les adverbes de temps et les connecteurs... 139

4.2.4 Le groupe prépositionnel... 142

4.2.4.1 L'emploi erroné des prépositions...142

(10)

4.2.6. L'orthographe d’usage et la ponctuation... 150

4.3 L'analyse du corpus dirigé...152

4.3.1 La phrase...153

4.3.1.1 L'emploi d'un complément d'objet direct et indirect.. 155

4.3.1.2 Les erreurs dans l’emploi des connecteurs...155

4.3.2 Le groupe nominal... 157

4.3.3 Le groupe verbal... 159

4.3.4 Le groupe prépositionnel...161

4.3.5 Le lexique... 163

4.3.6 L'orthographe d’usage et la ponctuation... 164

4.4 Tableaux statistiques...165

4.5 Conclusion... 169

Chapitre

V

5. Propositions didactiques et suggestions... 170

5.1 Les exercices écrits proposés dans les manuels... 171

5.2. Propositions...173

5.2.1 Le choix des éléments à enseigner...173

5.2.2 La progression du contenu à enseigner... 176

5.2.3 Le choix des exercices...184

5.2.4 Le choix de la méthodologie d'enseignement...194

5.2.5 Les démarches pédagogiques... 195

(11)

VI

Chapitre

VI

6.

Conclusions

...

201

Bibliographie...

209

(12)

Liste

des tableaux

Numéros Titresdes tableaux

Pages

1 Représentationdes phrases simples

en thaï. 51

2 Présentation des morphèmes préverbaux

employés pour indiquer le temps, l'aspect, lemode

et la voix en thaï. 55

3 Tableaux des erreursrelevées de chaque

catégorie. 166-168

4 Répartitions par niveau scolaire des types

d'exercicesproposés dans les manuels. 172

5 Proposition concernant laprogression

de contenugrammatical à enseigner. 176

6 Exemple d'exercice de reconstruction. 189

(13)

VIII

Liste

des

figures

Numéros Titres des figures Pages

1 Décompositiond'une phrase en français. 63

2 Corpus dirigé. 81

3 Présentation du phénomène d'interférence

auniveau de la phrase. 110

4 Schémaexplicatif de la concordance

des temps verbaux en français. 136

5 La proportiondesexercices présentés

(14)
(15)

Introduction

Durant la deuxième moitié du XXe siècle, la didactique des langues a été influencée par des théories successives résultant des travaux de recherche en linguistique, en sociolinguistique, etc., en vue d’améliorer l’apprentissage du français.

La fin des années 60 marque, de ce point de vue, un changement notable dans la définition de l'apprentissage des langues. C'est que la langue est de moins en moins vue comme un ensemble de structures que l'élève doit apprendre à manipuler à l'aide d'exercices plus ou moins répétitifs, mécaniques et structuraux. Elle est maintenant vue dans une de ses fonctions premières, la communication. En apprentissage, on tend de moins en moins à mettre l'accent sur le code et sur les systèmes qui la composent, et on insiste davantage sur l’acquisition des emplois que l'on peut en faire en communication. Les approches pédagogiques ont été radicalement modifiées.

L’enseignement et l'apprentissage du français en Thaïlande n'échappera pas à ces bouleversements et, en particulier, en ce qui a trait à la définition de la notion d'erreur en langue écrite, qui demeure un problème très important auquel doivent faire face tous les élèves thaïlandais et tous les enseignants. Ceux-ci tenteront de prévoir et de comprendre les causes des difficultés rencontrées par les élèves pour ensuite les aplanir graduellement tout au long du processus d’apprentissage.

Parmi les nouvelles notions qu’ont apportées, dès le début de cette période, les spécialistes de l'enseignement des langues, il y eut ce qu’on a appelé "l'analyse des erreurs". Les fautes commises par les élèves dans une langue seconde ou étrangère vont désormais être considérées comme des indices observables du processus même de l'apprentissage.

(16)

Cette méthode d'analyse est fondée sur l'hypothèse que la fréquence des erreurs est proportionnelle au degré de difficulté des éléments enseignés. Les questions que cette hypothèse soulève en didactique du français langue étrangère sont nombreuses et toutes pertinentes dans le cas de la Thaïlande où les apprentissages sont fortement orientés vers la communication orale et écrite. La présence d'erreurs illustre- t-elle l'imperfection des méthodes d’enseignement du français? Celle de la performance des élèves? L'erreur peut-elle être un moyen dont se sert l’élève pour améliorer son apprentissage du français? L'examen minutieux des erreurs systématiques peut-il témoigner de la progression de l'élève et de son niveau d'apprentissage? L'analyse des erreurs donnerait-elle aussi un aperçu de la manière dont se fait le processus d'apprentissage et des moyens dont l'élève se sert pour découvrir la langue étrangère?

L'analyse des erreurs sert à décrire, à expliquer et à corriger les erreurs commises par les élèves. Elle aide aussi à mieux comprendre les processus et les stratégies d'apprentissage des langues étrangères. Ces deux orientations peuvent élucider les difficultés, les obstacles des élèves et les lacunes didactiques en vue d'un meilleur enseignement et d'un meilleur apprentissage (Porquier,1977).

Cette recherche se propose d'étudier les erreurs commises par les élèves thaïlandais du secondaire dans leurs productions écrites en français, en vue d'améliorer leur apprentissage du français écrit.

Dans le chapitre I, nous présenterons la justification de la recherche. Nous étudierons le développement de la notion d'erreur ainsi que son application pédagogique. Par la suite, nous présenterons dais l'ordre les objectifs de la recherche, les hypothèses et les limites et l'originalité de la recherche. Nous terminerons par la définition des termes employés dans cette étude afin d’éviter toute ambiguïté relative aux autres domaines.

L'étude menée dans ce chapitre est motivée par un certain nombre de facteurs. Premièrement, on trouve encore très peu de travaux dans le domaine didactique qui portent sur les erreurs commises par des élèves thaïlandais en expression écrite. Deuxièmement, la nécessité de cette étude s'inscrit dans une

(17)

3

amélioration de l'enseignement et de l'apprentissage du français. Un rapide survol des recherches existant en analyse des erreurs nous permettra d’esquisser quelques voies de solutions pour atteindre nos objectifs.

Dans le chapitre H, nous présenterons d’abord les caractéristiques propres du milieu scolaire thaïlandais concernant l'enseignement et l’apprentissage du français. Puis, nous analyserons quelques-unes des différences les plus importantes entre le thaï et le français de manière à faire ressortir les spécificités structurales qui marquent profondément le processus d'apprentissage.

Le chapitre DI sera consacré à une présentation de la méthodologie de notre recherche. Nous présenterons les données : le corpus libre et le corpus dirigé et la description des instruments utilisés pour atteindre nos objectifs.

Au chapitre IV, nous ferons l’analyse des données de notre corpus. Nous examinerons les erreurs commises par les élèves thaïlandais. Nous essayerons de déterminer les aspects linguistiques sur lesquels il faudrait insister davantage dans la pratique des exercices.

A la lumière des résultats d’analyse, nous présenterons dans le chapitre V, des propositions didactiques dites non expérimentées. Elles sont, selon nous, susceptibles d'améliorer l'apprentissage de l'écrit pour les élèves thaïlandais.

Nous concluons en mettant en évidence nos constatations concernant l'enseignement et l'apprentissage du français en contexte scolaire thaïlandais.

Nous espérons que les résultats de la présente recherche répondront aux besoins des enseignants dont l'un des rôles consiste à aider les élèves à acquérir une maîtrise suffisante de l'expression écrite.

(18)

1.

PROBLEMATIQUE

1.1 Bref survol historique.

1.2 Le développement de la notion d'erreur et les applications pédagogiques de leur analyse.

1.3 Les objectifs de la recherche. 1.4 Les hypothèses de la recherche.

1.5 Les limites et l'originalité de la recherche. 1.6 Définitions : 1.6.1 L'interférence. 1.6.2 La compétence. 1.6.3 La performance. 1.6.4 L'erreur. 1.7 Conclusion.

(19)

4

Chapitre

I

1.

Problématique

L’étude des erreurs dans les productions écrites des élèves thaïlandais n'a fait l'objet d'aucune recherche en didactique des langues. La recherche le plus significative qui se rapproche de ce que nous voulons entreprendre a été effectuée par Pitaktham Supavej (1986), Analyse linguistique et didactique de l'intervention du thaï (Ll) et de l'anglais (L2) dans l'enseignement/apprentissage du français (L3). Pitaktham Supavej a étudié l'utilisation du thaïlandais (Ll) et de l'anglais (L2) dans l'enseignement et l'apprentissage du français (L3) en Thaïlande et plus particulièrement les relations de la langue maternelle avec l'anglais et le français qui sont respectivement la première et la deuxième langue étrangère apprises en Thaïlande.

L'idée de la réintroduction de la langue maternelle dans l'apprentissage des langues étrangères et la recherche de l'efficacité de l'harmonisation entre la langue maternelle et des langues étrangères, dans la perspective d'une linguistique de l'énonciation qui prend en compte l'activité réelle du langage, ont amené l'auteur à s'intéresser à l'utilisation linguistique et didactique des deux premières langues au cours de l'apprentissage du français. Elle tente de découvrir certaines sources de difficulté ou de facilitation dans l'apprentissage du français. Plus précisément, elle veut découvrir comment un élève thaïlandais, vivant très loin des pays dont il apprend la langue, peut construire son système de représentation des mécanismes du français, langue cible, à partir de sa langue maternelle, le thaï (langue source ou Ll), et à partir de la première langue étrangère apprise depuis environ 5 à 8 ans, l’anglais (L2). Elle cherche à savoir comment les systèmes de représentation de ces deux langues peuvent constituer un apport favorable à l'apprentissage du français. L’auteur, qui s'intéresse surtout aux temps verbaux, met l'accent sur le passé composé, l'imparfait et le plus- que-parfait. La majorité des erreurs rencontrées dans le corpus des productions d'élèves portent, selon elle, sur ce point.

(20)

L'auteur a essayé de mettre en évidence les caractéristiques générales de ces trois langues dans leurs différences aussi bien que dans leurs similitudes en signalant les éléments positifs et négatifs pour l'apprentissage du français par les élèves thaïlandais.

Pitaktham Supavej (1986) a fait une analyse contrastive des trois langues dans la perspective de la grammaire traditionnelle. Ensuite, elle a étudié le problème spécifique des temps du passé dans les trois langues. Enfin, elle a fait une analyse des erreurs des temps verbaux relevées dans le corpus établi par elle-même et composé des travaux de 127 élèves et de 53 professeurs de thaï. Elle a analysé certains points grammaticaux des trois langues et a montré que, malgré leurs divergences et leurs parallélismes, il est possible de mener à bien l’enseignement du français si l’on utilise une approche conceptuelle. Dans la plupart des cas, selon l’auteur, l'anglais constitue un élément de "transition" au français, mais son influence est à l'origine d'interférences. Et le thaï, bien qu'il manifeste un grand écart catégoriel par rapport au français, possède quelques éléments similaires que l'on n'imagine pas à première vue.

En somme, Pitaktham Supavej (1986) a montré qu’il y a une interrelation entre les apprentissages grammaticaux de Ll, L2 et L3 et que le français peut aider à améliorer l’enseignement et l'apprentissage de L2 et de Ll. De même, la prise en compte de Ll et L2 peut aider à l’enseignement de L3. A partir de cette constatation, Pitaktham Supavej a cherché une explication théorique à l'intérieur des systèmes de langue concernés en tenant compte seulement du temps et des aspects verbaux des trois langues d’après la théorie de l'énonciation et en utilisant tour à tour les travaux de Benveniste et l'essai de formalisation de Culioli. Pitaktham Supavej ne s'est pas intéressée à l’étude de ce qui est le sujet de notre recherche : pourquoi les élèves ne sont pas à l'aise dans la communication écrite malgré trois années d'apprentissage du français.

Nous voulons découvrir les erreurs commises en expression écrite en français chez les élèves thaïlandais, déterminer ce sur quoi elles portent et décrire comment elles sont conditionnées par la langue maternelle et éventuellement par

(21)

6

l’anglais. Plus intéressant encore, dans quelle mesure l'analyse des erreurs peut aider à résoudre les problèmes de l'enseignement de l'écrit et éventuellement à rejustifier le programme de l'enseignement du français au niveau secondaire en Thaïlande ?

La lecture des recherches en analyse des erreurs et de leurs applications est d'un grand intérêt pour nous. Historiquement, les erreurs ont été étudiées par Charles C. Fries (1945), ensuite par Weinreich (1953) puis par Lado (1957). Cette orientation est, par la suite, devenue un objet d’intérêt pour la recherche à cause de ses implications pratiques. Corder(l967,1971), Selinker (1972), Richards (1971 a, b et c), Nemser (1971) et d'autres s’y sont largement intéressés.

1.1

Bref

survol

historique

Nous nous proposons dans ce qui suit de faire le point sur l’évolution des concepts en analyse des erreurs et de leurs implications pédagogiques.

Pendant son apprentissage d’une langue étrangère, l’apprenant produit des erreurs qui sont souvent jugées inacceptables par le locuteur natif. Elles sont appelées "erreurs’’, "fautes", "déviations" ou même "variantes". Le terme "erreur" est généralement employé pour désigner les caractéristiques distinctives de la performance de l'apprenant. Les erreurs de l'apprenant ont été utilisées pour mesurer le degré de succès de l'apprentissage et de l'enseignement.

D’après Porquier (1977), l'analyse des erreurs sert à décrire, à expliquer et à corriger les erreurs. Elle aide aussi à mieux comprendre les processus et les stratégies d'apprentissage des langues étrangères. Ces deux orientations peuvent élucider les obstacles auxquels se heurtent les élèves et améliorer leur processus d'apprentissage. On pourrait affirmer, comme le démontrait Corder (1967,1980), que, aussi bien dans l’apprentissage d’une langue étrangère que dans celui de la langue maternelle, l'erreur est inévitable, normale et nécessaire. Il considère les erreurs comme "breaches of code" (Corder, 1973, p. 259). Les erreurs servent effectivement :

(22)

"[...] First to the teacher, in that they tell him, if he undertakes a systematic analysis, how far towards the goal the leamer has progressed and, consequently, what remains for him to leam. Second, they provide to the researcher evidence of how language is leamed or acquired, what strategies or procedures the leamer is employing in his discovery of the language. Thirdly,... they are indispensable to the leamer himself, because we can regard the making of errors as a device the leamer uses in order to leam. It is a way the leamer has of test in his hypothèses about the nature of the language he is leaming. The making of errors then is a strategy employed both by children acquiring their mother tongue and by those leaming a second language."

(Corder, 1967, p. 167)

Pour Strevens (1964, cité par Besse et Porquier, 1981, p. 65), l'analyse des erreurs a un double objectif : l’un théorique, mieux comprendre les processus d'apprentissage d'une langue étrangère; l'autre pratique, améliorer l’enseignement. L'analyse systématique des erreurs constantes à l'aide des catégories et des techniques de la linguistique moderne ouvre un champ fécond aux recherches ultérieures. En se concentrant sur les points de difficulté les plus évidents, elle apporte une contribution certaine à l'enseignement des langues, elle offre une solution de rechange qui peut porter fruit plus vite.

Les résultats de ces procédures fournissent une rétroaction sur la méthode et sur la technique d'enseignement ainsi que sur les stratégies d’apprentissage, rétroaction à partir de laquelle on peut, selon nous, organiser de nouvelles stratégies, autrement dit des démarches pédagogiques appropriées pour la classe du français.

(23)

8 Corder (1973, p.257) énonce :

Whilst the nature and quality of mistakes a leamer makes provide no direct measure of his knowledge of the language, il is probably the most important source of information about the nature of his knowledge. From the study of his errors we are able to infer the nature of his knowledge at that point in his leaming career and discover what he still has to leam. By describing and classifying his errors in linguistic terms, we build up a picture of the features of the language which are causing him leaming problems. In this respect the information we get is similar to that provided by contrastive analysis. Error analysis thus provides a check on the prédictions of bilingual comparisons, and inasmuch as it does this, it is an important additional source of information for the sélection of items to be incorporated into the syllabus".

(Corder,1973, p. 257)

1.2

Le

développement

de

la

notion

d

’erreur

et

les

applications

pédagogiques

de leur analyse

Beaucoup de recherches ont été faites sur l'analyse des erreurs. Plusieurs champs ont été simultanément explorés et certains noms y sont attachés. Nous allons étudier l'évolution des conceptions de l'analyse des erreurs dans l'apprentissage d'une langue étrangère.

Bally (1930) a énoncé l'idée de la maîtrise de la langue maternelle comme base préparatoire linguistique pour l’apprentissage d'une langue étrangère. Il avait entrevu que

(24)

"C’est en cultivant à fond les ressources et les ressorts de la langue maternelle qu'on pourrait le mieux préparer l'apprentissage des autres idiomes : ceux-ci devraient bénéficier des notions générales que l’idiome natal permet seul d'approfondir."

(Bally 1930, cité par Roulet 1980,p.5)

En 1945, le linguiste américain Charles C. Fries, dans son étude intitulée Teaching and Leaming English as a Foreign language. formulait, pour la première fois, l'idée de l'analyse des erreurs en déclarant que les matériaux pédagogiques les plus efficaces sont ceux qui sont basés sur une description scientifique de la langue à apprendre, comparée à une description parallèle de la langue maternelle de l'apprenant. Il explique que les problèmes fondamentaux de l'apprentissage ne sont pas dus aux traits de la nouvelle langue considérés en eux-mêmes, mais en premier lieu, à l'ensemble particulier des habitudes nées au cours de l'acquisition de la première langue.

Bien que cette idée soit de toute évidence en germe depuis le début du XXe siècle, c'est à partir de cette date, 1945, que se dégage l'un des concepts les plus importants de l'analyse des erreurs, celui de l’interférence linguistique.

C'est à partir des années 50 que l'on a établi des grammaires comparées d'un nouveau genre afin de faciliter l'apprentissage des langues étrangères et, d'une manière générale, le passage d’une langue à l'autre.

En 1950, à l'époque où les méthodes audio-orales et structuro-globales étaient en usage, la conception de l’erreur est dite négative. Elle était conçue comme une tare, une violation du système linguistique de la langue cible que le professeur et l'élève devaient chercher à éviter. La cause essentielle des erreurs est due à la non- correspondance entre la langue maternelle et la langue cible.

(25)

10

En 1953, le linguiste Weinreich propose une analyse systématique des performances d’élèves de langue seconde, illustrant et expliquant les manifestations de l’interférence linguistique. Dans son livre Language in contact (1953) intitulée "Multiple Language Contact as a Favorable Field of Study", il explique :

"The theory of interférence as well as the methodology of studying can profit substantially from investigations of multiple language contact, that is, of cases in which the same language has been in contact with two or more others. With the structure of the one language constant, the mutual influences of it on the others and vice versa can be described in fully comparable terms, and the likelihood of change convergence or of similarity due to other uncontrollable causes is considerably reduced."

(Weinreich 1953, p.l 13)

En 1957, le linguiste Lado dans son livre Linguistics Across Cultures a innové en proposant "l'analyse contrastive" appelée parfois "l'analyse différentielle", qu'il définit ainsi:

"The plan of the book rests on the assumption that we can predict and describe the patterns that will cause difficulty in leaming, and those that will not cause difficulty, by comparing systematically the languages and culture to be leamed with the native language and culture of the student."

(Lado,1957, p.8)

L'analyse contrastive a été effectivement définie comme étant la comparaison point par point des systèmes des deux langues en vue de déterminer leurs ressemblances et leurs différences. Elle consiste à comparer deux systèmes

(26)

linguistiques dans le but d’en déterminer les similitudes et les différences. Les points de différence sont considérés comme les causes d'erreurs. L'analyse contrastive est basée sur l'hypothèse voulant qu'il y ait interférence de la langue maternelle lors de l'apprentissage d'une langue étrangère. Plus la structure de la langue maternelle diffère de la structure de la langue étrangère, plus l'apprenant rencontre des difficultés d'apprentissage.

Lado (1957) a élaboré une théorie de l'interférence, selon laquelle l'apprenant tend à transférer dans la langue étrangère, en production et en réception, les caractéristiques formelles et sémantiques similaires de la langue maternelle. Bref, l'analyse contrastive est basée sur l'hypothèse voulant qu'il y ait interférence de la langue maternelle lors de l'apprentissage d'une langue étrangère.

L'analyse contrastive suppose au départ que les langues sont différentes. Et l'étude d'une langue étrangère ne pose pas le même problème que l'apprentissage de la langue maternelle. La finalité pédagogique de l’analyse contrastive se fonde sur deux grandes classes d'hypothèses, les unes linguistiques, les autres psychologiques. H y a trois hypothèses linguistiques :

1) C'est la description structurale des langues qui fournit les meilleurs instruments pédagogiques pour l'enseignement d'une langue seconde.

2) La compréhension systématique des structures phonologiques, morphologiques, syntaxiques et lexico-sémantiques de la langue maternelle et de la langue seconde permet d’expliquer tous les problèmes d'apprentissage.

3) En se fondant sur ces comparaisons, on peut établir une progression dans l’apprentissage en tenant compte des similitudes et des différences entre les deux langues, la langue maternelle et la langue seconde.

Les hypothèses psychologiques posent le problèmes de la qualité du transfert. Besse et Porquier (1981) expliquent qu'en production et en réception, les élèves tendent à transférer dans la langue seconde les caractéristiques intrinsèques de

(27)

12

la langue maternelle. Ce qui est similaire dans les deux langues est facile à apprendre, donc facilement transférable; c'est le transfert positif. Ce qui est différent est difficile à apprendre et aboutit à un transfert négatif, c’est-à-dire à une interférence et donc à des erreurs. Ces erreurs sont les manifestations de difficultés.

L'analyse contrastive ne fait pas partie intégrante de l’analyse des erreurs. Cependant, les échecs et la mise en question de l’analyse contrastive servent de point de départ à l'analyse des erreurs, car son objectif, clairement énoncé, est de décrire et d'expliquer les erreurs et les difficultés dues à l'interférence de la langue maternelle. En effet, depuis la parution de "Linguistics Across Cultures" de Lado (1957), de nombreux linguistes pensaient que l'analyse des erreurs pourrait aider à résoudre ces problèmes. D'après Lado, dans le processus de l'acquisition d'une langue étrangère, la langue maternelle ne peut qu'influencer la langue seconde ou étrangère.

Depuis que l’analyse des erreurs a vu le jour au début des années 60, les didacticiens ont commencé à se rendre compte que l'analyse contrastive, qui cherche à décrire les erreurs d'apprentissage, n'est pas efficace pour l'enseignement des langues étrangères. Du moins sous sa version originale, elle n'arrive pas à rendre compte de certaines erreurs, qui ne sont pas imputables à l'influence de la langue source ni à la dissemblance des deux systèmes. Par exemple; le cas d'un élève qui prononce une phrase ou produit une forme qu'il n’a jamais entendue de la bouche d'un locuteur natif. Le cadre d'une théorie de l'analyse contrastive ne peut expliquer de telles erreurs.

Ainsi, l'analyse contrastive paraît très limitée sur certains points. Elle mène les chercheurs à mettre en lumière des différences et leur permet de reformuler des erreurs. En pratique, la comparaison risque parfois d'induire en erreur, car les fautes potentielles les plus évidentes ne sont pas toujours celles qui se réalisent, pour la simple raison que la trop grande différence de structure exclut souvent toute possibilité d’erreur, alors que la similarité partielle en est génératrice.

Ainsi, à partir de l'inefficacité de la théorie de l’analyse contrastive, beaucoup de critiques ont été formulées :

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1) On a observé qu’un bon nombre d'erreurs prévisibles par la théorie, ne se produisaient pas, en réalité, ou se produisaient rarement ou seulement à certains stades de l'apprentissage ou encore selon les individus, les circonstances, les méthodes employées ou selon les exercices. (Gradman, 1971)

2) On a remarqué que bien des erreurs commises dans une langue seconde étaient aussi fréquentes en langue maternelle. (Jackson et Whitman, 1971, Oller, 1972)

3) On s'est aussi rendu compte que les erreurs imputées à l’interférence se retrouvaient chez les élèves dans leur langue maternelle ou dans certaines variétés de la langue seconde. (Sciarone, 1970)

4) La notion de transfert, positif ou négatif, s'est avérée très difficile à manipuler en recherche. C’est que plusieurs processus d'apprentissage peuvent se combiner pour former un réseau et permettre une production d'énoncés , corrects ou non, en langue étrangère sans qu'il soit possible de démêler la part respective du transfert positif ou de l’interférence. (Chau, 1975)

5) H est beaucoup plus difficile qu'il n'y paraît à première vue de démêler ce qui est "semblable" et ce qui est "différent" entre deux langues données. (Gradman, 1971)

6) Certaines erreurs ne sont pas dues à la langue maternelle, mais aux différentes hypothèses élaborées dans l'apprentissage de la langue cible selon le cas. (Jackson et Whitman, 1971)

Oller (1972) considère cette méthode comme un outil important de recherche sur les notions de transfert et d'interférence mais refuse d'y voir un moyen pédagogique destiné à l'enseignement des langues étrangères :

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"We should be careful not to under-estimate its importance as a research tool but we should note that as a basis for a total foreign language program, contrastive analysis is decidedly inappropriate."

(Oller,1972, p. 97)

Selon Nemser et Slama Cazacu (1970), l'analyse contrastive procède comme si la langue maternelle et la langue seconde se rencontraient à l'intérieur de l'apprenant, comme s'il s’agissait de systèmes statiques. En plus, on suppose que ces deux langues coexistent chez l'individu. Or, en réalité, l'apprenant n'intériorise la langue cible que petit à petit. La langue maternelle et la langue seconde ou étrangère ne se rencontrent jamais chez l’apprenant comme des entités complètes. Ainsi, l'analyse contrastive ignore ce qui se passe pendant l'apprentissage.

Jackson et Whitman (1971 et 1972) ont effectué une étude portant sur les difficultés d'apprenants japonais qui étudient l’anglais. Ils ont constaté que :

"In term of the capacity of contrastive analyses to make accurate prédictions, it must be concluded that the contrastive analyses fails utterly to predict problems that Japanese students would hâve...".

(Jackson et Whitman, 1971, p. 8)

Certains chercheurs essaient d’associer une analyse des erreurs à l'analyse contrastive; Py (1975) entre autres, tout en réaffirmant la complémentarité des deux méthodes, attribue à l'analyse des erreurs un rôle encore plus spécifique :

"Pour notre part, nous estimons qu’il s'agit de deux démarches complémentaires dont la mise en oeuvre concertée devrait permettre une approche efficace des problèmes d'apprentissage [...]. L'analyse contrastive

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fournit un inventaire des points communs ou divergents. L’analyse des erreurs permet d’attribuer un coefficient de difficulté à chaque type de divergence.”

(Py, 1975, p. 26)

Ainsi, le besoin d'une analyse des erreurs se fait sentir. Pourtant, l’analyse des erreurs ne rejette pas les aspects de l'analyse contrastive. Toujours, elle considère les erreurs comme des évidences de la recherche par l’apprenant de certaines irrégularités dans la langue, de l’application surgénéralisée d'une règle qui a des restrictions d'usage dans des contextes déterminés.

Catford (1968) explique que l'analyse des erreurs délimiterait avec précision les zones de difficulté propres à un groupe donné d'apprenants alors que l’analyse contrastive expliquerait les raisons de ces difficultés. Bref, l'analyse contrastive fournit un inventaire des points communs ou divergents tandis que l’analyse des erreurs permet d’attribuer un coefficient de difficulté à chaque type de divergence.

L'idée de l'analyse des erreurs est devenue un objet d’intérêt pour la recherche à cause de ses implications pratiques. Elle a suscité une intense activité dans toutes les directions susceptibles d’intéresser l'enseignement des langues.

Considéré comme le premier linguiste à réévaluer les erreurs de l'apprenant, Corder (1967), dans son article intitulé The Significance of the leamer's Errors. montre que les erreurs d'apprentissage, aussi bien celles de langue maternelle que celles de langue étrangère, constituent un phénomène naturel, inévitable et nécessaire. Elles reflètent le montage, l'élaboration, la construction progressive d’un programme intériorisé, que l'on appelle une interlangue. Pour Corder, la connaissance linguistique de l'apprenant est loin d'être identique à la compétence du locuteur natif. Cela n'empêche pas que la première est semblable à la seconde de sorte que, dans les deux cas, la compétence peut être considérée comme ce que Corder a appelé "le générateur" des énoncés. Bien que la compétence de l'apprenant évolue d'une façon

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permanente et le plus souvent même à un rythme plus mouvementé que celle de l'enfant qui apprend la langue maternelle, elle représente à chaque moment un système que Corder (1981) a appelé "un état de dialecte".

Dans son "Dialecte Idiosyncratique", Corder (1971) considère la langue maternelle et la langue cible comme dialectes. Il a parlé aussi de "l'idéolecte", qui implique un dialecte personnel. H considère "l'idéolecte" comme un mélange de plusieurs dialectes où se trouve une série de règles du dialecte social. Par contre, dans ce qu'il appelait "le dialecte idiosyncratique", quelques règles sont particulières à un individu.

Dans son article intitulé "Idiosyncratic Dialects and Error Analysis", Corder (1971, p. 147) explique que le langage de l'apprenant en langue seconde est une sorte de "dialecte". Il base cette hypothèse, premièrement, sur le fait que ce langage est systématique et que par conséquent, il a une grammaire propre. Deuxièmement, le langage de l'apprenant est en concordance avec quelques phrases et structures de la langue cible. Donc, ces deux langues devraient, selon lui, partager quelques règles grammaticales. Le langage de l'apprenant est considéré comme dialecte de la langue cible. Corder appelle ce phénomène un "dialecte idiosyncratique". Chaque dialecte a des règles de grammaire, particulières à l'individu qui le parle. Ces règles ne peuvent pas s'expliquer par les règles de grammaire de la langue en question. H y a des marques distinctes de ces dialectes qui ne sont pas facilement interprétables et qui ne sont pas stables. Corder distingue quatre catégories de dialectes idiosyncratiques : la première est le langage des poèmes; la deuxième, la performance d'un aphasique, et la troisième, le langage de l'enfant en train d'apprendre sa première langue. La quatrième est celle de l'apprenant d'une langue seconde. Les dialectes idiosyncratiques se produisent quand l'élève ne connaît pas toutes les règles de la langue cible. Il se crée son propre système pour pouvoir s'exprimer et communiquer. Les phrases "fautives" commises par l'élève sont idiosyncratiques.

Dans son article "Error Analysis", Corder (1973) a regroupé ses idées et y a ajouté quelques précisions. Il fait une distinction entre les erreurs nonsystématiques et les erreurs systématiques. Les premières impliquent l'utilisation incorrecte du code de la langue cible tandis que les deuxièmes impliquent la méconnaissance des règles

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propres à la langue. Les erreurs systématiques se produisent quand l’apprenant ne connaît pas les règles propres à la langue cible. Les erreurs nonsystématiques relèvent de la performance tandis que les erreurs systématiques appartiennent à la compétence.

En ce qui concerne la langue seconde, le dialecte idiosyncratique se définit comme suit :

"[...] it has a grammar, and is, in principle, describable in term of a set of rules, some sub-set of which is a sub-set of the rules of the target social dialect. His dialect is unstable...and is not ...a "language” in that its conventions are not shared by a social group, and lastly many of its sentences présent problems of interprétation to any native speaker of the target dialect"

(Corder 1981, p. 17)

Pour Corder (1973), l'analyse des erreurs d'apprenants présente un double intérêt pragmatique de sorte que les erreurs fournissent une rétroaction. Elles donnent à l'enseignant des informations sur l'efficacité du matériel didactique qu'il emploie ainsi que sur sa pratique didactique. Avec un nouveau groupe d’apprenants, elle fournit l'information nécessaire à l'élaboration d'un cursus rectificatif.

Par ailleurs, Corder (1967) considère même l'erreur comme un moyen dont se sert l’apprenant pour favoriser son apprentissage :

"We can regard the making of errors as a device the leamer uses in order to leam. It is a way the leamer

has of testing his hypothèses about the nature of the language he is leaming."

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18

Corder (1967) rapporte deux points de vue différents concernant les erreurs des apprenants en langue étrangère. Le premier voudrait que la présence d’erreurs soit la preuve de l’imperfection des méthodes actuelles de l'enseignement Le seconde voudrait que les erreurs soient inévitables.

Néanmoins, l'analyse des erreurs, selon Corder, poursuit deux objectifs: l'un théorique, qui vise à mieux comprendre les processus complexes de l'apprentissage d'une langue étrangère et l'autre, pratique, qui s'intéresse à l'amélioration de l’enseignement des langues étrangères.

La première recherche de Corder (1967, 1971) sur l'analyse des erreurs a été développée plus tard par Richards (1971 a et b), par Nemser (1971) (les systèmes approximatifs de communication), par Selinker (1972 a) (la description d’interlangue) et par d'autres que nous allons ultérieurement étudier. Ces études ont mis effectivement en lumière un certain nombre de problèmes spécifiques à l’apprentissage et à l'acquisition d'une langue étrangère.

L'analyse des erreurs a suscité une intense activité dans toutes les directions susceptibles d'intéresser l’enseignement des langues. En 1971, Richards (1972) a souligné le concept d' "Interlangue" et celui de "fossilisation" de Selinker. Les erreurs, selon lui, sont principalement dues à l'interférence, à la surgénéralisation et aux stratégies de communication, comme il l'écrivait lui-même :

"[...] ...why people who speak second language may not speak or write them with native-speaker like fluency,... that déficiences in their knowledge may be the results of interférence, the use of aspects of another language at a variety of levels, of strategies of leaming such as overgeneralization and analogy by means of which the leamer tests out his hypothèses about the structure of the language; of strategies of assimilation, in which the leamer makes his leaming task easier; and of strategies of

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communication, whereby the learner adapts what he knows into an efficient communication model, producing and optimal utility grammar ffom what he knows of the language."

(Richards 1971 (c), p. 23)

Richards et Oller (1973) expliquent qu'il existe, dans le processus d'apprentissage d'une langue étrangère, trois stratégies : une surgénéralisation d'une règle analogue, des stratégies d'assimilation qui rendent la tâche d'apprentissage plus facile et des stratégies plus générales de communication. Pour lui, l'interférence de la première langue n’est pas un facteur important pour expliquer ce qui est exprimé dans la langue seconde ou étrangère.

En plus de ces erreurs interlinguales, il existe aussi des erreurs intralinguales et développementales. Ces erreurs sont communes à tous ceux qui apprennent une langue cible. L'origine de ces erreurs est probablement dans le système de la langue cible même.

Par ailleurs, il énonce aussi les stratégies d'acquisition de l'apprenant et les méthodes d'enseignement comme causes possibles des erreurs. Ce sont la surgénéralisation, l'ignorance des contraintes linguistiques, l'application incomplète ou partielle des règles et la création de fausses hypothèses (Richards a et c, 1971). Il parle aussi de deux autres sources d'erreurs : les irrégularités dans le système de la langue cible et les erreurs résultant des méthodes d'enseignement.

Nemser W. (1971) a énoncé "les systèmes approximatifs" de l'apprenant. Dans la situation d'apprentissage d'une langue étrangère, Nemser considère la langue source de l'apprenant, la langue cible et l'état de langue de l'élève dans son apprentissage de la langue cible comme des "systèmes approximatifs", qu'il définit comme suit :

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”[...] le système linguistique déviant provisoirement utilisé par l’apprenant dans son effort de parler la langue cible.”

(Nemser,1971, p.116)

Ces systèmes approximatifs sont, selon Nemser (1971), des indices de stages successifs de compétence. A titre explicatif, l’état de langue de l'apprenant est, à un certain moment, un système structuré différent de la langue source et de la langue cible. L'état approximatif est constitué d'une succession d'états, les uns mieux rapprochés de la langue cible que les autres. Dans certaines situations, les états de langue des apprenants de même compétence coïncident, grosso modo, avec des variantes dues aux différences de styles d'apprentissage :

"The speech of a learner, according to the assumption, is structurally organized, manifestation of the order and cohesiveness of a System, although on frequently changing with a typical rapidity and subject to radical reorganization through the massive intrusion of new éléments as leaming proceeds. As such learner speech should be studied not only by référencé to second language and target language but in its own term as well."

(Nemser 1971, p. 116)

De son point de vue, le système approximatif de l’apprenant varie en fonction de sa compétence à la langue cible et en fonction d'autres facteurs tels que les expériences d'apprentissage antérieures, la fonction de la langue cible pour l'apprenant, les caractéristiques personnelles comme l'intelligence, la motivation, etc. Ce système approximatif n'est pas stable. Il change constamment, mais à chaque étape, l'élève intériorise systématiquement un nouveau vocabulaire, de nouvelles structures. Selon Nemser, il faut analyser ce système en lui-même et non pas en

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rapport à la langue de départ ni à la langue cible. Cependant, il n'a pas donné de précisions sur une méthodologie d'analyse possible.

Selon lui, les erreurs que fait celui qui apprend une langue étrangère sont systématiques. Elles sont révélatrices de sa compétence transitoire. Cette compétence constitue un système que l'on peut tenter de décrire en termes de règles. Ce système est dit approximatif.

Strevens (1971) ne considère pas l'erreur comme inévitable ou nuisible mais, bien au contraire, comme constituant les caractéristiques de la progression de l'apprentissage. L'examen minutieux des erreurs systématiques témoignerait de la progression de l'apprenant et de son stade d'apprentissage. L'analyse des erreurs donnerait aussi un aperçu de la façon dont se fait le processus d'apprentissage et des moyens dont se sert l'apprenant pour découvrir la langue étrangère :

"Error-analysis has suddenly found a new importance, [...] it has suddenly become a vital source of information about the progress of a learner towards his eventual compétence in the language, and the crucial component in our search for adéquate théories of language leaming and language teaching."

(Strevens, 1971, p. 6)

Dans son article intitulé "Language transfer" (1969), Selinker a formulé une hypothèse, semblable à celle de Corder, en utilisant le terme "interlangue". Il a mis en cause le transfert des structures de la langue maternelle à la langue seconde. L'apprenant se construit un système de comportement verbal structuré, où l'on retrouve des erreurs et des non-erreurs, par lequel il essaie de communiquer dans la langue cible.

En 1972, Selinker a énoncé le concept d'interlangue qu’il définit comme suit :

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22

"The seperate linguistic System based on the observable output which results from a leamer’s attempted production of a target language norm.”

(Selinker,1972, p. 214)

Pour observer ce phénomène, Selinker a fait l’étude d’énoncés produits par des étudiants israéliens qui apprennaient l'anglais. H a observé qu'il existait trois types de transfert syntaxique :

1) positif : lorsque les structures sont les mêmes; dans ce cas, il n'y a pas d'erreurs;

2) négatif : les structures diffèrent, il y a donc erreur.

3) neutre : on ne peut pas tirer de conclusions significatives.

Ce concept rappelle celui de dialecte idiosyncratique de Corder (1981) et celui des systèmes approximatifs de Nemser (1971) mentionnés plus haut. Il réfère aux processus de reconstitution et de reconstruction qui surviennent dans l'apprentissage et qui engendrent des états intermédiaires approximatifs de la langue cible. Selinker (1972) a appelé ce phénomène "interlangue" :

"[...] a dialect whose rules share characteristics of two social dialects of languages whether these languages themselves share rules or not"

(Selinker, 1972, p. 214)

En ce qui concerne la description linguistique des erreurs, on regroupe sous le titre d'erreurs intralinguales : les processus de surgénéralisation des règles de la langue étrangère, les stratégies d'apprentissage et celles de la communication. On entend ainsi couvrir plusieurs phénomènes : la surgénéralisation, les fausses

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hypothèses sur la langue cible, l'application incomplète d'une règle et la méconnaissance des restructurations de certaines règles.

Selinker conçoit donc l'interlangue comme un système dynamique qui implique les deux systèmes linguistiques, celui de la langue maternelle et celui de la langue cible. Il conçoit le système d’interlangue comme le produit du processus psycholinguistique de superposition de parties des systèmes de la langue maternelle et de la langue cible, autrement dit, d'interaction entre ces deux systèmes linguistiques. Pour lui, l'étranger parle toujours une interlangue qui représente par rapport à la langue cible un système approximatif, en expansion sans doute, mais qui n'égalera jamais le système linguistique du locuteur natif.

Selinker explique que cette interlangue met en jeu certains processus psycholinguistiques qui se ramènent aux cinq processus suivants:

1) Le transfert des éléments de la langue maternelle à l’interlangue (first language transfer);

2) Le transfert d'habiletés ou le transfert des habitudes d'apprentissage (transfer of training);

3) Les stratégies d'apprentissage d'une langue seconde : il s'agit des stratégies propres à l'apprenant utilisées pour intérioriser les éléments de la langue cible (strategies of second language leaming);

4) Les stratégies de communication dans une deuxième langue : l'apprenant a ses propres stratégies pour communiquer dans la langue cible avec des locuteurs natifs. A titre explicatif, l’apprenant formule ses phrases de façon à éviter l'emploi des formes dont il ne connaît pas les règles (strategies of second language communication);

5) La surgénéralisation des traits de la langue seconde, plus précisément, des règles et des éléments sémantiques de la langue cible: il s'agit de

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24

l'application d'une règle où elle ne devrait pas être appliquée, mais toujours à l'intérieur de la même catégorie grammaticale ou d'un même champ sémantique (overgeneralization of target language rules).

Ces cinq processus en langue étrangère correspondent à cinq types d'erreurs: des erreurs d'interférence de la langue maternelle, des erreurs imputées à l'enseignement, des erreurs de stratégies d’apprentissage et de stratégies de communication en langue cible.

Un autre concept introduit par Selinker est celui de "fossilisation". Cela implique certaines erreurs plus résistantes en dépit du temps consacré par l'élève à l'apprentissage et à l'utilisation de la langue étrangère. Pour Selinker, la notion d'interlangue se justifie principalement à partir de l'observation qu'il existe des formes fautives fossilisées dans la langue des apprenants, autrement dit dans leur langue maternelle, quel que soit leur degré de compétence en langue seconde. L'apprenant en langue cible garde toujours, dans sa langue apprise, des éléments grammaticaux, des prononciations, des types de phrases qui n'appartiennent pas à la langue seconde, mais qu'il utilise de façon courante. L'interlangue se définit donc comme la langue dont se sert l'apprenant pour communiquer en langue seconde à un stade ou à un autre de son apprentissage.

Nous remarquons que, d'après les études historiques, toutes les conceptions ont ceci de commun que celui qui apprend une langue étrangère, soit par la voie d'un contact naturel (informai leaming setting), soit dans le cadre d'un enseignement (formai educational setting), développe au niveau cognitif un système de règles qu'il met à l'épreuve chaque fois qu’il se détermine à énoncer une pensée ou un sentiment dans la langue étrangère,

" The hypothèses is that the learner is creating for himself and account of the structural properties of the target language, about its grammar, in other words, on

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the basis of his interaction with the data he is exposed to."

( Corder, 1976, p. 21)

Dans l’ensemble, toutes les recherches faisant appel à l'analyse des erreurs ne peuvent apporter, pour l’instant, de réponse précise à l'enseignement des langues. Mais elles dénotent néanmoins une tendance à concevoir l’erreur comme un indice important du cheminement de l'apprentissage des langues étrangères. Toutefois, l'analyse des erreurs peut apporter, directement et indirectement, une contribution importante à l'enseignement des langues :

1) "dans l'amélioration des descriptions pédagogiques;

2) dans la modification des attitudes des pratiques d'enseignement et d’apprentissage;

3) dans la conception et le contenu des programmes de formation et de recyclage d'enseignants, lieux et relais institutionnels où se cristallisent et

s'interrogent les évolutions profondes et superficielles de la didactique des langues."

(Besse et Porquier, 1981, p. 211)

En ce qui concerne les apports pédagogiques, l'analyse des erreurs nous permet de mieux comprendre les processus d’apprentissage d’une langue étrangère pour une amélioration de l'enseignement :

" Errors provide feed back, they tell the teachers something about the effectiveness of his teaching materials and his teaching techniques, and show him what

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26

parts of the syllabus he has been following hâve been inadequately leamed or taught and need further attention. They enable him to décidé whether he must devote more time to the item he has been working on. This is the day- to-day value of errors. But in term of broader planning and with a new group of leamers, they provide the information for designing a remédiai syllabus or a progress of teaching."

(Corder 1973, p. 265)

1.3

Les objectifs

de

la

recherche

L'objectif de cette recherche s’inscrit à la croisée de deux préoccupations : la linguistique et la didactique. Notre ambition n'est pas de proposer de nouvelles théories de la langue, mais de nous inspirer simplement de ce qui existe déjà pour améliorer nos techniques d'enseignement du français. Nous nous proposons d'étudier les erreurs commises par nos élèves dans leurs productions écrites en français, en vue d'améliorer leur apprentissage de l’écrit. Les objectifs spécifiques de notre recherche sont :

d'étudier les erreurs pour définir les zones potentielles d'interférence entre la langue maternelle et le français dans l'expression écrite, chez les élèves thaïlandais;

d'étudier les sources d'erreurs et d'examiner jusqu’à quel point elles sont imputables à l'interférence de la langue maternelle et de l'anglais, la première langue étrangère enseignée.

Nous tenterons d'établir, à la fin, un certain nombre d'activités et de démarches pédagogiques à appliquer dans une situation de classe, pour une

(42)

amélioration de l’expression écrite. Pour ce faire, nous ferons une analyse du contenu des manuels de la méthode "La France en Direct, Adaptation pour la Thaïlande", qui peut, pensons-nous, expliquer des lacunes linguistiques. Nous croyons que les résultats de nos recherches répondront aux besoins des enseignants en vue d’améliorer leurs techniques d’enseignement et de favoriser l’apprentissage de l'écriture du français.

Nous estimons que notre recherche constituera un apport original et significatif dans l'enseignement du français dans le contexte thaïlandais.

1.4

Les hypothèses

de

la

recherche

Dans les situations d'apprentissage du français en contexte thaïlandais, les problèmes auxquels doit faire face un élève de langue étrangère sont multiples. Ils tiennent, entre autres, à la différence dans l'organisation interne des deux systèmes linguistiques en présence, celle de la structure de la langue étudiée et celle de la langue maternelle de l’élève.

Nous proposons trois hypothèses. Les deux premières sont d'ordre linguistique et la troisième, d'ordre pédagogique.

1 ) L'expression écrite en français chez les élèves thaïlandais subit l'influence des habitudes structurales du thaï et de l'anglais;

2) Les erreurs lexicales sont davantage imputables à l'interférence de l'anglais qu’à celle de la langue maternelle;

3) Une prise de conscience de certaines particularités du système de la langue peut aider à déterminer les stratégies qui faciliteront l’élimination progressive de ces erreurs.

(43)

28

1.5

Les

limites

et

l'originalité de

la

recherche

Cette recherche vise à venir en aide aux enseignants thaïlandais qui cherchent des moyens efficaces d'intervention pédagogique pour relever le défi de l’enseignement de l'expression écrite chez leurs élèves. Elle est destinée aux élèves thaïlandais, en particulier ceux du secondaire. Il s’agit de trouver une façon d’améliorer l'apprentissage du français écrit dans la classe de langue. Nous concentrerons notre attention sur un point particulièrement problématique : les erreurs dans les productions écrites d’élèves thaïlandais. Cette recherche doit se limiter à expliciter le processus qui aboutit à la présence ou à l’utilisation d'un système linguistique donné et de modes d'agencement appartenant à un autre système linguistique aux niveaux morphosyntaxique et lexical.

Au niveau morphosyntaxique, nous étudierons de la façon la plus systématique possible les différences et les ressemblances, également importantes, des structures verbales en thaïlandais et en français, en mettant l'accent sur les points les plus difficiles à apprendre par des élèves thaïlandais. Au niveau lexical, nous étudierons le sens et les fonctions des mots.

Dans le contexte de l'enseignement du français en Thaïlande, la connaissance des difficultés éprouvées par nos élèves thaïlandais ainsi que des causes qui les sous-tendent est nécessaire et préalable à une amélioration de l'enseignement et de l'apprentissage du français, de l’organisation des matériaux didactiques, des techniques d'enseignement ainsi que de l'évaluation des progrès des élèves.

La présente recherche est un premier pas visant à améliorer l'enseignement et l'apprentissage de l'écrit chez les élèves thaïlandais du niveau secondaire.

(44)

1.6

Définitions

Nous déterminerons, dans cette partie, les termes utilisés dans cette recherche en ce qui a trait à l’apprentissage de la langue étrangère. Nous parlerons tout d'abord de l'interférence. Ensuite, nous aborderons la définition de la compétence linguistique et de la performance. Et nous terminerons par la définition d'erreur.

1.6.1

L

interférence

Le concept d'interférence a plusieurs définitions. Selon Weinreich (1953),

" The term interférence implies the rearrangement of patterns that results from the introduction of foreign éléments into the more highly structures domain of language, such as the bulk of the phenomic System, a large part of morphology and syntax and some areas of vocabulary."

(Weinreich,1953, p. 1)

Cette définition est, par la suite, développée par des linguistes. Lado (1964) définit l’interférence linguistique comme

"...added difficulty in leaming a sound, a word, or construction in a second language as a resuit of différence with the habits of native language."

(Lado,1964, p. 217)

Il explique que les interférences relèvent de l'extension des habitudes de la langue étrangère dans la langue cible. Le transfert est dit positif, s'il y a aide, facilitation ou consolidation. Mais par contre, s'il y a des gênes ou des difficultés, le transfert est dit négatif. C'est le phénomène d'interférence. Voici son explication :

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30

" ...the extension of a native language habit into target language, the language being taught or leamed with or without the awareness of the leamer, we hâve facilitation. When the transferred habit is unacceptable in the target language, we hâve interférence and an extra learning burden is assumed."

(Lado,1964, p. 222)

D’après Mackey (1965 cité par Debyser, 1970), l'interférence est l'emploi, lorsque l'on parle ou l'on écrit dans une langue étrangère, d'éléments appartenant à une autre langue. Au niveau linguistique, elle peut être considérée comme un transfert négatif provoqué par le contact. Au niveau psychologique, elle peut se concevoir comme un effet négatif de comportement qu'une habitude peut avoir sur l'apprentissage d'une autre langue. Au niveau de la pédagogie des langues, elle est le type d'erreurs que commet l'élève qui apprend une langue étrangère, sous l'effet des habitudes ou des structures de sa langue maternelle.

Dans le cadre de la présente recherche, il suffit de comprendre l'interférence définie par Rivers (1981) comme une déviation de la forme authentique de la langue seconde :

"..the student's déviations ffom authentic second-language forms..."

(Rivers, 1981, p. 82)

L’interférence peut être interprétée comme une tendance ou des facteurs influant sur l'apprentissage. L'interférence linguistique implique la linguistique comparée qui n'a fait que ressortir une grande partie des erreurs commises par des étudiants de la langue étrangère. Plus précisément, l'interférence implique des effets négatifs de la langue maternelle sur l'apprentissage d'une langue étrangère qui est déjà connue. Dans l'apprentissage d'une langue étrangère, lorsque la langue maternelle a

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un caractère bénéfique, on parle du transfert positif. On parle du transfert ou de l'interférence lorsque la langue maternelle aboutit à un effet déplaisant. Donc, le phénomène de transfert peut se produire dans les deux sens ; l'un dans l'ordre de succession des apprentissages, c’est-à-dire d’une façon dite proactive, l'autre d'une façon dite rétroactive.

Debyser (1970) explique :

" On appelle transfert, l’effet positif d’un apprentissage [...], interférence, l’effet négatif.”

(Debyser, 1970, p.36)

Pour Debyser (1970), l’interférence linguistique peut être interprétée avec plus de précision à trois niveaux :

1) D’un point de vue linguistique, l’interférence est définie comme l'emploi d'éléments appartenant à une langue lorsque l'on parle ou écrit dans une autre langue.

2) D'un point de vue psychologique, l'interférence peut se concevoir comme une contamination de comportement. Elle est définie comme l’effet négatif d'une habitude sur l'apprentissage d'une autre habitude.

3) Du point de vue de la pédagogie des langues étrangères, l’interférence est le type particulier d'erreurs que commet l'élève qui apprend une langue étrangère sous l'effet des habitudes ou des structures de sa langue maternelle. Les fautes commises par les élèves sont expliquées par des thèmes techniques : tels que déviations, glissements, transferts ou parasites.

Le phénomène d'interférence est expliqué aussi par des linguistes et des pédagogues. Pour Lado (1964, cité par Besse et Porquier, 1981) :

(47)

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"Les individus tendent à transférer dans la langue étrangère, en production et en réception, les caractéristiques formelles et sémantiques de leur langue maternelle. Ce qui est similaire est facilement transféré, facile à apprendre, ce qui est différent donne lieu à transfert négatif ou interférence, donc à des erreurs ... des manifestations des difficultés d'apprentissage."

(Besse et Porquier 1981, p. 201)

Les interférences peuvent affecter les différents niveaux d’organisation du langage. Elles peuvent non seulement retarder ou contrarier l'acquisition d'un système phonologique ou phonétique, mais aussi affecter la structure grammaticale, la morphologie et la structure de l’énoncé.

En résumé, l'interférence linguistique est un fait de contact entre deux ou plusieurs langues. D'une façon générale, c'est le processus qui aboutit à la présence et à l'utilisation dans un système linguistique donné d'unités et de modes d'agencement appartenant à un autre système linguistique. Debyser (1970) explique qu' il y a interférence quand un sujet bilingue utilise dans une langue cible A, un trait phonétique, morphologique, lexical ou syntaxique caractéristique de la langue B. L'emprunt et le calque sont souvent dus, à l’origine, à des interférences. L'emprunt implique le processus par lequel une langue reçoit une unité linguistique d'une autre langue , par exemple le mot "interview” qui est emprunté à la langue anglaise. Le calque implique l'emprunt par lequel une unité linguistique acquiert une nouvelle signification, sur le modèle du signe observé dans la langue maternelle.

L’apprentissage d'une langue étrangère implique une formation de nouvelles habitudes. L'élève organise peu à peu sa compétence en langue cible à partir d'hypothèses qui sont valables uniquement pour sa langue maternelle. Quand les hypothèses formulées sont fausses, elles affectent la compétence de l'élève qui éprouve des difficultés à produire un énoncé sans peine. Cet énoncé peut aussi être

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