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CADRE THEORIQUE DE LA RECHECHE

12. L’ ÉVALUATION DES COMPÉTENCES , PARTICULARITÉS

12.2. Q UEL TYPE D ’ EVALUATION PRIVILEGIER POUR EVALUER LES COMPETENCES ?

Comme cela a brièvement été évoqué, l’évaluation diagnostique, formative et certificative, sont les types d’évaluation qui, jusqu’à présent, ont été le plus couramment préconisés et adoptés en formation. Toutefois, ces modèles sont remis en cause depuis près d’une vingtaine d’années, certains auteurs abandonnant la dichotomie initialement induite entre ces types d’évaluation, au profit de nouveaux modèles (Tardif, 2006, p. 102). Il s’agit des évaluations alternatives, des performances et authentiques.

L’évaluation alternative s’est fondée, en quelque sorte, en opposition aux évaluations très brèves dans lesquelles cocher une case était suffisant (par ex. les questions à choix multiples). Dans ce type d’évaluation, l’étudiant doit fournir une réponse élaborée.

Ensuite, certains auteurs ont concrétisé cette évaluation en la formulant en tant qu’évaluation des performances. « Kane, Khattri, Reeve, et Adamson (1997) indiquent que l’évaluation requiert (…) des étudiants qu’ils structurent la tâche d’évaluation, qu’ils mettent des connaissances en action, qu’ils construisent une réponse et, dans plusieurs cas, qu’ils expliquent le rationnel et la démarche permettant de fournir une telle réponse » (Tardif, 2006, p.102). En somme, l’évaluateur doit pouvoir saisir la démarche de l’apprenant, qui fournit une réponse qu’il construit de A à Z et qui pourrait être qualifiée d’originale ou d’unique. Nous nous situons dans une vision très éloignée du bachotage où chaque réponse devrait être conforme, voire identique aux contenus des cours et d’un étudiant à l’autre, sans viser pour autant une assimilation réelle de l’apprenant, la mémoire à court terme étant suffisante pour restituer ce qui est attendu.

L’évaluation authentique inclut les caractéristiques des évaluations alternatives et de performances et se rapproche fortement de cette dernière. Elle se distingue cependant sur un point ; l’évaluation authentique recommande de transposer les situations d’évaluations aux situations réelles. On ne construit pas une problématique ou une thématique à des fins d’évaluation, on se sert de la réalité existante, à contrario de l’évaluation des performances qui ne requiert pas forcément ce réalisme. Les évaluations authentiques et des performances sont des évaluations alternatives qui, comme nous venons de le mentionner, incluent des caractéristiques supplémentaires.

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12.2.1. L’EVALUATION AUTHENTIQUE, LE MODELE A ADOPTER ?

Selon Tardif (2006, pp. 103-135), le modèle qui se prête le mieux au jeu de l’évaluation des compétences est sans doute, l’évaluation authentique. Les raisons invoquées pour justifier ce choix sont tout d’abord le réalisme des situations d’évaluation. En effet, pour évaluer un savoir-agir complexe, plus nous nous rapprochons de la réalité à laquelle les apprenants seront confrontés, plus nous pouvons espérer tendre vers la démonstration, in situ de ce savoir-agir. De plus, créer des situations artificielles alors que des situations réelles existent peut paraître pour le moins surprenant. Ensuite, étant donné que l’évaluation des compétences ambitionne une transférabilité dans la pratique, utiliser des situations réelles peut donner des indications précieuses sur cet objectif, contrairement aux situations déliées de réalisme. Pour terminer, si l’évaluation doit être authentique, il y a fort à parier que les situations d’apprentissages le seront également, présentant les avantages susmentionnés.

L’évaluation authentique devrait faciliter la prise en compte du parcours de formation en évaluant le niveau d’atteinte d’une compétence, en mesurant le degré d’acquisition des ressources nécessaires et, pour terminer, en appréciant les familles de situations dans lesquelles ces développements ont lieu. Le modèle d’évaluation authentique engendre un certain nombre d’exigences qui ont une influence bien au-delà du processus d’évaluation. A ce sujet, veuillez vous référer à l’annexe n° 21.10 (les exigences et les avantages de l’évaluation authentique).

12.2.2. UN MODELE MIXTE ?

Le Boterf (2009a, 2009b) et Tardif (2006) s’accordent sur le fait que la compétence n’est pas une simple addition de ressources mais qu’elle relève d’une combinatoire. Selon ces auteurs, pour véritablement évaluer une combinatoire, il est nécessaire qu’une action ait lieu. Par exemple, la compétence ne peut être appréhendée uniquement par le discours ou par des évaluations de ressources, indépendantes les unes des autres.

Si pour Tardif (2006), l’approche par compétence requiert d’adopter un dispositif relatif aux modèles cognitifs et que le type d’évaluation à privilégier est incontestablement l’évaluation authentique, Le Boterf (2009a, 2009b) a une position qui semble plus nuancée. Pour ce dernier, s’il est vrai qu’on ne peut attester d’une compétence en dehors d’une action, en amont de l’évaluation de la compétence, plusieurs sortes d’évaluations peuvent être alternées. Dans ce cas, le choix des modalités d’évaluation doit se réaliser en fonction de la ressource en question et il n’y a aucune raison de renoncer et de nier certains types d’évaluation, comme les questionnaires à choix multiples, par exemple.

Néanmoins, évaluer certaines ressources séparément ne peut être qu’une étape préalable car cette approche n’est pas suffisante en soi, elle est trop réductrice. Dans l’évaluation des compétences, il y a un enjeu de fiabilité important car, en quelque sorte, l’évaluation devrait être à même d’attester que telle personne possède un savoir-agir complexe mais encore que cela a été exercé au-delà de "la chance du débutant". En effet, parvenir « une fois à… » n’est pas un gage de fiabilité.

Pour Le Boterf (2009a, p.103), s’il n’est pas possible d’accéder à des situations réelles, des situations de simulations devraient êtres crées. Toutefois, lorsque pour des raisons X ce n’est pas envisageable non plus, il importe de compléter le discursif par des preuves, en somme de ne pas se contenter d’un simple descriptif d’activités réalisées car plus nous nous éloignons des situations réelles, plus la crédibilité des évaluations diminue.

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Dans les situations authentiques ou de simulations, le jugement de valeur sera émis en fonction de la prescription annoncée en prenant en compte son niveau de complexité. Si la prescription relève d’un savoir-procédural l’évaluateur se prononcera en termes de jugement à l’écart, par exemple, Paul a suivi la procédure en cas de crise d’épilepsie ou il ne l’a pas suivie et a mis en danger la personne. Dans ce cas, on se limite à l’évaluation d’un type de savoir et il s’agit d’un jugement de conformité.

Dans une situation d’évaluation plus délicate, qui requiert une combinatoire, c’est-à-dire la mise en œuvre d’une compétence, il n’existe généralement pas qu’une manière unique d’agir. Par exemple, il n’y a pas une procédure type qui règlemente la manière de gérer un conflit au sein d’un groupe et les ressources multiples qui vont se combiner dans l’action seront réadaptées dans chaque situation singulière. Le jugement de valeur sera déterminé en fonction de la pertinence des actions et du résultat final. L’évaluation « est un jugement de valeur sur sa pertinence, sur la façon dont le professionnel a su s’y prendre pour tenir compte d’un contexte particulier et pour interpréter des critères de réalisation qui expriment des orientations et non pas des enchaînements opératoires précis » (Le Boterf, 2009a, p. 108).

Dans le cas de prescriptions larges, si la manière de procéder ne peut être définie comme un mode d’emploi qu’on suivrait à la lettre, c’est parce qu’elle revêt une complexité nettement plus importante mais aussi parce qu’il n’existe pas qu’une seule façon d’agir avec compétence, en référence à la prescription. Dans ce cas, ce qui sera évalué, c’est-à-dire l’élément auquel la valeur sera attribuée, est la pertinence globale de l’action qui inclut le jugement d’efficacité (le conflit a été « désamorcé », voire résolu), le jugement de conformité (le professionnel a fait preuve d’éthique, de respect, etc.), le jugement de beauté (le conflit a été bien géré) et le jugement de singularité (grâce à sa touche personnelle, Paul est « parvenu à… »).

Toutefois, s’il est exact qu’il n’existe pas une norme à suivre, il en existe pourtant plusieurs auxquelles l’individu doit se conformer car si l'on ne sait dire à l’individu comment procéder avec exactitude, il y a un certain nombre de comportements, d’actions, qui ne seront pas tolérés (par exemple, être malveillant, recourir à la violence, etc.).

Le jugement de pertinence s’effectue, par conséquent, par le biais des représentations sociales de l’évaluateur qui, en somme, constituent un référent et qui vont déterminer la valeur à attribuer à l’activité (le référé).

Si certains indicateurs peuvent être communs aux règles du métier (par ex. les techniques de communication, le code de déontologie, etc.), la plupart se rapportent aux représentations sociales des évaluateurs de ce qu’est un

« bon professionnel » en action. Dès lors, afin de fiabiliser les jugements, il importe que ceux-ci soient confrontés et croisés. Pour Le Boterf (2009a, p. 110), « c’est en recourant à l’intersubjectivité que l’on gagnera en objectivité.

L’attribution d’une valeur relève alors d’un consensus et non du point de vue d’un seul acteur ». De plus, les actions doivent être explicitées, notamment concernant les prises de décisions. Il s’agit de la réflexivité que nécessite la mise en œuvre d’une compétence. Ce paramètre devrait être assimilé au processus d’évaluation.

Dans notre société contemporaine, nous pouvons émettre l’hypothèse que, du moins concernant les formations qui nous intéressent dans ce mémoire, la plupart du temps, l’évaluation portera sur cette pertinence. En effet, les formations de niveau Bachelor débouchent sur des métiers subtils, qui ne sauraient se réduire à l’application de procédures. Généralement, et dès leur insertion professionnelle, il est attendu des jeunes diplômés une grande capacité d’adaptation et de réflexivité. Ils doivent s’ajuster rapidement aux évolutions du marché du travail. Par exemple, dans le cas des TS, ils doivent faire face aux mutations sociales, trouver des solutions pour répondre aux nouvelles problématiques qui émergent du contexte. Les jeunes diplômés étant sans cesse confrontés à de nouvelles situations, il est attendu qu’ils y apportent des solutions, qu’ils fassent preuve d’initiatives et d’innovations. L’activité au travail est donc bien plus subtile et demande beaucoup plus d’aptitudes que la simple

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exécution de tâches prescrites dans un cahier des charges. D’ailleurs, si les employés se limitaient aux seules prescriptions, le travail serait peu efficace et de moindre qualité.

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Evaluation combinatoire et holistique

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Gage de fiabilité de l’évaluation Démonstration savoir-agir complexe

Situations réelles Situations simulées

Indice de transférabilité

Jugement de pertinence confrontés et croisés

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