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La primauté du droit communautaire

Section 2. La diversité des instruments de l’action communautaire

A. La primauté du droit communautaire

Le droit communautaire prime dans l’ordre interne, ne serait-ce que par l’interprétation des textes de l’Union par la CJUE (ex-CJCE) reprise ensuite par les juridictions nationales.

Mais ce n‘est pas tout : la primauté du droit communautaire est intrinsèque à sa nature, à savoir un « ordre juridique propre », qui, conformément à la hiérarchie des normes, s’impose aux normes nationales. C’est l’un des pans du transfert de souveraineté que les Etats membres de l’UE ont concédé. C’est aussi une règle qui permet d’éviter les conflits de normes, et ce faisant, d’harmoniser les solutions de droit (social, mais aussi, fiscal, bancaire, budgétaire… dont l’importance est aujourd’hui accrue dans l’hypothèse d’une Union économique et monétaire renforcée).

En conséquence, quand le droit communautaire et le droit national entrent en conflit, c’est le premier qui prime89 (ce qui n’interdit évidemment pas au Parlement, dans une loi, ou au Gouvernement, dans un décret ou un règlement, d’adopter en droit interne une norme plus favorable). Cela étant, les juridictions nationales continuent de faire primer les normes

89 Article 55 de la Constitution française : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». Et article 88-1 du même texte : « La République participe à l'Union européenne constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 ».

constitutionnelles sur le droit communautaire, ce qui n’est pas le cas des lois ordinaires.

Il prime donc parce qu’il est doté d’une force juridique particulière : les textes de droit communautaire dérivé par exemple, disposent alternativement ou cumulativement d’un effet juridique dit « vertical » (le particulier peut se retourner contre l’Etat à la charge duquel le texte a imposé des obligations) ; ou un effet juridique « horizontal » (la norme peut être invoquée entre particuliers). Par exemple, l’égalité salariale assurée par l’article 119 du TCE a été jugée suffisamment inconditionnelle et précise pour pouvoir être invoquée entre particuliers, c'est-à-dire par un salarié contre son employeur.

Les règlements comme les traités sont naturellement dotés d’un effet direct automatique en droit interne.

Si l’on fait abstraction des modifications constitutionnelles90 et des règles communautaires d’application automatiques (traités ratifiés, règlements), l’introduction en droit national des dispositions communautaires passe en effet principalement par les mesures (obligatoires) de transposition. Effectivement, une fois adoptés par le Parlement européen et le Conseil, les actes législatifs communautaires doivent être mis en œuvre par les Etats membres. C’est le cas pour les directives, instrument d’harmonisation privilégié par le droit communautaire en matière sociale. La transposition est la méthode par laquelle est

90 Le Conseil constitutionnel dans une décision du 10 juin 2004 a estimé que

« la transposition en droit interne d'une directive communautaire résulte d'une exigence constitutionnelle à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu'en raison d'une disposition expresse contraire de la Constitution ; qu'en l'absence d'une telle disposition, il n'appartient qu'au juge communautaire, saisi le cas échéant à titre préjudiciel, de contrôler le respect par une directive communautaire tant des compétences définies par les traités que des droits fondamentaux garantis par l'article 6 du Traité sur l'Union européenne ».

Jusqu’alors, en 2013, en cas de problème de ce type les Français ont choisi de modifier leur constitution.

assurée l‘harmonisation du droit communautaire dans les Etats membres (à défaut de quoi le droit communautaire ne serait qu’un panier percé en fonction de l’accord des Etats sur telle ou telle directive). Les délais sont prévus au sein même du texte communautaire.

Si un État membre n'adopte pas une législation compatible, la Commission Européenne peut initier à son encontre des procédures d'infraction ; dont la mise en œuvre peut aboutir à des sanctions financières. Leur montant dépend alors de la gravité et de la durée de l'infraction (à partir de la date de l'arrêt de la Cour de justice de l'UE, saisie le cas échéant par la Commission), ainsi que de chaque Etat (en fonction de son PIB et du nombre de voix qui lui est attribué au Conseil).

Néanmoins, ces sanctions restent rares : les statistiques confirment que les États membres réalisent d'importants efforts pour mettre fin à leurs infractions sans qu’une saisine de la Cour de justice de l'UE soit nécessaire.

Le nombre de ces procédures d'infraction est en constante diminution : À la fin 2011, 1775 procédures d’infraction restaient ouvertes, contre 2900 environ en 2009.

La France a souvent été en retard dans le tableau des transpositions et rappelée à l’ordre par la CJUE pour mauvaise transposition. En 2011, le Conseil des ministres a annoncé la mise en place d’un groupe de travail qui associerait les membres du gouvernement et les représentants du Parlement, afin d’une part d’affiner la position que défend la France lors des négociations entre Etats membres, et d’autre part de préparer la future transposition des textes en droit interne.

Malgré cette force du droit communautaire, il faut noter que depuis Lisbonne, le Parlement national dispose en théorie d’un droit de veto et d’un droit de regard accru sur les politiques

conduites au niveau du parlement européen. Il peut notamment vérifier le respect par la Commission du principe de subsidiarité (article 12 TFUE). En outre, les députés des commissions des Affaires européennes du Parlement français peuvent contrôler en amont et en aval l’élaboration et la transposition des textes européens. Ce droit de veto est en fait un revers du devoir de transposition des dispositions communautaires, qui s’impose à tous les Etats membres.

Si ce sont « les Etats membres » qui assurent cette intégration du droit communautaire en droit français, il faut savoir plusieurs choses :

- Le Parlement français est tenu de ratifier les directives (sauf si l’on est en présence d'une disposition expresse contraire de la Constitution).

- C’est le gouvernement qui négocie et signe les traités européens. C’est également lui qui est garant de la transposition des directives (il pourra éventuellement voir sa responsabilité être engagée, si un défaut ou un retard de transposition intervenait).

- Fréquemment, le Parlement se dessaisit lui-même de son pouvoir de transposition en le confiant au Gouvernement, qui agira par voie d’ordonnances (sur le fondement de l’article 38 de notre Constitution).

Toutefois un constat s’impose en droit social : les compétences européennes en la matière sont limitées non seulement par la nature même des traités (à couleur plutôt économique), mais encore par le principe de subsidiarité91 qui permet de conserver

91 Un protocole annexé au TCE par le Traité d'Amsterdam indique que pour juger de l'opportunité de l'action communautaire, il faut rechercher si les questions en cause présentent des aspects transnationaux et si une action nationale ou une abstention européenne serait contraires aux exigences du Traité ou préjudiciables aux intérêts des Etats membres. C'est à la lumière des

l’autonomie nationale… Mais empêche dans le même temps toute politique sociale communautaire d’envergure.

B. Quelques exemples de droits garantis au salarié par