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Le Traité de Maastricht (Traité sur l’Union européenne, dit

Signé en février 1992, il entre en vigueur en novembre 1993. Ce traité prépare la création de l’Union monétaire européenne (l’euro, donc) et pose les fondements d’une union politique (citoyenneté européenne, politique européenne de sécurité commune, mais aussi coopération dans de le domaine de la justice et des affaires intérieures). C’est le traité constitutif de l’Union européenne.

Les apports principaux du Traité de Maastricht sont :

 La création de l’Union Européenne (qui remplace les Communautés européennes) et affirmation des objectifs qu’elle poursuit.

 L’introduction de la procédure de codécision, en faveur d’un renforcement du Parlement européen dans le processus décisionnel. Il s’agit en fait d’un mécanisme permettant un législatif à deux têtes, dans lequel le Conseil et le Parlement travaillent ensemble pour l’adoption des normes communautaires. Les propositions législatives doivent être approuvées à la fois par le Parlement européen, qui est directement élu par les citoyens, et par le Conseil, qui réunit les gouvernements des 27 États membres. La Commission dispose d’un pouvoir d’initiative : elle est chargée à la fois d'élaborer les propositions de législation et de les mettre en œuvre.

 L’instauration de nouvelles formes de coopération entre les Etats membres (la méthode ouverte de coordination). Un

29 Texte du Traité :

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:C:1992:191:FULL:FR:PDF

nombre limité d’Etats membres peuvent s’accorder sur une intégration renforcée dans le cadre des compétences qu’ils partagent avec l’Union européenne (ainsi en matière judiciaire et pénale), et donc contourner l’opposition de certains Etats membres. Elle a été mise en œuvre pour les divorces internationaux, par exemple. . Le meilleur exemple de coopération renforcée reste toutefois la mise en place de la zone euro.

 Le principe de subsidiarité30, décliné dans le Traité, prend un nouvel essor : il consacre une articulation intelligente des actions nationale et communautaire. L’Etat membre agit tant que ce niveau national est plus apte à remplir efficacement la mission qu’il se donne ; lorsqu’il n’est plus en mesure de le faire, l’action communautaire prend le relai.

 Le lancement de l’UEM, qui ambitionne de casser les politiques déflationnistes des Etats de la zone euro, qui se font en défaveur des autres Etats membres. C’est aussi l’occasion de renforcer le marché unique, en faisant de l’Europe un marché ouvert, facilitant d’autant plus les transactions et la libre circulation des biens et des personnes. Les pays de l’Union peuvent y participer dès lors qu’ils remplissent certaines conditions : les fameux critères de convergence31, détaillés dans la Partie 5.

 Le protocole social permet de dépasser l’obstruction des voies sociales au sein de l’Union (caractérisée par un refus du

30 Article 5 du traité de Maastricht. « En vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l'Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu'au niveau régional et local, mais peuvent l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, au niveau de l'Union. Les institutions de l'Union appliquent le principe de subsidiarité conformément au protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Les parlements nationaux veillent au respect du principe de subsidiarité conformément à la procédure prévue dans ce protocole ».

31 Déficit inférieur à 3% du PIB ; dette publique inférieure à 60% du PIB ;

Royaume-Uni de s’engager sur ce terrain). Le protocole social annexé au traité de Maastricht offre donc aux onze autres Etats membres la possibilité d’adopter des mesures sociales plus favorables que celles contenues dans le chapitre consacré du Traité32. C’est l’acte fondateur des coopérations renforcées. La Communauté peut intervenir dans les domaines relatifs à l'information et à la consultation des travailleurs, leur santé et leur sécurité, l'égalité entre les femmes et les hommes et l'intégration des personnes exclues du marché du travail.

L'action de l'Union européenne est, avant tout, définie comme un soutien et un complément à celle des États membres.

Pour Force ouvrière, « le sommet de Maastricht a commencé à apporter des éléments concrets pour l'amorce d'un droit social européen. » (rapport de Congrès, 1992). La partie 4-1 sur le dialogue social européen reviendra sur ce point.

Le Conseil peut également statuer à l'unanimité sur les questions liées à la protection sociale des travailleurs y compris en cas de résiliation du contrat de travail, à la représentation collective des employeurs et des travailleurs, aux conditions

32 Selon le protocole, « les actes du Conseil pris en vertu du présent protocole qui doivent être adoptés à la majorité qualifiée le sont s'ils ont recueilli au moins quarante-quatre voix. L'unanimité des membres du Conseil, à l'exception du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, est nécessaire pour les actes du Conseil qui doivent être adoptés à l'unanimité, ainsi que pour ceux constituant amendement de la proposition de la Commission. Les actes adoptés par le Conseil et toutes les conséquences financières autres que les coûts administratifs encourus par les institutions ne s'appliquent pas au Royaume-Uni de Grande- Bretagne et d'Irlande du Nord ».

Toutefois, l’anomalie d'une politique commune où un État membre ne partageait pas les objectifs des autres a été corrigée à Amsterdam. En 1997, la Grande Bretagne s’est engagée à adhérer aux dispositions sociales du nouveau traité et à adopter les directives qui avaient été approuvées sous l’accord. Le protocole n° 14 sur la politique sociale, annexé au traité et l’Accord sur la politique sociale ci-annexé ont été supprimés.

d'emploi de ressortissants issus de pays tiers et aux contributions financières visant la promotion de l'emploi. Les rémunérations, le droit de grève ou de lock out et d'association sont en revanche expressément exclus du champ d'intervention communautaire.

 La citoyenneté européenne est reconnue. C’est un bond en avant dans la construction européenne, qui implique directement les citoyens des Etats membres dans l’Union, au-delà des accords interétatiques (pour comprendre son impact en termes d’accès aux droits sociaux dans l’Union, se reporter à la Partie 4).

 Les compétences communautaires sont refondues, en instaurant 3 piliers. En fonction du pilier dans lequel se situe l’action envisagée, la procédure adoptée et la communautarisation à l’œuvre ne sont pas les mêmes33. Le premier pilier correspond aux 3 communautés historiques CEE, CEEA et CECA. Il est dit « intégré » car toutes les institutions communautaires participent au processus décisionnel. Le second pilier est celui de la PESC (politique étrangère et de sécurité commune). Les décisions sont adoptées au sein du Conseil par les ministres des affaires étrangères des Etats membres. Le dernier pilier (JAI – Justice et affaires intérieures) est consacré à la coopération policière et judiciaire donc immigration, visas…). Il fonctionne largement selon la méthode de la coopération intergouvernementale, écartant donc l’intervention communautaire.

33 Par exemple : le Parlement européen est simplement consulté pour la PESC, la politique fiscale, l’Union monétaire et sur la plupart des directives agricoles mais il va disposer du pouvoir d’arrêter le budget européen ; l’unanimité des voix est requise au Conseil de l’Union européenne pour la coopération policière et judiciaire en matière pénale, mais la majorité suffit pour la libre circulation des marchandises

PESC (politique étrangère et de sécurité commune)

Cet instrument juridique permet au Conseil de définir la position de l’UE sur une question particulière de nature géographique ou thématique34. Les Etats membres sont tenus de conformer leurs politiques nationales aux positions arrêtées par l’UE. Celles-ci sont adoptées à l’unanimité par le Conseil.

JAI (Justice et affaires intérieures)

Au sein de l'Union européenne, la libre circulation des personnes est garantie par l'accord de Schengen, qui a supprimé les contrôles aux frontières intérieures de l'UE (à l'exception de la Bulgarie, de Chypre, de l'Irlande, de la Roumanie et du Royaume-Uni). L’espace comprend aussi 4 Etats non membres de l’UE : l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège, la Suisse, et de facto 3 Etats européens : Monaco, Saint-Marin et le Vatican.

Toutefois, pour profiter pleinement de cette liberté, les citoyens doivent pouvoir vivre et travailler en toute sécurité. Ils doivent être protégés contre la criminalité internationale et le terrorisme, tout en étant assurés d'un accès au système judiciaire local et du respect de leurs droits fondamentaux où qu'ils se trouvent dans l'UE. En outre, l'immigration en provenance des pays ne faisant pas partie de l'UE doit être gérée de façon équitable et durable.

Cette architecture en termes de piliers n’est plus à l’œuvre depuis l’instauration de l’Union européenne, en 2007, qui consacre la codécision dans tous les domaines d’action de l’UE (sauf exceptions, de type PESC justement, toujours intergouvernementale).

34 Titre V du traité sur l'Union européenne relatif à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).

La France, par un référendum a approuvé le Traité de Maastricht le septembre 1992. Le traité a nécessité une modification de la Constitution35.

FO et le Traité de Maastricht

« Le sens de notre action était de faire inscrire au traité, dont la modification était inscrite à l'ordre du jour du Conseil européen de Maastricht, un droit social plus fort que par le passé, offrant les mêmes voies de recours à tous les travailleurs communautaires, offrant les mêmes possibilités de progrès à tous les travailleurs communautaires, c'est-à-dire, l'extension du vote à la majorité qualifiée à certains domaines du social, et la base juridique permettant à la négociation de déboucher sur des accords contractuels européens. En fait c'est de l'avenir même de l'Europe qu'il s'agit. L'Europe ne se réalisera que si les travailleurs y voient des perspectives qui leur sont favorables, faute de quoi après le doute c'est le rejet qui risque de s'affirmer. » (rapport de congrès 1992)

Dans son rapport au 17ème Congrès en 1992, la Confédération souligne

« qu’avec l'objectif de 1993 : disparition des barrières douanières, libre circulation des biens, des capitaux, des hommes et des services, les mécanismes économiques se sont emballés, provoquant un décalage considérable entre l'Europe économique, presque achevée, et un droit social européen balbutiant. »

Force ouvrière analyse alors avec préoccupation le projet d’UEM et anticipe le résultat : « un budget enfermé dans un carcan, une absence de politique industrielle, la rigueur salariale pour le secteur public comme pour le privé et un chômage en augmentation constante. »

35 Ainsi, aux termes de l’article 88-1 de la Constitution, il est stipulé que « La République participe à l'Union européenne constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007».

Considérant ensuite que « la monnaie unique est donc bien un des attributs essentiels d'un Etat » et que « cet Etat n'existe pas vraiment et qu'il n'est pas contrôlé démocratiquement en l'absence d'Europe politique, l'UEM risque de se résumer à un instrument de rigueur financière imposée à toute l'Europe parce que certains de ses industriels ont besoin de cette stabilité pour conforter leur position sur les marchés extérieurs. » En conclusion, la Confédération s’interroge :

« Comment dès lors éviter avant, pendant et après les prolongations en matière de rigueur salariale, budgétaire et donc sociale ? Comment ne pas craindre que la banque centrale ne devienne le pouvoir dominant ? Comment éviter le tout pour la monnaie ? Et le moins pour le social ? Les rigidités que se sont imposées les Etats à Maastricht sont une sorte de pari où chacun pense qu'il sera vainqueur sur tous les autres. Il y aura forcément 2 ou 3 Etats qui monteront sur le podium mais les autres devront résoudre leur manque de performance... par plus de rigueur. Là encore l'analyse n'est pas volontairement pessimiste ; elle est réaliste et préoccupante. »

Fidèle à sa tradition d’indépendance vis-à-vis du politique, la confédération FO n'avait pas souhaité prendre position lors du référendum sur le traité de Maastricht.

Lors du Congrès de la CES à Bruxelles en 1995, Marc Blondel rappelle

« qu’au Congrès de 1991, on parlait de déficit social et que celui-ci perdure (…) et qu’en conséquence, le pessimisme gagne la pensée moyenne des travailleurs, notamment des travailleurs français face à la construction européenne. Face à la montée du chômage, l’Europe est considérée à tort ou à raison comme un bouc émissaire. Cela constitue un défi qu’il nous appartient de relever ».