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Un contrôle dissocié des services de renseignement

IV. ESPAGNE

6. Un contrôle dissocié des services de renseignement

Les services secrets espagnols sont intégrés dans une structure unique, le Centro Nacional de Inteligencia, qui cumule les activités de renseignement et de contre-espionnage. Réorganisés par une loi de 2002, ils sont depuis soumis à un contrôle parlementaire, qui est partiellement dissocié de celui appliqué à la politique de défense.

489 Entretien, conseiller de la ministre de la défense, Madrid, 17/12/2008. 490 Entretien, administrateur de la commission de défense, Madrid, 13/05/2009.

491 XUCLA i COSTA J, A. M. Pla i Boix, « La autorización y control parlamentario de las missiones del ejercito en el exterior : la falta de un procedimiento común », op. cit., p. 34 et s.

492 M. Gonzales, « Chacón anuncia la retirada de Kosovo », El País, 19 mars 2009. 493

R. M. de Rituerto, A. Rizzi, « La OTAN critica la retirada por precipitada », El País, 20 mars 2009.

494 F. Garea, « Zapatero sufre un severo revolcón en el Congreso por la polemica de Kosovo », El País, 26 mars 2009. 495 Entretien, conseiller « défense » du groupe socialiste, Madrid, 18/12/2008.

496 « Proposicion no de ley, relativa a la información sobre las Misiones de las Fuerzas Armadas Españolas en el Exterior », 20 avril 2009 (texte transmis par son auteur).

497

Entretien ,porte-parole « défense » du groupe populaire, Madrid, 13/05/2009. Suscitant un consensus relativement large, ce texte était encore en débat au moment où l’enquête était réalisée.

La loi 11/2002 du 6 mai 2002 a crée le Centro Nacional de Inteligencia (C.N.I.) qui est venu se substituer au Centro Superior de Información de la Defensa (Ce.S.I .D.) mis en place en 1977498. La réforme de 2002 visait notamment à

attribuer au C.N.I. une autonomie fonctionnelle, avec un budget propre, et des règles de recrutement spécifique. Le C.N.I. est organiquement inclus dans la structure du ministère de la défense, et sa mission consiste à informer le gouvernement, et notamment son président. Son directeur au rang de secrétaire d’Etat, nommé pour 5 ans par le gouvernement, sur proposition du ministre de la défense. Une des innovations majeures introduites par la loi de 2002 concerne le contrôle parlementaire des services de renseignement. L’exposé des motifs fait de l’introduction de ce contrôle un des objectifs de la loi et son chapitre III y est en partie consacré.

Malgré son inscription dans le ministère de la défense, le contrôle du C.N.I. fait l’objet de règles spécifiques, qui le placent à part, du reste de la politique de défense. La loi 11/2002 prévoit en effet que c’est la commission des « fonds réservés » (« gastos réservados ») du Congrès des députés qui en est chargée. Présidée par le président du Congrès, cette commission est composée d’un représentant de chaque groupe, choisi parmi les députés habilités à consulter les documents classifiés. Au cours de la IXe législature, les élus qui en font partie n’affichent qu’une faible proximité avec la commission de la défense. Outre son président, Josep Bono, ancien ministre de la défense du premier gouvernement de José Luis Zapatero formé en avril 2004 et président en exercice du Congrès, seuls deux de ses membres ont participé aux travaux de cette commission : l’un, ancien président de la commission des affaires étrangères de la VIIIe législature, en a fait partie lors des IIe et IIIe législature, l’autre, également membre de la commission des affaires étrangères, pendant les VIIIe et IXe législatures. S’y ajoute un représentant du parti nationaliste basque, porte-parole de son groupe au sein de la commission des affaires étrangères mais n’appartenant pas à la commission de la défense. La commission des fonds secrets est chargée de contrôler l’utilisation des crédits alloués au C.N.I. et d’examiner le plan d’objectifs qu’il soumet chaque année au gouvernement.

Le rôle mineur attribué à la commission de la défense dans le contrôle des activités du C.N.I. découle des règles de droit commun qui s’applique à ses réunions. Juridiquement, il n’existe aucun moyen d’imposer la confidentialité de ses travaux. Les demandes d’accès à des documents classifiés ne sont accordées qu’aux députés disposant d’une habilitation en la matière. La seule procédure existante consiste à organiser une réunion à huis clos de la commission de la défense. Extrêmement rare, cette règle n’a été appliquée que deux ou trois fois depuis les années 1980. Ces expériences ont d’ailleurs montré les limites de l’exercice : la constitution d’une commission de la défense à huis clos sur l’opérationnalité des forces armées espagnoles, mise en place dans le cadre de leur professionnalisation en 1996, a fait l’objet de fuites qui ont mis en évidence les difficultés à restreindre la circulation d’informations en la matière. La commission de la défense dispose également de la possibilité d’auditionner à huis clos le directeur du C.N.I., mais même si certains groupes l’ont demandé, ce dispositif n’a jamais été mis en place499. Lorsque le directeur du C.N.I. fait l’objet d’une audition dans le cadre de la commission de la défense, ce n’est donc pas sur des sujets touchant à ses fonctions. Le 20 mai 2009, il a ainsi été auditionné, à la demande des députés du groupe populaire, mais également à son initiative, pour se défendre d’accusations émises par la presse, sur de supposés détournements à des fins personnelles des fonds qui lui étaient confiés. Dans ce cadre, le directeur du C.N.I. a pris soin de souligner qu’il ne se prêtait à cet exercice que pour se défendre d’attaques mettant en cause son honneur, mais ne concernant pas des activités couvertes par son obligation de réserve500. Malgré le soutien très consensuel qui lui a été apporté par les

députés, cette audition a été l’occasion pour le porte-parole du groupe Izquierda Unida, par ailleurs membre de la commission des « fonds réservés », de regretter les restrictions apportées par la loi 11/2002 au suivi parlementaire des activités du C.N.I. Gaspar Llamarzares Triga a notamment souligné le paradoxe existant entre le contrôle des activités publiques des services de renseignements soumises aux règles du secret et le contrôle des activités privées de son directeur, faisant l’objet d’un traitement public, montrant que les règles mises en place en 2002 ne font pas l’objet d’une unanimité au Congrès.

498 « Ley 11/2002, de 6 de mayo, reguladora del Centro Nacional de Interligencia », B. O. E., n° 109, p. 16440-16444. 499

Entretien, conseiller de la ministre de la défense, Madrid, 17/12/2008.

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