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Chapitre 4 : La présentation des résultats

5.1 Évolution des relations familiales à la suite de la séparation

Durant le parcours de vie de toute personne, les relations familiales sont appelées à changer et à se modifier à travers le temps. Toutefois, il arrive que certaines transitions, telles que la séparation parentale, soient directement impliquées dans la transformation relationnelle qui s’effectue entre le parent et l’enfant. Lors de ce processus, l’enfant peut notamment ressentir de la frustration ou encore de la rancœur à l’égard de son ou ses parents. Bien que ces sentiments soient souvent de courte durée, ils peuvent altérer, pour un temps du moins, les relations que les enfants entretiennent avec leurs parents. Comme Lambert (2007) le mentionnait, la rupture amène bien souvent des frictions entre l’enfant et le parent en réaction à l’instabilité familiale. Parmi les participants de cette étude, Claudia et Nicolas ont dit avoir attribué la responsabilité de la séparation à l’un de leurs parents, ce qui a nui à la qualité des relations parents-enfants. Il est d’ailleurs plus fréquent de blâmer l’un de ses parents ou encore de ressentir de la colère à leur égard chez les enfants âgés de 9 à 12 ans;

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âge que Claudia avait au moment de la séparation de ses parents (Ministère de la Justice, 2004a; Ministère de la Justice, 2013). Toutefois, les écrits scientifiques rapportent aussi que la séparation peut créer des rapprochements à long terme entre certains membres de la famille (Lambert, 2007; Morrison, 2014). À cet effet, Audrey et Vincent disent avoir développé une relation de proximité avec l’un ou les deux parents. À leurs avis, ceci n’aurait pas été possible sans la séparation de leurs parents. Lambert (2007), mentionne qu’il est plus rare que l’enfant développe le sentiment d’être plus près de ses deux parents, comme ce fut le cas pour Vincent. Le plus souvent, il se développe un sentiment de proximité entre l’un des parents et l’enfant au détriment de l’autre. Pour quelques participants, l’effritement de l’une des relations parentales fut vécu positivement, notamment lorsque le contexte relationnel est teinté de violence ou de conflits importants. C’est le cas de Catherine, Cédric et Nicolas qui voient l’éloignement de l’un de leurs parents positivement maintenant qu’ils sont devenus adultes. Cartwright (2006) trouve d’ailleurs que certains adultes ayant vécu la séparation de leurs parents dans leur enfance ou leur adolescence croient que si leurs parents étaient demeurés ensemble, ils auraient vécu une vie malheureuse ou conflictuelle. Ces constats montrent qu’il ne faut pas oublier que le processus de la séparation en soi n’est pas le seul facteur à considérer. D’autres éléments attribuables à l’enfant, au parent ou à l’environnement familial peuvent représenter des facteurs de risque ou de protection pour les relations qui se poursuivront entre les jeunes et leurs parents. Outre la relation parent-enfant, la séparation familiale entraîne également une transformation dans les relations qu’entretiennent l’enfant avec la fratrie et la famille élargie. La prochaine section fait état de la progression de ces relations à travers le regard des participants.

5.1.1 Évolution des relations familiales élargies à la suite de la séparation

Les écrits scientifiques mentionnent qu’il est bénéfique d’avoir des personnes significatives au sein de son entourage avec qui il est possible de se confier et de discuter de son expérience face à la séparation (Morisson, 2014). À cet effet, les répondants de cette étude ont cité à de nombreuses reprises l’aide et le support dont ils ont bénéficié de leurs grands-parents lors de cette période plus difficile. Claudia, Catherine et Nicole rapportent d’ailleurs l’appui donné par leurs grands-parents maternels afin de soutenir les parents lors

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des mois suivant la séparation. Le soutien peut également se présenter sous différentes formes dans la vie de l’enfant, soit par des modèles positifs. De plus, un soutien professionnel est parfois nécessaire. Ce fut notamment le cas pour Claudia, Catherine, Laura, Michaël et Nicolas. Il serait pertinent d’évaluer l’impact de ce soutien par rapport à son absence dans l’adaptation des enfants à la séparation de leurs parents dans le cadre de futures recherches. Néanmoins, il est certain que ce soutien est vécu positivement dans la vie des enfants.

Des liens étroits entre les différents membres de la fratrie favorisent également une meilleure adaptation (Morrison, 2014). À la suite de la séparation des parents, il n’est pas rare de voir une modification dans les rôles de chacun des membres de la fratrie en raison de la réorganisation familiale. On remarque que l’aîné de la famille est souvent porté à adopter un rôle de soutien et de protection face à ses frères et sœurs (Siméon, 2001). En quelque sorte, il semble remplacer le parent manquant. Ce fut notamment le cas pour Claudia et Catherine qui ont exprimé avoir pris davantage soin du reste de la fratrie à la suite de la séparation. Un besoin de protection semble être à l’origine de cette attribution de rôle. Celui- ci n’est toutefois pas perçu positivement par les participants en raison de l’augmentation des responsabilités. En ce sens, Claudia affirme avoir eu l’impression d’avoir été privée d’une partie de son adolescence, puisqu’elle devait prendre soin des autres. Dans la présente recherche, on constate que ce phénomène est plus présent chez les filles aînées. Les participants masculins ayant une fratrie n’ont pas exprimé explicitement l’inconfort lié à l’adoption de ce nouveau rôle. Les raisons de cette observation seraient à explorer davantage.