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CADRE THEORIQUE DE LA RECHECHE

10. L ES REFERENTIELS DE COMPETENCES

10.3. L ES DIFFICULTES RELATIVES A L ’ IMPLEMENTATION DES REFERENTIELS

Les représentations et conceptions de la compétence influent de manière significative sur les pratiques de formation. Le référentiel est, sans équivoque, le reflet des dites conceptions et représentations. Etant donné qu’il sert de fondement aux orientations de la formation, au même titre que les objectifs servent de base aux choix opérés dans une approche par objectifs, plusieurs problématiques se dévoilent dans la pratique et elles sont symptomatiques de certaines confusions.

Dans le paysage de la formation, nous pouvons constater que de nombreux référentiels sont présents et il est étonnant de constater que pour un même type de formation, nous puissions trouver des référentiels très différents dans des zones géographies similaires, partageant à priori une culture commune de la profession en jeu. Ce fait est révélateur de la difficulté même à définir la compétence, étant donné qu’il n’existe pas de référentiels sur mesure, il en va de la construction d’individus.

Le référentiel va déterminer l’ensemble du pilotage de la formation. Cependant, dans certains cas, les liens entre le référentiel et le savoir-agir sont tellement faibles qu’ils ne peuvent que laisser perplexe car on semble naviguer à vue, sans anticiper la moindre difficulté potentielle relative au processus d’évaluation, notamment.

Dans d’autres cas, en revanche, le référentiel est tellement vaste que, finalement, une compétence intègre des familles de situations et, non plus, une des familles de situations par compétence. Cette latitude va laisser place à des incohérences importantes, faisant perdre de vue le but que l'on souhaite initialement atteindre et qui va engendrer une difficulté à déterminer ce qu'au final, on vise réellement mais aussi ce qui sera évalué. Par ailleurs, selon Tardif (2006), « relativement au caractère contextuel de la compétence, la définition privilégiée impose qu’une famille soit la cible de la finalisation de tous les apprentissages dans le cadre d’une compétence donnée, les situations circonscrivant l’étendue de cette famille » (p. 45). Le Boterf (2009a et 2009b) partage ce point de vue. Par ailleurs, opter pour une famille de situations par compétence va grandement favoriser l’opérationnel de la formation.

De plus, comme le relèvent certains auteurs (Delevay, 2007, Tardif, 2006), dans les différentes taxinomies usitées pour établir un référentiel, nous constatons parfois des confusions importantes entre référentiel de compétences, référentiel de ressources et référentiel de tâches. Les caractéristiques types d’une compétence ayant été préalablement détaillées, lors de l’analyse d’un référentiel de compétences, il importe de se questionner afin de déterminer s’il s’agit bien de compétences et non pas uniquement de ressources. Comme évoqué, un référentiel dans lequel une compétence peut être intégrée à une autre n’en est pas réellement une.

S’il est possible de l’intégrer à une autre compétence, il s’agit alors d’une ressource qui fait partie intégrante de l’autre compétence. Souvent, certaines compétences transversales à toutes les autres font l’objet, dans le référentiel, d’une compétence en soi. Tardif (2006, p. 42) énonce l’exemple de l’éthique. Si dans chaque situation, un travailleur social doit faire preuve d’éthique, le niveau de complexité que cette compétence requiert a trait à la singularité et à l’ajustement qui doit se réaliser dans chaque situation singulière. En faire une compétence à part, énoncée dans un référentiel, a certes l’avantage de s’assurer que celle-ci sera évaluée en tant que tel. Cependant, l’énoncer comme une compétence en soi, engendre le risque d’en faire une évaluation

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en soi, délié des autres compétences et dans lesquels elle ne peut être appréciée, nonobstant son importance capitale dans chacune des autres familles de situations.

S’y adjoint la difficulté à déterminer de manière pertinente les savoirs-être23. Si l'on ne souhaite pas négliger l’importance de ces derniers pour mettre en œuvre efficacement une compétence et les évincer des évaluations, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une notion ambiguë. Sans entrer dans le célèbre débat sur l’inné et l’acquis, on juge la personnalité d’un individu, à travers les savoirs-être. Ceux-ci sont souvent exprimés en termes de capacités personnelles et engendrent la sélection des personnalités, comme le relève notamment Le Boterf (2009a, pp.18-19). Or, s’il est exact que certaines personnalités sont plus à même d’exercer certains emplois, un grand nombre de personnalités peut exercer une même profession. De plus, les savoirs-être sont toujours situés, au même titre que n’importe quelles autres ressources. Par exemple, une personne qui est incapable d’écouter son conjoint avec empathie est peut-être à même de le faire dans un contexte professionnel. En situation professionnelle, il possède donc cette ressource. Pour Le Boterf (2009a, pp.19-20), ce qu’il importe de déterminer et qui servira ensuite de balise à l’évaluation est la manière dont une action est réalisée. « A un raisonnement en termes de qualités plus ou moins innées, et donc difficiles à faire évoluer par le moyen de la formation, il est donc préférable de substituer un raisonnement en termes de modalités d’action, de comportements associés à des activités à réaliser dans des contextes particuliers » (Le Boterf (2009a, p.20). Au final, ce qu’on attend d’un professionnel n’est pas qu’il dispose de « capacités à » mais que dans l’action, il parvienne à agir efficacement, en mobilisant ses différents savoirs, le savoir-être étant dans la plupart des situations professionnelles incontournable.

Pour situer les savoirs-être et l’éventuel impact que la formation peut raisonnablement prétendre à leurs égards, une grille de lecture qui nous paraît utile est celle qui a été établie par la NPEC (National Postsecondary Education Coopérative) :

23 Pour rappel et selon la définition retenue, la compétence intègre des ressources variées, incluses dans des familles de ressources. Il s’agit « de savoirs, de savoir-faire, de savoir-être » (Tardif, 2006, p.28) dans lesquels sont incluses des

« connaissances déclaratives, des connaissances procédurales et des « connaissances conditionnelles » (Tardif, 2006, p.

28).

- 48 - Source : NPEC, 2001 (cité par Le Boterf, 2009a, pp.19-20).

La NPEC définit la compétence comme « a combination of skills, abilities and knowledge needed to perform a specific task » soit une combinaison de compétences, aptitudes et connaissances nécessaires pour accomplir une tâche spécifique. Comme le mentionne Le Boterf (2009a, p. 25), les traits de personnalité ne peuvent être l’objet de stratégies d’apprentissages alors que certains savoirs-être peuvent faire l’objet d’entrainements et, par conséquent, d’apprentissages. Pour les ingénieurs de formation, il importe de les spécifier car si les traits de personnalité peuvent constituer des prérequis à l’exercice de la profession, ils n’en sont en aucun cas l’objet. A contrario de certains savoirs-être, qui devront être traduits en termes opératoires et qui seront évaluables. Le Boterf (2009a, p. 25) propose plusieurs manières de les intégrer aux référentiels de compétences :

o « Traduire en faire (…). L’écoute par exemple pour le métier d’infirmier peut se traduire en savoir-faire relationnel : être capable d’établir une relation d’écoute compréhensive (…) ;

o Y associer des indicateurs qui permettront de les évaluer. Le savoir-être « rigueur » pourrait par exemple avoir comme indicateur : « les procédures sont appliquées systématiquement et correctement » ;

o Les considérer comme des exigences professionnelles relatives à une situation de travail (…) ».

L’analyse de chaque compétence dans un référentiel n’est pas sans intérêt, étant donné les influences et les conséquences que celle-ci va avoir sur le choix des situations d’apprentissage, mais aussi sur le processus d’évaluation, qui représente en quelque sorte le gage de qualité de la formation.

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EN N RÉSSUUMÉ ::

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11. L’ ÉVALUATION