• Aucun résultat trouvé

2.2 Des d´etecteurs `a double composante ionisation-chaleur

2.2.1 Voie chaleur

Le principe de fonctionnement d’un bolom`etre est le suivant. Un absor-beur (ici un cristal de germanium) de capacit´e calorifique C (en J.K−1 ) est mis en contact avec un r´eservoir de chaleur `a temp´erature T0 par un lien thermique G (en J.K−1.sec−1) (figure 2.4, en haut).

Apr`es le temps n´ecessaire `a la relaxation de toute l’´energie d´epos´ee en chaleur, l’absorption d’une particule d´eposant l’´energie E dans le d´etecteur, la temp´erature vaut : T = T0+EC. Le retour `a la temp´erature de base se fait par une relaxation thermique qui se traduit par une exponentielle d´ecroissante dont la constante de temps est li´ee `a la fuite thermique : τ = C

G. Si le temps n´ecessaire `a la relaxation en chaleur est n´egligeable devant τ , la variation de la temp´erature de l’absorbeur apr`es le passage d’une particule s’´ecrit comme suit :

∆T (T ) = E Ce

On obtient une impulsion d’une amplitude li´ee `a l’´energie d´epos´ee dans l’ab-sorbeur (cf figure 2.4 en bas).

Fig. 2.4 – En haut : sch´ema de principe d’un bolom`etre. En bas : impulsion thermique d’un bolom`etre apr`es un d´epˆot d’´energie instantann´e.

Chaleur sp´ecifique d’un semi-conducteur `a basse temp´erature L’´energie interne d’un isolant est r´epartie entre les modes collectifs de vi-bration du r´eseau cristallin (phonons). Le mod`ele de Debye d´ecrit ce syst`eme de gaz de phonons `a l’´equilibre thermodynamique [45].

Dans le domaine des basses temp´eratures, on obtient la capacit´e calori-fique (en J.K−1.g−1) : Cisolant = 1944nmaille Mmaille ( T θD )3

o`u nmaille est le nombre d’atomes dans la maille ´el´ementaire et Mmaille la masse molaire de cette mˆeme maille, θD est la temp´erature de Debye. Cette temp´erature est donn´ee par θD = ¯D

kB avec ωD fr´equence maximale des pho-nons acoustiques et kB la constante de Boltzmann [46].

Pour les semi-conducteurs, le gap est largement sup´erieur `a l’´energie d’agi-tation thermique (mˆeme `a temp´erature ambiante : kBT = 25 meV `a 300 K). Les ´electrons sont, pour la plupart, dans la bande de valence, et le nombre d’´electrons de conduction est n´egligeable pour la capacit´e calorifique. La loi de Debye pr´ec´edemment d´ecrite est donc valable pour les semi-conducteurs. Cette variation en T3 de la chaleur sp´ecifique permet d’obtenir de plus grandes variations de temp´erature du d´etecteur pour un d´epˆot d’´energie donn´e lorsqu’on se place `a basse temp´erature.

Lecture de la variation de temp´erature de l’absorbeur

La lecture de la temp´erature de l’absorbeur se fait avec un thermom`etre en germanium cristallin dop´e par transmutation neutronique dit NTD (Neutron Transmutation Doped). Le germanium `a tr`es basse temp´erature ne comporte pas de porteur de charge. Mais lors de l’irradiation par des neutrons ther-miques, des noyaux de Ge subissent des captures neutroniques pour former diff´erents isotopes de Ge qui d´ecroissent ensuite en des noyaux d’As, Se et Ga. Ceci permet d’obtenir un dopage al´eatoire tr`es uniforme dans le cristal. La cr´eation de porteurs par excitation thermique peut alors se faire `a plus basse temp´erature. La conduction de ces syst`emes rel`eve de la probl´ematique de Mott-Anderson [47] [48]. `A tr`es basse temp´erature dans un isolant d’An-derson, le m´ecanisme dominant de conduction est appel´e ”variable range hopping”, c’est-`a-dire par saut tunnel assist´e par phonons des ´electrons entre sites d’´energie proche. Dans la gamme de temp´erature qui nous int´eresse, un thermom`etre NTD qui est un isolant d’Anderson suit la loi :

R(T ) = R0exp(T0 T )

0.5

Pratiquement, le thermom`etre (d’un volume de l’ordre du mm3) est coll´e sur l’absorbeur de germanium. Lorsqu’une particule interagit dans l’absor-beur, la d´etection des phonons, apr`es relaxation de toutes les formes d’´energie

produites par l’impact, se fait par lecture de la variation de r´esistance du ther-mom`etre ce qui donne directement la quantit´e d’´energie qui a ´et´e d´epos´ee. Le temps de r´eponse du signal li´e au temps de thermalisation du cristal et du thermom`etre se situe entre 1 et 10 ms ce qui est relativement faible devant la constante de temps de la fuite thermique (qui est de quelques dizaines de ms).

Pour lire la variation de temp´erature du thermom`etre on fixe le courant qui le traverse et on lit la variation de tension qui est engendr´ee par l’augmen-tation de temp´erature (c’est le cas pour les exp´eriences faites au CSNSM). La technique de d´etection synchrone peut ˆetre utilis´ee (c’est la m´ethode utilis´ee pour l’exp´erience EDELWEISS `a Modane).

La figure 2.6 montre la variation de temp´erature associ´ee `a l’interaction d’une particule dans le bolom`etre (le temps caract´eristique CG de retour du signal `a la ligne de base peut ˆetre perturb´e par l’usage de filtres).

0 50 100 150 200 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 Temps (msec)

Variation de température (normalisé)

Fig. 2.5 – Variation de temp´erature associ´ee `a l’interaction d’une particule dans l’absorbeur en fonction du temps (ms).

La courbe de la variation de la r´esistance en fonction de la temp´erature pour le bolom`etre ID201 (le bolom`etre principalement ´etudi´e au cours de cette th`ese) est montr´ee figure 2.6 en haut `a gauche. La loi de variation de r´esistance en fonction de la temp´erature cit´ee plus haut est respect´ee. L’´electronique de mesure est optimis´ee pour une imp´edance du thermom`etre de l’ordre de 1 MΩ. Pour nos exp´eriences, cela correspond `a une temp´erature de 26 mK.

La tension aux bornes du thermom`etre en fonction du courant qui le par-court n’est pas lin´eaire car plus on polarise le thermom`etre et plus il dissipe de l’´energie par effet Joule ce qui augmente sa temp´erature (cf figure 2.6 en

20 30 40 50 60 0 2 4 6 8 10x 10 5 Température (mK) Résistance (ohm) y(x) = a.exp((b /x)^0.5) a = 2.0878 b = 4439.6 R = 0.99996(lin) 0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4 4.5 I (nA) V (mV) 32 mK 30 mK 0 0.5 1 1.5 2 2.5 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4 I (nA) dV/dT (V/K)

Fig. 2.6 – En haut `a gauche : variation de la r´esistance du thermom`etre en fonction de la temp´erature du bolom`etre ID 201. En haut `a droite : Variation de la tension aux bornes du thermom`etre en fonction du courant qui lui est impos´e. En bas : Sensibilit´e (en V/K) en fonction du courant de polarisation.

haut `a droite). Pour augmenter la tension V , on pense alors `a augmenter le courant I. Mais la puissance dissip´ee par effet Joule augmente et chauffe le bolom`etre. Il y a donc une comp´etition entre l’augmentation du courant dans le thermom`etre (pour augmenter la sensibilit´e du thermom`etre), et la r´eduction de la r´esistance R induite par l’´el´evation de temp´erature caus´ee par ce courant et qui r´eduit dR

dT.

Pour trouver la valeur du courant la plus appropri´ee, on diff´erencie les courbes V (I) effectu´ee `a des temp´eratures diff´erentes pour obtenir la courbe de sensibilit´e (∆V

∆T) en fonction du courant de polarisation. Sur cette courbe (cf figure 2.6 en bas), on observe bien l’existence d’une valeur du courant o`u la sensibilit´e est la plus ´elev´ee. C’est `a cette valeur du courant qu’il faudra se placer pour avoir le signal de l’amplitude la plus ´elev´ee possible.Pour le d´etecteur ID201, la sensibilit´e maximale est de 0.37 V/K pour un courant de 1.2 nA `a 31 mK (la sensibilit´e `a plus basse temp´erature doit ˆetre plus importante mais nous ne disposons pas ici des donn´ees de r´esistance du ther-mom`etre `a plus basse temp´erature). Il est possible de remonter `a la sensibilit´e en ´energie par le biais des relations suivantes : ∆V

∆E = ∆V ∆T∆T

∆E = ∆V

∆T ∗C. La capacit´e calorifique du germanium vaut : 0.51 10−6T3 (J.K−1.g−1) soit pour notre cristal de 193 g `a 31 mK : 2.65.10−9(J.K−1). Ainsi la sensibilit´e en ´energie de notre bolom`etre est de : 22 nV.keV−1 (`a 31 mK) si on n´eglige les autres termes de capacit´e calorifique, en particulier celle du thermom`etre NTD.