• Aucun résultat trouvé

L'expérience de la séparation parentale durant l'enfance et ses incidences à l'âge adulte : vécus et effets perçus par des enfants aujourd'hui adultes

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "L'expérience de la séparation parentale durant l'enfance et ses incidences à l'âge adulte : vécus et effets perçus par des enfants aujourd'hui adultes"

Copied!
143
0
0

Texte intégral

(1)

© Jessica Cantin, 2020

L'expérience de la séparation parentale durant l'enfance

et ses incidences à l'âge adulte : Vécus et effets perçus

par des enfants aujourd'hui adultes

Mémoire

Jessica Cantin

Maîtrise en service social - avec mémoire

Maître en service social (M. Serv. soc.)

(2)

L’expérience de la séparation parentale durant l’enfance

et ses incidences à l’âge adulte

Vécus et effets perçus par des enfants aujourd’hui adultes

Mémoire

Jessica Cantin

Sous la direction de :

(3)

ii

Résumé

Cette recherche qualitative porte sur l’expérience de douze participants âgés entre 19 et 29 ans ayant vécu la séparation parentale de leurs parents durant l’enfance. Les incidences à long terme sont ici examinées quant aux trajectoires de vie familiale et conjugale des répondants. Cette étude repose sur la perception de ceux-ci avant, pendant et après ce processus.

Les réponses des participants permettent de dégager certains facteurs susceptibles d’influencer l’expérience de chacun, soit l’évolution des liens familiaux, les modalités de garde ainsi que la recomposition familiale. Ces éléments auront une incidence sur la perception actuelle de nos répondants quant à la vision de la famille, l’engagement et le développement personnel. Les résultats suggèrent que la séparation parentale a une influence à long terme chez les personnes qui l’ont vécue. Les participants affirment que dans leurs relations conjugales, ils tentent de ne pas reproduire certains éléments qu’ils considèrent comme ayant été néfastes durant leur enfance. Ils tendent alors à vouloir mieux faire que leurs parents. Chez certains, la séparation leur aura permis de développer une plus grande autonomie, une capacité d’adaptation, une force de caractère, une meilleure gestion des situations difficiles, de la débrouillardise et de l’indépendance. Chez d’autres, ils auront développé des problèmes de santé mentale, tels que de l’anxiété et un trouble alimentaire. Enfin, les données de cette recherche soulèvent l’importance de maintenir le développement des connaissances dans ce domaine afin de mieux comprendre les besoins des personnes qui le vivent.

(4)

iii

Table des matières

RÉSUMÉ II

TABLE DES MATIÈRES III

LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX VI

REMERCIEMENTS VII

INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : LA PROBLÉMATIQUE 6

1.1L’OBJET DE RECHERCHE ET LA PRÉVALENCE 6

1.2LA DÉMARCHE DOCUMENTAIRE RÉALISÉE 9

1.3ÉTAT DES CONNAISSANCES 9

1.3.1LES RELATIONS FAMILIALES 9 1.3.2LES RELATIONS INTIMES 11 1.3.3L’EXPÉRIENCE PERSONNELLE 12 1.3.4LES MODALITÉS DE GARDE 13 1.3.5LA RECOMPOSITION FAMILIALE 15 1.4RÉSUMÉ DE LA RECENSION 15 1.5LES LIMITES MÉTHODOLOGIQUES 19 1.6LA PERTINENCE SCIENTIFIQUE 20 1.7LA PERTINENCE SOCIALE 21 1.8LA PERTINENCE DISCIPLINAIRE 22

CHAPITRE 2 : LA THÉORIE DU PARCOURS DE VIE 23

2.1LES PRINCIPES DE BASE 23

2.1.1LE DÉVELOPPEMENT TOUT AU LONG DE LA VIE 23

2.1.2L’INTENTIONNALITÉ DES INDIVIDUS 24

2.1.3LE TEMPS ET L’ESPACE 24

2.1.4LA TEMPORALITÉ DES EXPÉRIENCES DE VIE 25

2.1.5 LES VIES INTERRELIÉES 26

2.2LES CONCEPTS CLÉS 26

CHAPITRE 3 : LA MÉTHODOLOGIE 29

3.1L’APPROCHE PRIVILÉGIÉE 29

3.2LE TYPE DE RECHERCHE 29

3.3LA POPULATION À L’ÉTUDE ET L’ÉCHANTILLONNAGE 30

3.4LA MÉTHODE DE COLLECTE DES DONNÉES 31

(5)

iv

3.6ANALYSE DES DONNÉES DE RECHERCHE 32

3.7LES CONSIDÉRATIONS ÉTHIQUES 33

CHAPITRE 4 : LA PRÉSENTATION DES RÉSULTATS 35

4.1.LE PORTRAIT DES PARTICIPANTS AU MOMENT DE L’ENTREVUE 35

4.2LE CONTEXTE DE LA SÉPARATION 36 4.2.1ALEXANDRE,29 ANS 37 4.2.2AUDREY,25 ANS 37 4.2.3CATHERINE,19 ANS 38 4.2.4CÉDRIC,25 ANS 38 4.2.5CLAUDIA,29 ANS 38 4.2.6FRANÇOIS,24 ANS 39 4.2.7JOSIANE,24 ANS 40 4.2.8LAURA,22 ANS 40 4.2.9MICHAËL,21 ANS 41 4.2.10NICOLAS,25 ANS 41 4.2.11STÉPHANIE,25 ANS 41 4.2.12VINCENT,21 ANS 42

4.3ÉVOLUTION DES RELATIONS FAMILIALES, DE LA SÉPARATION À AUJOURD’HUI 47

4.3.1ÉVOLUTION DES RELATIONS PARENTS-ENFANTS 47

4.3.2ÉVOLUTION DES LIENS AVEC LA FRATRIE ET LA FAMILLE ÉLARGIE 50

4.3.3L’ORGANISATION DES MODALITÉS DE GARDE POUR LES ENFANTS 53

4.3.4LA RECOMPOSITION FAMILIALE 60

4.4VISION ACTUELLE DES PARTICIPANTS DES RELATIONS INTIMES 66

4.4.1LA VISION DE L’ENGAGEMENT 69

4.5IMPACTS DE LA SÉPARATION PARENTALE SUR LE PLAN PERSONNEL 72

4.5.1GAINS OU DÉFICITS DE L’EXPÉRIENCE POUR LES RÉPONDANTS 73

4.5.2LEUR VISION DE LA FAMILLE IDÉALE 75

4.6TRAJECTOIRE DE VIE FAMILIALE ET CONJUGALE DES PARTICIPANTS 79

CHAPITRE 5 : LA DISCUSSION 91

5.1ÉVOLUTION DES RELATIONS FAMILIALES À LA SUITE DE LA SÉPARATION 91

5.1.1ÉVOLUTION DES RELATIONS FAMILIALES ÉLARGIES À LA SUITE DE LA SÉPARATION 92

5.2ORGANISATION DES MODALITÉS DE GARDE 93

5.2.1LES PRATIQUES PARENTALES 98

5.2.2LES ATTITUDES DES PARENTS SÉPARÉS 99

5.3LA RECOMPOSITION FAMILIALE 100

5.3.1LES BEAUX-PARENTS 100

5.3.2LE SENTIMENT D’INIQUITÉ RELATIF À L’ARRIVÉE DU BEAU-PARENT ET SES ENFANTS 104

5.4IMPACTS DE LA TRAJECTOIRE DES PARTICIPANTS DURANT LEUR ENFANCE SUR LEUR VIE

ACTUELLE 106

5.4.1LA VISION DES RELATIONS AMOUREUSES 106

5.4.2VISION DE L’ENGAGEMENT 107

5.4.3VISION DE LA FAMILLE IDÉALE 108

5.4.4IMPACTS DE LA SÉPARATION PARENTALE SUR LE PLAN PERSONNEL 109

(6)

v

5.6LES LIMITES DE L’ÉTUDE 112

5.7LES PISTES DE RÉFLEXION POUR L’INTERVENTION 113

5.8LES PISTES DE RÉFLEXION POUR LES RECHERCHES FUTURES 114

CONCLUSION 116

RÉFÉRENCES 118

ANNEXE 1 : AFFICHE DE RECRUTEMENT 125

ANNEXE 2 : LA GRILLE D’ENTREVUE 126

ANNEXE 3 : FORMULAIRE DE CONSENTEMENT 128

ANNEXE 4 : EXEMPLE DE CALENDRIER DE VIE 131

ANNEXE 5 : QUESTIONNAIRE SOCIODÉMOGRAPHIQUE 133 ANNEXE 6 : RÉPERTOIRE DE RESSOURCES D’AIDE 135

(7)

vi

Liste des figures et des tableaux

Liste des figures

Figure 1. Parcours conjugal et familial d’hier ……….. 3 Figure 2. Parcours conjugal et familial d’aujourd’hui ……….. 3

Liste des tableaux

Tableau 1. Résumé de la recension des écrits ………17 Tableau 2. Portrait sociodémographique des répondants au moment de l’entrevue…...36 Tableau 3. Contexte entourant la séparation des parents des participants ……….43 Tableau 4. Évolution des trajectoires familiales et conjugales des participants et leur vision actuelle des relations conjugales et familiales ...80

(8)

vii

Remerciements

Je tiens à remercier tous ceux qui m’ont encouragé durant la rédaction de mon mémoire et qui ont fait en sorte que ce projet s’est réalisé.

Un merci tout spécial aux douze participants de cette étude qui ont accepté de se joindre au projet et qui m’ont accordé leur confiance.

(9)

1

Introduction

Le modèle de la famille québécoise a grandement évolué à travers les années. Au cours de son histoire, le Québec a connu trois grands modèles familiaux se distinguant par leur composition et leur structure. Le premier est celui de la famille traditionnelle, appelé aussi la famille rurale. Il s’agit notamment du modèle ayant perduré le plus longtemps, se prolongeant jusque dans les années cinquante (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005). Le mariage est ici vu comme étant le fondement de la famille et l’image traditionnelle étant celle d’une famille nombreuse en territoires agricoles où la vie familiale et le travail sont entremêlés. Les membres de la famille traditionnelle sont continuellement en interaction. C’est le père qui détient formellement l’autorité au sein de la cellule familiale. Quant à la mère, elle se voit attribuer plusieurs rôles, soit celui d’éducatrice auprès des enfants, de l’entretien ménager et de la transmission des valeurs religieuses et morales (Valois, 1965).

Le deuxième modèle, appelé la famille moderne, a quant à lui émergé à la suite de la Seconde Guerre Mondiale (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005). Il est marqué par l’industrialisation, l’urbanisation, la scolarisation et un plus grand accès aux moyens de communication. On remarque également une plus grande revendication des droits, notamment ceux des femmes. Chacun des membres de la famille moderne s’épanouit dans des sphères différentes : la mère à la maison, le père au travail et l’enfant à l’école. Le père veille d’ailleurs à la sécurité financière de la famille, puisqu’il est le pourvoyeur (Battams, 2016; Valois, 1965).

Depuis une quarantaine d’années, certains experts parlent d’un troisième modèle familial : celui de la famille postmoderne ou contemporaine. Bien que les modèles familiaux précédents n’aient pas totalement disparu, on observe une plus grande mouvance et une plus grande diversité quant à la structure de la famille. Trois changements sociaux ont permis l’émergence du modèle contemporain de la famille : les changements de valeurs, de l’organisation de la vie familiale et du marché du travail (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005). Les changements de valeurs sont marqués par la montée de l’individualisme où, plus

(10)

2

que jamais, l’autonomie, le plaisir et la satisfaction immédiate des besoins sont valorisés (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005; Dupont, 2004). Dans ce modèle, la forme et la durée de la relation conjugale ne sont plus déterminées comme avant. On y remarque une baisse de la popularité du mariage au profit de l’union libre. En outre, avoir des enfants n’est plus laissé au hasard, cela devient un choix et de plus en plus de familles sont fondées au sein d’une union libre. Ce type d’union étant associé à un plus grand risque de rupture conjugale, de nombreux enfants vivront la séparation de leurs parents (Giroux, Le Bourdais et Pacaut, 2016). Pour ce qui est de l’organisation du marché du travail, davantage de ménages sont composés de deux adultes en emploi, ce qui apporte un deuxième salaire dans le ménage. Alors qu’auparavant une grande partie des femmes demeuraient à la maison, une majorité de ces dernières ont, à ce jour, un emploi rémunéré au même titre que les hommes. En 1953, seulement 24 % des femmes étaient présentes sur le marché du travail. En 2014, cette proportion était de 82 % (Statistique Canada, 2017b).

L’ensemble de ces changements engendre une diversification des trajectoires familiales et conjugales. Une publication du Conseil de la famille et de l’enfance (2005) en faisait d’ailleurs une illustration éloquente (figures 1 et 2). On y observe notamment une différence entre le parcours d’autrefois et celui d’aujourd’hui. Par le passé, les trajectoires étaient plutôt linéaires, passant du célibat, au mariage, à la parentalité jusqu’à la grand-parentalité. Actuellement, on remarque plutôt des parcours irréguliers qui font place à de nouveaux concepts tels que les unions libres, la séparation ou le divorce et l’arrière-grand-parentalité.

(11)

3

Figure 1 : Parcours conjugal et familial d’hier (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005, p. 39)

Figure 2 : Parcours conjugal et familial d’aujourd’hui (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005, p. 39)

Les résultats des études recensées dans le cadre de ce travail indiquent que ces changements familiaux ont certaines conséquences sur les enfants, notamment en ce qui concerne leur trajectoire à la suite de la séparation de leurs parents. De plus, bien que les

(12)

4

conséquences négatives de la séparation des parents pour les enfants soient bien documentées, l’aspect positif de ce processus demeure sous-représenté (Ottaway, 2010). Face à ce constat, le but de la présente étude consiste à connaître les conséquences, tant positives que négatives, que perçoivent des adultes ayant vécu la séparation de leurs parents durant l’enfance et l’interprétation qu’ils en font relativement à leurs trajectoires de vie. Plus précisément, la question de recherche examinée est la suivante :

Quelles sont les incidences perçues par des adultes à l’égard de la séparation de leurs parents survenue durant leur enfance et quel rôle ont eu ces dernières dans leurs trajectoires de vie familiale et conjugale?

À la lumière de ce questionnement, ce projet de recherche s’inscrit dans un paradigme scientifique de type constructiviste. Le fondement de cette posture épistémologique repose sur la compréhension, la construction et l’interprétation subjective des gens envers les phénomènes sociaux (Guba et Lincoln, 1994). Baumard (1997) affirme que, selon la position constructiviste, il importe de rejeter l’idée d’une existence autonome en dehors de celle décrite par les personnes. On peut ainsi dire que « la réalité n’existe pas en dehors du système d’acteurs qui la produit », d’où l’importance d’obtenir le sens perçu par les individus (Baumard, 1997, p. 4). C’est donc dans cette perspective que s’inscrit la présente étude.

La structure de ce mémoire est composée de cinq chapitres. Le premier développe tout d’abord la problématique associée à la séparation parentale. Il aborde également la prévalence de la problématique, les facteurs de risques et de protections ainsi que la démarche documentaire réalisée et la recension des écrits. Ensuite, les limites méthodologiques sont présentées, en plus de la pertinence scientifique, sociale et disciplinaire. Le deuxième chapitre expose la perspective théorique qui sous-tend ce mémoire ainsi que ses concepts importants. Le chapitre trois est consacré à la méthodologie, soit l’approche utilisée, le type de recherche, la population à l’étude et l’échantillonnage, la méthode de collecte de données ainsi que les considérations éthiques. Le quatrième chapitre, quant à lui, fait état des résultats de la recherche relativement à la question de recherche préalablement énoncée. Le cinquième chapitre offre une analyse des résultats en fonction du cadre théorique utilisé et de la

(13)

5

littérature portant sur la séparation parentale. En conclusion, des pistes de réflexion sont émises dans le but de proposer d’éventuelles recherches ou pistes d’intervention pour les jeunes qui vivent la séparation de leurs parents.

(14)

6

Chapitre 1 : La problématique

Cette section du travail présente l’objet de recherche et sa prévalence, la démarche documentaire ainsi que la recension des écrits. Par la suite, les limites méthodologiques des articles scientifiques recensés seront présentées. Enfin, la pertinence scientifique, sociale et disciplinaire d’étudier le phénomène que constitue la trajectoire des adultes à la suite de la séparation de leurs parents durant leur enfance sera exposée.

1.1 L’objet de recherche et la prévalence

Il importe de noter que le divorce ou encore la séparation conjugale n’est accepté socialement que depuis quelques décennies (Conseil de la famille et de l’enfance, 2007; Douglas, 2008). En effet, depuis l’entrée en vigueur de la toute première Loi sur le divorce au Canada en 1968, il est maintenant possible de se séparer légalement. La réforme canadienne qui suit, en 1985, vient par ailleurs façonner certaines règles régissant la compétence des tribunaux. Elle simplifie notamment les motifs de divorces et elle réduit de trois à un an la période de non-cohabitation requise pour justifier une demande de divorce (Beaudry, 1988; Douglas, 2008). À ce jour, il existe plusieurs manières de mettre un terme à une relation conjugale et toutes ces manières ont des appellations précises. Tout d’abord, le terme « divorce » renvoie au fait qu’un couple obtient légalement la dissolution du mariage (Gouvernement du Québec, 2017). Si le couple est marié, ce dernier peut avoir recours à la séparation de fait ou encore à la possibilité de demander la séparation de corps ou le divorce (Gouvernement du Québec, 2011; Gouvernement du Québec, 2016). Par ailleurs, si le couple est uni civilement, il peut recourir à la séparation de fait ou encore demander que l’union soit dissoute de manière légale par un notaire ou le tribunal. Enfin, le terme « séparation » renvoie à la terminaison de la vie commune, qu’elle soit réalisée à partir d’un accord commun ou non ou encore en vertu d’une ordonnance de la Cour (Gouvernement du Québec, 2011; Gouvernement du Québec, 2016). Dans le cadre de ce mémoire, pour en faciliter la compréhension, le terme séparation sera utilisé autant pour désigner la notion de divorce que la séparation d’une union civile ou de fait.

(15)

7

Actuellement, on remarque que près de la moitié des engagements maritaux vont potentiellement se conclure par un divorce (Lewandowski, 2009). Ainsi, en 1971 au Québec, on dénombrait 49 695 mariages, tandis qu’en 2014, on en comptait deux fois moins, c’est-à-dire 22 429 (Ministère de la Famille, 2017). Cette tendance semble vouloir se poursuivre en raison de la proportion grandissante des unions libres (Emery, 2011; Ministère de la Justice, 2015). « Au Canada, de 2006 à 2011, le nombre de couples en union libre a augmenté de 13,9 %, soit plus de quatre fois plus que la hausse de 3,1 observée chez les couples mariés » (Statistique Canada, 2012, p. 3). En outre, comme mentionné précédemment, de plus en plus de couples décident d’élever leurs enfants au sein d’une union libre (Giroux, Le Bourdais et Pacaut, 2016; Statistiques Canada, 2012). Ce type d’union est associé à un plus grand risque pour les enfants de vivre la séparation de leurs parents. De plus, cette situation a plus de risque de se produire plus tôt dans leur trajectoire familiale que pour les enfants issus de parents mariés (Giroux, Le Bourdais et Pacaut, 2016).

Selon le ministère de la Famille (2017), le Québec se démarque quant aux pourcentages de naissances hors mariage. En 2012, on constate qu’au Québec, 63 % des naissances surviennent auprès de parents non mariés, comparativement à 33 % dans l’ensemble du Canada (Ministère de la Famille, 2017). Sur le plan mondial, le Québec se situe au deuxième rang derrière l’Islande qui comprend 66,9 % de naissances hors mariage. Par ailleurs, des données démographiques récentes tendent à montrer qu’une proportion croissante d’enfants évolue dans des familles monoparentales dues à la séparation de leurs parents, et cela à un âge de plus en plus bas (Ministère de la Justice, 2015). La monoparentalité est souvent vécue comme étant une période de transition vers une recomposition familiale. On observe que les unions libres recomposées sont plus populaires que les remariages et qu’elles se produisent alors que les enfants sont encore jeunes. Le risque que ces enfants vivent une nouvelle séparation et ses impacts serait très élevé (Giroux, Le Bourdais et Pacaut, 2016).

Il ressort des études que la réaction des enfants face à la séparation de leurs parents varie énormément en raison d’une multitude de facteurs. Tous reconnaissent néanmoins que

(16)

8

l’expérience de la séparation engendre des effets à court, moyen et long terme pour les enfants qui la vivent. Emery (2011) rapporte que les enfants de parents séparés peuvent éprouver plus de difficultés au cours de leur vie que les enfants qui ont vécu dans une famille dite intacte. La séparation est souvent associée à un risque accru de problèmes psychologiques, académiques et sociaux tout au long de la vie. D’autres études (Cartwright, 2006; Lambert, 2007) portant sur les impacts de la séparation des parents sur leurs enfants permettent de nuancer ces résultats. Les auteurs de ces études précisent notamment que si certains jeunes devenus adultes restent affectés par ce processus, d’autres rapportent que la séparation de leur parent a eu des effets positifs dans leur vie. D’ailleurs, la grande majorité des jeunes participants ayant collaboré aux études de Cartwright (2006) et Lambert (2007) rapporte que la rupture de leurs parents a eu divers impacts positifs sur leur vie d’adulte. De ces effets, il est question notamment d’une plus grande résilience, d’une plus grande autonomie ainsi qu’une meilleure adaptation face aux imprévus de la vie (Cartwright, 2006; Lambert, 2007).

Plusieurs facteurs peuvent influencer les résultats obtenus dans les études. Tout d’abord, la qualité des pratiques parentales peut venir influencer le développement de l’enfant à la suite de la séparation parentale (Emery, 2011). En effet, l’aspect anxiogène que représente la séparation pour les parents peut venir affecter la qualité de leurs pratiques parentales. Il demeure ainsi difficile de maintenir un équilibre alors qu’il faut, par le fait même, s’adapter à un nouveau mode de vie familial. Les parents peuvent donc être moins patients, cohérents et chaleureux envers leurs enfants (Cartwright et Seymour, 2002). De plus, la surveillance des enfants, les échanges positifs et une discipline efficace tendent également à diminuer à la suite de la rupture (Emery, 2011). D’autres éléments peuvent également venir exacerber les effets négatifs de la séparation parentale chez les enfants, comme la pauvreté, une structure familiale désorganisée, de faibles contacts avec l’un des deux parents et des problèmes de santé mentale chez les parents (Emery, 2011).

À l’inverse, plusieurs facteurs de protection peuvent venir atténuer les effets négatifs possibles de la séparation parentale : la coopération des parents, un style parental démocratique ainsi qu’une faible exposition et implication des enfants dans les conflits (Emery, 2011; Ministère de la Justice, 2017). Des liens étroits entre les différents membres

(17)

9

de la famille et la fratrie favorisent également une meilleure adaptation (Morrison, 2014). De plus, le fait de conserver des contacts avec les deux parents est également un gage de réussite (Lambert, 2007). Tous ces facteurs sont ainsi à prendre en considération lors de l’analyse des trajectoires empruntées par les jeunes adultes qui ont vécu la séparation de leurs parents étant enfants.

1.2 La démarche documentaire réalisée

La démarche documentaire de ce travail fut réalisée à partir de plusieurs banques de données, dont Ariane 2.0, Cairn.info, JSTOR, Social Services Abstract, Famili@ et PsycNET. Les mots-clés utilisés pour interroger les diverses bases de données sont : séparation parentale (ou break-up), divorce, adult children of divorce, perspective, long-terme (ou long-term), expérience (ou experience ou perception ou personal perspective) et trajectoire de vie (ou life course).

1.3 État des connaissances

Les prochains paragraphes présentent les études qui ont porté sur les impacts de la séparation des parents sur la vie des jeunes, tant sur le plan des relations familiales que sur celui de leurs relations intimes à l’âge adulte. Il sera ensuite question des conséquences de ce processus dans leur vie adulte à travers leurs expériences personnelles en tant qu’enfant, puis en lien avec l’organisation de la garde et, pour certains, de la recomposition de leur famille.

1.3.1 Les relations familiales

Les écrits mentionnent qu’il est bénéfique d’avoir des personnes importantes au sein de son entourage avec qui il est possible de se confier et de discuter de son expérience face à la séparation (Morrison, 2014). Il est particulièrement aidant de discuter avec une personne ayant vécue une situation similaire, que ce soit un parent, un ami ou une personne de sa fratrie (Cartwright et Seymour, 2002; Morrison, 2014). On rapporte d’ailleurs que la séparation peut parfois créer des rapprochements entre certains membres de la famille (Lambert, 2007 et

(18)

10

Morrison, 2014). Il est à noter que dans l’étude de Lambert (2007) réalisée auprès de 39 femmes et 11 hommes en provenance de l’Australie, âgés de 18 à 50 ans, seules les répondantes de sexe féminin ont relevé cet avantage. À l’inverse, certains ont mentionné que la rupture a été la cause de certaines frictions, tant auprès des parents que de la fratrie (Lambert, 2007). Ces dernières peuvent d’ailleurs refaire surface plus tard alors qu’un des deux parents se remarie ou qu’une nouvelle personne est introduite au sein de la famille (Cartwright, 2006; Cartwright et Seymour, 2002; Lambert, 2007; Ministère de la Justice, 2004a). Cette nouvelle venue peut occasionner une diminution de l’attention qu’accorde le parent à l’enfant (Cartwright et Seymour, 2002). Les adultes ayant vécu une telle expérience durant l’enfance disent avoir ressenti de la jalousie et s’être senti de moindre importance pour leur parent (Cartwright et Seymour, 2002).

Au sein des différentes recherches recensées, les auteurs font également référence à certains avantages résultant de la séparation. Les études mentionnent notamment que les parents sont parfois plus heureux après la séparation (Amato, 1994; Cartwright, 2006; Lambert, 2007). Cela est observable par la réduction des conflits, le fait d’avoir une nouvelle relation avec une personne plus compatible ou encore la réalisation d’activités qui étaient alors impossibles au sein de l’ancienne relation. Cette plus grande disponibilité émotionnelle peut engendrer de meilleurs contacts entre le parent et l’enfant. Dans ce contexte, certains adultes ayant vécu la séparation de leurs parents croient que si ces derniers étaient demeurés ensemble, ils auraient vécu une vie malheureuse ou conflictuelle (Cartwright, 2006). De plus, ces adultes mentionnent parfois que la séparation a permis de réduire le stress et la tension qui étaient présents au sein de la famille (Lambert, 2007). Cet avantage est nommé particulièrement lorsque les conflits entre les parents étaient très intenses et sévères, la séparation amenant donc une certaine quiétude (Lambert, 2007).

Un autre avantage pour les enfants est le fait d’avoir davantage d’attention de la part de leurs parents (Lambert, 2007). En effet, la séparation peut conduire à une augmentation du nombre de présents offerts aux enfants, par exemple au moment du temps des fêtes ou encore à leur anniversaire. En outre, il se peut que l’enfant se retrouve plus souvent seul avec l’un de ses parents, ce qui augmente les moments à deux et potentiellement la qualité de leurs

(19)

11

relations (Lambert, 2007; Morisson, 2014). Il faut toutefois que les parents soient prêts à développer cette relation, car à la suite de la séparation, ils sont souvent trop absorbés par leurs propres difficultés pour répondre aux besoins de leurs enfants (Vaillancourt, 2007). Même si ces problèmes tendent à s’amenuiser avec le temps, il reste que, pour les enfants, la période de la séparation demeure très stressante. Ils se retrouvent souvent dans un dilemme d’équité, ne voulant pas déplaire à leurs parents en passant plus de temps avec l’un plutôt qu’avec l’autre. Cela se reflète également lors d’autres événements tels que la fête des mères et des pères (Lambert, 2007).

1.3.2 Les relations intimes

À travers les recherches recensées, certains adultes nomment que la séparation de leurs parents a influencé la perspective qu’ils ont de leurs relations amoureuses. Ils mentionnent, entre autres, que cette expérience vécue durant l’enfance leur a enseigné à ne pas répéter certaines erreurs au sein de leurs propres relations (Amato, 1999; Blanchette, 2003; Cartwright, 2006; Lambert, 2007; Morrison, 2014; South, 2013). À ce propos, des adultes mentionnent espérer ne pas faire les mêmes choix que leurs parents en ce qui concerne le type de partenaire, les modèles de communications ainsi que le moment d’avoir des enfants (Amato, 1999; Lambert, 2007; South, 2013). En outre, ces adultes souhaitent particulièrement éviter une séparation, puisqu’ils ne veulent pas faire vivre à leurs propres enfants l’expérience qu’ils ont vécue (South, 2013). Quelques participants dans l’étude d’Amato (1999) attribuent même l’échec de leur propre mariage à la rupture de leurs parents. En 2013, South indique aussi que certains de ses participants affirment que leur séparation était due au fait qu’ils n’ont pas grandi au sein d’un foyer biparental intact où les décisions se prennent à deux. Selon les résultats de sa recherche réalisée auprès de 50 participants, 39 femmes et 11 hommes, dans un collège du Midwest américain, des personnes prétendent ne pas savoir comment avoir une relation amoureuse harmonieuse en raison du divorce de leurs parents. À l’inverse, d’autres déclarent mettre davantage d’efforts au sein de leur relation actuelle, comparativement aux personnes n’ayant pas vécu la séparation de leurs parents (South, 2013). On affirme qu’ils sont souvent prêts à tout pour éviter d’envisager une éventuelle séparation. Ils peuvent ainsi entretenir des attentes élevées face à leur conjoint.

(20)

12

Cette statistique est plus importante auprès des répondants ayant vécu dans des familles où il y a eu des séparations multiples, c’est-à-dire deux séparations parentales et plus.

Dans le cadre de la recherche réalisée par Amato (1996), on y explique la transmission intergénérationnelle de la séparation. En ce sens, Amato affirme que les couples composés d’un homme ou d’une femme ayant connu la séparation de ses parents présentent un taux plus élevé de séparation que les couples où aucun des deux partenaires n’a vécu cette situation familiale. Les probabilités de séparation sont encore plus importantes si les deux partenaires proviennent de familles éclatées (Amato, 1996). Cela est notamment plus apparent lorsque la séparation parentale survient alors que les enfants sont âgés de 12 ans et moins.

La revue de littérature réalisée par Ottaway (2010) à propos de l’impact de la séparation parentale sur les relations intimes des adultes qui ont vécu cette expérience lorsqu’ils étaient enfants montre également que l’expérience de la séparation durant l’enfance « conduirait à la formation de croyances irréalistes concernant le sens des accords dans les relations » (p. 4). En effet, ces personnes confrontées aux désaccords avec leur partenaire seraient plus enclines à interpréter ces conflits comme étant la finalité possible de leur relation (Morrison, 2014; Ottaway, 2010).

1.3.3 L’expérience personnelle

La communication entre le parent et l’enfant semble être un thème récurrent au sein des études qui portent sur les adultes ayant vécu la séparation de leurs parents (Cartwright et Seymour, 2002; Morrison, 2014; Saint-Jacques, Godbout et Baude, 2016). Une communication ouverte portant sur les raisons de la séparation est considérée comme aidante, tandis qu’une communication fermée et évitante semble nuisible au processus d’ajustement des enfants. Ainsi, le type de communication apparaît déterminant pour l’adaptation, l’acceptation et la compréhension de la rupture pour les enfants (Cartwright et Seymour, 2002; Morrison, 2014; Vaillancourt, 2007). En ce sens, les enfants ayant eu l’occasion de discuter de la séparation avec leurs parents se sont sentis davantage appuyés face au processus et devenus adultes, ils conservent une perception moins négative de la séparation

(21)

13

ainsi qu’une vision positive de leurs parents (Cartwright et Seymour, 2002; Morrison, 2014; Vaillancourt, 2007).

Selon l’étude qualitative réalisée par Lambert (2007) auprès de 39 femmes et 11 hommes provenant de la Californie, le bénéfice le plus fréquemment cité lorsqu’on parle de séparation est l’augmentation de la résilience. En effet, de cet échantillon d’adultes âgé en moyenne de 29 ans, 12 des participants ont affirmé qu’avoir vécu une telle expérience durant l’enfance les a rendus plus forts, plus indépendants et qu’ils ont développé des capacités d’adaptation plus grande (Cartwright, 2006; Lambert, 2007). Il ressort aussi de cela que les enfants qui surmontent la séparation de leurs parents affirment régulièrement se sentir plus matures (Lambert, 2007). Cela s’explique notamment par le fait que ces enfants se voient bien souvent accorder des responsabilités plus grandes qu’à l’habitude, ce qui les rend autonomes plus rapidement (Lambert, 2007; Vaillancourt, 2007). Par ailleurs, dans l’étude réalisée par Amato et Booth (1991) auprès d’un échantillon de 1 243 personnes à Lincoln au Nebraska, États-Unis, on constate que les répondants ayant vécu la séparation de leurs parents durant l’enfance affichent un faible bien-être à l’âge adulte comparativement à ceux ayant grandi au sein d’une famille dite intacte et heureuse. Cette affirmation est notamment corroborée par les recherches d’Amato (1988), Glenn et Kramer (1985) ainsi que Kulka et Weingarten (1979). Ils rapportent toutefois que la séparation ne semble pas être une expérience uniformément problématique pour les enfants y étant exposés. Ils suggèrent d’ailleurs que, selon les résultats, une séparation comprenant des perturbations minimales pour l’enfant engendre moins de risque à long terme qu’une relation conjugale intacte dont les enfants ont une perception négative ou étant malheureuse (Amato et Booth, 1991).

1.3.4 Les modalités de garde

Lambert (2007) mentionne qu’un des désavantages de la séparation pour les enfants concerne les modalités de garde qui ont été adoptées. Il s’agit d’un élément de déséquilibre pour l’enfant puisqu’il peut se retrouver en mouvance constante entre les domiciles respectifs de ses parents. À ce jour, de plus en plus d’enfants maintiennent des liens avec leurs deux parents à la suite d’une séparation conjugale, notamment en optant pour la garde partagée

(22)

14

(Parent, Saint-Jacques, Drapeau, Fortin et Beaudry, 2016). Certains participants des études recensées affirment que ces arrangements sont injustes, particulièrement lorsqu’ils ne sont pas en mesure de choisir le moment qu’ils souhaitent passer en compagnie de l’un ou l’autre de leurs parents (Cartwright et Seymour, 2002; Lambert, 2007). Selon la Convention

internationale des droits de l’enfant, adoptée par l’Organisation des Nations Unies en 1989,

l’enfant a le droit de se prononcer quant aux décisions qui influencent sa vie (Ministère de la Justice, 2004a). Il y est mentionné que cette participation aurait des retombées avantageuses auprès de l’enfant en laissant entendre que cette possibilité augmenterait son sentiment de contrôle (Ministère de la Justice, 2004a). Toutefois, cette situation peut aussi devenir problématique si l’enfant doit choisir de cohabiter avec l’un ou l’autre de ses parents, engendrant ainsi des conflits de loyauté importants (Vaillancourt, 2007). En réalité, ce sont bien souvent les parents qui prennent les décisions concernant la garde de leurs enfants en supposant qu’ils connaissent quel est leur meilleur intérêt, ce qui n’est pas toujours le cas (Ministère de la Justice, 2004a). On remarque également que le choix des modalités de garde peut être différent s’il y a plusieurs enfants au sein de la famille séparée. La séparation de la fratrie peut engendrer un deuil supplémentaire pour les jeunes, en plus de celui de la rupture parentale (Vaillancourt, 2007).

Des auteurs mentionnent que les modalités de garde peuvent également causer des difficultés financières pour le parent qui a la garde du ou des enfants (Cartwright et Seymour, 2002). Certains affirment que le divorce entraîne une diminution des avoirs financiers par le fait de devoir subvenir aux besoins de la famille avec un salaire en moins (Lambert, 2007). Cette situation est bien documentée, car une rupture conjugale entraîne souvent une diminution des ressources financières pour les enfants (Amato, 1999). Cet aspect prend d’ailleurs plus d’ampleur lorsque l’un des deux parents décide de ne plus soutenir l’enfant financièrement (Lambert, 2007). Quelques adultes ayant vécu la séparation de leurs parents mentionnent avoir ressenti de la rancœur puisqu’ils ont dû modifier leurs plans de vie, notamment la durée de leurs études, en raison de la baisse du revenu familial (Lambert, 2007).

(23)

15

1.3.5 La recomposition familiale

Bien que la rupture mène à un morcèlement de la famille, elle peut également mener à un élargissement de la famille en raison de la recomposition familiale. Pour certains participants des études analysées, cet élargissement de la famille est considéré comme un avantage (Lambert, 2007). Cet élément réfère notamment à une possibilité d’un plus grand réseau de soutien. Toutefois, le fait d’assister à l’introduction de nouveaux membres au sein de sa famille peut aussi se transformer en inconvénient si ces personnes ne sont présentes que de manière temporaire (Lambert, 2007). Par exemple, lorsque des séparations suivant la recomposition familiale se répètent, les enfants peuvent ne plus vouloir s’attacher aux nouveaux conjoints de leur parent, de peur de les voir quitter la famille à la suite d’une seconde rupture.

Selon l’étude de Cartwright et Seymour (2002) menée auprès de 28 étudiants de la Nouvelle-Zélande âgés de 18 à 30 ans, plusieurs affirment avoir eu une relation plus étroite avec leur parent de la famille d’origine ou avec le parent monoparental et que cette relation s’est détériorée en raison de la recomposition familiale. Certains affirment que les relations au sein de la famille recomposée ne sont pas toujours aussi significatives que celles résultant de la famille intacte (Lambert, 2007). De plus, des participants ont affirmé se sentir exclus ou encore mal à l’aise lorsque les beaux-parents ont tenté de s’imposer à l’aide de la discipline. Ils affirment s’être sentis blessés, en colère et trahis lorsque leur parent a délaissé son rôle disciplinaire au profit du beau-parent (Cartwright et Seymour, 2002).

1.4 Résumé de la recension

Le tableau présenté ci-dessous offre un résumé des principaux éléments tirés de la recension des écrits. Concernant les relations familiales, plusieurs aspects positifs ont été relevés. Les participants de différentes études affirment qu’à la suite de la séparation de leurs parents, ils ont vécu des rapprochements au sein de leur famille, une diminution des conflits et du stress, une meilleure ambiance familiale générale, un accès plus grand à leurs parents et une attention plus soutenue de ceux-ci, tout en profitant de cadeaux offerts en double lors

(24)

16

d’anniversaires ou à Noël. À l’inverse, des participants ont mentionné des aspects négatifs, dont des frictions entre certains membres de la famille, une faible disponibilité émotionnelle du parent à court terme et parfois la présence de conflits de loyauté. Pour ce qui est des relations intimes, les participants nomment un désir de ne pas reproduire les mêmes erreurs que leurs parents et un plus grand investissement au sein de leur propre relation afin d’éviter de vivre une séparation. Les aspects négatifs indiquent que les adultes qui ont vécu la séparation de leur parent dans leur jeunesse ont un plus grand risque de vivre une séparation, ont une absence de modèle conjugal positif, ont souvent des attentes élevées envers leur partenaire et des croyances parfois erronées face à ce que devrait être une relation de couple. Du point de vue de l’expérience personnelle, plusieurs rapportent avoir acquis une plus grande résilience, une plus grande autonomie, une capacité d’adaptation face aux imprévus de la vie et une plus grande maturité. À l’inverse, certains participants parlent d’un faible bien-être. La participation des enfants au processus décisionnel entourant l’organisation de la garde est notamment perçue comme un aspect positif. En contrepartie, un sentiment d’injustice, une plus grande mouvance entre les maisons de leurs parents, une rupture potentielle avec les autres membres de la fratrie et une diminution des avoirs financiers sont considérés négativement. Pour conclure, la recomposition familiale est perçue positivement lorsqu’il y a un agrandissement de la famille engendrant un soutien plus important de la part des nouveaux arrivants. Elle est perçue négativement dans les cas où il y a une coupure rapide des liens lors de séparations répétitives ou encore lorsque l’enfant développe un sentiment d’exclusion ou de jalousie à l’égard de son beau-parent.

(25)

17

Tableau 1 : Résumé de la recension des écrits

Impacts de la séparation des

parents sur la vie des jeunes

Aspects positifs Aspects négatifs

Les relations familiales

• Rapprochements entre certains membres de la famille.

• Réduction des conflits et du stress. • Meilleure ambiance.

• Plus grande attention de la part de chaque parent. • Biens matériels plus nombreux (cadeaux,

vêtements, etc.).

• Frictions entre certains membres de la famille.

• Faible disponibilité émotionnelle du parent (court terme).

• Conflit de loyauté.

Les relations intimes

• Désir de ne pas répéter les mêmes erreurs. • Plus grand investissement dans la relation pour

éviter une séparation.

• Risque plus élevé de séparation.

• Absence d’un modèle positif de couple. • Attentes plus élevées envers le partenaire. • Croyances erronées à propos des relations

(conflits = séparation probable).

L’expérience personnelle

• Augmentation de la résilience. • Autonomie.

• Capacité d’adaptation renforcée. • Plus grande maturité.

(26)

18

Impacts de la séparation des

parents sur la vie des jeunes

Aspects positifs Aspects négatifs

Les modalités de

garde • Participation de ou des enfants aux décisions.

• Conflits de loyauté. • Déséquilibre (mouvance). • Sentiment d’injustice.

• Rupture potentielle avec la fratrie.

• Diminution des ressources financières pour l’enfant.

La recomposition

familiale

• Élargissement de la famille (plus grand réseau de soutien).

• Coupure de liens dans le cas de séparations à répétition.

• Sentiment d’exclusion au profit du beau-parent.

(27)

19

1.5 Les limites méthodologiques

Les études recensées présentent plusieurs lacunes, entre autres sur le plan de l’échantillon. Les recherches dans ce champ d’études sont très homogènes quant au sexe des participants. En effet, la grande majorité de ces études sont réalisées auprès de personnes de sexe féminin (Cartwright, 2006; Cartwright et Seymour, 2002; Lambert, 2007; Morrison, 2014; Vaillancourt, 2007). On dénote ainsi une surreprésentation des perspectives féminines dans les travaux réalisés jusqu’à maintenant. Compte tenu de la faible diversification des participants au sein des études, il apparaît que les résultats sont difficilement généralisables. Par ailleurs, il ressort de cela que peu d’études ont observé le contexte de séparation au sein de différentes communautés culturelles (Amato, 1994). En effet, on remarque que la majorité des études sont réalisées auprès d’une population blanche caucasienne au détriment des communautés afro-américaines, asiatiques, hispaniques et amérindiennes (Amato, 1994). De plus, nous n’avons dénombré aucune étude québécoise portant sur le thème des impacts de la séparation parentale sur le parcours des adultes qui ont vécu ce processus dans leur enfance.

Une autre limite ressort quant au moment de la séparation parentale. En sachant que l’expérience d’une séparation diffère en fonction du stade de développement de l’enfant, donc de son âge, il est possible que l’expérience des participants diffère en ce sens. Ce critère est souvent négligé lors de la sélection des participants ou n’est pas pris en compte pour des contraintes reliées au recrutement. Cela dit, les limites présentées laissent croire que les thèmes ressortis auraient pu être différents si un échantillon plus grand et hétérogène avait été utilisé.

De plus, la date des différentes études recensées représente une importante limite. En effet, la majorité des études datent des années 1985 à 2010. Ainsi, rares sont celles présentant un portrait à jour du phénomène de l’impact de la séparation parentale sur les enfants devenus adultes. À la suite des travaux d’Amato, qui ont été produits dans les années 1990, une diminution des études sur ce phénomène grandissant est remarquée. La présente étude permettra donc de réaliser une mise à jour des connaissances sur ce sujet.

(28)

20

1.6 La pertinence scientifique

Selon Chevrier (2009), certains types de problèmes rapportés dans les études peuvent mener à la justification d’une recherche. Il fait notamment référence à l’absence partielle de connaissances concernant un phénomène. À cet effet, Morrison (2014) affirme que les recherches portant sur la perception des adultes ayant expérimenté la séparation de leurs parents étant enfants sont largement sous-représentées dans la littérature. Ce mémoire vise donc à combler cette absence partielle quant aux connaissances dans le domaine de la séparation parentale. En outre, une grande partie des études réalisées à ce sujet date de plus d’une dizaine d’années (Morrison, 2014; Ottaway, 2010). Comme mentionné ci-dessus, peu de recherches ont été effectuées depuis les travaux d’Amato dans les années 1990. Puisque l’institution de la famille a beaucoup évolué depuis le début du 21e siècle, il parait essentiel

de mettre à jour les connaissances dans ce domaine. Cette actualisation est déterminante afin de mieux comprendre les conséquences actuelles de la séparation des parents sur leurs enfants, notamment lorsqu’ils sont devenus adultes (Morrison, 2014). La majorité des études réalisées concernent les effets à court et moyen terme à la suite de la séparation. Peu de recherches abordent les conséquences à long terme qui peuvent se poursuivre à l’âge adulte (Amato et Booth, 1991). De plus, Lambert (2007) affirme que les recherches antérieures portent rarement sur les avantages de la séparation parentale. En effet, la relation entre les conséquences négatives et la séparation sont grandement représentées dans la littérature, mais il y a peu de connaissances quant aux effets potentiellement bénéfiques de cette transition pour les jeunes. Ainsi, la présente étude permettra de connaître davantage les aspects positifs de la séparation parentale, qui seront abordés en même temps que les aspects négatifs. De plus, ces aspects seront étudiés sous l’angle de la perspective des adultes ayant vécu la séparation de leurs parents lorsqu’ils étaient enfants, perspective qui est rarement prise en compte actuellement.

(29)

21

1.7 La pertinence sociale

Une des particularités de la séparation parentale consiste à devoir préserver la relation parentale pour le bien du ou des enfants alors que la relation conjugale est, quant à elle, rompue (Conseil de la famille et de l’enfance, 2007). Cette transition familiale est porteuse de multiples facteurs de stress, en plus d’être une transition émotionnelle douloureuse pour tous les membres de la famille. Selon les circonstances entourant ce processus, les membres de la famille impliqués sont susceptibles de ressentir de la colère, de la tristesse, de l’agressivité, de la désillusion, du rejet, etc. (Conseil de la famille et de l’enfance, 2007). Dans cette optique, la rupture du couple est considérée comme étant le deuxième événement familial générateur de stress, précédé uniquement par le décès d’un membre de la famille (Conseil de la famille et de l’enfance, 2007).

Tel que mentionné précédemment, bien que la séparation soit acceptée aux yeux de la loi, cela ne semble pas tout à fait le cas pour la population générale. Selon une étude récente réalisée en 2015 auprès de 1 202 hommes et femmes québécois, presque la totalité (87 %) des répondants affirme que les gens se séparent trop facilement de nos jours. De plus, près de la moitié (44 %) considère que les enfants concernés vont subir les conséquences négatives de la séparation toute leur vie (Saint-Jacques et coll., 2016). On remarque donc qu’en général, la population perçoit les familles autres que biparentales intactes comme étant porteuses de problèmes. Toutefois, les Québécois semblent accepter plus facilement la séparation dans certains contextes, dont celui où les conflits sont élevés ou encore lorsque les membres de l’union conjugale se disent malheureux (Saint-Jacques et coll., 2016). Dans ces cas précis, on remarque que la décision d’en venir à une séparation est considérée comme étant une option plus acceptable. Ahrons (2004) croit par ailleurs que la vision populaire face au divorce est faussée puisqu’on ignore la majorité des « bons » divorces alors que l’on attire notre attention sur les « mauvais ». Il apparaît donc pertinent de poursuivre les recherches dans le but de mieux connaître les aspects potentiellement positifs de la séparation pour les enfants afin de contribuer à l’évolution de la pensée collective quant à ce phénomène qu’est la séparation parentale.

(30)

22

1.8 La pertinence disciplinaire

Comme mentionné plus haut, les transitions familiales constituent un sujet de plus en plus populaire dans le domaine des sciences sociales. En outre, peu de gens peuvent affirmer qu’ils n’ont jamais été affectés de près ou de loin par la séparation parentale, que ce soit dans la famille immédiate ou celle élargie. Aussi, les données collectées dans le cadre de cette recherche permettront de mieux comprendre ce phénomène dans le but d’offrir des services de plus en plus adaptés aux besoins de cette population. Ce mémoire permettra, entre autres, de déceler les forces des familles ayant été affectées par ce type de transition. Ainsi, le fait de connaître les facteurs facilitants et aidants face à une telle situation permettra d’offrir de meilleures interventions et une offre de services plus spécialisés auprès de ces familles.

(31)

23

Chapitre 2 : La théorie du parcours de vie

La théorie sélectionnée pour ce mémoire est celle du parcours de vie. Celle-ci fut développée par le sociologue John Elder dans les années 1960. Cette théorie s’inspire notamment de diverses disciplines telles que la psychologie, le travail social, la sociologie et la démographie (Gherghel et Saint-Jacques, 2013). Cette théorie réfère à une séquence d’événements et de rôles socialement définis qu’un individu franchit et adopte à travers le temps (Gherghel et Saint-Jacques, 2013; Giele et Elder, 1998). Le parcours de vie d’un individu comprend ainsi l’ensemble des trajectoires qu’il a vécues, dont celle ayant trait à la famille. La transition que représente la séparation parentale s’intègre donc dans la trajectoire de vie familiale de l’individu.

2.1 Les principes de base

La théorie du parcours de vie s’organise autour de cinq principes de base qui en permettent son articulation. Ces derniers sont détaillés ci-dessous.

2.1.1 Le développement tout au long de la vie

Tout d’abord, le premier principe est celui du développement tout au long de la vie (life-span development). Il renvoie au processus complexe et continu que représente le développement d’un individu (Elder, Johnson et Crosnoe, 2005; Gauthier et Montigny, 2014). Il est influencé par plusieurs facteurs, notamment par les changements sociaux et les changements biologiques et psychologiques d’un individu. Ces facteurs peuvent avoir des répercussions importantes sur le développement de la personne. La compréhension des événements traversant la vie s’approfondit tout au long de l’âge adulte, d’où l’importance d’explorer les perceptions des individus à long terme. Ainsi, cette perspective de longue portée évoque que le développement humain se poursuit bien au-delà de son enfance, son adolescence et sa majorité. En ce sens, la perception d’une personne ayant vécu la séparation de ses parents durant son enfance est sujette à évoluer et à être façonnée en fonction du vécu de la personne à travers son parcours. Pour qu’une période de vie soit entièrement comprise,

(32)

24

il importe donc de tenir compte des expériences du passé et des diverses dimensions du développement humain (Gherghel et Saint-Jacques, 2013).

2.1.2 L’intentionnalité des individus

Le deuxième principe, l’intentionnalité des individus ou l’agentivité (agency), porte sur la construction des parcours de vie en fonction des choix, des actions et des contraintes de l’environnement social et historique (Elder, Johnson et Crosnoe, 2005; Elder, Shanahan et Jenning, 2015; Gauthier et Montigny, 2014). Les individus possèdent des aptitudes leur permettant de faire des choix dans des situations contraignantes, dans le but d’exercer un certain contrôle sur leurs trajectoires de vie (Elder, Shanahan et Jennings, 2015). On affirme alors que l’individu est responsable de son parcours de vie en prenant ses propres décisions (Gauthier et Montigny, 2014). Dans cette perspective, il demeure important de s’intéresser aux motivations, aux valeurs, aux idéaux et aux décisions de l’individu pour bien comprendre les transitions de vie importantes telles que la séparation parentale (Gherghel et Saint-Jacques, 2013).

2.1.3 Le temps et l’espace

Ensuite, le troisième principe est celui du temps et de l’espace (time and place) qui s’appuie sur la mesure de la durée des transitions dans le temps (Elder, Johnson et Crosnoe, 2005; Gauthier et Montigny, 2014). En ce sens, chaque génération est marquée selon le contexte socioculturel dans lequel il évolue. Ce principe reconnaît la complémentarité essentielle de deux perspectives, soit l’historique et l’écologique (Elder, Shanahan et Jennings, 2015). Le développement biologique et psychologique des individus en est ainsi influencé. Il existe d’ailleurs certaines normes non écrites faisant référence aux calendriers de vie attendue. Ces normes peuvent varier en fonction de différents facteurs. Bien que plus fréquente aujourd’hui, la séparation est encore souvent considérée comme une déviation de la trajectoire « normale » de la vie familiale.

(33)

25

2.1.4 La temporalité des expériences de vie

Puis, on retrouve le quatrième principe, la temporalité des expériences de vie (timing

of transition) (Elder, Johnson et Crosnoe, 2005; Gauthier et Montigny, 2014). Comme

indiqué dans une majorité d’études portant sur la séparation parentale, les événements marquants ne sont pas vécus de la même manière en fonction du stade de développement de la personne (Ministère de la Justice, 2004a; Ottaway, 2010). Il importe de noter que ce principe n’est pas que lié à l’âge et au stade de développement de la personne, mais aussi aux normes sociales qui étaient en vigueur à l’époque à l’égard de certaines transitions. On observe ce phénomène alors que les membres d’une même famille peuvent vivre différemment l’expérience de la séparation parentale. On remarque que les différents enfants d’une même fratrie, bien qu’ils soient exposés au même environnement familial, en arrivent à ne pas percevoir et vivre la rupture de la même manière. Aucun moment n’est considéré comme étant favorable à la séparation, mais l’âge de l’enfant lors d’un tel changement peut faire une différence importante en matière de conséquences (Elder, Shanahan et Jennings, 2015). Plus l’enfant est jeune, plus il risque d’en être affecté, considérant qu’il est toujours dépendant de ses parents. Effectivement, un enfant d’âge préscolaire (2 à 5 ans) aura une faible compréhension de ce que signifie la séparation et risque d’être désorienté en ce qui a trait à la garde partagée. Cette transition touchera l’enfant pendant longtemps, ce qui explique que la séparation a plus d’impact à long terme sur l’adaptation des enfants qui la vivent alors qu’ils sont très jeunes. À l’inverse, les adolescents, quant à eux, dépendent moins de la famille. Par conséquent, la séparation risque d’avoir un impact moindre sur leur fonctionnement et leur développement (Ministère de la Justice, 2017b). À cet effet, l’âge de l’enfant au moment de la séparation de ses parents est un élément dont il faut tenir compte dans le domaine de l’étude des conséquences positives et négatives de la séparation parentale chez les enfants. Cet aspect sera notamment discuté dans le cadre de ce mémoire.

(34)

26

2.1.5 Les vies interreliées

Pour terminer, le cinquième principe est celui des vies interreliées (linked lives), qui réfère au fait que les vies sont liées et interdépendantes (Elder, Johnson et Crosnoe, 2005; Gauthier et Montigny, 2014). Les changements familiaux sont particulièrement pertinents au principe de vies interreliées et ses implications, notamment en ce qui a trait à la séparation parentale (Elder, Shanahan et Jenning, 2015). L’être humain se développe en réciprocité avec les acteurs de ses différents milieux de vie (Gherghel et Saint-Jacques, 2013). Cela dit, un enfant est dépendant de son réseau familial et donc des décisions qui sont prises au sein de ce système. Par le fait même, un événement touchant le système parental au sein d’une famille influencera inévitablement le reste des membres de la famille. Le principe des vies interreliées fait également référence au mécanisme de transmission intergénérationnelle, incluant l’éducation, la profession, le revenu, les valeurs, les croyances et la santé (Elder, Shanahan et Jennings, 2015).

2.2 Les concepts clés

La théorie des parcours de vie englobe plusieurs concepts tels que le parcours de vie, le cheminement social, la trajectoire, le stade ou étape de vie, la transition, les points tournants et l’événement. Les concepts les plus pertinents à la présente recherche sont ici définis.

Tout d’abord, le parcours de vie fait référence à « une séquence d’événements qui se déroule en fonction des groupes d’âge et qui est socialement définie et ordonnée dans le temps et le contexte historique » (Gherghel et Saint-Jacques, 2013, p. 14). Ainsi, le parcours de vie d’une personne est le résultat de l’ensemble de ses trajectoires de vie familiale, éducationnelle, professionnelle, résidentielle, etc. Les trajectoires peuvent générer un changement de statut, d’état et de rôle chez une personne (Gherghel et Saint-Jacques, 2013). La signification des différentes trajectoires varie en fonction de leur emplacement dans le temps et leur chronologie. Ainsi, les trajectoires sont définies comme étant une composition

(35)

27

de « séquences de rôles et d’expériences qui sont définies ou délimitées par des transitions caractérisées comme des périodes d’instabilité » (Gherghel et Saint-Jacques, 2013, p. 16).

Le concept « […] de transition fait référence au changement d’un stade ou d’une situation à une autre, d’une période à une autre, d’un statut ou rôle à un autre » (Gherghel et Saint-Jacques, 2013, p. 18). Les transitions peuvent se rapporter à l’individu même ou encore être en lien avec l’environnement familial. On fait ici référence aux transitions marquées par une séparation parentale, la monoparentalité ou encore la recomposition familiale. Puisque les vies sont dites interdépendantes, les transitions d’une personne impliquent souvent des transitions pour d’autres personnes. Dans le cadre de ce mémoire, on peut ainsi dire que la séparation parentale engendre une transition familiale chez tous les membres de la famille impliqués. De plus, Elder, Johnson et Crosnoe (2005) soulignent que les transitions précoces peuvent avoir des conséquences de vie sur les trajectoires des individus en façonnant les événements à venir, les expériences et les transitions.

À la suite des études portant sur les transitions et les trajectoires, le concept de points

tournants a fait son apparition. Ces derniers « représentent des événements, des transitions

ou des contextes qui déclenchent un changement considéré comme substantiel dans le cheminement individuel » (Gherghel et Saint-Jacques, 2013, p. 20). Ces transitions peuvent être volontaires, anticipées, attendues ou encore subites, telles que la séparation parentale. Ainsi, la transition que représente la dissolution conjugale peut devenir un point tournant si elle entraîne des changements substantiels, que ce soit sur le plan des finances, des valeurs ou des normes (Gherghel et Saint-Jacques, 2013). Cela dépend également de la signification subjective qu’en fait la personne affectée. Ainsi, étant donné que chaque individu accorde une signification différente aux événements qu’il vit, la séparation parentale peut-être vécue comme étant un point tournant pour une personne et ne pas l’être pour une autre. Le passage du temps, à l’aide des impacts d’une expérience à moyen et long terme, est souvent un bon moyen pour savoir si cette expérience est considérée comme un point tournant.

Le type de transition que représente la séparation parentale nécessite inévitablement des changements tant sur le plan du statut que de l’identité sociale et personnelle (Gherghel

(36)

28

et Saint-Jacques, 2013). Ainsi, une personne ayant vécu au sein d’une famille intacte n’aura pas traversé les mêmes expériences de vie qu’une personne dont les parents se sont séparés. Cela dit, les événements caractérisant les différents parcours de vie d’une personne vont jouer un rôle quant à la manière dont elle percevra son environnement. Il importe donc de se demander comment le fait de vivre la séparation de ses parents durant l’enfance a influencé le parcours de vie conjugal et familial de ces individus à l’âge adulte. En s’appuyant sur les cinq principes caractérisant la théorie du parcours de vie et de ses concepts, la poursuite de ce mémoire va tenter de répondre à ce questionnement.

(37)

29

Chapitre 3 : La méthodologie

Ce chapitre présente les choix méthodologiques qui ont été privilégiés dans le cadre de ce mémoire. Il est question de l’approche choisie, du type de recherche, des critères de sélection des participants, de la méthode de collecte de données, de l’analyse des données ainsi que des considérations éthiques de la recherche.

3.1 L’approche privilégiée

L’approche privilégiée dans cette recherche est qualitative. La recherche qualitative vise à explorer un ensemble général et complexe de facteurs entourant le phénomène à l’étude (Creswell, 2014). Paillé (2007) décrit la recherche qualitative comme étant « une méthodologie de proximité » (p. 432). En effet, on affirme que le qualitatif est près du sens des expériences, du vécu des personnes, des témoignages et des interactions à travers le construit de la réalité des gens (Paillé, 2007). On remarque que la majorité des études portant sur l’expérience de la séparation parentale ont également choisi cette approche (Cartwright, 2006; Cartwright et Seymour, 2002; Lambert, 2007; Morrison, 2014; Vaillancourt, 2007). Ainsi, la recherche qualitative permet aux participants de faire entendre leur voix et de parler de leur expérience dans leurs propres mots (Morrison, 2014). Dans un contexte où l’objet de cette étude vise à comprendre et à approfondir l’expérience de vie de personnes ayant vécu la séparation de leurs parents et des retombées perçues au sein de leurs trajectoires de vie conjugale et familiale, l’approche qualitative semble tout indiquée.

3.2 Le type de recherche

Cette recherche se veut de type compréhensif et rétrospectif. Cette visée compréhensive s’explique par le fait que cette recherche s’intéresse au sens que les personnes donnent à un événement, ici représenté par la séparation de leurs parents. Avec leur discours, il a été possible de constituer un corpus de données présentant un portrait global de l’expérience de personnes ayant vécu cette même transition familiale. Le but de ce mémoire est d’obtenir une compréhension plus approfondie des incidences à long terme de la

(38)

30

séparation parentale chez les enfants devenus adultes. Cette recherche se veut également de type rétrospectif dans le sens où l’expérience de la séparation parentale vécue durant leur enfance est abordée. Cela demande aux participants de se reporter dans le passé et d’éveiller des sentiments se rapportant à cet épisode transitoire. Le fait de se rapporter tant au passé qu’au présent permet aux participants d’émettre des hypothèses quant au cheminement personnel fait depuis la séparation parentale. Ce type d’étude rétrospective comporte toutefois certaines limites telles que la capacité des participants à se souvenir de l’événement vécu, en plus du biais que représente l’interprétation et le vécu différentiel de chacun.

3.3 La population à l’étude et l’échantillonnage

Comme mentionné dans la question de recherche, les personnes à l’étude sont des adultes d’origine québécoise ayant vécu la séparation de leurs parents durant l’enfance. Le choix de la période de l’enfance vise à regrouper un ensemble de participants ayant vécu la séparation parentale à un stade de développement semblable. L’omission de la période de l’adolescence vise à conserver une certaine homogénéité au sein de l’échantillon et ainsi se centrer sur un groupe d’âge en particulier. De ce fait, l’un des critères d’inclusion de l’étude est que les participants ont vécu la séparation de leurs parents avant d’avoir atteint l’âge de 12 ans. Bien que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et l’UNICEF aient établi que l’adolescence s’étend de l’âge de 10 à 19 ans, on associe au Québec, bien souvent, le passage de l’adolescence avec l’entrée au secondaire qui se produit dans la majorité des cas à l’âge de 12 ans (OMS, 2018; Unicef, 2011). De plus, les personnes sollicitées pour participer à l’étude ont entre 18 et 30 ans afin qu’ils aient une distanciation suffisante face à leur expérience de la transition familiale, ce qui permet une réflexion plus approfondie. Ces critères d’âge minimal et maximal permettent de conserver un bassin de participants ayant vécu dans une période sociale et historique semblable. De plus, cette recherche a la caractéristique d’être paritaire quant au genre des participants, puisqu’elle compte six personnes de sexe masculin et six de sexe féminin.

En raison de l’impossibilité d’offrir une chance égale à toutes les personnes susceptibles d’être admissibles selon les critères d’inclusions énumérés plus haut, les

Figure

Figure 1 : Parcours conjugal et familial d’hier (Conseil de la famille et de l’enfance, 2005,  p
Tableau 1 : Résumé de la recension des écrits
Tableau 2 : Portrait sociodémographique des répondants au moment de l’entrevue
Tableau 3 : Contexte entourant la séparation des parents des participants
+2

Références

Documents relatifs

Le récit d’enfance: la commémoration d’un monde perdu Il convient d’abord de souligner l’ancrage des deux textes de notre corpus dans la même période de l’histoire (les

6.2 Le  monde  médical   6.2.1Les  professionnels  de  la  santé  rencontrés  au  cours  de  la   prise  en  charge   La plupart des parents évoquent une rencontre avec

Une alternance classique de type une semaine chez un parent puis une semaine chez l’autre n’est certainement pas évidente sur un plan organisationnel, même si elle peut

Ce premier essai de monochromation double pour la séparation électromagnétique des isotopes est le résultat d’un travail d’équipe. Sarrouy a,eu

Dans notre travail, nous présentons des observations clinique de six cas de lymphangiomes kystiques abdominaux colligés au service de chirurgie infantile A à l’hôpital d’enfants

(1985) et reprise plus tard par Egeland, Kalkoske, Gottesman et Erickson (1990) indique que la plupart des enfants qui ont développé un lien anxieux avec leur mère entre 12

4 patients presented with a family history of Meniere’s disease, and their MRIs revealed the presence of hydrops in all of them, including 3 bilateral ones.. The vestibular

La recherche sur laquelle se fonde cet article visait ainsi à explorer la réalité des jeunes adultes ayant reçu un diagnostic de maladie mentale, à partir de leur