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Chapitre 4 : La présentation des résultats

5.4 Impacts de la trajectoire des participants durant leur enfance sur leur vie actuelle

5.4.3 Vision de la famille idéale

La majorité des participants s’entend pour dire que le scénario idéal pour la sphère familiale reste que les deux parents demeurent ensemble, si la situation le permet. Ils perçoivent cette possibilité comme étant la plus stable et la plus bénéfique pour les enfants. Dans le cadre de la présente étude, une majorité des répondants utilise le terme « mal nécessaire » pour décrire la séparation parentale. Elle est d’ailleurs plus facilement acceptée lorsqu’elle prend place dans certains contextes. On parle ici d’un environnement familial négligent, néfaste ou qui pourrait affecter négativement les enfants étant impliqués. Le contexte semble ainsi être un élément essentiel à l’acceptabilité sociale ou non de la séparation. On peut notamment parler d’une « solution acceptable à une vie de couple malheureuse » (Godbout, Saint-Jacques et Ivers, 2018). Certains, comme Stéphanie,

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dénoncent d’ailleurs la facilité à laquelle les gens de notre société actuelle optent pour la séparation. Cela rejoint l’opinion de la majorité des Québécois (87 %), selon l’étude menée par Godbout, Saint-Jacques et Ivers (2018).

À la suite de la séparation parentale, il arrive parfois que les enfants constatent une différence positive dans le comportement de leurs parents qui n’auraient probablement pas été possibles sans l’avènement de la dissolution de la famille. Cela corrobore plusieurs études dans lesquelles les participants évoquent que les parents paraissent maintenant plus « heureux » depuis qu’ils ne sont plus ensemble (Amato, 1994; Cartwright, 2006; Lambert, 2007). Cela peut notamment s’expliquer par le fait que la séparation engendre dans certains cas une diminution des tensions et des frictions, étant donné que les parents n’ont plus à cohabiter, réduisant ainsi les contacts directs. Les parents peuvent également rencontrer ou développer de nouvelles relations plus saines et positives que les précédentes (Amato, 1994; Cartwright, 2006; Lambert, 2007) ce qui aide à un contexte plus positif que le précédent.

5.4.4 Impacts de la séparation parentale sur le plan personnel

Pour ces répondants maintenant devenus adultes, il devient plus facile d’identifier certains bénéfices et pertes avec un recul quant à la séparation parentale survenue durant leur enfance. À cet effet, les hommes et les femmes interrogés ont nommé avoir développé une plus grande autonomie, une capacité d’adaptation, une force de caractère, une meilleure gestion des situations difficiles, de la débrouillardise et de l’indépendance. Cela vient ainsi corroborer les nombreuses études à ce sujet (Cartwright; 2006; Lambert, 2007 et Vaillancourt, 2007). À l’inverse, ces mêmes participants évoquent aussi avoir constaté certaines pertes sur le plan personnel. Ils font notamment référence à un manque de confiance en soi ou encore des problèmes de santé mentale (anxiété, attaques de panique et troubles alimentaires).

De plus, chez certains participants, le fait d’avoir vécu la séparation de leurs parents aura même eu une incidence quant à leur choix de carrière. Claudia et François nomment à cet effet avoir choisi une profession en relation d’aide, un choix qu’il considère directement

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lié avec leur expérience face à la séparation parentale. Cette transition leur aura permis de développer des habiletés qu’ils peuvent aujourd’hui mettre en application dans leur travail.

5.5 Trajectoire de vie familiale et conjugale des participants

Dans le cadre de cette étude, les participants ont été invités à compléter un calendrier de vie à la suite de l’entrevue. Ils avaient à y inscrire, par ordre chronologique, les événements qu’ils considèrent comme étant les plus significatifs dans leur trajectoire de vie conjugale et familiale. À la fin de cet exercice, ils devaient encercler un événement parmi ceux énumérés qu’ils considèrent comme ayant été le plus significatif dans chacune des trajectoires. En comparant les différents calendriers de vie, on constate que la moitié des répondants (n=6) nomme que l’élément le plus significatif de leur trajectoire de vie familiale, jusqu’à présent, est une recomposition familiale chez le père ou la mère avec un beau-parent ayant ou non des enfants. Les autres participants diront qu’il s’agit plutôt d’un changement de garde (n=3), un déménagement (n=1) ou encore des conflits importants avec un parent (n=1). Tous ces événements se sont déroulés alors que les participants étaient près de l’adolescence, soit à l’âge de 10 ans et plus. Seul Vincent rapporte que la recomposition vécue à l’âge de quatre ans fut l’événement le plus important.

Pour ce qui est de la trajectoire conjugale, il est plutôt difficile de faire ressortir une cohésion entre les différentes réponses obtenues. On remarque que certains des répondants ont indiqué qu’une relation amoureuse teintée de conflits (n=5) est considérée comme étant plus significative. Ils diront avoir appris énormément sur eux-mêmes et sur ce qu’ils souhaitent avoir ou non dans leurs futures relations. Les participants restants ont plutôt nommé une de leurs relations saines (n=5) qui est décrite comme étant aidante. Le point commun demeure que la relation aura apporté un certain enseignement au participant face aux relations conjugales. À noter que François et Laura n’avaient pas de données quant à cette trajectoire, n’ayant pas expérimenté de relation amoureuse.

En bref, il est possible de conclure que la séparation parentale vécue durant l’enfance peut avoir des répercussions à long terme dans différentes sphères de vie de la personne une fois rendue à l’âge adulte. L’impact de ces incidences dépend néanmoins d’une multitude de

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facteurs. On peut tout de même dégager certains éléments qui semblent être plus fréquents. En ce sens, les enfants maintenant rendus adultes semblent être portés à faire des comparaisons entre leurs relations amoureuses actuelles et celle de leurs parents, surtout si ces dernières deviennent sérieuses au point de vouloir fonder une famille. Leur expérience passée leur permet aujourd’hui de reconnaître ce qu’ils souhaitent reproduire ou non dans leur propre trajectoire. Selon les participants de la présente étude, il semblerait que les adultes ayant expérimenté la séparation de leurs parents seraient plus enclins à faire moins d’efforts au sein de leur couple si la relation se détériore. Certains voient la séparation comme étant une possibilité dans l’avenir de leur couple. Il n’y a toutefois pas d’unanimité à savoir si la séparation est considérée comme étant quelque chose qui peut bien se faire ou encore un échec. Les participants masculins ont exprimé avoir de plus grandes difficultés quant à la notion d’engagement. Il s’agit pour eux d’un élément anxiogène, craignant ainsi le rejet et l’échec. Cette difficulté peut notamment entraîner des lacunes, notamment face à la confiance en soi et la capacité à faire face aux imprévues et défis d’une relation conjugale.

De manière générale, nos participants s’entendent pour dire que le scénario idéal demeure toujours que les parents puissent demeurer ensemble pour le bien des enfants. La séparation peut toutefois être justifiable si la situation familiale est considérée comme néfaste. On peut alors parler d’un « mal nécessaire ». D’ailleurs, bon nombre de participants ont rapporté avoir vu leurs parents s’épanouir et être plus heureux à la suite de la séparation, notamment lorsqu’ils forment à nouveau un couple avec un partenaire au sein d’une relation qualifiée de plus saine. Ceci peut donc être aidant à la création de liens positifs avec ses parents concernant la trajectoire de vie familiale. À long terme, les répondants de cette étude auront été à même de pouvoir énoncer certains effets bénéfiques et néfastes de la séparation de leurs parents sur le plan personnel. On fait notamment mention de meilleures capacités d’adaptation, de résilience, d’autonomie et d’indépendance. À l’inverse, certains diront que le fait de vivre la séparation de leurs parents aura entraîné de l’anxiété ou un trouble alimentaire. Il n’y a toutefois pas de situation tout blanc ou noir. Chacun de nos participants peut affirmer avoir retiré des bénéfices comme des pertes. Finalement, il est possible de constater que nos participants semblent avoir une opinion relativement semblable face aux événements considérés comme importants à la suite de la séparation de leurs parents ayant

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teinté leur trajectoire de vie familiale et conjugale. La moitié des participants a nommé que la recomposition chez le père ou chez la mère constitue l’événement le plus important de leur trajectoire. Il s’agit donc d’une transition qui mériterait d’être davantage approfondie. Du côté de la trajectoire conjugale, il fut toutefois plus difficile de dégager un portrait aussi clair des éléments significatifs. L’événement choisi dans ce cas-ci, représente davantage une relation qui aura permis à la personne de pouvoir découvrir quelque chose sur soi ou encore d’aider la personne à mieux comprendre ce qu’elle désire ou non dans une future relation. Il fut impossible de faire ressortir d’autres éléments pouvant être révélateurs dans les résultats recueillis.

Pour conclure, les sections suivantes présentent les limites de la présente étude ainsi que les pistes de réflexion pour l’intervention et les futures recherches.