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La varizelle : vivre dans un pavillon au dessus de l’autoroute 1/ Préambule

II.2/ LES PERCEPTIONS DEPUIS L’HABITAT PAVILLONNAIRE

II.2.3/ La varizelle : vivre dans un pavillon au dessus de l’autoroute 1/ Préambule

Nous nous intéressons ici aux pavillons situés sur le coteau de l’autoroute, c'est-à-dire un peu au dessus de celui-ci. La lecture attentive des entretiens permet de retenir les principaux aspects du vécu. Nous résumons en quatre points la situation.

L’espace : Les maisons et leurs jardins sont exposés directement sur l’autoroute située en contrebas. Elles sont donc construites à flanc de coteau. L’autoroute possède à cet endroit un écran acoustique.

L’écoute : le bruit routier qui est un véritable mur sonore à l’étage. Il est en revanche beaucoup moins présent au rez-de-chaussée des maisons. Les variations tiennent aux signatures acoustiques des motos et des camions qui passent, aux périodes d’encombrement (les bouchons routiers). L’envie de quitter le lieu apparaît clairement.

Le regard : la circulation des véhicules est vue comme un flux incessant. Les conditions du regard sur les monts du Pilat et la campagne sont fortement mises en avant.

Mémoire : Le sentiment dominant est une surdose de bruit et un trafic en augmentation. La mémoire du lieu, autrefois campagnard et aujourd’hui toujours labouré (cf. le discours sur les odeurs), accentue ce sentiment de surexposition. Le souvenir des possibilités de franchissement en direction du coteau d’en face, ainsi que de l’autoroute au moment de sa construction, sont toujours vivaces.

2/ Synthèse des entretiens Les raisons de l’emménagement

C’est une maison que mon mari a avec sa grand mère qu’il a voulu garder, qu’on a rénovée, et maintenant on est là.

« Personnellement je préférerais habiter à St-Martin chez ma maman là-haut dans un petit village, et ne pas avoir l’autoroute. Là je viens de chez une amie, elle veut déménager, vendre sa maison, je lui dis « mais tu es folle ! » [alors qu’] elle n’a pas un seul bruit ! [dans le coin de St-Martin] « qu’est-ce que tu veux aller vendre ta maison ? » elle me dit « toutes celles que je suis aller visiter c’était au bord de l’autoroute ».

Même à-côté de l’autoroute c’est cher. ® [Et les gens achètent ?] Ben oui.

« Il y avait des milliers d’ouvriers dans le temps, dans toute la vallée. Toutes les usines se sont fermées, donc maintenant les gens sont partis. Il y en a qui reviennent un peu. ® [Pour la retraite ?] Non, qui font construire parce qu’ils étaient en ville, par exemple Lyon ou tout ça, ils n’en peuvent plus, ils reviennent, avec l’autoroute Lyon ce n’est pas très loin, 1/2h-3/4h. ® [Construisent où ?] Ils achètent…. les terrains les maisons c’est hors de prix là maintenant. ® [Près de l’autoroute ?] Dans toute la région. De toute façon maintenant l’immobilier est hors de prix. Même à-côté de

Les ambiances et la vie à distance de l’autoroute

1/ Le rôle de la situation géographique ou topographique

Les effets secondaires de l’écran anti-bruit

« Depuis qu’ils ont fait le mur anti-bruit, c’est bien pour les gens qui habitent DANS la Varizelle, qui sont EN-DESSOUS de l’autoroute. Mais si vous regardez de chez moi, d’un côté le mur anti-bruit il a une certaine hauteur, et de l’autre côté il est bien plus haut. Donc ça impacte et ça renvoie sur chez nous. ® Il repart en direction des hauteurs de la Varizelle. Donc depuis qu’ils ont fait le mur, on entend mieux

l’autoroute ! [rire] Nous, étant au-dessus, on entend mieux l’autoroute ! Il n’y a pas

très longtemps qu’il y est… il y a eu des travaux… je ne pourrais pas vous dire exactement… ça ne fait pas 10 ans, ça doit faire 5-6 ans. ® [Avez senti une différence ?] Non, aucune. Parce qu’il y a de plus en plus de véhicules, donc on ne sent pas de différence.

2/ Le rôle de l’espace construit

L’importance du Rez-de-chaussée

« Quand je suis en bas, et quand je monte, ça n’a rien à voir [x2]. En bas, je n’entends rien [x2], tandis qu’en haut j’entends.

« Je disais que depuis qu’ils ont fait le mur anti-bruit on entendait mieux l’autoroute. Oui, le mur anti-bruit ça ne nous a pas [changé grand chose ?]. Au contraire, ça fait

boomerang. Par contre il y a la végétation quand même, les arbres, les feuilles ça

amortit un peu. [Écran] de notre côté est [plus bas que celui d’en face]. Donc ça fait TRIC POF et ça renvoie. Donc en dessous, le lotissement qui est en bas, ils doivent certainement entendre du bruit, mais moins que nous.

3/ L’usage des fenêtres

Le plus dur c’est l’été, quand il y a les vacances, quand il faut dormir les fenêtres ouvertes parce qu’il fait chaud, et que ça circule jour et nuit

« Nous, en cette période, on a les fenêtres fermées, mais juillet août… [—], dans la chambre du haut… La pièce en bas où je couche, sur l’autoroute, je n’entends pratiquement pas [en sous-sol]. Mais dans la pièce du haut, elle ne peut pas dormir la fenêtre ouverte. Quand on a rénové la maison, on a mis du double vitrage. On a fait mettre du double vitrage de partout. « Je couche dans la chambre du haut, j’ai une fenêtre qui donne de là et une autre de là.

« Nous il y a plus de passage… ça dépend les périodes… c’est tt le tps… Quand c’est les vacances c’est jour et nuit ! Quand c’est l’hiver la nuit c’est un peu plus calme. A partir du mois de juillet ça circule la nuit ! A partir de juin juillet. Même les motos. Alors les motos GRINGNANNNNNNNNN ! [elle imite longuement] Voilà ce qu’on entend ! Les motos c’est affreux ! [rire] [bis] En plus elles roulent encore plus vite que les voitures, en plus la nuit ils doivent s’en donner à cœur joie, c’est plein gaz ! (…) Mais le plus dur c’est l’été, quand il y a les vacances, quand il faut dormir les

fenêtres ouvertes parce qu’il fait chaud, et que ça circule jour et nuit

4/ Le regard porté sur l’autoroute et sur le paysage visuel environnant

« On dirait un flux qui descend. Là-haut on voit vraiment tous les dimanche les voitures qui descendent, et l’hiver tous les feux montants et descendants on les voit, ça circule là. Mais bon, ça fait partie du paysage, on s’est habitué.

« Nous on est contents de nos montagnes ! [bis] Là il y a mon témoin [il va à la fenêtre], là-haut ça s’appelle Fontchevret, quand il y a un [nuage ???] qui traîne, je sais qu’il va [pleuvoir]. De ce côté c’est fermé parce que là-bas on a emménagé plein de meubles de ma fille, qui est en réparation. Sinon on a le Pilat… On voit le Pilat, on a une jolie vue.

5/ L’écoute du son de l’autoroute et des autres sons environnants

Ça ferait comme une rivière qui coule. « Toute la nuit vous entendez ces bruits de pneus ; pour peu que le goudron soit chaud, ça a… un autre bruit. ® je ne sais pas comment expliquer ce bruit. Ça ferait comme une rivière qui coule. Mamie, quand elle fait la sieste ici, elle dit « on dirait qu’il y a la rivière qui coule » ! C’est le bruit du goudron avec les camions. Les camions il en passe là, PFUIII ! C’est affreux. (…) Une année on avait loué en Savoie, on était juste au-dessus du torrent, eh ben le torrent ça fait du bruit ! Le torrent c’est pire.

Une espèce de sifflement

« L’autoroute c’est plus ZIIIIII… Ça fait rivière, ça fait VOUUUUVUUUU… La route en contre bas c’est plus BOUBOULOUM… On entend mieux ronfler en bas, les moteurs on les entend mieux. L’autoroute c’est plus les pneus. Les moteurs, mais avec le pneu… Une espèce de sifflement…

- L’autoroute : un donneur sonore du temps

Le réveil matin

« À 5h du matin vous les entendez, les camions, parce que c’est l’heure où ils s’en vont, où ils démarrent, des entreprises… Il y a le service technique qui est là-haut. Ils passent tous avec leur camion entre 5 et 6h du matin. Là vous êtes réveillé.

« Si c’est le matin à 5h c’est des camions, les cars passent aussi en bas, ils desservent, ils prennent les scolaires, et c’est à partir de 6.30h-7h le matin. Les camions les cars c’est ce qui fait le plus de bruit. Après c’est les voitures aussi. Le matin de bonne heure, c’est plus la route d’en-bas que l’autoroute, parce que c’est l’heure où les gens s’en vont pour travailler. Après, 10.00h du matin ou au milieu de l’après-midi, la route est peut-être un peu plus calme en bas. Comme de partout il doit y avoir des heures de pointe et des heures un peu plus calmes.

8/ S’habituer au bruit

Quand on part en vacances et qu’on revient… on ne supporte pas… On vient du Gers, on entend rien… si la nature, les bruits de la nature. Mais quand on revient là OHHH [horreur], on dit « ce n’est pas possible », et après on s’y habitue. Mais au retour on dit « oh la la ». Il faut 15 jours à peu près pour se réadapter au bruit. Moi je suis né là et je m’y acclimate.

« Ce n’est pas un malheur. Même si on n’est pas super bien, on est quand même bien. On n’est pas super bien par rapport à d’autres qui ont la tranquillité, mais on est quand même encore mieux que si on était en ville. On a quand même une belle vue, [du vert] ! ® [Le bruit capte-t-il tout le temps l’attention ?] Non, on n’y pense pas toute la journée non plus, on vit avec, parce que si on y pensait tt le tps ça nous saoulerait.

Donc on s’évade ailleurs. On s’habitue, on s’accoutume. On n’y prend même pas

garde. Si si, si on veut écouter quelque chose et que la porte est ouverte et que je veux

écouter quelque chose à la télévision, je pousse la porte. Parce que j’ai vraiment des

problèmes d’oreille !

9/ Les odeurs

Les labours

« Depuis que le gars a monté sa stabulation, on a les odeurs ! On a un paysan qui s’est monté là-haut, quand il met du truc dans les prés, je ne vous dis pas pendant 2 jours ! Il y a de quoi ne pas sortir… Mais bon, c’est ça la campagne ! [rire]

10/ La chaleur

® [Vivez beaucoup dehors l’été ?] Oui, on a un grand parasol, on mange dehors. Mais là il fait très chaud quand même l’été, parce que c’est en plein sud. Sinon, quand il fait très chaud, on ouvre toute la nuit, courants d’air, et quand le matin on se lève on ferme tout dès qu’il y a le soleil, et on vit dans le noir. Quand on monte à 40° passés… Mais ça c’est quand il y a la canicule, on n’est pas bien quand il fait chaud. On est dedans, avec le ventilateur au derrière ! [rire] Lui n’aime pas, mais moi j’ai le ventilateur !

11/ La mémoire du lieu

Avant, ici, c’était vraiment la campagne, il y avait des jardins. Enfin les jardins ça ne faisait pas bien joli, parce qu’il y avait des cabanes. Mais chacun y trouvait son compte. Le gars qui faisait pousser ses salades, il avait sa vieille cabane, elle était rafistolée comme il pouvait. Ce n’était pas très joli, ces cabanes rafistolées… qui faisaient des petits bouts de jardin… [jardins ouvriers]. Maintenant il y a des jardins ouvriers plus haut, mais ils ont tous la même cabane …avec le même tonneau pour récupérer l’eau… Tandis [qu’en face] c’était chacun sa petite cabane comme il voulait. Il y en a qui y mangeaient. Ils y passaient toutes leurs vacances, c’était leur lieu de vacances, quand il faisait beau ils allaient au jardin, ils portaient le casse- croûte…

On entendait moins, avant il n’y avait quand même pas le trafic qu’il y a actuellement. [Vous qui êtes né ici, étapes du changement de l’environnement] Le problème, c’était de traverser la nationale. Maintenant ça sature, c’est fou, c’est fou, c’est fou. Déjà l’A45 ça désengorgerait l’A47, parce que là ça sature hein, les 3 voies saturent en heure pointe.

L’accident ! Ah oui, oui. Les samedi et dimanche matin, les gens qui rentrent de boîte, moi j’entends à 4-5h du matin… GNANGGGGBIMMMM ! Boum ! Ça me fait sauter de mon lit, j’ouvre la fenêtre je vois les clignotants en face. S’il n’y a qu’une voiture qui fume, je descends et j’appelle les flics, je dis « il vient d’y avoir un accident au niveau de la Varizelle, arrivez dépêchez-vous, parce qu’il n’y a pas de voiture qui circule ». Par contre quand je vois des voitures qui s’arrêtent, parce que maintenant tout le monde a un portable, je ne dis rien. En plus si ce n’est pas grave et que je les appelle, après la personne risque d’avoir une prime parce que…, maintenant ça me gêne. Par contre une fois je n’ai pas appelé, la personne était décédée. Alors je me dis

« si tu avais appelé tout de suite, peut-être … qu’elle ne serait pas morte… », je m’étais culpabilisée, parce qu’en plus c’était un jeune. C’est toujours en face, parce

que je pense que les gens vont peut-être aussi vite, et ils sont surpris, et quand il pleut c’est mortel.

12/ Les commodités de l’A47

Si on veut dégager les villes, on est obligé d’avoir des autoroutes. Les autoroutes maintenant. Il faut bien comprendre que si on a des voitures on est obligé d’avoir des autoroutes, sinon on est obligé de tous marcher à pied hein ! Et de tout centrer sur la ville (…) Et pour le travail, maintenant les gens ne travaillent plus à-côté de chez eux, on est obligé d’avoir une route assez rapide pour aller au travail. Ma fille qui va habiter dans la plaine elle a 48 km et elle travaille à Saint-Chamond, donc tous les jours elle va se faire l’A47. Elle est contente de l’autoroute… Elle habite à 3- 4 minutes de l’autoroute, et à 2-3 minutes de la sortie à Saint-Chamond. Donc c’est pratique.

13/ Les déplacements

La bifurcation

« Souvent vous avez les camions qui ne sont pas dans la bonne file, le gars met son clignotant, déboîte, et ceux qui arrivent derrière… [accident]. Mais entre le pont de l’autoroute là et ici, c’est très souvent que ça pète.

« Le seul problème, c’est quand on arrive à la bretelle qui va sur la route du Puy et sur Clermont. C’est très, très mal foutu. Il faudrait que la bifurcation prenne bien plus bas. Parce que là-haut c’est pareil que quand on arrive dans Saint-Chamond, les gens voient trop tard qu’ils ne sont pas dans la bonne direction, donc ils coupent.

La conduite

« Il y a des personnes qui n’aiment pas conduire sur l’autoroute, moi j’aime bien. Par contre j’ai des amies qui ne prendront jamais l’autoroute parce ce q’elles ont tellement peur de doubler les camions, elles stressent de doubler les camions, elles resteront

derrière. Et les camions qui ne sont pas sur la bonne file, qui veulent aller sur Lyon, qui s’en aperçoivent, ils déboîtent. À ce niveau-là, à partir d’ici c’est mal fait.

La signalétique

« C’est vrai, quand on est sur l’autoroute et qu’on trouve des panneaux qui nous indiquent à regarder quelque chose, c’est agréable, parce qu’on y porte les yeux. Une fois, on revenait du Gers par l’autoroute, on est passés vers Clermont [ont vu panneau pour « Mont d’or » on a dit « tiens, on a le temps, si on allait y faire un tour ? », parce qu’il y avait une belle pancarte. ® [Ça donnait envie de sortir] pour voir des choses. Ça coupait la route. Parce qu’on a une belle région, il y a des choses intéressantes à voir.

14/ La santé

« Si on entendait un petit peu moins l’autoroute, ça serait plus agréable, mais on le supporte. Ça fait de la pollution aussi. La pollution on ne s’en aperçoit pas, on la respire. Après être mariés, on avait fait une haie en bas et une autre en haut du jardin : ça a tout crevé ! On avait mis des arbres fruitiers en espalier, il reste deux arbres, les autres ont tous crevé.

II.4/ La Chabure : vivre à distance de l’autoroute dans un pavillon en

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