U NE CREATIVITE DU QUOTIDIEN QUI REND ACTEUR

1.1.3.1.D

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Les initiatives sociales et solidaires témoignent de l’action des individus quand s’expriment leurs solidarités et leurs sociabilités. Cela prend donc de multiples formes, des plus élémentaires aux plus engagées : repas entre voisins, associations de parents d’élèves, trocs de plantes, fêtes diverses, camions en tournée, projets d’éco-construction, ressourceries, ateliers intergénérationnels…

Ces initiatives du quotidien instaurent dans l’espace une dynamique d’action particulière. Elles rapportent l’appropriation à des actes élémentaires du quotidien. Nous pensons qu’elles témoignent d’une créativité collective. Elles montrent ainsi la capacité des individus à se saisir de situations complexes, pour les adapter et les rendre plus « vivables ».

Amélie Lefebvre Chapitre 1

1.1.3.2.L

En touchant à cette créativité quotidienne des individus, l’étude des initiatives les rejoint dans leurs pratiques ordinaires. Les hommes et les femmes, sur la base de leurs pratiques quotidiennes, entretiennent avec l’espace une relation, un vécu : c’est-à-dire qu’ils expérimentent l’espace, ils le parcourent et y vivent. Cet espace vécu dessine le parcours intime de chacun, non seulement dans une perspective passée (à travers les souvenirs, les expériences passées, etc.), mais évoluant au gré des idées, des rencontres, des rêves, des représentations, des réalisations, des projets… C’est donc un ensemble vaste, foisonnant, personnel et évolutif.

Le vécu influence ces pratiques créatives, et à travers elles, les initiatives sociales et solidaires que les individus portent. C’est au sein des différents vécus des individus et des groupes que l’on pourrait trouver une raison d’être de ces initiatives.

1.1.3.3.

L

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Les problématiques autour du lien social traversent fréquemment les débats publics mais aussi les études des sciences sociales. Sans toutefois faire le tour des idées et controverses sur la question, retenons plusieurs éléments utiles à notre étude.

« Les nouveaux défis du lien social conduisent à penser la solidarité … comme un système comprenant des formes multiples et complémentaires de la solidarité, lesquelles correspondent en réalité à la pluralité des liens sociaux : le lien de filiation, le lien de participation élective, le lien de participation organique et le lien de citoyenneté. Ces liens sont entrecroisés et chacun d’eux apporte sa contribution au tissage qui enveloppe les membres d’une société. Renforcer ou renouer le lien social revient alors à renforcer chaque type de liens sociaux de façon à ce que chacun d’entre eux s’entrecroise réellement avec les autres et permette ainsi l’intégration solidaire de tous les membres de la société. » (Paugam 2013). La mise en lumière des différents liens à l’échelle de notre étude prend en considération tous les hommes dans leurs actions les plus ordinaires. Être solidaire se pose en acte participatif constituant la base de la vie en société. Ainsi, l’étude des initiatives sociales et solidaires nous amène à étudier la construction la plus simple, la plus primaire, mais aussi la plus fondamentale (à notre sens) de l’implication de chaque personne à la vie en commun.

Ensuite, la qualité du lien social est fragile ou peut faire l’objet d’accaparement ou de convoitise. En effet, la situation d’interdépendance dans laquelle nous place la vie en société rend la coopération nécessaire, mais pas systématique. Perdre sa place (son travail par exemple) peut être une épreuve signifiant la perte de son utilité sociale (Paugam 2013). La rupture des liens au sein d’un socio- système (à travers des conflits) fragilise le tissu social (idib.)13_{. De plus, les relations sociales}

13 _{Il est bon ici de remarquer, comme le fait Serge Paugam, que la rupture des liens sociaux n’est pas forcément un mal en}

Amélie Lefebvre Chapitre 1 dépendent essentiellement des individus : chacun élabore son propre tissu social. On imagine aisément que ce tissage n’est pas équivalent pour chacun. Dès lors, sa protection et son entretien impliquent une prise de conscience collective et appellent à une responsabilité individuelle et collective.

Ceci étant, la manière de concevoir l’objet de notre étude a un caractère innovant. En effet, les initiatives sociales et solidaires sont l’expression spatiale des solidarités sociales. Les deux notions, « solidarité » et « sociabilité » ont ici leur importance. La vie en société implique un élan vers l’autre qui ne se traduit pas forcément par des initiatives sociales et solidaires. Le travail est l’exemple d’une utilité individuelle (pour se nourrir par exemple), mais qui est également une contribution à un tout et à la société. Mais l’entrée de cette recherche n’est pas structurelle ou en rapport à un fait ou un mécanisme identifié. Elle se rapporte à une dynamique de solidarités sociales, comme un « tissu sémantique sans lequel aucune société ne pourrait exister » (Berger et Luckmann, 1986 dans Banos et Candau, 2006).

Enfin, en redonnant de la place aux sociabilités ordinaires, l’individu est envisagé comme un être qui s’inscrit en société. Les actes de solidarités sociales posés placent les individus dans une dimension d’acteurs, de citoyens que nous allons maintenant développer en gardant à l’esprit le fait que « les sociétés locales vivent une solidarité qui n’est pas toujours consciente et rarement formulée comme telle. » (Pecqueur 1992). La révélation des solidarités sociales implique des méthodologies de recherche adaptées.

En conclusion, les initiatives sociales et solidaires se dévoilent à travers des pratiques du quotidien, portées par des individus-acteurs imprégnés de leurs vécus. Ces initiatives se tissent dans l’intimité des espaces et des lieux. Ancrées spatialement, elles sont influencées par le territoire dans lequel elles s’inscrivent, ce qui constitue une singularité fondamentale : les initiatives reflétant des solidarités de proximité.

Amélie Lefebvre Chapitre 1

1.2.

DES SOLIDARITES DE PROXIMITE

Les initiatives sociales et solidaires entretiennent des liens avec l’espace. Spatialement ancrées, elles dévoilent un rapport au territoire spécifique : la proximité. Développant ainsi des liens aux lieux, les initiatives sociales et solidaires permettraient l’appropriation du territoire.