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Chapitre II : Le cinéma muet chinois avant 1930

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4.3 Voir la caméra

Il est fréquent que le personnage regarde la caméra dans ce film. Même l’actrice principale regarde la caméra de temps en temps (voir plans 4-5, 6, 7). On n’est pas sûre que ce soit une demande du réalisateur, ou une habitude des acteurs car ils sont aussi acteurs de théâtre moderne.

On peut constater que le cinéaste ne suit pas un standard important du cinéma classique : construire un monde fermé dans le film, et effacer toutes les traces de tournage. Il n’a pas beaucoup de connaissances professionnelles à ce moment là, donc il cherche une solution simple et originale pour faciliter le tournage.

En conclusion, les cinéastes ZHANG Shichuan (réalisateur) et Zheng Zhengqiu (scénariste) ont pratiqué la production de cinéma en 1913 pour la première fois. Pendant une interruption de dix ans, ils fréquentent le cinéma pour voir et apprendre le film américain et européen. Quand ZHANG Shichuan recommence à tourner des films en 1922, il imite le cinéma occidental, en même temps, il cherche une solution originale et simple.

Dans Romance d’un marchand ambulant, la coexistence d'un cinéma primitif et d'un cinéma classique est remarquable, tandis que ces deux modèles de représentation présentent un caractère caduque par rapport à l’histoire du cinéma occidental. Si on considère que la production du cinéma chinois est très en retard, tandis que la projection du film occidental est florissante depuis 1896, il est normal que relativement à l'histoire du cinéma chinois, dans un film "primitif" chinois de 1922, on puisse voir à la fois le caractère de documentaire, le modèle primitif et le modèle classique.

Le système de « trois plans » et la répétition sont des procédés expéditifs pendant le tournage. C’est un style personnel du cinéaste ZHANG Shichuan. On continuera à analyser son style dans les films des années trente.

Le cinéaste n’a pas un concept clair de construction d'un monde fermé dans le film. Comme certains films primitifs dans l’histoire du cinéma occidental, il reste des traces de tournage dans ce court-métrage. Plus particulièrement, la distinction entre l’espace filmique et l’espace réel est confuse. Tout cela forme un effet de déconstruction de film, d’après la théorie du cinéma d’aujourd’hui. La créativité du cinéaste et le mélange de modèles font un style original et particulier dans ce film.

III Analyse des cinq longs-métrages des années vingt

Il ne reste que cinq longs métrages complets des années vingt, la liste est la suivante :

Un collier de perles (1925, LI Zheyuan, HOU Yao), 5962 secondes, 611 plans, l'ASL est de 9.76 secondes70. Le générique est construit par plusieurs plans, sur fond de dessin, et présente le titre du film et le personnel de l’équipe.

La Rose de P ushui (Histoire de la chambre de l'ouest,1927, HOU Yao), version française, 2550 secondes, 496 plans, l'ASL est de 5.14 secondes. Le générique se compose d'un plan, dont le fond est une image fixe de paysage du temple Pushui, et présente le titre du film.

S'embrasser de n ouveau (1928, XIE Yunqing), 3575 secondes, 683 plan, l'ASL est de 5.23 secondes. Un plan de générique présente le titre du film, deux acteurs principaux et le studio.

Une orpheline (1929, ZHANG Huimin et ZHOU Juanmin), 4510 secondes, 834 plans, l'ASL est de 5.41 secondes. Le générique est construit par 4 plans, sur fond noir, et présente le titre du film et le personnel de l’équipe.

Mon fils est un héros (1929, YANG Xiaozhong et CHEN Zhiqing), 4234 secondes, 536 plans, l'ASL est de 7.9 secondes. Le générique est construit par neuf plans, sur fond noir, et présente le titre du film, le personnel et les interprètes.

L'ASL du cinéma hollywoodien de 1917 à 1928 est entre 5 et 7 secondes. Le cinéma chinois des années vingt possède une vitesse normale dans le cadre du standard hollywoodien, qui est aussi l’exemple à suivre pour le cinéaste chinois. Pourtant, le film chinois a une tendance à être plus lent. Dans ces cinq films, il n’y a pas de film dont la vitesse est inférieure à 5 secondes, mais deux films dont la vitesse est supérieure à 7 secondes.

La vitesse la plus rapide est celle de La Rose de Pushui : 5.14 secondes. Le film qu’on peut voir aujourd’hui est une version française. Selon HOU Yao, il y a une scène importante sur le rendez-vous du héros et de l’héroïne71, mais cela n’est pas présenté clairement dans cette

version. D’après Histoire du cinéma chinois, c’est un film de 10 bobines72. On croit que ce film a été refait et beaucoup coupé quand il a été distribué en France. Ce film raconte une histoire d’amour romantique et il possède beaucoup de scènes de paysage et de jardin chinois. On peut voir que cette version française n’a pas pu montrer totalement la beauté du paysage dans le plan, car le plan ne dure pas assez longtemps. Il est possible que la vitesse soit beaucoup moins rapide dans la version chinoise.

Un c ollier de perles est une production méticuleuse du studio Great Wall (Changcheng Huapian Gongsi), réalisée par le cinéaste qui a appris sérieusement la technique du film à Hollywood. C’est un film tout à fait semblable au film hollywoodien au niveau de la composition du plan et de la construction de scène. Cependant, la vitesse de 9.76 secondes est beaucoup plus lente en comparaison avec son exemple, le film hollywoodien.

En plus, le film chinois des années vingt possède certains plans relativement longs. Souvent c’est le plan de paysage. Tandis qu’un plan ne peut pas être très long dans le film hollywoodien. Par exemple, l’ouverture dans Un collier de perles est un plan de paysage qui dure 35 secondes. Il y a aussi un plan fixe qui dure 65 secondes pour montrer la courte action du voleur : il s’assoit sur la table et choisit les bijoux. Dans Une orpheline, le plan d’ensemble en extérieur dépasse souvent 30 secondes.

71候曜,《眼底的西厢》,1927,《中国无声电影》,中国电影资料馆编,北京:中国电影出版社,1996, p 326。

HOU Yao, La Rose de Pushui à voir, 1927. Le cinéma muet chinois / ed. par La Cinémathèque chinoise. Beijing: Maison d’édition du cinéma chinois, 1996, p326.

72 《中国电影发展史》(两卷),程季华主编, 北京: 中国电影出版社,1963。

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