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Cinéaste des années cinquante et soixante

Chapitre I : Problème de méthode

2.2 Cinéaste des années cinquante et soixante

La pensée des cinéastes des années 50 et des années 60 s’appuie sur l’étude de l’esthétique traditionnelle dans le domaine du cinéma. Les recherches sont conduites surtout par les cinéastes eux-mêmes et la plupart s’appuient sur leurs expériences de travail. Les films et les écrits que ces artistes nous ont laissés ont ouvert de nouvelles perspectives théoriques au cinéma chinois. Les écrits représentatifs sont : Art c inématographique et c aractère du cinéma (HAN Shangyi, architecte décorateur)41, Apprendre l’art traditionnel- Note su r la fo rme nationale du cinéma (XU Changlin, réalisateur)42, Style de l'image dans le film d ’opéra trad itionnel (HAN

Shangyi)43, De la beauté de la forme (JIANG Jin, architecte décorateur)44, et Expérience de `

40FEI Mu, Parler de « l’air », 1934. Anthologie de la théorie chinoise du cinéma de cent ans, 1897-

2001 (vol. I) / ed. par DING Yaping, Beijing : Maison d’édition de la culture et l’art, 2002, p 216.

41 HAN Shangyi, Dianying meishu yu dianying texing (Art cinématographique et caractère du cinéma). Lun dianying

yu xiju de meishu sheji ( L’étude du décor dans le cinéma et dans le théâtre), Beijing, 1962, p.37.

42 XU Changlin, Xiang chuantong yishu tanshengqiubao-Dianying minzhu xingshi zenti xuexi biji (Apprendre l’art traditionnel- Note sur la forme national du cinéma).

«L’Arbre mo rt re prend vi e » (ZHENG Junli, réalisateur et acteur)45, etc. Le théoricien de Hongkong LIN Niantong analyse les études de ces cinéastes de façon claire dans son essai « Les théories du cinéma chinois et l’esthétique traditionnelle»46. On peut consulter cet essai pour mieux connaître l’école de l’esthétique traditionnelle.

ZHENG Junli utilise très tôt les mouvements de caméra continus dans l’esprit de la tradition chinoise. Il mentionne qu'une scène de son film L’Arbre mort reprend vie lui rappelle la peinture sur rouleau intitulée La fête du printemps sur le bord du fleuve, du peintre ZHANG Zeduan sous la dynastie de SONG. Il a dit « Dans une composition picturale, le peintre, grâce à un point de vue changeant, peut inscrire des scènes fort différentes dans un flux organique continu. Tout ce que l’œil peut embrasser en parcourant le rouleau est semblable à ce que la caméra nous montre avec un panoramique »47. Il faut retenir le fait que c’est à partir des années 30 que les cinéastes chinois recherchent la beauté de la peinture sur rouleau en utilisant le mouvement de la caméra. C’est la raison pour laquelle le plan-séquence devient un moyen d’expression privilégié à cette époque. ZHENG Junli fut le premier cinéaste à étudier en profondeur cette question esthétique.

Les architectes décorateurs HAN Shangyi et JIANG Jin et l’opérateur NIE Jin continuent à chercher les différents problèmes esthétiques sur cette direction. HAN Shangyi a démontré, en employant les mouvements de la caméra dans le droit fil de la tradition chinoise qu’il peut exister une relation fructueuse, dans l’organisation de l’espace en plans successifs, entre les mouvements de caméra, la peinture de paysage et l’art des jardins chinois.

Les idées de Han furent encore développées dans le procédé du cadrage afocal mis en œuvre par JIANG Jin, qui représentait pour lui un moyen d’expression inspiré de la succession des espaces dans les peintures sur rouleau. JING Jin insiste sur le fait que le cadrage afocal doit

Anthologie de la théorie chinoise du cinéma, 1920-1980 ( vol.I) / ed. par LUO Yijun. Beijing : Maison d’édition de

la culture et l’art, 1992, p571.

43 HAN Shangyi, Xiqu yingpian de zaoxing fengge (Style de l'image dans le film d’opéra traditionnel).

Anthologie de la théorie chinoise du cinéma, 1920-1980 (vol. I) / ed. par LUO Yijun. Beijing : Maison d’édition de

la culture et l’art, 1992, p612.

44 JIANG Jin, Lun Xingshi mei (De la beauté de la forme), Dianying yishu (Art du cinéma), Nº 32,1963, p32. 45 ZHENG Junli, Kumu fengchun chuangzuo deshi tan (Expérience de L’Arbre mort reprend vie ). Anthologie de la

théorie chinoise du cinéma, 1920-1980 (2 vols) / ed. par LUO Yijun. Beijing : Maison d’édition de la culture et l’art,

1992, p638.

46 LIN Niantong, Les théories du cinéma chinois et l’esthétique traditionnelle. Le cinéma Chinois / ed. par QUIQUEMELL Marie-Claire, PASSEK Jean-loup. Paris : Centre Gorges pompidou, 1985, p89.

posséder une affinité esthétique avec la notion de You (Vagabondage de l’esprit). Dans son essai De la beauté de la forme, il affirme « En effet, Le Rêve dans le pavillon rouge (Film de CEN Fan, 1961) a une structure fragmentée, et pas assez de cohésion pour amener le public “vagabonder” (you). Le film est trop direct, trop peu suggestif ». Le cinéaste indique ici très clairement que l’utilisation du plan-séquence et du cadrage afocal a sa valeur esthétique dans le film.

NIE jing enrichit la théorie cinématographique d’une notion aussi importante, celle de « musicalité » de séquences (Jing-yun, l’esprit de la caméra). Il affirme que chaque séquence doit posséder un « schéma prosodique » et que les scènes doivent se succéder selon « un flux harmonique ».

En ce qui concerne les modes de production des images cinématographiques, la réflexion des cinéastes des années 50 et années 60 ne s’appuie pas uniquement sur la technique cinématographique, ils font davantage de recherches sur la valeur esthétique traditionnelle du film. Un système esthétique du cinéma chinois s’est constitué, fondé sur les mêmes principes et sur les mêmes canons que l’esthétique traditionnelle.

3 Théorie de « montage et Fu, Bi et Xing »

Dans la poésie chinoise, la façon d’utiliser Fu, bi et xing est la clé pour atteindre l’imagination poétique. En étudiant la langue de la poésie chinoise, bi et xing est la logique de construction, la structure, c’est-à-dire la façon de relier les mots dans la phrase. Cela ressemble au découpage au cinéma. De ce point de vue, il est raisonnable que des cinéastes cherchent la relation entre le montage et le système de bi et xing.

Un article de Xu Changlin intitulé « le montage cinématographique et les modes d’expression de la poésie chinoise » propose pour le cinéma chinois une démarche sur les modes traditionnels

d’expression poétique fu, bi et xin. Selon LIN Niantong, c’est une démarche fondée sur les recherches de transmission de la « poésie » par le langage cinématographique48.

Le cinéaste de Hongkong LIU Chenghan continue cette recherche dans son article La théorie du cinéma-Fu, bi et xing 49publié en 1980. Il étudie systématiquement la technique de fu, bi et

xin dans le poème chinois, et cherche les points communs entre le poème et l’image cinématographique comme système de rhétorique. L’auteur prétend qu’il faut chercher la particularité dans le cinéma chinois, et développer la théorie chinoise du cinéma.

L’autre article Le Montage chinois étudie la ressemblance entre la structure de la poésie et le raccord typique du montage entre le personnage et le paysage de la nature dans des films chinois célèbres. D’après l’auteur, c’est la manifestation de l’esthétique traditionnelle dans la poésie et du lyrisme au cinéma. Il déclame: « C’est précisément par cette technique du montage lyrique d'images simples filmées avec une caméra statique que les réalisateurs de film chinois essaient maintenant d'exprimer visuellement, toutes les émotions de leurs histoires. Ces montages sont si fréquents et uniformes dans tous les films chinois qu’ils constituent, si vous voulez, une sous- catégorie de ce que Metz a nommé les syntagmes de la parenthèse, si typiquement chinois qu’ils sont désignés sous le nom de montage chinois50. »

Cette manière de relier le montage et la rhétorique du poème chinois est partagée par beaucoup de cinéastes et théoriciens du cinéma. C’est une recherche originale, mais pas assez approfondie.

48LIN Niantong, Les théories du cinéma chinois et l’esthétique traditionnelle. Le ci néma C hinois / ed. par QUIQUEMELL Marie-Claire, PASSEK Jean-loup. Paris : Centre Gorges pompidou, 1985, p88.

49刘成汉,《电影理论赋比兴》,刘成汉,《电影赋比兴集》,台北:远流出版社,1992, p 3。 LIU Chenghan, La théorie du cinéma- Fu, bi et xing. LIU Chenghan, FU, bi , xing et le film. Taibei : Edition de

Yuanliu, 1992, p3.