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Comment favoriser l'utilisation des ressources d'aide chez les joueurs problématiques?

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Academic year: 2021

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Comment favoriser l’utilisation des ressources d’aide

chez les joueurs problématiques?

Mémoire doctoral

Andréanne Faucher-Gravel

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D. Psy.)

Québec, Canada

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Comment favoriser l’utilisation des ressources d’aide

chez les joueurs problématiques?

Mémoire doctoral

Andréanne Faucher-Gravel

Sous la direction de :

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Résumé

Peu de joueurs problématiques sollicitent les ressources d’aide et ceux qui traversent cette étape tendent à le faire lorsqu’ils cumulent les conséquences. Le désir de régler le problème par soi-même et la méconnaissance des alternatives disponibles constituent des obstacles à l’entrée en traitement bien documentés. Pourtant, il existe des modalités offrant une plus grande autonomie, c’est-à-dire les traitements auto-administrés (TAA), ainsi que des publicités visant à promouvoir les ressources d’aide. La présente étude vise à explorer les facteurs susceptibles de mener à une demande d’aide moins tardive, les motifs et obstacles à l’utilisation d’un TAA, les éléments à inclure ou à éviter dans les publicités de promotion des traitements du jeu et les canaux de communication à privilégier pour les diffuser. Deux entretiens de groupe ont été effectués, l’un auprès de joueurs ayant récemment complété une thérapie (n = 5) et l’autre auprès de joueurs n’ayant jamais consulté en lien avec leurs habitudes de jeu (n = 9). Des analyses qualitatives inductives ont été réalisées, incluant une procédure d’accord interjuges. Les résultats mettent en lumière l’importance d’être bien informé sur les problèmes de jeu et les ressources d’aide, et ce bien avant le cumul des conséquences du jeu. Plusieurs caractéristiques du TAA sont valorisées, mais encore plus de flexibilité semble recherchée. Différentes perceptions d’une publicité de traitement efficace sont suggérées, notamment l’inclusion d’informations chocs sur les problèmes de jeu ou encore, le fait de miser sur les bénéfices liés à l’arrêt du jeu. L’éventualité que les publicités de traitement suscitent le désir de jouer en raison des stimuli liés au jeu qu’elles incluent est également discutée. D’autres études seraient nécessaires afin de tester l’efficacité des différents types de publicités proposés, d’autant plus que les opinions sont parfois divergentes.

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Tables des matières

Résumé ... iii

Tables des matières ... iv

Liste des tableaux ... v

Liste des figures ... vi

Remerciements ... vii

Introduction ... 1

Traitement du jeu pathologique ... 2

Motivations sous-jacentes à la demande d’aide ... 4

Obstacles à l’utilisation des ressources d’aide ... 5

Existe-t-il des solutions? ... 6

Mise en contexte et pertinence du mémoire ... 12

Objectifs de recherche ... 14 Méthode ... 15 Protocole de recherche ... 15 Participants ... 15 Matériel ... 17 Procédure ... 18 Analyses qualitatives ... 19 Résultats ... 21 Discussion ... 40 Conclusion ... 51 Bibliographie ... 52 Tableau 1 ... 58 Figure 1 ... 59 Figure 2 ... 60 Figure 3 ... 61 Figure 4 ... 62 Figure 5 ... 63 Annexe A ... 64 Annexe B ... 65 Annexe C ... 66 Annexe D ... 80 Annexe E ... 84 Annexe F ... 89 Annexe G ... 90

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Liste des tableaux

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Liste des figures

Figure 1. Facteurs susceptibles de favoriser une demande d’aide précoce………..59 Figure 2. Motivations qui pourraient inciter les joueurs à débuter un traitement

auto-administré………..60 Figure 3. Obstacles qui pourraient compromettre l’utilisation d’un traitement

auto-administré et solutions envisagées………..………..61 Figure 4. Éléments désirables et nuisibles dans les publicités sur le traitement du

jeu………..62 Figure 5. Canaux de communication à privilégier pour les publicités sur le traitement du jeu………..63

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Remerciements

Je tiens d’abord à remercier madame Isabelle Giroux, qui a dirigé mon mémoire doctoral, mais qui m’accompagne depuis le début, m’ayant offert un premier contrat de recherche au cours du baccalauréat. Ton côté humain m’a plu dès notre première rencontre. Isabelle m’a fait confiance et m’a donné plusieurs opportunités tout au long de mes études universitaires, incluant celle de prendre part à une équipe de travail incroyable! Je fais référence ici à mes amis du Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu, Catherine, David, Émilie, Annie, Maxime, Dominic, Bianca, Daniel, Jonathan et Priscilla. Nos profondes discussions dans la salle à dîner, nos soirées en ville, nos blagues beaucoup trop intenses et notre belle complicité vont rester gravées dans ma mémoire à jamais. Je tiens aussi à ajouter une mention spéciale pour Christian Jacques, un homme tellement inspirant que j’ai eu la chance de côtoyer au laboratoire. Je remercie aussi mes superviseurs de clinique avec qui j’ai énormément appris, monsieur Maurice Bhérer, madame Sandra Hopps. Merci aux deux femmes extraordinaires qui m’ont supervisée dans le cadre de l’internat, mesdames Louise Gauthier et Stéphanie Murray du CSSS Québec-Nord, Orléans. J’ai grandement apprécié votre accueil chaleureux, vos enseignements et surtout l’ambiance de travail légère et plaisante que vous m’avez offerte. Je m’ennuie de la belle équipe que j’ai connue au CLSC!

Je souhaite également remercier mes parents, Martine et Daniel. Je me compte chanceuse d’avoir grandi auprès de parents aussi aimants et dévoués que vous l’êtes. Vous m’avez encouragée et soutenue tout au long de mes études et je vous en suis profondément reconnaissante. Que ce soit par des petits plats à emporter, de l’aide financière, une petite tape dans le dos lors d’un moment de découragement ou encore, un agréable souper ensemble à se raconter nos péripéties, je tiens à vous dire que j’apprécie chacun de ces gestes, chacun de ces moments. Je vous aime papa et maman! Je remercie mon conjoint, mon chum, mon beau Pierre-Luc. Merci de me faire rire et de rendre mon quotidien tellement plaisant, de partager avec moi cette grande passion pour la musique et d’accepter mes moins beaux côtés, dont mes petits et grands moments de stress. Je t’aime. T’avoir à mes côtés a définitivement rendu le doctorat plus léger. Je veux aussi remercier mes fidèles

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amies, Mélissa, Dania, Steffie et Andréanne. Ensemble on se confie, on dédramatise et on rit beaucoup! Vous êtes chères à mes yeux mes belles amies.

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Introduction

Plusieurs problèmes d’ordre psychologique peuvent mener la population à consulter afin de recevoir de l’aide professionnelle, dont les problèmes liés aux jeux de hasard et d’argent (JHA). Les JHA regroupent toute activité impliquant la mise d’une somme d’argent ou d’un objet de valeur de manière irréversible, et dont l’issue repose au moins en partie sur le hasard (Ladouceur, Sylvain, Boutin, & Doucet, 2000). Ceci inclue notamment la loterie, les jeux de casino, les appareils de loterie vidéo (ALV), le bingo, les paris sportifs ainsi que les paris entre amis. Dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition (DSM-5), le jeu d’argent pathologique se retrouve sous la catégorie des trouble addictifs et se définit principalement par une pratique inadaptée, persistante et répétée du jeu d’argent qui perturbe le fonctionnement ou cause une souffrance significative (American Psychiatric Association [APA], 2013). Pour que le diagnostic de jeu d’argent pathologique soit posé, au moins quatre critères diagnostiques parmi une liste de 9 critères doivent avoir été réunis sur une période de 12 mois et les symptômes ne doivent pas être mieux expliqués par un épisode maniaque. Les critères diagnostiques peuvent être résumés ainsi : 1) préoccupation par le jeu; 2) besoin de jouer des sommes d’argent croissantes pour atteindre le même état d’excitation; 3) efforts infructueux pour contrôler ou arrêter la pratique du jeu; 4) agitation ou irritabilité lors des tentatives de réduction ou d’arrêt du jeu; 5) joue pour échapper aux difficultés ou pour soulager une humeur dysphorique; 6) après avoir perdu de l’argent au jeu, retourne souvent jouer un autre jour pour se refaire; 7) ment pour dissimuler l’ampleur réelle de ses habitudes de jeu; 8) met en danger ou perd une relation importante, un emploi ou des possibilités d’étude ou de carrière à cause du jeu; 9) compte sur les autres pour obtenir de l’argent et se sortir de situations financières désespérées dues au jeu. Il n’est donc pas étonnant de constater que ce trouble est associé à des conséquences importantes chez les joueurs telles que des problèmes financiers, des conflits conjugaux et familiaux, des difficultés liées à l’emploi, des problèmes légaux ainsi que des problèmes de santé mentale (Walker et al., 2006). La parution du DSM-5 marque un changement quant à la façon de diagnostiquer les problèmes de jeu, considérant que quatre critères diagnostiques au lieu de cinq sont maintenant exigés, que l’un des critères a été retiré (c.-à-d. commet des actes

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illégaux pour financer la pratique du jeu) et qu’un critère temps a été ajouté. De plus, l’appellation jeu d’argent pathologique remplace celle de jeu pathologique que l’on retrouvait dans la version antérieure du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV-TR; APA, 2000). Par souci de congruence avec les études évoquées au cours de l’introduction, le terme jeu pathologique sera utilisé tout au long du présent mémoire.

Selon les travaux de Kairouz et Nadeau (2014), 84,1% des Québécois auraient déjà parié ou dépensé de l’argent à au moins un JHA au cours de leur vie. De plus, en 2012, il est estimé que près de 90 000 Québécois (c.-à-d. 1,4% de la population adulte) présentaient un risque modéré de développer un problème de jeu et qu’environ 25 000 Québécois (c.-à-d. 0,4% de la population adulte) étaient des joueurs pathologiques probables. Ces catégorisations de joueurs sont issues de l’Indice canadien du jeu excessif (ICJE), un instrument largement utilisé au Canada afin d’évaluer la gravité des problèmes de jeu (c.-à-d. classer les répondants en tant que non-joueurs, joueurs sans problème, joueurs à faible risque, joueurs à risque modéré, ou joueurs excessifs; Ferris & Wynne, 2001; Petry, 2009). L’appellation joueur pathologique probable est parfois préférée à celle de joueur excessif, démontrant que l’ICJE fournit une estimation de la probabilité que le répondant rencontre les critères du jeu pathologique (Giroux, Jacques, Ladouceur, Leclerc, & Brochu, 2010). Par ailleurs, le terme joueur problématique est régulièrement évoqué dans la littérature et représente habituellement le rassemblement des joueurs à risque et des joueurs pathologiques dans une même catégorie (Gendron, Dufour, Brunelle, & Leclerc, 2010).

Traitement du jeu pathologique

Plusieurs alternatives s’offrent aux joueurs problématiques qui souhaitent recevoir une aide psychologique, notamment les interventions cognitive-comportementales, les interventions psychodynamiques, les groupes d’entraide (p. ex. Gamblers Anonymes), les traitements éclectiques ainsi que la pharmacothérapie (Gendron et al., 2010; Gooding & Tarrier, 2009; Petry, 2009). Cependant, la majorité des traitements pour les joueurs relatés dans la littérature s’inscrivent dans une approche cognitive-comportementale, cette approche étant également préconisée pour le traitement de plusieurs autres problématiques

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exposition in vivo c. en imagination), ces interventions mettent généralement l’emphase sur la modification des cognitions erronées à propos du jeu, le renforcement des comportements non liés au jeu et la prévention de la rechute (Petry, 2009). Selon une recension critique de la littérature portant sur le traitement du jeu pathologique, les interventions cognitive-comportementales seraient celles ayant reçu le plus grand support empirique, les données disponibles suggérant que ces traitements soient plus efficaces qu’une condition sans traitement (Toneatto & Ladouceur, 2003). De plus, selon les résultats d’une méta-analyse incluant 25 études indépendantes, ces interventions auraient un effet large et significatif (g de Hedges = -0,72) sur les comportements de jeu à court terme (c.-à-d. dans les trois mois suivant le traitement) et les effets des interventions seraient maintenus au suivi à six mois, 12 mois et 24 mois (Gooding & Tarrier, 2009). Il importe toutefois de préciser qu’un petit nombre d’études documentaient les suivis à 12 mois et 24 mois, nécessitant d’user de prudence face à ce résultat. Les interventions cognitive-comportementales peuvent être administrées dans plusieurs modalités, entre autres en suivi individuel, en groupe et de façon auto-administrée.

Par ailleurs, il apparaît qu’il ne soit pas nécessaire pour tous les joueurs de s’engager dans un traitement afin de modifier leurs habitudes de jeu. En effet, certaines études ont permis de documenter le phénomène de rémission naturelle chez les joueurs problématiques, suggérant que les individus puissent surmonter leur dépendance au jeu sans nécessiter d’aide professionnelle (Hodgins & el-Guebaly, 2000; LaPlante, Nelson, LaBrie, & Shaffer, 2008; Slutske, 2006; Toneatto et al., 2008). Par exemple, les résultats de deux sondages nationaux menés aux États-Unis suggèrent un taux de rémission naturelle chez les joueurs de 33 et 36% (Slutske, 2006). Toutefois, il importe de considérer que les études abordant la rémission naturelle ne permettent pas de statuer quant au maintien des changements dans le temps, alors que les données de recherche semblent prometteuses quant à l’efficacité à long terme des thérapies cognitive-comportementales (BC Centre for Social Responsibility, 2006). Il est également possible de se questionner quant à la probable variabilité associée à ce phénomène de rémission naturelle, considérant que les individus peuvent, malgré qu’ils n’aient pas consulté formellement, avoir activement travaillé sur leur problème de jeu en utilisant différentes stratégies ou encore avoir bénéficié de l’aide de proches. Malgré que la rémission naturelle puisse caractériser le cheminement de certains

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joueurs, il n’en demeure pas moins que pour d’autres, les problèmes de jeu sont persistants et nécessitent une aide professionnelle (Petry, 2009; Slutske, 2006). Il est donc inquiétant de constater que seulement 7% à 29% de joueurs pathologiques auraient recours à des ressources d’aide pour leur problème de jeu (Cunningham, 2005; Slutske, 2006; Suurvali, Hodgins, Toneatto, & Cunningham, 2008). Ces statistiques sont d’autant plus préoccupantes, considérant que les joueurs pathologiques qui ne vont pas chercher de l’aide continuent de s’exposer eux-mêmes ainsi que leur entourage à des problèmes dommageables, qui pourraient potentiellement être résolus (Pulford et al., 2009). Il s’agit de taux de consultation qui peuvent se distinguer de ceux retrouvés avec d’autres problématiques de santé mentale, tandis qu’une étude américaine rapporte des taux de consultation de 54% pour la dépression majeure, 61% pour le trouble bipolaire et 70% pour le trouble de somatisation (Robins, Locke, & Regier, 1991).

Motivations sous-jacentes à la demande d’aide

Les données récentes démontrant qu’un grand nombre de joueurs pathologiques ne sollicite pas les ressources d’aide, il apparaît primordial de s’intéresser aux motivations qui mènent certains d’entre eux à entreprendre une démarche d’aide. En 2010, Suurvali, Hodgins et Cunningham ont publié une revue de la littérature empirique, mettant en lumière les principales motivations incitant les joueurs à utiliser les ressources d’aide ou à modifier leurs habitudes de jeu. Au total, 19 études ont été incluses, soit 10 études sur les motivations pour tenter de modifier ses habitudes de jeu ou d’arrêter de jouer, cinq études sur les motivations pour utiliser les ressources d’aide et quatre études sur les motivations pour demander l’auto-exclusion des casinos. Selon les résultats de cette revue de littérature, l’utilisation des ressources d’aide par les joueurs serait principalement motivée par la survenue de problèmes sérieux liés au jeu, en particulier les problèmes financiers, les problèmes relationnels, les émotions négatives (p.ex. honte, dépression, anxiété, idées suicidaires) ainsi que les problèmes au travail et légaux. L’arrêt du jeu ainsi que la modification des habitudes de jeu seraient souvent motivés par des raisons similaires, mais d’autres facteurs seraient également importants, entre autres l’évaluation des avantages et des inconvénients du jeu et les changements dans le style de vie ou dans l’environnement du joueur. De plus, certaines études ont mis en lumière des différences entre les joueurs

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identifiées (Hodgins, Makarchuk, el-Guebaly, & Peden, 2002; Marotta, 1999; Nett & Schatzmann, 2005). Notamment, les résultats de l’étude de Marotta (1999) montrent qu’une proportion significativement plus élevée de joueurs ayant bénéficié d’un traitement ou d’un groupe d’entraide que de joueurs ayant arrêté de jouer par eux-mêmes (55% c. 24%) ont identifié les émotions négatives comme raison principale pour entreprendre un changement. Ainsi, la décision de modifier ses habitudes de jeu sans aide professionnelle semble associée à un certain processus de réflexion chez certains joueurs, par exemple en pesant les pours et les contres, tandis que la demande d’aide serait principalement motivée par la survenue de conséquences importantes liées aux habitudes de jeu, voire un état de crise. Ceci est congruent avec la littérature suggérant qu’une plus grande gravité du problème de jeu est associée à une plus grande probabilité d’utiliser les ressources d’aide (Slutske, 2006; Suurvali et al., 2008).

Obstacles à l’utilisation des ressources d’aide

Malgré que certaines motivations telles que des problèmes financiers puissent mener les joueurs à entreprendre une démarche d’aide, il semble que différents types d’obstacles puissent entraver ou retarder cette démarche. Suurvali, Cordingley, Hodgins et Cunningham ont d’ailleurs publié une revue de la littérature à ce sujet en 2009. Au total, 19 études ont été identifiées, la seule exigence méthodologique étant que les joueurs soient questionnés directement. Les auteurs rapportent que les obstacles à l’utilisation des ressources d’aide les plus fréquemment mentionnés sont les suivants: (1) le désir de régler le problème soi-même, (2) la honte, la stigmatisation ou le malaise de consulter et (3) la réticence à admettre son problème de jeu ou la minimisation de celui-ci, suivis des craintes face aux traitements (qualité et contenu), de la méconnaissance des traitements disponibles et des problèmes pratiques liés à l’entrée en traitement (p. ex. être incapable d’obtenir le service à l’endroit ou au moment désiré). De plus, les auteurs suggèrent que la non-reconnaissance du problème de jeu soit un obstacle beaucoup plus important que ce qui est documenté dans la littérature, considérant que cet obstacle pourrait difficilement être identifié par des participants n’ayant pas encore reconnu ou admis que le jeu pose problème pour eux. En ce sens, les auteurs recommandent la réalisation d’études qualitatives auprès de joueurs déjà en traitement afin de s’attarder en profondeur au processus permettant aux joueurs de prendre conscience de leur problème de jeu.

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Les mêmes types d’obstacles à l’utilisation des ressources d’aide ont également été rapportés dans une étude plus récente (Suurvali, Hodgins, Toneatto, & Cunningham, 2012). De plus, les joueurs québécois ne feraient pas exception, tel que soulevé par une enquête regroupant 179 participants (Kairouz, Gleeton, Luce, & Nadeau, 2012). En effet, certains joueurs à risque modéré et pathologiques affirment ne pas avoir recours aux ressources d’aide (ligne téléphonique et centre de traitement) car ils ont l’impression de ne pas avoir besoin d’aide et que le service ne pourrait les aider. Il semble donc y avoir des obstacles à la demande d’aide liés à la perception de soi (p.ex. désir de régler le problème soi-même, honte de consulter, impression de ne pas avoir besoin d’aide ou de ne pas avoir de problème) alors que d’autres obstacles seraient plutôt liés à la perception de la ressource d’aide (p. ex. impression que la ressource ne pourra les aider, craintes face aux traitements, problèmes pratiques). De plus, certains joueurs ne consulteraient pas tout simplement parce qu’ils ne connaissent pas les ressources d’aide disponibles.

Existe-t-il des solutions?

Étrangement, peu de chercheurs se sont intéressés aux solutions envisageables afin de favoriser l’entrée en traitement, par exemple en questionnant directement les joueurs à ce sujet au cours des études portant sur les obstacles au traitement. Simoneau, Constant, Chauvet et Ladouceur (2012) l’ont fait, en plus d’étudier les motifs de consultation et les obstacles au traitement, auprès de deux groupes d’intervenants et d’un groupe de joueurs en traitement dans la région des Laurentides. Leur méthodologie comprenait des entretiens de groupe ainsi que des questionnaires auto-rapportés qui ont été complétés préalablement. Plusieurs motifs de consultation (p.ex. les pertes, les souffrances émotionnelles, les conflits) et obstacles au traitement (p. ex. le désir de régler le problème soi-même, la honte, la méconnaissance des traitements) étaient similaires à ceux rapportés dans les revues de littérature sur le sujet (Suurvali et al., 2009; Suurvali et al., 2010). Parmi l’ensemble des solutions évoquées (c.-à-d. développer une approche globale et humaniser les services, faciliter l’accès aux ressources, remplacer le terme «jeu pathologique» par «dépendance au jeu», sensibiliser au montant dépensé, créer des groupes de soutien), le fait d’informer sur la problématique et de promouvoir les services, de modifier le contenu des publicités et d’augmenter leur fréquence ainsi que de former le personnel pour améliorer le repérage des

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participants. Cependant, les opinions divergent lorsque les publicités existantes sont commentées. Des opinions favorables à l’égard de celles-ci ont été verbalisées, c’est-à-dire qu’elles encouragent la consultation puisqu’elles parlent des conséquences du jeu et font appel aux émotions. Toutefois, le fait de ne pas se sentir concerné par ces publicités et que celles-ci sous-représentent les joueurs d’ALV ou de machines à sous constituent des éléments ayant également été soulevés. Puisque les commentaires sur les publicités découlent d’une discussion au sujet de la promotion des services et n’étaient pas reliés à une question de recherche spécifique, il serait important de questionner les joueurs sur les éléments des publicités qui les rejoignent ou les rebutent. Les perceptions de joueurs n’ayant jamais consulté pourraient apporter un éclairage différent sur ce sujet, d’autant plus que cette catégorie de joueurs n’était pas représentée dans cette étude. En effet, un entretien de groupe devait être réalisé auprès de joueurs n’ayant jamais consulté, mais ce groupe n’a pu être formé en raison de difficultés de recrutement.

La promotion des ressources d’aide: Solution ou échec? Tandis que la

méconnaissance des ressources d’aide ainsi que la méfiance ou les craintes à l’égard de celles-ci sont évoquées comme obstacles à la consultation, il est possible de se questionner quant à l’efficacité des publicités visant la promotion de ces ressources. Certaines études suggèrent une efficacité des campagnes de sensibilisation dans le domaine du jeu, afin de faire connaître les ressources d’aide pour les joueurs ainsi que pour favoriser la demande d’aide (Jackson, Thomas, Thomason, & Ho, 2002; Responsible Gambling Fund Trustees, 2009). Notamment, l’évaluation d’une campagne de prévention initiée en 1995 par le Victorian Departement of Human Services (Australie) met en lumière une augmentation de la connaissance des ressources d’aide dans la communauté (passée de 43% à 71%), une augmentation drastique des appels à la ligne d’aide, une augmentation du nombre de nouveaux clients débutant un traitement ainsi qu’une plus grande collaboration entre les services d’aide et le personnel des sites de jeu (Jackson et al., 2002). Cette imposante campagne incluait cinq semaines de diffusion de publicités à la radio, dans les journaux et sur des panneaux publicitaires lors de la première année, 14 semaines de diffusion de publicités télévisées pendant la deuxième année et des phases de 30 semaines de présentation des publicités à la radio ainsi qu’à la télévision lors des deux dernières années, en plus d’un volet d’éducation régional incluant entre autres la distribution de produits tels

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que des brochures. Il est notamment décrit que les messages télévisés présentaient un joueur en crise en raison de son problème de jeu (perte de sa maison, mensonges à sa conjointe), que l’on voit finalement au téléphone avec une ligne d’aide en scène finale. Considérant l’ampleur de la campagne, son étendue en termes d’années, la variété de médias utilisés ainsi que les variations quant au matériel promotionnel distribué, il peut être ardu de distinguer clairement quelles composantes contribuent davantage à son efficacité, notamment pour faire en sorte qu’un joueur se décide à prendre action pour demande de l’aide. Par exemple, le slogan «Si vous avez un problème de jeu dans votre vie, appelez la G-Line gratuite» était l’un des deux slogans les plus rappelés par les participants sondés. Il s’agit toutefois d’un slogan ayant été utilisé durant les trois phases de diffusion, en plus d’être inclus dans des brochures distribuées localement et présenté avec certaines variations au niveau de la formulation. Est-ce le contenu du slogan qui est efficace, ou bien plutôt le fait qu’il puisse être entendu ou lu à plusieurs endroits?

D’autres études suggèrent qu’il existe un défi au niveau de la capacité à assurer une visibilité aux campagnes de sensibilisation et de promotion des services, ainsi que de faire en sorte que les publicités aient un impact comportemental sur l’individu (p. ex. changer ses habitudes de jeu, faire une demande d’aide). Notamment, Najavits, Grymala et George (2003) ont étudié l’impact d’une campagne publicitaire visant à informer les résidents de l’Indiana des signes associés au jeu pathologique ainsi que des ressources d’aide disponibles. Cette campagne comportait des publicités à la radio, dans les journaux, sur des panneaux publicitaires et la distribution d’objets promotionnels et de brochures. Le slogan utilisé pour la campagne publicitaire était le suivant: «Jouez intelligemment. Ne misez pas plus que ce que vous pouvez vous permettre de perdre!». Huit cents (800) résidents de l’Indiana ont été sondés afin d’évaluer les effets de la campagne (pré-campagne = 400, post-campagne = 400). Les résultats de cette étude montrent que la campagne publicitaire a eu peu d’impact (pas de différence significative pré/post-campagne), possiblement parce que peu de participants ont vu les différentes publicités diffusées (8,2% du groupe post-campagne). Cependant, parmi les participants du groupe post-campagne ayant vu les publicités, 72% ont affirmé que celles-ci ont augmenté leur niveau de connaissances à propos du jeu pathologique et une personne a entrepris une demande d’aide. Bien que les

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participants ayant vu les publicités, il n’est pas clair que ce type de campagne puisse inciter les joueurs vivant des difficultés à utiliser les ressources d’aide présentées, une seule personne ayant entamé une demande d’aide suite à la campagne. Ceci pourrait possiblement être lié au type de slogan utilisé «Jouez intelligemment. Ne misez pas plus que ce que vous pouvez vous permettre de perdre!», qui n’évoque pas directement le thème de la demande d’aide.

Puis, une étude plus récente s’attarde aux impacts d’une campagne publicitaire visant à encourager la consultation d’une ressource d’aide locale pour les joueurs, et ce par le biais de panneaux publicitaires sur l’autoroute (Calderwood & Wellington, 2015). Dans le cadre de cette étude, quatre à huit panneaux publicitaires ont été apposés sur une période de 24 semaines à des endroits commerciaux dans le comté d’Essex en Ontario. Les deux messages publicitaires étaient les suivants : «Gambling again? Shattered?», «Gambling problem? Shattered?». Les résultats montrent que les publicités ont eu une certaine influence, c’est-à-dire que 5,9% des nouveaux appelants (quatre individus) auraient rapporté avoir connu la ressource par le biais de la campagne. Toutefois, l’hypothèse selon laquelle la campagne permettait d’augmenter le taux de consultation de la ressource a été infirmée, les taux de consultation ayant diminué durant l’étude. Afin d’expliquer ces résultats, les auteurs font entre autres référence au niveau de publicité (p. ex. nombre de panneaux et durée de l’affichage) qui aurait pu être insuffisant afin de produire un effet. Ces derniers font également appel à la théorie du traitement de l’information (Weilbacher, 2003), suggérant que le simple fait de voir une publicité de promotion d’une ressource d’aide n’aura un impact comportemental que si les individus sont disposés à poser une action. En accord avec les auteurs, ceci est cohérent avec le modèle transthéorique du changement (Prochaska & DiClemente, 1983; Prochaska & Norcross, 2001), dont les stades peuvent être résumés ainsi : précontemplation (peu de reconnaissance du problème et pas d’intention de changement); contemplation (reconnaissance du problème et désir de changement); préparation (intention de changement plus claire avec amorce de petites actions); action (changements comportementaux significatifs afin de régler le problème); maintien (efforts pour maintenir les gains et prévenir la rechute). Cela soulève la pertinence de mettre de l’avant des publicités susceptibles de rejoindre des joueurs qui seraient moins avancés au niveau des stades de changement, notamment pour favoriser la reconnaissance

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du problème de jeu ou concrétiser le désir de changement. Il s’agit d’ailleurs d’un type d’adaptation ayant été fait au cours de l’étude de Calderwood & Wellington (2015), le premier slogan n’utilisant pas la formulation «problème de jeu» puisque certains joueurs pourraient ne pas se reconnaître sous cette étiquette. Les auteurs précisent qu’il s’agit d’une recommandation issue d’un entretien de groupe qu’ils ont réalisé avec des joueurs afin d’orienter la création des publicités utilisées dans la campagne. Alors que les auteurs recommandent que l’on continue à consulter les joueurs comme ils l’ont fait, il aurait été intéressant qu’ils prennent en compte le contenu de la publicité comme étant une variable susceptible d’influencer l’efficacité de la campagne, notamment en questionnant les perceptions des participants à cet égard.

Par ailleurs, les publicités de promotion des traitements du jeu peuvent également cibler d’autres obstacles à la consultation identifiés dans la littérature, par exemple en normalisant les sentiments de honte et de gêne que les joueurs pathologiques peuvent ressentir, en plus d’offrir les services d’aide disponibles. Cette stratégie publicitaire a d’ailleurs été employée afin de recruter des participants pour le traitement auto-administré JEu me questionne (JMQ) suite à des difficultés de recrutement à l’aide d’une publicité plus conventionnelle (voir la publicité conventionnelle en annexe A et la seconde publicité en annexe B). Alors que la deuxième publicité a semblé plus efficace que la première en raison de l’augmentation du nombre d’appels, il serait pertinent d’investiguer si cette stratégie est réellement susceptible avoir un impact selon la perception des joueurs (Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu [CQEPTJ], communication personnelle, 1er mai 2012). De façon plus globale, il serait important d’en savoir davantage

quant aux perceptions des joueurs à l’égard des différents types de publicités de promotion des traitements qui leur sont présentés, ce qui pourrait permettre une meilleure adéquation avec leurs besoins et attentes. Tandis que peu d’études abordent cette question dans le domaine du jeu pathologique, la littérature portant sur la promotion des traitements visant d’autres troubles mentaux soulève l’importance de s’y attarder. Par exemple, dans le cas de la dépression, une plus grande sévérité des symptômes serait associée à des attitudes plus négatives envers les publicités des traitements et à de plus faibles intentions de consulter (Keeler, Siegel, & Alvaro, 2014). Toutefois, une étude récente (Siegel, Lienemann, & Tan,

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c’est-à-dire en présentant le message comme s’il s’adressait à quelqu’un d’autre, comme un ami ou un membre de la famille. De plus, certains effets iatrogènes reliés aux publicités de traitement ont été mis en lumière. Notamment, dans une étude menée par Klimes-Dougan et Lee (2010), le message publicitaire «Prévenez le suicide – Traitez la dépression – Consultez votre médecin» publié sur un panneau publicitaire a eu pour effet d’augmenter les attitudes négatives à l’égard de la demande d’aide et d’amplifier la croyance normative reliant la dépression au suicide, chez des participants à haut risque de dépression et de suicide. Ce type d’effet indésirable soulève bien la pertinence de s’intéresser aux impacts des stratégies publicitaires mises de l’avant afin de promouvoir les ressources d’aide. Les attraits du traitement auto-administré. Il est en outre probable que certaines

modalités de traitement permettent d’enrayer ou du moins de diminuer la portée des obstacles liés à la perception de soi et à la perception des ressources d’aide discutés précédemment. Par exemple, les contraintes pratiques telles que les déplacements sont évoquées comme obstacle au traitement (Suurvali et al., 2009) tandis que les traitements auto-administrés (TAA) se déroulent à la maison et ne nécessitent aucun déplacement. En effet, les TAA constituent une modalité de traitement permettant aux joueurs de travailler sur leur problème de jeu à leur propre rythme sans que l’assistance d’un clinicien soit nécessaire, par le biais de matériel écrit (manuel ou livre de traitement) ainsi que par l’utilisation d’autres médias dont les enregistrements audio et vidéo, les ordinateurs, les mobiles et Internet (Raylu, Oei, & Loo, 2008). Ce type de traitement est également susceptible de contrer l’obstacle du désir de régler le problème de jeu par soi-même considérant l’autonomie qu’il propose. Cette modalité permet aussi d’élargir l’accès au traitement à des joueurs qui n’auraient pas nécessairement fait le choix de débuter une thérapie formelle ou encore, qui n’y auraient pas accès dans leur région. Selon une revue de littérature publiée en 2008 (Raylu et al.), les TAA, lorsqu’étudiés auprès de différentes problématiques psychologiques, montrent des améliorations significatives au post-traitement lorsque comparés à un groupe contrôle, avec des tailles d’effet variant de .57 à .96 selon la meta-analyse. Les TAA auraient surtout été étudiés dans le cadre du traitement des troubles de l’humeur (Raylu et al., 2008), mais certaines études suggèrent tout de même leur efficacité auprès des joueurs problématiques (Carlbring & Smit, 2008; Giroux et al., 2015; Hodgins, Currie, Currie, & Fick, 2009; Hodgins, Currie, & el-Guebaly, 2001).

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Tandis qu’il serait fréquent de retrouver un contact avec le clinicien lors de l’administration des TAA, les données empiriques suggèrent une augmentation de l’efficacité du traitement lorsque ce contact est présent, par exemple par téléphone, courriel, ou par vidéoconférence. Toutefois, le niveau de contact serait très variable d’une étude à l’autre, passant d’une évaluation prétraitement à un suivi téléphonique régulier au cours du traitement. La valeur ajoutée du contact avec le clinicien est également soutenue dans des études menées auprès de joueurs problématiques, comparant une condition incluant une ou plusieurs interventions motivationnelles par téléphone et un livre de traitement, une condition avec le livre de traitement seul et une condition liste d’attente (Hodgins, Currie, & el-Guebaly, 2001; Hodgins et al., 2009). Les résultats d’une étude de faisabilité du traitement auto-administré JMQ vont en ce sens, l’évaluation de l’appréciation du programme révélant que les participants auraient particulièrement apprécié les contacts téléphoniques avec l’intervenant, en plus du contenu du manuel et des avantages liés à la formule, c’est-à-dire l’anonymat, le rythme et l’absence de déplacement (Ladouceur et al., 2011). De plus, 51% des participants ont rapporté qu’ils n’auraient pas entrepris un traitement si ce dernier avait été de type conventionnel. Considérant le caractère non-intrusif du TAA et ses autres caractéristiques distinctives, serait-il possible que les joueurs y adhérent en raison de motivations différentes de celles évoquées dans la littérature, c’est-à-dire les conséquences néfastes liées aux habitudes de jeu (Suurvali et al., 2010)?

Mise en contexte et pertinence du mémoire

Le présent mémoire doctoral s’inscrit dans un projet de recherche intitulé JEu me questionne: Bonification et validation scientifique (Giroux, Ladouceur, & Simoneau, 2012), subventionné par le Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQ-SC). Ce projet de recherche incluant trois phases constitue la suite d’une étude ayant démontré des résultats encourageants concernant la faisabilité du traitement JEu me questionne (JMQ; Ladouceur et al., 2011). JMQ est un traitement auto-administré créé par le CQEPTJ de l’Université Laval pour aider les joueurs à modifier leurs habitudes de jeu (Ladouceur et al., 2011). Offrant une formule semi-autonome, il permet au joueur de cheminer à son propre rythme à l’aide d’un manuel et s’accompagne de trois entrevues motivationnelles réalisées par téléphone. Ce programme s’inspire des approches thérapeutiques ayant reçu le plus

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motivationnelle; Desrosiers & Jacques, 2010) et s’inscrit dans une visée d’intervention précoce afin de rejoindre les joueurs à risque de développer un problème de jeu (Raylu et al., 2008).

Lors de la première phase du projet de recherche actuel, une mise à niveau du programme JMQ a été effectuée selon les commentaires des participants ayant suivi le traitement et des intervenants. Le présent mémoire doctoral constitue la deuxième phase et vise à identifier certains facteurs associés à la décision des joueurs de débuter un traitement pour le jeu et à formuler des recommandations qui pourraient guider le développement d’une publicité de recrutement pour la troisième phase, pendant laquelle 100 joueurs problématiques sont recrutés afin d’évaluer l’efficacité du nouveau programme JMQ. Les résultats de la présente étude pourront également influencer la création d’autres publicités visant à promouvoir les traitements pour les joueurs.

La littérature sur le jeu apporte un éclairage quant aux motivations qui mènent les joueurs à demander de l’aide ainsi que face aux obstacles qui pourraient compromettre cette demande d’aide. Cependant, les différentes études qui abordent la recherche d’aide chez les joueurs le font de façon très générale, sans faire la distinction entre les différentes modalités de traitements. Pourtant, il apparaît plausible que les obstacles qui pourraient compromettre la demande d’aide et les motivations pour initier cette demande puissent varier en fonction du type de traitement, nécessitant que les questions posées aux joueurs spécifient la modalité de traitement, par exemple dans le cas d’un TAA. De plus, il apparaît important d’investiguer si certains facteurs dans l’évolution du joueur (p. ex. un événement ou une prise de conscience) sont susceptibles de favoriser une demande d’aide précoce, avant que les problèmes ne deviennent trop importants et qu’ils provoquent un état de crise. Puis, considérant que plusieurs questions demeurent quant à la façon dont les publicités de promotion des traitements sont perçues par les joueurs et quant aux ingrédients faisant que celles-ci seront susceptibles de mener à la consultation, il apparaît primordial d’explorer cet aspect.

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Objectifs de recherche

Les objectifs du mémoire sont les suivants : 1) identifier les facteurs qui pourraient inciter les joueurs à entreprendre un traitement plus tôt, avant l’arrivée de conséquences graves liées au jeu, 2) identifier les motivations qui pourraient inciter les joueurs à entreprendre un traitement auto-administré tel que JMQ, 3) identifier les obstacles qui pourraient retarder ou compromettre la décision des joueurs d’entreprendre un traitement auto-administré tel que JMQ et les solutions possibles pour contrer ces obstacles, 4) identifier les éléments désirables et nuisibles des publicités visant à promouvoir les traitements pour le jeu et 5) identifier les canaux de communication à privilégier pour rejoindre les joueurs.

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Méthode

Protocole de recherche

L’étude est réalisée par le biais d’un devis qualitatif incluant des entretiens de groupe. Les entretiens de groupe comportent plusieurs avantages, entres autres la possibilité d’étudier les problématiques en profondeur et de recueillir davantage d’informations qu’une méthodologie par enquête (Sharts-Hopko, 2001). De plus, les entretiens de groupe constituent une méthode structurée, relativement simple et peu coûteuse, permettant aux participants de jouer un rôle actif dans l’enrichissement des connaissances scientifiques, et ce, sans fournir trop d’efforts. Selon Krueger et Casey (2000), les entretiens de groupe peuvent être utilisés afin d’éclairer une prise de décision avant, pendant ou après un événement, un programme ou l’implantation d’une politique. C’est le cas de la présente étude, qui vise à recueillir des informations susceptibles d’influencer la création d’une nouvelle publicité pour le traitement JMQ.

Il a été choisi de recruter deux catégories de participants pour effectuer des entretiens de groupe, c’est-à-dire des joueurs actuellement en traitement pour un problème de jeu ainsi que des joueurs n’ayant jamais suivi un traitement pour un problème de jeu. Il est souhaité que la tenue d’un entretien de groupe avec des joueurs actuellement impliqués dans un traitement donne accès à des informations riches, ces joueurs ayant probablement fraîchement en mémoire le processus les ayant menés à consulter. Il importe également de recueillir les perceptions de joueurs n’ayant jamais initié le processus de demande d’aide, à qui les efforts visant à favoriser la consultation pour les problèmes de jeu pourraient s’adresser. De plus, l’étude de ces deux catégories de participants risque de mener à un éventail plus large de réponses, puisqu’il a été soulevé que les perceptions des joueurs (notamment en ce qui a trait aux motivations pour demander de l’aide) pourraient varier en fonction qu’ils soient ou non des utilisateurs de ressources d’aide pour le jeu (Hodgins et al., 2002; Marotta, 1999; Nett & Schatzmann, 2005).

Participants

Pour être admissibles à l’étude, tous les participants devaient : (a) être âgés de 18 ans et plus, (b) être considérés joueur à risque modéré ou joueur pathologique probable, tel

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qu’indiqué par un score de 3 ou plus à l’ICJE, (c) avoir des habiletés minimales en lecture de la langue française et (d) être en mesure de comprendre et de parler la langue française afin de participer à l’entretien de groupe.

Deux modes de recrutement des participants ont été utilisés. Dans un premier temps, afin de recruter des joueurs n’ayant jamais consulté pour un problème de jeu, une annonce a été publiée dans le Journal de Québec à l’hiver 2013. Suite à la publication de cette annonce, 20 personnes ont pris contact afin d’obtenir des informations sur l’étude : quatre d’entre eux étaient non-admissibles, sept n’ont pas donné suite (p. ex. par manque d’intérêt ou de disponibilité) et neuf étaient admissibles et se sont présentées à l’entretien de groupe. Puis, au printemps 2013, le recrutement pour former un groupe de joueurs en traitement pour un problème de jeu a été mis en branle. Ces derniers ont été sollicités par le biais d’une collaboration avec le Centre Casa, offrant des thérapies au niveau des dépendances (jeu excessif, cyberdépendance, dépendance à l’alcool, aux drogues ou aux médicaments). Deux intervenants du Centre Casa étaient informés des buts et critères d’admissibilité de l’étude et ont référé des membres du Centre ayant demandé de l’aide pour un problème de jeu et qui acceptaient d’être contactés par téléphone. Les défis du recrutement ont fait en sorte que les participants à l’étude sont des individus ayant très récemment complété une thérapie pour le jeu, c’est-à-dire dans un délai d’environ quatre à neuf semaines. Cet accommodement a été effectué afin d’être en mesure de former un groupe comprenant un nombre suffisant de participants. Parmi les sept personnes contactées, cinq ont accepté de participer et se sont présentées à l’entretien de groupe. Notons que l’appellation «joueurs ayant récemment complété une thérapie» sera utilisée afin de qualifier ce groupe de participants.

Les données sociodémographiques et autres caractéristiques des participants sont présentées au Tableau 1, et ce à des fins descriptives. En ce qui concerne les habitudes de jeu des participants, la plupart d’entre eux (12 participants sur 14) considère avoir déjà, par le passé, trop joué, trop dépensé d’argent ou passé trop de temps à jouer à des JHA. Alors qu’une majorité de participants a joué à plus d’un JHA dans la dernière année, les plus populaires sont les ALV dans les bars (11 participants sur 14) et la loterie (11 participants sur 14). Au cours de la dernière année, six participants ont rapporté avoir joué moins de

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5 000$ au JHA dans lequel ils ont le plus dépensé, trois participants entre 5 000 et 9 999$, deux participants entre 10 000 et 14 999$ et trois participants ont rapporté avoir joué plus de 15 000$ au JHA dans lequel ils ont le plus dépensé. Par ailleurs, un peu plus de la moitié des participants a déjà reçu de l’aide pour une problématique de santé mentale autre que le jeu pathologique. Puisque les habitudes de jeu des participants sont questionnées en utilisant le cadre temporel de la dernière année, ce qui concerne également l’ICJE, il est à noter que la présente étude ne permet pas de distinguer les habitudes de jeu prétraitement et post-traitement chez les joueurs ayant récemment complété une thérapie.

Matériel

Questionnaire «premier contact». Ce questionnaire permettant d’évaluer

l’admissibilité des participants documente brièvement les habitudes de jeu et les antécédents d’utilisation des ressources d’aide. Il contient également un court questionnaire sociodémographique ainsi que l’ICJE (voir annexe C).

Indice canadien du jeu excessif (ICJE, Ferris & Wynne, 2001). Ce questionnaire

développé en français et en anglais contient 31 items, dont neuf (Problem Gambling Severity Index) permettent d’évaluer la gravité des problèmes de jeu. Seulement ces neuf items sont administrés dans la présente étude. Les participants sont classés selon quatre catégories: joueurs sans problème (score de 0), joueurs à faible risque (score de 1 à 2), joueurs à risque modéré (score de 3 à 7), joueurs excessifs ou joueurs pathologiques probables (score de 8 à 27). Selon Ferris et Wynne (2001), l’ICJE obtiendrait un taux de prévalence du jeu pathologique presque équivalent à celui se rapportant aux critères du DSM-IV (APA, 1994). De plus, l’ICJE possèderait de bonnes qualités psychométriques, notamment une bonne cohérence interne (alpha de Cronbach = 0,84) et une bonne validité selon les critères, lorsque comparé au South Oaks Gambling Screen [SOGS] (Lesieur & Blume, 1987) et au DSM-IV (APA, 1994).

Guide d’animation des entretiens de groupe. Ce guide d’animation présente le

déroulement des entretiens de groupe ainsi que les questions qui sont posées aux participants, en précisant le temps à accorder pour chacun des thèmes abordés (voir annexe D). Trois grands thèmes sont discutés : (1) les facteurs favorisant une demande d’aide

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précoce, les motivations ainsi que les obstacles influençant la décision de débuter un traitement (7 questions, 40 minutes), (2) les publicités sur le traitement du jeu (9 questions, 40 minutes), et (3) les canaux de communication à privilégier pour rejoindre les joueurs (2 questions, 10 minutes).

Procédure

En premier lieu, tous les participants ont répondu au questionnaire de premier contact par téléphone. Deux rencontres ont ensuite été fixées pour la tenue des entretiens de groupe, c’est-à-dire le 7 mars 2013 pour les joueurs n’ayant jamais consulté et le 22 juillet 2013 pour les joueurs ayant récemment complété une thérapie. L’entretien avec les joueurs n’ayant jamais consulté a eu lieu à l’Université Laval, alors que le second groupe a eu lieu directement au Centre Casa, endroit où les joueurs ont suivi leur thérapie pour le jeu. Dans les deux cas, les entretiens ont été d’une durée approximative de deux heures.

Les deux entretiens de groupe se sont déroulés de la manière suivante : accueil des participants par l’animatrice et son assistant (l’étudiante au doctorat en psychologie en charge de l’étude et un assistant de recherche de niveau doctoral), lecture et signature du formulaire d’information et de consentement (voir annexe E) et d’engagement à la confidentialité (voir annexe F), présentation du fonctionnement de la rencontre incluant les règles à respecter, brève présentation de chaque participant (prénom seulement) et réponse à une question initiale afin d’amorcer la discussion. Le contenu audio de chacun des entretiens de groupe a été enregistré. L’animatrice avait pour rôle de poser les questions aux participants en suivant le guide d’animation, en restant ouverte aux sujets amenés spontanément par les participants. Cette dernière s’est permis de sous-questionner les participants à certains moments afin de clarifier les propos. Les questions du guide d’animation ont aussi été présentées aux participants par écrit, via PowerPoint. Chaque individu a eu l’occasion de s’exprimer sur les différents thèmes abordés. Une liste de ressources d’aide a été remise à la fin de l’entretien de groupe (voir annexe G). De plus, un certificat-cadeau d’une valeur de 50,00$ a été remis afin de couvrir les frais encourus pour participer à l’étude, en plus du permis de stationnement pour les participants qui ont dû se stationner à l’Université Laval. La présente étude a reçu l’approbation du Comité d’éthique

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de la recherche avec des êtres humains de l’Université Laval (No d’approbation 2012-079

Phase II A-1 / 18-01-2013).

Analyses qualitatives

L’audio des entretiens de groupe a été transcrit pour analyses en format Word par deux assistants de recherche au baccalauréat. Les analyses qualitatives ont été réalisées à l’aide du logiciel QDA Miner version 4.1.9 (Provalis Research), permettant entre autres de d’attitrer les codes (ou catégories) élaborés par le chercheur à des segments de texte ainsi que d’effectuer des analyses, dont l’évaluation de l’accord interjuges. L’analyse inductive est utilisée, celle-ci étant définie par un ensemble de procédures systématiques permettant de traiter des données qualitatives (Blais & Martineau, 2006). Ce type d’analyse vise principalement à condenser des données brutes, variées et nombreuses, à faire émerger des catégories en lien avec les objectifs de la recherche et à développer un cadre de référence à partir des catégories émergentes (Thomas, 2006). L’analyse de type inductive a été privilégiée puisqu’il était attendu que des dimensions n’ayant pas été documentées dans la littérature soient mises en lumière, considérant le caractère novateur de certains objectifs de recherche. L’analyse des données est effectuée en suivant les quatre étapes suivantes, telles qu’énoncées par Blais et Martineau (2006) : (1) préparer les données brutes, (2) procéder à une lecture approfondie du matériel, (3) procéder à l’identification et à la description des premières catégories et (4) poursuivre la révision et le raffinement des catégories. Les catégories (ou thèmes) sont regroupées dans un guide d’analyse, dans lequel chacune des catégories est décrite et illustrée à l’aide d’exemples.

Afin d’augmenter la rigueur de l’analyse des données, une procédure d’accord interjuges a été effectuée. Lorsque l’étudiante en charge de l’étude a complété les quatre étapes décrites ci-haut menant au guide d’analyse, cette dernière ainsi qu’un assistant de recherche de niveau doctoral ont assigné les catégories du guide d’analyse à des segments du texte, de façon individuelle, sur 50% du matériel. Le taux d’accord entre les assignations de l’étudiante et de l’assistant de recherche a été évalué à l’aide du logiciel QDA Miner. Le guide d’analyse et le codage des segments de texte par l’étudiante et l’assistant de recherche ont été révisés et raffinés jusqu’à l’atteinte d’un accord interjuges final de 99,7 % (alpha de Kripendorff = 0,87). Puisque ce niveau d’accord était jugé satisfaisant

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(Neuendorf, 2002), l’étudiante en charge de l’étude a par la suite complété l’assignation des catégories à l’ensemble du texte à l’aide du guide d’analyse final.

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Résultats

Les résultats sont présentés selon chaque objectif sous forme de thèmes ressortant des discussions avec les participants à l’étude. Sauf lorsque spécifié, les thèmes proviennent du verbatim des deux groupes de joueurs. Les thèmes sont tous définis, puis illustrés à l’aide d’extraits du verbatim lorsque cela permet d’enrichir la compréhension du thème. Dans le but de favoriser une meilleure compréhension du contenu, quelques tics vocaux, hésitations et onomatopées ont été retirés des extraits, tout en s’assurant de ne pas modifier le sens des propos ainsi que l’intensité associée. Les Figures 1 à 5 illustrent l’ensemble des thèmes répertoriés en lien avec les objectifs de recherche, en fonction du groupe de joueurs.

Facteurs susceptibles de favoriser une demande d’aide précoce

Les participants ont mis de l’avant différents facteurs susceptibles de favoriser une demande d’aide plus tôt dans l’évolution du problème de jeu, ceux-ci faisant parfois écho au vécu individuel du joueur, ou encore, à la société dans son ensemble. Ainsi, être bien informé au sujet des JHA et des risques associés, être en mesure de reconnaître les premiers signes du problème de jeu ainsi que le fait de voir des publicités encourageant la consultation pourrait mener à une demande d’aide moins tardive.

Être mieux informé et sensibilisé. Faire en sorte que les joueurs ainsi que la

population générale soient mieux informés au sujet des JHA, notamment en ce qui a trait aux risques de dépendance associés aux différents types de jeu (p. ex. billet de loterie c. ALV). Il est également suggéré de bien expliquer ce qu’est un problème de jeu, par exemple en faisant un parallèle avec l’alcoolisme afin de bien illustrer qu’il s’agit d’une dépendance affectant le fonctionnement neuronal.

C'est un manque de publicités pour renseigner les gens que c'est une dépendance comme l'alcool. (Joueur ayant récemment complété une thérapie) Ils pourraient informer les gens qu’il faut faire attention. Que c'est pas un billet de Loto-Québec, que c'est pas si… Que c'est quelque chose qui procure dans la tête de la dopamine pis que c'est plus grave que d'aller chercher un billet de loto. Il y a des conséquences. (Joueur ayant récemment complété une thérapie)

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De plus, l’importance d’informer la population qu’il s’agit d’un problème qui peut survenir chez n’importe quel individu est mise de l’avant, ce qui pourrait avoir un effet bénéfique en réduisant la honte et la stigmatisation auxquels les joueurs problématiques peuvent être confrontés.

Ben une campagne de publicité un peu comme les burnout, t’sais là. Asteure c'est vraiment plus accepté dans les bureaux. Savoir que quelqu'un part en burnout avant c'était comme «ah, il est faible». Si l'image était véhiculée dans le sens où personne pourrait chercher de mal sur une personne qui doit être respectée par la société. C'est pas un BS ou quoi que ce soit. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Il est donc proposé d’agir au niveau de la méconnaissance de ce qu’est un problème de jeu, des préjugés envers les joueurs ainsi qu’au niveau de la perception des JHA et de leurs risques, et ce par le biais de la diffusion d’informations dans la population générale, afin de favoriser une utilisation précoce des ressources d’aide par les joueurs.

Reconnaître les premiers signes du problème. Être en mesure de reconnaître

les changements dans les habitudes de jeu ou les premiers signes du problème afin de pouvoir en parler avec des membres de l’entourage ou à un professionnel de la santé plus rapidement. La reconnaissance du problème de jeu est identifiée comme une étape nécessaire au processus de demande d’aide, mais qui se produit souvent tardivement, alors que le joueur vit plusieurs conséquences.

Ouais, tout suite tout suite tout suite. Regarde, tu vois que ça devient une… même si c’est une petite habitude, même si c'est juste cinq piastres une fois de temps en temps, demande de l'aide tout de suite. (Joueur ayant récemment complété une thérapie)

Dans le même ordre d'idée, c'est souvent la prise de conscience, c'est-à-dire que tant et aussi longtemps qu'on ne reconnait pas, il y en a pas de problème. On peut perdre énormément d'argent, mais si ça pose pas… si c'est pas lié à un problème qu'on reconnait, on va perdre 20 000 [dollars] ici pis on va continuer, c'est pas tannant… Jusqu'à temps que… Parce que perdre 20 000 [dollars] c'est pas normal. Perdre x, perdre ma maison, perdre mes enfants, c'est pas normal, il y a quelque chose qui se passe. À partir de ce moment-là, je pense que quand la prise de conscience se fait que nos habitudes nous amènent à ces constats-là, là à ce moment-là on est en mesure de poser un pied et de dire oups. (Joueur n’ayant jamais consulté)

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Ainsi, la reconnaissance des premiers signes du problème de jeu devrait favoriser une demande d’aide précoce, mais les participants expriment qu’il s’agit d’une étape complexe puisqu’il n’existe pas, selon eux, d’indicateurs clairs du jeu à risque ou pathologique, comme dans le cas de l’alcool où le taux d’alcoolémie est mesurable, par exemple. De plus, des variables intrinsèques au joueur peuvent contribuer à la difficulté de cette étape, entre autres l’orgueil (p. ex. avoir de la difficulté à s’admettre vaincu) et l’espoir d’arriver à s’en sortir par le gain.

[…] Un gars qui prend de l'alcool, on va y donner, on va y dire toi t'es grand, tu mesures tant de pieds, donc tu as le droit de prendre telle quantité d'alcool à l'heure, parce que sinon tu vas dépasser le .08, pis tu vas être dans une situation de danger, ou bien, y vont mettre dans les bars des petits souffleurs là, où tu souffles là, bon. Nous autres on n'en a pas. Quand est-ce qu'on se situe en situation de risque? Pis en situation de risque on peut aller cherche de l'aide. […] (Joueur ayant récemment complété une thérapie)

Ouais, je ne réalisais pas. Le jeu, je me disais je vais me refaire, j'avais tout le temps de l'espoir. (Joueur ayant récemment complété une thérapie)

Les outils de dépistage des problèmes de jeu, entre autres un questionnaire ciblant les comportements à risque, sont identifiés comme étant susceptibles de faciliter le processus de reconnaissance du problème de jeu, en amenant le joueur à réfléchir sur ses habitudes de jeu peu importe la gravité de son problème. Notons par ailleurs que l’utilité des questionnaires de dépistage a également été remise en doute. Au cours de la discussion, des exemples concrets d’indicateurs d’un problème de jeu sont proposés en fonction du vécu de chacun : organiser sa routine de vie en fonction du jeu et passer beaucoup de temps à jouer, perte d’intérêt pour les autres activités, mentir au sujet des habitudes de jeu, miser plus d’argent que prévu, rejouer tous les gains dans l’espoir de gagner plus, frauder pour obtenir de l’argent, avoir l’impression de contrôler le jeu.

Les questions c'est bon aussi pour les personnes qui ne sont pas rendues très loin dans le jeu. Qu’elles aient une réflexion c'est intéressant en maudit, pis même pour une personne qui a un problème de jeu profond, elle va se les poser pareil les questions. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Un questionnaire, tu réponds aux questions pis ils disent si t'es dangereux ou pas. D'après moi ça ne sert à rien. (Joueur n’ayant jamais consulté)

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Voir des publicités de promotion des traitements. Il est suggéré de faire de la

publicité ou d’augmenter le nombre de publicités afin d’inciter les joueurs à consulter et/ou de faire connaître les traitements ou ressources disponibles, par exemple les joueurs anonymes.

Peut-être, publiciser un peu plus les joueurs anonymes. Parce que celui qui est gêné d'y aller, qui a peur d'être reconnu. C'est comme les alcooliques anonymes. Normalement, c'est comme ici ce soir, t’sais quelque chose de confidentialité. Peut-être que ça inciterait un peu plus les gens à vouloir y aller. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Les participants proposent d’emblée des éléments liés au contenu de ces publicités, alors qu’ils sont questionnés à ce sujet ultérieurement. L’influence de la source des publicités est également discutée, notamment dans le cas de Loto-Québec, qui fait la promotion des JHA mais est également associé à des publicités de prévention incluant des références à des ressources d’aide. La contradiction entre ces deux mandats est soulevée.

Ailleurs, pis pas nécessairement fait par Loto-Québec. C'est ça le problème de Mise sur Toi. Tu te dis voyons maudit, t’sais ils te font… ben ils t'attirent pour que tu ailles mettre ton argent dedans, pis après ils te payent la thérapie là. C'est complètement contradictoire, ça n’a pas de bon sens. (Joueur ayant récemment complété une thérapie)

Par ailleurs, l’idée que les publicités de promotion des traitements du jeu puissent avoir un effet limité voire aucun effet sur l’individu est également émise. Il est nommé que certains joueurs peuvent ignorer volontairement les publicités ou encore, qu’elles risquent de ne pas faire le poids face à l’intensité des envies de jouer, voire même susciter cette envie de jouer.

Je vois une annonce, je peux aussi bien mettre mon manteau puis aller jouer. (Joueur n’ayant jamais consulté).

Facteurs ayant émergé chez les joueurs n’ayant jamais consulté

Alors que les thèmes précédents étaient communs aux deux groupes, d’autres facteurs susceptibles de favoriser une demande d’aide précoce sont ressortis seulement chez les joueurs n’ayant jamais consulté, c’est-à-dire le fait d’être aidé par d’anciens joueurs et d’être rencontré directement dans le milieu de jeu.

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Être aidé ou inspiré par d’anciens joueurs. Le fait que l’intervenant qui apporte de

l’aide soit une personne qui a déjà eu un problème de jeu a été soulevé comme un élément qui pourrait favoriser la demande d’aide précoce. Certains avantages à utiliser le vécu d’anciens joueurs sont nommés, dont le fait de se sentir plus en confiance et mieux guidé par quelqu’un qui est passé par un cheminement semblable. L’importance de la crédibilité de l’intervenant et de la richesse de son vécu personnel est donc mise de l’avant et il est attendu que ces caractéristiques soient présentes chez un intervenant ayant vécu la problématique du jeu. L’expérience d’anciens joueurs peut également être utilisée par le biais de témoignages de leur histoire de jeu et de ce qui a été aidant afin d’arrêter de jouer, ce qui pourrait favoriser des prises de conscience et mener à la consultation.

Dans ces dépendances-là effectivement, que la personne elle, elle l'a vécu. Tu peux avoir la meilleure des personnes qui te comprend, qui comprend ce que tu lui dis, oui je te comprends, oui, tu peux avoir toute la formation que tu veux. Mais un moment donné, ça prend un peu plus, d'avoir le vécu. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Je pense que ça apporte une crédibilité qu'aucun chercheur aura. Tout simplement, il y a des trucs qui ne s'apprennent pas dans les livres. Ou si la personne s'accote sur une personne qui a déjà eu le problème. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Ce qu'il disait tantôt, c'est une bonne idée ça, comme solution, entendre des témoignages, des vraies histoires, t’sais ce que le monde garde pour eux autres, ce qui est arrivé, des fois ça frappe. Des fois tu te dis câline il s'en est sorti, mais lui il a perdu en tabarouette, il a joué longtemps. (Joueur n’ayant jamais consulté)

Être rencontré dans le milieu de jeu. Afin de favoriser la demande d’aide chez les

joueurs, des références vers des ressources d’aide et du soutien devraient être offerts en personne, directement dans les milieux de jeu. Plus précisément, des psychologues, anciens joueurs ou même des serveurs sur place pourraient rencontrer les joueurs vivant des difficultés pour leur donner des conseils, favoriser des prises de conscience et remettre de la documentation au sujet des alternatives pour arrêter de jouer, ce qui permettrait une intervention plus humaine et susceptible d’aider les joueurs à s’en sortir. L’importance est mise sur le côté humain de l’intervention, par exemple le fait qu’un dépliant est remis d’une personne à une autre.

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