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Mode de transfert de la résistance (de l’animal à l’homme / de l’homme à l’animal) Les bactéries évoluent rapidement non seulement par mutation et multiplication mais

283 Annexe 40 Profils de résistance détaillés du souchier d’Escherichia coli humain 284

H. ANNEXE DES ISOLATS D’ESCHERICHIA COLI DE L’ETUDE Nombre d’isolats récoltés par souchier et nombre de souches d’Escherichia

3- Antibiotique et Antibiothérapie

4.10. Mode de transfert de la résistance (de l’animal à l’homme / de l’homme à l’animal) Les bactéries évoluent rapidement non seulement par mutation et multiplication mais

également par acquisition de matériel génétique exogène. La résistance par accumulation de mutations est supposée présenter un risque minimum de dissémination des gènes, alors que la résistance par acquisition de gènes exogènes a un fort potentiel de diffusion car elle est dans la plupart des cas portée par des éléments génétiques mobiles. L’absence d’étanchéité entre les écosystèmes animal - homme - environnement aggrave d’un point de vue santé publique le risque de dissémination de la résistance aux antibiotiques (Figure 41) (Faure, 2009).

92 Figure 41. Les écosystèmes (animal - homme – environnement) impliqués dans la dissémination

potentielle des bactéries résistantes et des gènes de résistance (Faure, 2009)

La résistance aux antibiotiques affiche un problème majeur aussi bien en termes de santé humaine qu’animale. Il existe bel et bien des risques pour le consommateur, liés à l’apparition de bactéries résistantes aux antibiotiques, générées par les usages d’antibiotiques en médecine vétérinaire et en alimentation animale (Afssa, 2006).

A coté de bactéries résistantes, des bactéries multirésistantes sont apparues également dans les élevages et se transmettent directement de l’animal à l’homme ou via l’alimentation (Trégouët, 2016).

Le transfert de la résistance de l’animal à l’homme se défini à l’échelle moléculaire, lorsque des mécanismes de résistance identiques ou des mêmes clones bactériens sont identifiés chez l’animal et l’homme. En effet, une résistance à un même antibiotique peut être due à des plasmides, des gènes de résistance aux antimicrobiens (résistomes) voire des clones bactériens différents chez l’homme et l’animal. Les preuves de transmission avérées, par mise en évidence de matériel génétique identique, sont peu nombreuses mais présentes. Les cas d’infections des éleveurs suite à des contacts rapprochés et réguliers se limitent en général à l’échelle individuelle et se propagent peu dans le réservoir humain (Poncet, 2013).

De même, des cas de transfert de la résistance de l’homme à l’animal sont répertoriés, principalement lors de ces mêmes contacts étroits (éleveurs-animaux). Des cas de transmission hospitalière sont également mis en évidence. Une étude a par exemple démontré qu’il existait des cas de complications infectieuses sur des chiens suite à une transmission de SARM par les chirurgiens lors de chirurgies orthopédiques (Poncet, 2013).

Les bactéries ingérées avec l’alimentation et colonisant transitoirement l’intestin peuvent contribuer au pool flexible des gènes de résistance du microbiote indigène. De plus, les gènes de résistance du réservoir digestif peuvent être disséminés via les déjections humaines et animales, enrichissant ainsi le réservoir environnemental par le biais des stations d’épuration

93 et du fumier. Le résistome digestif établit donc de nombreuses interconnections avec les différents réservoirs environnementaux (Figure 42) (Marshall et al., 2009 ; Schmieder et Edwards 2012 ; Duda-Ferrand, 2013).

Figure 42. Voies de dissémination des gènes d’antibiorésistance

(Marshall et al., 2009 ; Schmieder et Edwards 2012 ; Duda-Ferrand, 2013).

Légende : Les flèches indiquent les points de diffusion possibles entre les différents environnements (en bleu).

Agriculture=Agriculture ; Food animals=Aliments des animaux ; River/sea/Lake=Rivière/Mer/Lac ; Wastewater treatment=traitement des eaux usées ; Aquaculture=Aquaculture ; Soil=Sol ; Human=Humain ;

Manure=Fumier ; Runoff=Eaux de ruissellement ; Rainfall=Pluies ; Sludge=Boue ; Vegetables and fruit=Légumes et fruits ; Direct contact and meat=Contact direct et viande ; Drinking water and

swimming=Eau potable (Eau de boisson et Eau de natation) ; Fish=Poisson ; Industrial and households=Eaux usées des industries et des Ménages.

[Auteurs : (A) Durso et al., 2011 ; (B) Kristiansson et al., 2011 ; (C) Sommer et al., 2009 et Seville et al., 2009]. Depuis 2008, l’APUA (Alliance for the Purdent Use of Antibiotics), une Organisation Non Gouvernementale américaine, développe une approche multidisciplinaire pour étudier l’ensemble de ce réseau complexe d’antibiorésistance. Elle a notamment lancé le projet ROAR (Reservoirs of Antibiotic Resistance Project) qui tente de déterminer la prévalence et la dissémination de gènes de résistance dans les réservoirs commensaux et environnementaux. L’implication du microbiote intestinal dans l’émergence de l’antibiorésistance et sa dissémination est de plus en plus évidente. Cependant, les acteurs et les mécanismes mis en jeu dans les transferts de gènes sont encore peu étudiés (Marshall et al., 2009 ; Schmieder et Edwards 2012 ; Duda-Ferrand, 2013).

94 CHAPITRE 3 : ANTIBIOSURVEILLANCE

La découverte des antibiotiques a constitué un progrès médical extraordinaire, qui a permis d’améliorer le pronostic des infections. Cependant, une résistance à ces produits s’est rapidement développée et a évolué jusqu’à constituer un problème de santé important à l’échelle mondiale. Les conséquences en sont très nombreuses, dont une augmentation de la morbidité et de la mortalité, un accroissement des couts des soins de santé, causé par des hospitalisations plus longues, et la nécessite d’utiliser des médicaments plus couteux et souvent plus toxiques. Certaines infections résistent même à tous les antibiotiques actuellement disponibles sur le marché. Exerçant une pression sur les micro-organismes, l’usage abusif des antibiotiques est le principal facteur épidémiologique responsable de l’émergence de la résistance. De nombreuses espèces bactériennes ont développé des mécanismes de résistance à plusieurs classes d’antibiotiques. En milieu hospitalier, le traitement des infections causées par ces bactéries multirésistantes devient de plus en plus problématique. L’usage optimal des antibiotiques constitue la pierre angulaire de la réduction de l’antibiorésistance. La réduction de la pression sélective des antibiotiques est importante pour prévenir l’émergence d’une résistance microbienne et préserver le plus longtemps possible l’efficacité des médicaments disponibles (Carle, 2009).

A l’occasion de la journée européenne de sensibilisation au bon usage des antibiotiques, un colloque sur la lutte contre l’antibiorésistance dans les domaines humain et vétérinaire fut organisé le 12 novembre 2014, ayant pour ambition de mettre en partage les connaissances sur l’antibiorésistance et de faire état des mesures engagées et à venir pour la limiter. Ce colloque s’est intéressé à la surveillance des résistances bactériennes, à l’effet de l’exposition aux antibiotiques sur ces résistances, à la diffusion des résistances bactériennes entre l’homme et l’animal, et a rappelé l’importance de la prévention sanitaire ou médicale. Chaque thème a été abordé du point de vue de la médecine humaine et de la médecine vétérinaire. C’est ainsi que Jean-Yves Madec (Anses) a présenté des travaux mettant en évidence que le nombre de résistances serait le même en élevage bio et non bio. De son coté, Sophie Vaux (InVs) a indiqué que la France doit avoir une vigilance particulière concernant les entérobactéries en médecine humaine. Quant à Gérard Moulin (Anses), il a présenté le « plan d’action pour combattre les menaces croissantes de la résistance aux antimicrobiens » lancé en novembre 2013 par la Commission Européenne. Ce plan couvre la médecine vétérinaire et la médecine humaine en matière de surveillance de la résistance et de la consommation d’antibiotiques. Enfin, Emmanuelle Soubeyran (DGAL) a rappelé que la protection de la santé publique passait d’abord et avant tout par l’agriculture, l’alimentation et la forêt, incontournable problématique. Suite à cela, Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, et Stéphane Le Foll, Ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire, et de la forêt, sont intervenus pour mettre en exergue l’importance de la collaboration des médecines vétérinaire et humaine sur cette problématique (SIMV, 2014).

Au niveau International, tous les pays ont adopté en mai 2015, lors de la World Health Assembly, une résolution politique visant à mettre en place, partout, des plans nationaux de lutte contre la résistance bactérienne aux antibiotiques. Ces programmes suivent le modèle du plan global de l’OMS, utilisant l’approche« One Health » (approche globale tenant compte des liens entre les humains, les animaux et l’environnement) et doivent être effectifs d’ici mai 2017. Le Parlement européen a également adopté en mai 2015 une résolution pour lutter contre la résistance bactérienne. Plusieurs pays ont lancé d’ambitieux plans nationaux de lutte contre la résistance bactérienne. En France, le ministère de la Santé a créé en janvier 2015 une « task force » sur les antibiotiques, dont la mission était d’être une force de propositions

95 innovantes pour améliorer le juste usage des antibiotiques, suivant une approche « One Health », dans tous les secteurs (établissements de santé, médecines humaine et vétérinaire, environnement. . .). Des professionnels venant de tous horizons (médecins, pharmaciens, vétérinaires, sociologues, industriels, etc.) ont travaillé ensemble pour proposer des actions dans 5 domaines :

• évaluation du coût de l’antibiorésistance ; • bon usage des antibiotiques ;

• communication, information et éducation ;

• recherche, innovation et nouveaux modèles médico-économiques et ; • antibiorésistance et environnement.

Il faut espérer que toutes ces actions porteront leurs fruits, et permettront d’améliorer la qualité des prescriptions et de limiter les résistances bactériennes aux antibiotiques. L’engagement de tous est indispensable si nous voulons sauver les antibiotiques, qui sauvent nos vies (Fleming, 2014 ; Etienne et Pulcini, 2015 ; Tebano et Pulcini, 2016).

En Algérie, c’est dans le cadre de la 8ème journée nationale d’hygiène hospitalière et de lutte contre les infections associées aux soins, qui s’est tenue le 28 Mai 2015, au palais de la culture Moufdi Zakaria d’Alger, que le thème de la résistance des bactéries aux antibiotiques fut présenté avec comme sous-thèmes, la résistance des bactéries aux antibiotiques, l’épidémiologie des BMR (Bactéries Multi Résistantes), les nouvelles et anciennes thérapeutiques et enfin la prévention. La résistance des bactéries aux antibiotiques est considérée aujourd’hui comme « un problème de santé publique planétaire ». On parle de BMR (Bactéries Multi Résistantes) mais également de BHR (Bactéries Hautement Résistantes). Le Pr Rahal, Directrice de l’AARN (réseau national de la surveillance de la résistance aux antibiotiques), a intervenu sur les BMR en évoquant les données du réseau, les alertes, les mécanismes de résistances identifiées chez les souches isolées de patients, ainsi que de celles de la volaille, et leur circuit de transmission. Elle a conclu sur l’importance du feed-back avec présentation des résultats annuels locaux du réseau aux médecins prescripteurs dans différents services hospitaliers. La dernière présentation de la première session a été celle du Pr G. Arlet qui a porté sur La place du diagnostic bactériologique rapide des infections à BMR. Selon le Pr G. Arlet, la prise en charge thérapeutique et épidémiologique rapide des patients ayant une BMR est importante, afin d’éviter leur dissémination. Les moyens disponibles actuellement sont sûrs, plus adaptés au dépistage des patients colonisés tels les milieux de culture sélectifs et associés à d’autres tests phénotypiques comme le test de Hodge modifié par exemple. D’autres tests enzymatiques, colorimétriques, chromogéniques ou spectro-photométriques permettent de préciser le mécanisme de résistance en cause dans un délai inférieur à quelques heures, voire moins de 30 minutes pour certains. Enfin, les tests moléculaires, essentiellement PCR, PCR temps réel ou PCR multiplex couplés à l’hybridation sont en général les tests les plus rapides et sont adaptés soit à la caractérisation des gènes sur colonies, soit directement à partir des selles ou de certains prélèvements comme les urines ou les hémocultures. L’utilisation de cet ensemble de tests est à adapter à la situation de chaque cas, sachant que plus le diagnostic probable ou certain de BMR est rapide, plus la situation thérapeutique et/ou épidémiologique sera aisément contrôlée. La troisième et dernière séance avait pour thème la prévention. L’optimisation de l’utilisation des ATB et donc l’objectif du bon usage des ATB, selon le Pr S. Houacine, sont de retarder et limiter l’émergence des résistances bactériennes, pour sauvegarder l’efficacité des antibiotiques, permettant ainsi de prévenir l’intérêt collectif sans nuire à l’intérêt individuel du patient. Pour cela, il faut prescrire moins, prescrire mieux en réduisant le volume des prescriptions et en optimisant les traitements.

96 Le Pr O. Patey, dans sa présentation sur « La phagothérapie : place des bactériophages dans le traitement des infections bactériennes à BMR », a défini les bactériophages, qui sont des virus lytiques ayant pour cibles les bactéries et a précisé que ces bactériophages pourraient être une alternative aux antibiotiques qui sont hélas de moins en moins efficaces, pour le traitement des infections à BMR. Malheureusement si leur efficacité in vitro est indéniable avec une lyse rapide des bactéries, les données cliniques, même si elles sont encourageantes, pèchent par l’absence d’essais cliniques réalisés selon les standards actuels. Selon le Pr O. Patey, ceux-ci sont actuellement impossibles dans l’union européenne en l’absence de l’autorisation pour l’utilisation des préparations disponibles en Russie (Laboratoire MicroGen) et en Georgie (Institut Georges Eliava). Quant au Pr Jacques Fabry, dans le cadre de la maitrise des risques liés aux BMR, il a enchaîné en posant la question pertinente suivante : que faire? Il a rappelé qu’il y a d’abord trois actions de fond, conditions pour pouvoir un jour maîtriser la résistance. Si elles ne sont pas menées à bien, on peut penser que la bataille sera perdue. Ce sont:

- la qualité du diagnostic bactériologique des infections à BMR, - l’importance du bon usage des ATB,

- la généralisation des précautions standards, considérées comme le B-A-BA de l’hygiène hospitalière.

Nous en sommes tous conscients mais cela doit être mis en application chez 100 % des patients. Les recommandations adoptées lors de cette VIIIe journée Nationale, est la mise en oeuvre de l’ensemble de ces mesures qui ne peut se faire que si l’organisation interne et la gouvernance de l’établissement viennent appuyer le travail des professionnels (Anonyme 12, 2015 ; Anonyme 13, 2015 ; Kim et al., 2015 ; Trégouët, 2016).

Dans sa quête pour lutter contre l’antibiorésistance, l’Algérie n’est pas si loin du modèle français ou international et œuvre dans ce sens avec des objectifs communs.

C’est dans cette même optique et pour atteindre tous ces objectifs, qu’il convient de pouvoir se conformer à ce qui suit :

1°-Détecter l’antibiorésistance ;

2°-Prévenir l’expansion de l’antibiorésistance ;

3°-Prendre des mesures de lutte contre l’antibiorésistance ; 4°-Surveiller l’antibiorésistance.