• Aucun résultat trouvé

Vaccins thérapeutiques contre le fragment C-terminal du peptide Aβ 40

Partie 2 : les immunothérapies en développement clinique dans la MA

D. Les immunothérapies anti-Aβ en développement clinique pour traiter la MA

3) Vaccins thérapeutiques contre le fragment C-terminal du peptide Aβ 40

A l’heure actuelle, un seul vaccin thérapeutique ciblant le fragment C-terminal du peptide Aβ est en développement : l’Aβvac40. Ce vaccin cible spécifiquement le peptide Aβ40, qui est la forme prédominante d’Aβ, et plus précisément son fragment C-terminal [155].

Bien que la forme Aβ42 ait une propension plus élevée à l’agrégation, l’Aβ40 peut

également s’agréger sous forme de produits hautement toxiques et diffusables.

Plusieurs études ont notamment suggéré qu’une concentration élevée en Aβ40 dans le

cerveau distingue les patients atteints de MA de ceux qui possèdent des plaques séniles mais sont sains sur le plan cognitif [164] - [165]. Ces données soulignent ainsi l’importance de l’Aβ40 dans le développement des démences comme la MA. L’Aβ40 est également le principal

composant des dépôts amyloïdes qui se forment dans les angiopathies amyloïdes cérébrales, fréquemment retrouvées chez les patients atteints de MA.

De plus, des études ont noté la présence d’anticorps anti-Aβ40 spécifiques dans des

enchevêtrements neurofibrillaires (DNFs) intra- et extra-neuronaux, localisés dans le cortex entorhinal et l’hippocampe des cerveaux atteints de MA. Ces anticorps anti-Aβ40 spécifiques

ne sont pas co-localisés avec les DNFs composées de tau, suggérant l’existence de dégénérescences neuronales remplies de fragments C-terminaux Aβx-40.

Enfin, certaines études ont montré que le ratio Aβ42/Aβ40 pourrait être plus crucial pour

la formation d’oligomères neurotoxiques que la charge totale de peptides Aβ produite dans le cerveau. Des modifications de ce ratio pourraient favoriser la stabilisation de ces intermédiaires hautement toxiques in vitro [166]. Ces données suggèrent que réduire la charge totale de peptides Aβ (en ciblant le fragment N-terminal par exemple) pourrait être moins efficace que de restaurer un ratio Aβ42/Aβ40 approprié en ciblant spécifiquement les peptides

Aβ42 ou Aβ40 sur leur fragment C-terminal.

C’est donc pour toutes ces raisons qu’un vaccin ciblant le fragment C-terminal du peptide Aβ a été développé.

a) Structure des vaccins ciblant le fragment C-terminal

L’ABvac40 est composé d’un peptide Aβ33-40, qui vise à minimiser le risque de réponse

T cellulaire. En effet, les épitopes T qui en sont responsables se situeraient sur différentes régions du peptide Aβ (Aβ1-16, 6-28, 16-25, 16-30, 19-33 et 28-42). Cependant, les cellules T réactives

à l’Aβ28-42 n’ont pas réagi au peptide Aβ1-40, suggérant l’importance des deux dernier résidus

aminés C-terminaux [145]. Cet antigène est couplé à l’aluminium pour stimuler la réponse immune de type Th2 [155].

Contrairement aux anticorps ciblant le fragment N-terminal du peptide Aβ, l’épitope ciblé par les anticorps générés par ce vaccin se situe sur la portion transmembranaire de l’APP : cet épitope ne peut donc se lier aux anticorps qu’après le clivage et la sécrétion du peptide Aβ. Cela empêche notamment les réactions croisées avec la protéine APP native et l’accumulation de complexes anticorps-antigène au niveau de la membrane de la cellule neuronale. Ceci permet notamment d’augmenter la disponibilité des anticorps circulants pour interagir avec les peptides Aβ.

De plus, ces anticorps pourraient jouer un rôle protecteur contre les peptides Aβ tronqués ou modifiés au niveau de leur fragment N-terminal. C’est par exemple le cas du pyroglutamate-3 Aβ, qui a été décrit comme hautement toxique et sujet à l’agrégation [167] - [168].

b) Résultats des essais cliniques de l’ABvac40

Cette molécule a présenté un profil de sécurité favorable en phase I. Aucune méningoencéphalite n’a été rapportée durant l’étude. 88% des patients ont développé des anticorps anti-Aβ40 suite à l’injection du vaccin. Aucune donnée d’efficacité n’a été publiée à

l’heure actuelle mais les anticorps polyclonaux générés par ce vaccin reconnaissent les formes monomériques, oligomériques et insolubles (plaques) du peptide Aβ40. Ce profil multi-cible

pourrait améliorer la probabilité de succès chez des patients se situant à différents stades pathologiques de la MA, en comparaison aux anticorps monoclonaux qui n’ont qu’une seule cible. Une phase II a été initiée en février 2018 pour évaluer l’efficacité de ce vaccin ; elle devrait se terminer en février 2021 [155].

c. Conclusion sur les vaccins thérapeutiques anti-Aβ

L’immunothérapie active anti-Aβ présente de nombreux avantages : elle est capable de fournir une réponse naturelle et durable de la production en anticorps, nécessitant par conséquent peu d’injections – ce qui la rend moins coûteuse et facilite l’observance. L’injection de faibles doses d’antigènes suffit et les pics de concentration sont atteints progressivement, ce qui permet de limiter les effets toxiques. Ainsi, cette immunothérapie est bien tolérée par les patients sur le long terme, ce qui présente un avantage considérable pour une pathologie chronique comme la MA.

Cependant, cette réponse immune n’est pas garantie car la réponse à ce vaccin repose sur le système immunitaire du patient. Ainsi, les réponses immunes chez les personnes plus âgées sont parfois plus faibles et ne déclenchent pas de réponse en anticorps robuste. De plus, la génération d’anticorps en réponse au traitement peut varier d’une personne à l’autre, ce qui conduit à une hétérogénéité des titres en anticorps et de leurs spécificités. Enfin, l’administration des vaccins peut déclencher une réaction auto-immune. Il convient donc de concevoir des vaccins qui n’entraîneront pas de réponse auto-réactive des lymphocytes T.

Les études chez l’Homme ont permis de montrer que, comme in vitro et chez l’animal, les anticorps générés suite à l’administration d’un vaccin anti-Aβ sont capables de se lier aux plaques amyloïdes pour les éliminer, ce qui permet de diminuer la charge amyloïde cérébrale. Cela a notamment été observé avec l’AN1792 et le CAD106. En revanche, aucune étude clinique n’a pour l’instant démontré une efficacité suffisante de la vaccination thérapeutique anti-Aβ sur les patients atteints de MA légère à modérée pour atteindre la phase III.