• Aucun résultat trouvé

Détection de l’antibiorésistance

283 Annexe 40 Profils de résistance détaillés du souchier d’Escherichia coli humain 284

H. ANNEXE DES ISOLATS D’ESCHERICHIA COLI DE L’ETUDE Nombre d’isolats récoltés par souchier et nombre de souches d’Escherichia

1. Détection de l’antibiorésistance

On entend par antibiorésistance l’absence partielle ou totale de sensibilité d’une bactérie aux antibiotiques, qui deviennent alors inefficaces. A noter que ces résistances peuvent résulter d’une mutation génétique ou de l’acquisition de gènes de résistance en provenance d’autres bactéries. Ce transfert horizontal se produit là où les bactéries échangent du matériel génétique, soit chez ou entre les humains, les animaux sauvages, de rente et de compagnie, soit dans l’environnement (eaux usées, engrais de ferme, etc.). Les gènes de résistance contiennent l’information génétique permettant aux bactéries de se protéger contre l’antibiotique, par exemple, en produisant une enzyme qui le désactive. En se multipliant, ils peuvent être transmis à la prochaine génération : c’est ainsi que naissent les souches de bactéries résistantes (StAR, 2014).

La résistance aux antibiotiques est un phénotype hautement sélectionnable et peut être détectée en déterminant la CMI (Concentration Minimale Inhibitrice) par des méthodes de dilution en milieu liquide ou de diffusion sur disque. Dans la méthode de dilution en milieu

97 liquide, la CMI d'un antibiotique peut être calculée pour chaque isolat bactérien et l'organisme est typiquement interprété comme étant sensible ou résistant à l'antibiotique. Bien sûr, il existe une graduation de la résistance et certains schémas de classification comprennent des niveaux intermédiaires. Pour les bactéries cliniquement importantes, les laboratoires de diagnostic effectuent des analyses phénotypiques basées sur des méthodes normalisées ou standardisées de détection de la sensibilité, généralement conformes à celles publiées par le CLSI (Clinical and Laboratory Standards Institute).

Pour obtenir des résultats, les approches basées sur la culture peuvent prendre 1-2 jours pour les bactéries à croissance rapide, comme Escherichia coli ou Salmonella, mais plusieurs semaines pour les bactéries à croissance lente, comme Mycobacterium tuberculosis. De plus, la culture ne fonctionne que pour une fraction de microbes; Bien que la plupart des agents pathogènes peuvent être cultivés, la grande majorité des microbes ne peuvent pas pousser en dehors de leur environnement, y compris les pathogènes tels que Chlamydia ou Trypanosomes. Les nouvelles techniques de détection moléculaire pour la résistance telles que la PCR quantitative (qPCR) ou les microsatellites sont capables de déterminer la présence de gènes de résistance spécifiques et d’améliorer le diagnostic en fournissant des résultats en quelques heures. Cependant, ces approches indépendantes de la culture ne ciblent que les pathogènes bien étudiés ou les gènes connus responsables de la résistance et ne peuvent pas être facilement utilisées pour le dépistage à large spectre.

Les recherches ciblées sur les antibiotiques pour le traitement des maladies infectieuses et les risques pour la santé humaine posés par la résistance aux antibiotiques ont principalement porté sur le contexte clinique. Pour bien comprendre le développement et la dissémination de la résistance, nous devons aborder l'étude des antibiotiques et de leurs gènes de résistance non seulement dans les milieux cliniques, mais aussi dans les environnements naturels (non cliniques).

Avant le séquençage de prochaines générations, les gènes de résistance aux antibiotiques étaient typiquement isolés à partir d'échantillons environnementaux par clonage à partir de bactéries cultivées ou par amplification par PCR. Ces méthodes ignoraient les réservoirs potentiels de résistance aux antibiotiques car la plupart des bactéries ne sont pas cultivables et la détection par PCR dépend des amorces qui sont basées sur des gènes de résistance connus et ne permet pas aisément de découvrir de nouveaux gènes. Le développement de techniques indépendantes de la culture était nécessaire pour identifier de nouveaux gènes de résistance et accéder à la diversité génétique de la plupart des bactéries, d’où « l’étude indépendante de la résistance par la métagénomique ». Ces différentes approches métagénomiques sont utilisées pour identifier les gènes de résistance aux antibiotiques.

La métagénomique est l'une des approches les plus modernes qui surmontent les limites des méthodes basées sur la culture ou l'amplification. Cette approche est un outil puissant pour décrire le potentiel génétique d'une communauté et identifier les types de microbes présents dans une communauté, ainsi que la présence ou l'absence de gènes ou de variations génétiques responsables de la résistance aux antibiotiques. En utilisant la métagénomique, plusieurs nouveaux gènes de résistance aux antibiotiques ont été identifiés, y compris la résistance aux β-lactames, à la tétracycline, aux aminoglycosides et à la bléomycine.

En 1985, Pace et al. ont été les premiers à proposer le clonage direct de l'ADN environnemental pour classer les microorganismes incultivables. Le premier dépistage fonctionnel des bibliothèques métagénomiques, appelé « zoo-bibliothèques » par les auteurs, a

98 été réalisé en 1995. Le terme «métagénomique» a été inventé en 1998 par Handelsman et al., en se référant à l'analyse fonctionnelle d'espèces d'ADN environnementales mixtes. Initialement, la métagénomique a été utilisée principalement pour récupérer de nouvelles biomolécules, en particulier l'ADN provenant d'assemblages microbiens environnementaux. Le développement de techniques de séquençage des nouvelles générations a conduit à une approche alternative où une fraction de l'ADN dans l'échantillon a été séquencée en masse, sans égard au clonage. Cette approche s'appelait parfois la génomique communautaire aléatoire, qui devint également connue sous le nom de métagénomique. Le séquençage métagénomique représentait une puissante alternative au séquençage de l'ARNr pour l'analyse des communautés microbiennes complexes et a un impact considérable sur l'étude de la diversité microbienne dans les échantillons environnementaux et cliniques (Schmieder et Edwards, 2012).

De nos jours, le domaine de la métagénomique peut être divisé en deux approches différentes: la métagénomique fonctionnelle et la métagénomique séquentielle (Figure 43). La première approche ou « Métagénomique fonctionnelle » implique le clonage et l'expression hétérologue de l'ADN de l'environnement dans un hôte de substitution avec le dépistage basé sur les activités couplées. Quant à la deuxième approche ou « métagénomique séquentielle », elle consiste à extraire et réaliser le séquençage aléatoire de l'ADN directement à partir de l'environnement sans qu'il soit nécessaire de passer par une culture. (Schmieder et Edwards, 2012 ; Duda-Ferrand, 2013)

Figure 43. Analyse métagénomique de la résistance aux antibiotiques dans les communautés microbiennes.

99 De par son importante densité (150 fois plus de gènes que le génome humain), le microbiome intestinal (ensemble des gènes de la microflore intestinale) peut représenter un réservoir de gènes de résistance aux antimicrobiens (ou résistome) (Gill et al., 2006 ; Sommer et Dantas 2011 ; Duda-Ferrand, 2013).

Pendant longtemps, la prévalence de l’antibiorésistance dans ce réservoir était majoritairement étudiée par des approches basées sur la culture, plus rarement sur l’amplification génique. Selon Bailey et al. (2010), ces premières méthodes ont montré, par exemple, que les souches commensales de E. coli d’adultes sains représentaient un réservoir de gènes de résistance au triméthoprime (dfrA), sulphaméthoxazole (sul), tétracycline (tet) et ampicilline (blaTEM) (Bailey et al., 2010 ; Duda-Ferrand, 2013).

Cependant, ces deux approches sont insuffisantes puisque :

- la majorité des bactéries du microbiote intestinal (70-80%) reste non cultivable,

- la détection par PCR cible seulement les gènes de résistance « connus » (Schmieder et Edwards, 2012 ; Duda-Ferrand, 2013).

Le développement récent de techniques de métagénomique a permis d’explorer le résistome intestinal de façon plus représentative. Une approche de métagénomique fonctionnelle appliquée aux microbiotes intestinaux et salivaires de deux adultes sains a notamment permis de détecter 95 « nouveaux gènes de résistance » potentiellement exprimables, prouvant ainsi que l’abondance et la diversité du résistome intestinal intrinsèque humain étaient jusqu’alors largement sous-estimées (Schmieder et Edwards, 2012 ; Duda-Ferrand, 2013).

En Perspective, l'application de la métagénomique facilitera non seulement l'identification future de nouveaux gènes de résistance, mais elle sera utilisée pour prédire l'évolution future de la résistance aux antibiotiques et permettra de poursuivre les études sur les éléments génétiques participant au transfert de gènes de résistance (Schmieder et Edwards, 2012). Les recherches doivent se poursuivre afin de mieux comprendre le phénomène de la résistance. L’INRA développe des travaux dans certains domaines complémentaires, soit la connaissance des réservoirs de gènes et de bactéries résistantes, la réévaluation des modes de traitement ainsi que la posologie et finalement les nouvelles stratégies thérapeutiques. Le Centre de Recherche en Infectiologie de l’Université Laval travaille activement à établir des plates-formes génomiques et protéomiques qui permettront d’identifier de nouvelles cibles microbiennes, ce qui permettra la mise au point de nouvelles classes d’antibiotiques. Des tests génétiques de détection de gènes de résistance sont en train d’être mis au point afin d’identifier leur présence en moins d’une heure chez les patients infectés. De plus, des approches thérapeutiques novatrices permettront d’optimiser la réponse immunitaire et inflammatoire de l’hôte à l’aide de composés immunomodulateurs. Ces approches novatrices permettront de poursuivre avantageusement le combat contre les « super-microbes » (Fournier, 2003).