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Le transfert partiel au tiers du seul pouvoir de représentation extrapatrimoniale 186.Bénéficiant du transfert d’une partie de l’exercice de l’autorité parentale, le tiers

α) La perte de l’administration légale par le délégant

A. Les pouvoirs du tiers à qui l’enfant est confié en dehors d’une mesure d’assistance éducative

2) Le transfert partiel au tiers du seul pouvoir de représentation extrapatrimoniale 186.Bénéficiant du transfert d’une partie de l’exercice de l’autorité parentale, le tiers

ne peut cependant accomplir que des actes usuels de surveillance et d’éducation (a), ce qui ne l’empêche pas d’en posséder l’attribut qu’est le pouvoir de représentation (b).

a. Le principe de l’accomplissement d’actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant

187. Selon l’article 373-4 du Code civil, « lorsque l'enfant a été confié à un tiers, l'autorité parentale continue d'être exercée par les père et mère ; toutefois, la personne à qui l'enfant a été confié accomplit tous les actes usuels relatifs à sa surveillance et à son éducation. » Cette disposition s’applique de manière générale à tous les tiers à qui l’enfant est confié163. Bien qu’ils ne résident plus avec leur enfant, les parents continuent d’exercer l’autorité parentale. Ayant pour mission de prendre en charge la vie courante de l’enfant, le tiers-gardien dispose néanmoins du pouvoir d’accomplir les actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation de l’enfant164. Il ne peut donc accomplir que des actes de faible gravité, ne compromettant pas l’avenir de l’enfant165. Il aura ainsi en charge le contrôle des relations de l’enfant, de ses sorties, de ses loisirs ou de sa correspondance. S’agissant de l’éducation, il reçoit les carnets de note, assure l’aide aux devoirs, est en contact avec les enseignants de l’enfant mais autorise également les voyages scolaires. Il peut procéder à l’inscription de l’enfant dans un établissement scolaire sans pour autant pouvoir en changer radicalement le type de scolarité, un tel choix qualifié d’acte non usuel revenant aux parents166.

163 Cependant, lorsque l’enfant est confié au tiers à la suite du retrait de l’autorité parentale fondé sur l’article 380 alinéa 1er ou au cours de l’instance en établissement de la filiation, il n’est pas possible de considérer que les parents continuent d’exercer l’autorité parentale. Si le tiers effectue bien - en attendant que la tutelle soit organisée - les actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation, les décisions importantes relèvent du juge. V. F. Terré, D. Fenouillet, op. cit., n° 1066.

164 Le tiers pourra être tenu à la demande du juge de requérir l’ouverture d’une tutelle. Celle-ci est nécessairement ouverte si aucun des parents n’est en mesure d’exercer l’autorité parentale selon l’article 373-5. La tutelle est ouverte même s’il n’y a pas de biens à administrer.

165 Sur la notion d’actes usuels, v. infra n° 230. 166 Ph. Bonfils, A. Gouttenoire, op. cit., n° 489.

A la différence des actes usuels relatifs à la personne de l’enfant visés par l’article 372-2, cette catégorie d’actes paraît plus restrictive, limitée à la surveillance et à l’éducation, excluant les actes relatifs à la santé du mineur. Cependant, même si la catégorie visée par l’article 373-4 semble moins vaste que celle visée à l’article 372-2, il est difficile d’exclure les actes relatifs à la santé de l’enfant. Devant prendre en charge la vie courante de l’enfant avec lequel il vit quotidiennement, le tiers est nécessairement amené à s’occuper de la santé de l’enfant, ce qui implique visites médicales, soins, traitements et actes bénins167. Retirer un tel pouvoir à la personne vivant avec l’enfant pourrait être préjudiciable à ce dernier. D’ailleurs d’une manière ou d’une autre la santé de l’enfant est rattachée par la doctrine soit à la protection générale de la personne de l’enfant168, soit à la surveillance169. Le pouvoir du tiers cesse cependant lorsque l’acte se révèle grave.

b. Le transfert partiel et spécial de l’exercice de l’autorité parentale

188. Confier l’enfant à un tiers ne signifie pas les priver de l’exercice de l’autorité parentale170, ni même déléguer et transférer cet exercice. Les parents demeurent donc titulaires du pouvoir de direction et de contrôle et du pouvoir de représenter l’enfant171. La délégation-partage de l’exercice de l’autorité parentale n’est pas non plus le cadre juridique de référence. Que le gardien exerce un pouvoir similaire à l’exercice de l’autorité parentale n’est justifié que par des considérations matérielles liées à la vie commune avec l’enfant, non pas par le transfert ou le partage d’une partie de cet exercice. Exerçant toujours l’autorité parentale, les parents ne sont pas juridiquement dessaisis du pouvoir d’accomplir les actes de surveillance et d’éducation, la mesure n’emportant donc pas transfert de leurs prérogatives. Il ne s’agit pas non plus d’un partage, dont le régime est clairement différent de celui de l’article 373-4. La distinction établie entre les actes accomplis sur le fondement des articles 377 et 377-1 et ceux

167 M.-L. Delfosse-Cicile, op. cit., n° 419. 168 Ph. Malaurie, H. Fulchiron, op. cit., n° 1564.

169 A. Bénabent, op. cit., n° 1162. I. Carbonnier, « Autorité parentale - Exercice de l’autorité parentale », art. préc., n° 19.

170 Il n’y a donc pas lieu à ouverture d’une tutelle, sauf si le juge aux affaires familiales en impose l’ouverture au tiers. Reste alors à savoir si cette tutelle est complète ou limitée aux biens, dans la mesure où le principe est celui de la conservation de l’exercice de l’autorité sur la personne. Dans le cas des articles 374-1 et 380, la tutelle doit être complète. En revanche, lorsque l’article 373-4 alinéa 2 est mis en œuvre, la tutelle doit être limitée aux biens.

accomplis sur le fondement de l’article 373-4 implique que le tiers-gardien n’exerce pas l’autorité parentale et ne possède donc pas de pouvoir de représentation.

189. Pourtant, en dépit de ces différences, la rédaction de l’article 373-4 laisse clairement entendre une exception au maintien de l’exercice intégral de l’autorité parentale par les parents. Cette exception est strictement limitée et spéciale, fondée sur des impératifs pragmatiques : matériellement, les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ne sont pas en mesure de remplir leur mission, qui par conséquent se voit déchargée des actes usuels relatifs à l’éducation et la surveillance de leur enfant. Aussi, il est impossible de considérer que les prérogatives d’autorité parentale demeurent toutes dans les mains des père et mère ou même qu’elles sont partagées avec le tiers avec qui vit l’enfant. Le dessaisissement matériel des parents conduit nécessairement à un dessaisissement juridique, limité dans le temps comme en substance172.

Dès lors, le tiers bénéficie bien du transfert173 d’une partie de l’exercice de l’autorité parentale, cette partie étant limitée aux actes usuels de surveillance et d’éducation. Pour limitée qu’elle soit la part d’autorité dont dispose le tiers lui confère son accessoire qu’est le pouvoir de représentation. Le tiers à qui est confié l’enfant possède donc le pouvoir de le représenter dans l’accomplissement d’actes relatifs à la personne, d’actes liés à son éducation ou à sa surveillance. Il est évident que le pouvoir de direction et de contrôle sera davantage utilisé par le tiers et qu’au contraire la représentation ne sera qu’exceptionnelle. Mais dès qu’il s’agira d’effectuer un acte de cette nature – inscrire l’enfant à la cantine, à une activité de loisirs, effectuer une démarche administrative comme la demande d’une carte d’identité174 -, le tiers pourra intervenir.

190. Un écueil surgit néanmoins en matière médicale. La règle est incontestablement celle du consentement à l’acte médical par les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale. Lorsque l’enfant est confié à un tiers dans le cadre de l’assistance éducative ou à l’aide sociale à l’enfance, les articles R. 1112-34 et R. 1112-35 du Code de la santé publique prévoient que l’admission à l’hôpital est effectuée par le gardien et

172 L. Gareil, op. cit., n° 549. Mme Gareil rapproche le cas des parents dont l’enfant est confié à un tiers du parent qui n’exerce pas l’autorité parentale : ne leur restent que les droits de visite et d’hébergement. 173 Il existe un transfert des prérogatives, qui ne doit cependant pas être confondu avec la délégation-transfert beaucoup plus lourde. Par comparaison, en matière d’assistance éducative, les père et mère conservent également l’exercice de l’autorité parentale, doivent être associés à la mesure, ce qui ne signifie pas pourtant que le tiers exerce son pouvoir en concurrence avec eux. V. infra n° 194.

174 L’avant-projet de réforme de l’autorité parentale proposait cependant de les faire figurer prochainement au rang des actes graves.

l’autorisation écrite d’opérer donnée par les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale, hors les cas d’urgence. Cette disposition semble logiquement s’appliquer au tiers visé par l’article 373-3 du Code civil. Le Code de la santé publique rappelle donc le principe de la représentation du mineur par ses père et mère lors de l’assentiment à l’acte médical, même si l’enfant est confié à un tiers, sauf urgence. Le tiers se contente de permettre l’admission de l’enfant à l’hôpital sans être doté de prérogatives supplémentaires. Si les titulaires de l’autorité parentale ne donnent pas le consentement nécessaire, le médecin délivre les soins indispensables. Dès lors, soit les père et mère exercent leur pouvoir de consentir au nom du mineur en matière médicale, soit ils ne l’exercent pas et le tiers n’est pas fondé à agir à leur place, même en cas de danger pour l’enfant puisque dans cette hypothèse le médecin agit sans autorisation parentale.

Or, le tiers peut être amené à prendre en charge la santé de l’enfant, ce qui signifierait qu’il doit se limiter à l’administration de traitements au mineur, ne pouvant l’amener chez un médecin libéral en raison de son impossibilité de conclure le contrat médical ? L’analogie avec l’hospitalisation de l’enfant incline en ce sens. Les parents doivent donc effectuer les actes médicaux. En réalité, le Code de la santé publique manque fréquemment de précision dans la réglementation des actes comme dans le vocabulaire employé. Si l’hospitalisation du mineur est régie par des conditions strictes, cela est dû à la nature de l’acte en cause qui ne relève pas de la catégorie des actes usuels relatifs à la surveillance et à l’éducation prévus par l’article 373-4 du Code civil. Une intervention chirurgicale peut certes être bénigne et être assimilée aux actes usuels d’autorité parentale tels qu’énoncés par l’article 372-2, mais elle ne trouve pas sa place au sein des actes usuels de gestion de la vie quotidienne de l’enfant. En revanche, l’amener chez le médecin pour faire soigner une maladie bénigne relève des actes usuels de surveillance et d’éducation que peut accomplir le gardien de l’enfant dans la mesure où cet acte s’inscrit dans la vie quotidienne de l’enfant. Il en est de même pour les vaccins obligatoires, ce qui n’est pas le cas des vaccins facultatifs. En définitive, le tiers dispose d’une part, certes très limitée, d’exercice de l’autorité parentale et peut figurer au rang des personnes visées par l’article L. 1111-4 lorsqu’il s’agit de consentir à un acte médical bénin relevant du quotidien de l’enfant.

191. Le tiers chez qui réside l’enfant possède donc le pouvoir de représenter l’enfant lorsque la vie quotidienne l’exige, dès lors que l’acte n’engage pas l’avenir et l’intégrité physique et morale de l’enfant. Il est incontestable, au vu de l’énoncé de l’article 373-4, que le pouvoir est limité à la protection de la personne de l’enfant et que le tiers ne peut

représenter l’enfant sur le plan patrimonial. Pour cela, les administrateurs légaux devront intervenir. Le tiers à qui l’enfant est confié dispose donc d’un pouvoir limité. Son intervention se restreint à la personne de l’enfant et s’il est investi du pouvoir de représenter l’enfant, cet exercice est exceptionnel et limité aux actes usuels de protection de la personne de l’enfant. L’avant-projet de réforme relatif à l’autorité parentale et aux droits des tiers propose que le tiers, à l’image des règles d’assistance éducative, puisse saisir le juge afin d’être autorisé à effectuer un acte important de l’autorité parentale, lorsque l’intérêt de l’enfant le justifie et, notamment, en cas de refus abusif ou injustifié, de négligence des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ou d’impossibilité pour eux d’effectuer un tel acte.

B. Les pouvoirs du tiers à qui est confié l’enfant en vertu d’une mesure