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Le comité d’entreprise européen : l’action syndicale à

Section 3. Agir syndicalement dans l’Europe d’aujourd’hui : les

A. Le comité d’entreprise européen : l’action syndicale à

Selon l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux, le droit à l’information et à la consultation est un droit fondamental.

C’est pourquoi au-delà des instances internationales qui portent la voix des revendications syndicales devant les organes européens, l’action collective passe aussi par d’autres biais119. Le premier d’entre eux, levier d’action direct des syndicalistes, est le Comité d’entreprise européen. Revendiqué par la CES depuis les années 1970, il est institué par la directive 94/45/CE du 22 septembre 1994 (la directive 2009/38/CE120 l’a révisée).

C’est l’instance de représentation des travailleurs européens d’une même entreprise. A travers lui, les salariés sont informés

119 Dans les années 1960-1970, on se souvient que les secrétariats professionnels internationaux (SPI) avaient déjà pris l’initiative de créer des conseils de groupes mondiaux, pour répondre justement à cette exigence de globalisation. Comment réguler juridiquement des relations de travail international ? Les codes et chartes d’éthiques, insuffisantes car dénuées de toute contrainte, ont laissé le champ libre à une règlementation communautaire en la matière. Les CEE sont cette réponse européenne d’une tentative de faire exister un contre-pouvoir face aux multinationales.

120 Force ouvrière avait estimé, lors de la révision de la directive de 1994, que les améliorations à apporter au mécanisme « CEE » devaient porter sur plusieurs points : l’augmentation du nombre de membres au CEE ; la conservation d’une surreprésentation nationale des travailleurs du pays d’établissement historique de l’entreprise lors des restructurations ; une simultanéité de l’information-consultation aux échelons CE-CEE ; assurer la participation des fédérations syndicales européennes ; des définitions claires des notions d’information et de consultation et un droit consacré à la formation pour les membres du CEE.

et consultés par la direction de toute décision qui pourrait les affecter.

Il devient aujourd’hui un instrument clé de l’action syndicale, parce qu’il permet une coordination de l’action collective au-delà du cadre national121. Il est donc primordial d’en connaître les ressorts. S’il n’est pas encore, ou pas toujours l’espace privilégié d’une discussion et d’une anticipation des décisions de la direction, ou d’une réflexion sur de possibles alternatives, le CEE est en tout état de cause un lieu de débat syndical transnational permettant l’élaboration d‘objectifs communs et la détermination des moyens de leur mise en œuvre.

Où peut-on envisager l’implantation d’un CEE ? Les CEE n’existent que dans les entreprises qui comptent au moins 1000 travailleurs dans l'ensemble des États membres et au moins 150 travailleurs dans 2 d’entre eux, en vue d’informer et de consulter les travailleurs.

Concrètement, devra être mis en place un CEE ou une procédure d’information et de consultation, sur la base d’un accord entre direction centrale et groupe spécial de négociation.

En pratique, il existait parfois déjà des groupes de négociation à ce niveau, antérieurement à la transposition de la directive.

Globalement, l’expérience prouve que la direction engage généralement la discussion avec les représentants des travailleurs pour qu’une telle instance voie le jour.

C’est l’entreprise qui est responsable de la création des conditions et des moyens nécessaires pour l’institution du CEE

121 La nouvelle directive datée de 2009 souligne que les CEE impliqués dans un processus de renégociation peuvent se faire assister par des représentants syndicaux. En outre, les partenaires sociaux européens doivent être informés de l’ouverture des négociations afin de suivre l’établissement des CEE.

ou d’une procédure d’information ou de consultation. C’est la direction centrale qui en supporte d’ailleurs les dépenses de fonctionnement. Le groupe de négociation (3 membres au minimum, 27 maximum), aura lui pour tâche de fixer avec la direction centrale, par un accord écrit, le champ d'action, la composition, la compétence et la durée du mandat du ou des comités d'entreprise européens, ou les modalités de mise en œuvre d'une procédure pour l'information et la consultation des travailleurs.

Les membres du CEE sont désignés par les organisations syndicales de salariés parmi leurs élus aux CE ou leurs représentants syndicaux, en fonction des résultats aux dernières élections professionnelles. Leur mandat dure au minimum 4 ans (durée « plancher » fixée par la directive).

Quelles sont les fonctions du CEE ?

 Il a le droit de se réunir avec la direction centrale, une fois par an, pour être informé et consulté, sur la base d’un rapport établi par la direction centrale, de l’évolution des activités de l’entreprise de dimension communautaire ou du groupe d’entreprises de dimension communautaire et de ses perspectives.

 Si des circonstances exceptionnelles interviennent, qui affectent considérablement les intérêts des travailleurs, notamment en cas de délocalisation, de fermeture, ou de licenciements collectifs, il a le droit d'en être informé. Il faut que la décision ait un caractère transnational : un sujet l’est dès lors qu’il dépasse la simple compétence locale.

En d’autres termes, dans ces deux cas, si la consultation n’a pas lieu, la décision de la direction n’est pas valide.

 Les membres du CEE doivent informer les représentants des travailleurs de la teneur et des résultats de cette procédure.

En clair, les questions entrent dans la compétence du CEE

lorsqu’elles sont transnationales, c'est-à-dire lorsqu’elles concernent l’ensemble de l’entreprise de dimension communautaire.

La question se pose, inévitablement, de ses rapports avec les représentants nationaux de salariés. Selon la lettre communautaire, c’est l’accord collectif qui met en place le CEE qui régit leurs relations, de manière à ce que les fonctions de l‘un ne nuisent pas à l’exercice de l’activité des autres. En tout état de cause, les processus d’information-consultation doivent être conduits tant au niveau national qu’au niveau européen (et ce en principe au même moment, le CEE pouvant toutefois en être averti avant, mais jamais après).

« L’information » en tant que telle n’est pas sujette à interprétation : c’est la transmission par l’employeur de données aux représentants des travailleurs, afin de permettre à ceux-ci de prendre connaissance du sujet traité et de l’examiner.

L’information s’effectue à un moment, d’une façon et avec un contenu approprié. Elle doit permettre aux représentants, en fait, de se forger une opinion sur son contenu, pour éventuellement formuler des propositions ou des revendications.

De même pour la « consultation ». Il ne s’agit pas d’une notion flottante ; c’est l’établissement d’un dialogue et l’échange de vues entre les représentants des travailleurs et la direction, qui permette aux représentants, une fois encore, d’exprimer sur la base de ces informations fournies et dans un délai raisonnable122 un avis sur les mesures proposées.

122 La CJCE a eu à connaître de plusieurs affaires dans lesquelles la question du « temps utile » et du « délai raisonnable » étaient sujets à contentieux. En effet, selon la directive, « lorsqu’un employeur envisage d’effectuer des licenciements collectifs il est tenu de procéder, en temps utile, à des consultations avec les représentants des travailleurs en vue d’aboutir à un

Ces notions sont solidement définies par la directive 2002/14/CE sur l’information/consultation des travailleurs.

Cela étant, rien n’empêche de conclure un accord collectif qui prévoie une définition plus large et plus avantageuse au droit d’information-consultation des salariés.

Les membres du CEE sont des représentants des travailleurs. A ce titre, ils bénéficient d’une série de droits dans l’exercice de leurs fonctions :

 Droit d’ester en justice contre la direction de l’entreprise, lorsque les droits garantis par la directive 2009/38/CE ont été enfreints.

 Droit d’obtenir de l’employeur, des moyens appropriés pour communiquer avec la main-d’œuvre, y compris un accès à tous les sites de la société.

 Droit obligatoire à l’obtention d’une formation sans perte de salaires, l’employeur n’ayant pas de pouvoir de décision sur le contenu de la formation, qui doit cependant prouver sa « nécessité ».

 Protection contre le licenciement identique à celle des membres du CE.

Pour Force Ouvrière, si les dispositions en matière d’« Information-consultation » constituent une réelle progression (clause de non-régression oblige), le texte de la directive CEE révisée, transposé en droit français n’est pas exempt de critiques, qui permettront sans doute à terme, d’en améliorer le fonctionnement et d’éclairer la lecture qu’en feront les Juges :

accord». Dégagée dans sa jurisprudence datée du 10 septembre 2009, aff. C-44/08, Akavan Erityisalojen Keskusliitto AEK. La Cour a estimé que la consultation devait être menée en temps utile, «au moment où elle ouvre aux représentants des travailleurs la possibilité de participer de manière efficace à cette négociation ».

 La procédure d’information-consultation doit être conduite en « temps utile », mais sans précision quant aux délais exacts, peu explicites

 Rien n’oblige la direction de l’entreprise à fournir une réponse motivée aux observations et avis du CEE.

 Les sanctions de la violation de la procédure ne sont pas suffisamment dissuasives.

B. Les conseils syndicaux interrégionaux : l’action syndicale