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2. L'ochratoxine A

3.1 Citrinine

3.1.2 Toxicocinétique

La toxicocinétique de la CIT est peu connue. Elle est rapidement absorbée, et persiste dans le sang au moins 24h après administration. Lors d'une injection intraveineuse, elle est retrouvée dans les urines après 48h chez le chien, et 24 h dans le sang chez le rat; son produit de réduction, la dihydrocitrinone, est isolée dans l'urine 8h à 48h après le traitement.

Au niveau du rein, la CIT est transportée par le système de sécrétion des anions organiques .Il existe une compétition entre la CIT et l’OTA pour ce transporteur (Jung et al., 2001). La toxicocinétique de la CIT est modifié en présence simultanée d’OTA (Molinié, 2004).

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3.1.3 Effets toxiques

Néphrotoxicité et hépatoxicité

La CIT est hépatotoxique et néphrotoxique chez un grand nombre d'espèces et a été impliquée avec l'OTA comme un agent potentiel de la BEN (Pfohl-Leszkowicz, et al., 2002). La CIT provoque des lésions rénales au niveau des tubules proximaux, caractérisées par l'apparition de protéinurie, glucosurie et d'infiltration de leucocytes. Ces altérations rénales seraient liées à une perturbation de l’homéostasie calcique, avec une accumulation du calcium au niveau cortical. Elle modifie les fonctions rénales chez le chien, le poulet, le lapin et le rat. Les effets observés sont proportionnels aux doses administrées et varient selon la voie d'administration. Le gavage de porcs par de la nourriture contaminée à 200 ppm de CIT, pendant 1 ou 2 mois, induit une néphropathie.

La CIT agit sur le métabolisme hépatique en diminuant le glycogène hépatique et en augmentant le glucose sanguin. Des études menées in vivo par Endo & Kuroda, 1980 ont montré, l’effet inhibiteur de la CIT sur la biosynthèse des triglycérides et du cholestérol au niveau du foie de rat.

Cytotoxicité

Il a été montré que la CIT est cytotoxique, seule ou en combinaison avec l’OTA, inhibe la synthèse d’ADN, d’ARN et de protéines dans des cellules d’hépatomes et des cellules rénales épithéliales. La CIT induit un stress oxydatif en modifiant les défenses enzymatiques antioxydantes. Elle inhibe la glutathion-réductase et la transhydrogénase ce qui conduit à une augmentation des anions superoxydes, mais n’induit pas de peroxydation lipidique (Ribeiro et al., 1997). Ceci serait lié à la capacité de la CIT à chélater le fer sous forme de complexe Fe3+- CIT, empêchant ainsi l’action de la NADPH cytochrome P450 réductase (Da Lozzo et al., 2002)

Génotoxicité et mutagénicité

La mutagénicité de la CIT est discutée et dépend du test utilisé. En effet pour des tests de mutagénicité à court terme, la CIT est négative avec le test de Ames sur Salmonella typhimurium. Cependant, elle induit des cassures simple et double brins au niveau de l’ADN de cellules de Escherichia coli (Martin et al., 1986). La CIT induit aussi des mutations; son action mutagène semble dépendre de son activation par les complexes cellulaires. Ainsi des aberrations chromosomiques sont induites par la CIT après une activation métabolique par des hépatocytes de rat (Sabater-Vilar, et al., 1999) et des fragmentations acentriques des chromatides au niveau des cellules de la mœlle osseuse chez les souris (Jeswal et al., 1996).

Liu et son équipe en 2003 n’ont pas observé de potentiel clastogène de la CIT sur des cellules de mammifères. Par contre, Lebrun et Follman, en 2002, mettent en avant un faible effet génotoxique (par comet assay) sur des cellules de rein de chien (MDCK). Bien que la CIT soit considérée comme n’étant pas cancérogène, il a été montré qu'une exposition à la CIT à long terme induit des adénomes rénaux chez le rat. Il a été montré que la citrinine était génotoxique puisqu’elle est responsable de la formation d’adduit à l’ADN in vitro et in vivo (Molinié et al., 2003 ; 2004). L’administration simultanée d’OTA (25 mg/kg) et CIT (200 mg/kg) augmente l’incidence des tumeurs rénales chez les souris DDD male en comparaison à un traitement avec de l’OTA seule; la CIT seule n’est pas cancérogène (Kanisawa et al., 1984).

Jeswal (1995) a observé une augmentation des tumeurs rénales chez des souris ingérant simultanément 50µM d’OTA et 50µM de CIT.

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3.2 La Fumonisine B1

3.2.1 Origine et structure de la FB1

C’est en 1988 que Gelderblom et al. ont identifié les fumonisines, une nouvelle classe de mycotoxines, à partir de cultures de Fusarium moniliforme (Gelderblom et al., 1988; Benzuidenhout et al., 1988).. Elle est principalement produite par Fusarium verticillioides, champignon qui contamine plus particulièrement le maïs (Norred et al., 1993; Scott et al., 1993). La FB1 est un diester de l’acide 1, 2, 3 propane tricarboxylique et du 2-amino- 12,16-

diméthyl 3,5,10,14,15- pentahydroxyeicosane (figure 8). Il existe au moins 15 membres, répartis en 4 catégories : FA1, FA2, FA3, FAK1 ; FB1, FB2, FB3, FB4 ; FC1,FC2, FC3, FC4 ; FP1, FP2

et FP3 . La fumonisine B1 a une structure proche de celle de la sphingosine et la sphinganine

(figure 9) (sphingolipides membranaires). Cette similarité de structure est à l’origine de l’inhibition de la biosynthèse des sphingolipides. Ces sphingolipides jouent un rôle important dans la fluidité membranaire au niveau du cerveau notamment. Ils permettent aussi la synthèse de céramide impliquée dans la croissance cellulaire et la différenciation (Pinelli et al, 1999 ; Poux et al, 2000).

La FB1 est relativement stable dans la plupart des conditions utilisées pour le

traitement des denrées alimentaires.

3.2.2 Exposition de l’homme

Les fumonisines se sont révélées être des contaminants fréquents du maïs et de ses sous-produits mais aussi du sorgho et du riz.

Le tableau 4 donne une idée de la présence respective de FB1 et FB2 trouvés dans les dérivés

du maïs. Les niveaux de contamination observés sont parfois très élevés et responsables d’intoxications animales aiguës de maïs ayant engendré des mycotoxicoses. La découverte des fumonisines est en fait liée à des recherches sur le cancer de l'oesophage humain dans la région sud africaine. La contamination du maïs par F. moniliforme est positivement corrélée aux cancers de l'œsophage (Pfohl-Leszkowicz ; 1999).

3.2.3 Toxicocinétique

La quantité de FB1 mesurée dans le plasma après une administration par voie orale

chez le porc, la poule pondeuse, le singe, la vache, le rat et le canard est très faible. Le passage dans la circulation générale ne représenterait que 2 à 4% de la dose de FB1

administrée chez rat.

Lors d’une administration par voie orale chez le rat et le porc, la FB1 est retrouvée

dans la plupart des tissus notamment le foie et les reins (Pfohl-Leszkowicz, 1999).

Figure 8: Structure de Fumonisine B1 Figure 9: Structure de la sphinganine et la

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Tableau 4 : Présence respective de FB1 et de FB2 dans les dérivés de maïs, à l’origine de mycotoxines.

Peu de données sont disponibles sur le métabolisme de FB1. La principale forme

d’excrétion biliaire et urinaire est la molécule mère. Chez le singe, une fraction de FB1

retrouvée dans les fèces est sous une forme partiellement hydrolysée (mono-esters par perte d’un acide propane-tricarboxylique), alors que la fraction retrouvée dans l’urine est composée. de 96% de FB1. Il apparaît donc clairement que le métabolisme de la FB1 se déroule dans le

tube digestif sous l’action d’enzymes ou de micro-organismes et non dans le foie puisque aucun métabolite n’est retrouvé dans les voies biliaires. Son absorption s’effectue vraisemblablement par voie lymphatique comme pour les acides gras (Mahouf et al, 2002).

3.2.4 Effets toxiques

Le mécanisme d’action de la FB1 repose sur l’analogie structurale entre la toxine et la

sphingosine. Cette analogie est à l’origine de l’inhibition de la N-acyltransférase et de la perturbation de la biosynthèse des sphingolipides. Cela se traduit, au plan cellulaire par l’accumulation de sphinganine, parfois de sphingosine, qui sont deux composés hautement réactionnels pouvant perturber le bon fonctionnement de la machinerie cellulaire.

Chez les mammifères, les fumonisines sont responsables de la leucoencéphalomalacie des équidés (Marasas et al, 1988) ainsi que de l’oedème pulmonaire porcin (Colvin et al., 1992). Elles sont considérées comme carcinogènes chez le rat et suspectées d’intervenir dans les cancers de l’oesophage chez l’homme (IARC ; 2002). Dans plusieurs espèces, comme les équidés, les suidés, les ovins, les rongeurs et les primates, une toxicité hépatique et rénale a également été observée, ainsi qu’une réduction du poids vif et une altération de l’indice de consommation alimentaire chez les oiseaux.

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Cancérogénèse

Les propriétés cancérogènes et cytotoxiques de la FB1 ont été mises en évidence chez

le rat (Casteel et al, 1993). Une intoxication de courte durée (4 jours à 4 semaines) entraîne principalement une hépatotoxicité avec cirrhose (hyperplasie hépatocellulaire) et prolifération des canaux biliaires et une néphrotoxicité avec des images d’autophagocytose et de dégénérescence cellulaire dans le cortex dès 15 mg FB1/kg d’aliment (Riley et al, 1994).

Après une exposition de longue durée (50 mg FB1/kg d’aliment, 150 jours à 2 ans)

diverses équipes ont noté la formation de carcinomes hépatocellulaires, de cirrhose, d’adénofibrose, de nodules néoplasiques et de cholangiocarcinome (Gelderblom et al, 2001).

Une étude du NTP (National Toxicology Programm, 1999) a montré que la FB1 est

cancérogène chez le rat et la souris, mais l’organe cible n’est pas le même. Des rats Fischer F344 (mâle et femelle) et des souris B6C3F1 (mâle et femelle) ont été traités par des doses

allant de 5 à 150 ppm de FB1 dans la nourriture pendant 2 ans. Chez les rats mâles traités

respectivement par 50 et 150 ppm de FB1, des adénomes des tubules rénaux (2/48 ; 5/48) ainsi

que des carcinomes tubulaires rénaux (7/48 ; 10/48) sont observés. Chez les souris femelles, des doses de 50 et 80 ppm provoquent de l’apoptose hépatique (7/47 ; 14/45), des adénomes hépatiques (16/47, 31/45) et des carcinomes hépatiques (10/47 ; 9/45).

Mutagénicité

La FB1 n’est pas mutagène dans le test d’Ames avec les souches TA 100, TA 98 ou TA

97. Elle n’induit pas non plus la réparation SOS, ni la synthèse non programmée d’ADN. Elle ne forme pas d’adduit à l’ADN, par contre elle induit des cassures simple brin ainsi que des aberrations chromosomiques et des micro-noyaux (IARC, 2002). La fumonisine modifie la transduction du signal et de ce fait aurait un effet promoteur (WHO, 2000 ; 2002 ; Pinelli et al., 1999 ; Poux et al., 2000).

Embryotoxicité et tératogenèse

La FB1 affecte les fœtus chez les rates en gestation engendrant des portées de poids plus

faibles et perturbe le développement du squelette.

Lors d’études in vitro, il a été montré que la FB1 est embryotoxique, elle diminue la

croissance et le développement des embryons de rats. La FB1 apparaît comme potentiellement

embryotoxique et tératogène chez les volailles (Pfohl-Leszkowicz, 1999).

Immunotoxicité

L'administration de FB1 par voie orale provoque une immuno-dépression. Elle conduit

in vitro, à des phénomènes de cytotoxicité des macrophages de poulet avec renflements membranaires, désintégration de l'ADN et sécrétion de facteurs de cytolyse. Par inhibition de la céramide synthétase conduit à l'accumulation de sphinganine et de sphingosine. Elle stimule l'expression d’IL-4 dans les lymphocytes de souris simultanément à une baisse de l'IL-2 et de la densité des antigènes de surface. Tryphonas et son équipe (1997) ont montré une baisse des immunoglobulines G chez les rats males traités avec 1-15 mg/kg pendant 14 jours (Pfohl-Leszkowicz, 1999).

3.3 Les Aflatoxines

Les aflatoxines sont produites par des Aspergillii se développant entre autres sur les céréales et les oléagineux dans des atmosphères chaudes et humides. L'exposition chronique aux aflatoxines (AF) est responsable de cancers chez diverses espèces animales. Non seulement, l’AFB1 mais également le mélange des quatre aflatoxines (B1, B2, G1, G2) induit

44 des tumeurs hépatiques aussi bien chez la souris que le rat, mais également chez le canard, la

truite, le saumon et le singe (Castegnaro et al, 1999). En général, il s'agit de cancer primaire du foie, néanmoins des tumeurs des reins, de la vésicule biliaire, du pancréas, de la vessie peuvent avoir lieu ainsi que des leucémies. La fréquence de tumeurs rénales et d'adénome du colon, est augmentée en cas de déficience en vitamine A. Le pouvoir cancérogène des AF dépend de leur structure chimique. Ainsi l’AFB1 est le plus puissant cancérogène hépatique,

alors que l’AFG1 induit plutôt des tumeurs rénales. Les cancers primaires du foie sont

caractérisés par des carcinomes hépatocellulaires, des cholangiosarcomes et des hépatoblastomes. L'aflatoxine a un effet co-carcinogène avec le virus de l'hépatite B sévissant souvent dans les mêmes zones. De plus, l’inhalation de poussière contenant des AF est responsable de tumeurs du système respiratoire. Ainsi, des associations entre cancer et exposition professionnelle à des mycotoxines ont été mises en évidence. L’interaction ADN- toxine est le point clef dans le développement du processus de cancérogenèse. Il a été clairement démontré, lors d’études expérimentales chez l’animal, que les aflatoxines se fixent sur l’ADN. L’AFB1 après avoir été métabolisée en aflatoxine B1-8,9-époxyde va réagir avec

la guanine au niveau de l’azote en position 7 pour donner le trans-8,9-dihydro-8 (7-guanyl)-9- hydroxy-aflatoxine B1. Le dosage de cet adduit dans les urines constitue une méthode de

détection d’une exposition récente à cette substance. L’AFB1 n’est pas la seule mycotoxine à

provoquer des dommages à l’ADN. Les AF sont mutagènes dans tous les tests.

3.4 La Zéaralénone

La zéaralénone est produite par des Fusaria, peuvent se retrouver dans les céréales notamment lorsque celles ci ont été stockées dans de mauvaises conditions à des températures relativement basses et exposées à l’humidité. La zéaralénone induit des cancers hépatiques et de la glande pituitaire, mais à des doses nettement supérieures aux doses engendrant un effet hormonal (WHO, 2002). Pour cette raison, elle n’est pas considérée comme étant elle-même cancérogène. Les effets seraient dus à l’effet hormonal. Néanmoins, la zéaralénone est génotoxique et forme des adduits à l’ADN (Pfohl-Leszkowicz et al. 1995).

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4. Législation concernant les mycotoxines