• Aucun résultat trouvé

Thérapeutique transfusionnelle : sécurité transfusionnelle 1. Sécurité transfusionnelle infectieuse

64 3.2. Dépistage néonatal à Ouagadougou

3.4. Thérapeutique transfusionnelle : sécurité transfusionnelle 1. Sécurité transfusionnelle infectieuse

La transfusion sanguine est un acte thérapeutique essentiel dans la prise en charge des patients drépanocytaires. Au Burkina Faso, malgré l’amélioration du plateau technique des centres de transfusion sanguine et l’utilisation de trousses de réactifs très sensibles pour la qualification biologique des dons, la fréquence élevée des maladies transmissibles augmentent de manière considérable le risque résiduel de transmission d’agents infectieux. Parmi les mesures préconisées pour réduire le risque infectieux transfusionnel, figure la sélection clinique avant le don, au cours de laquelle sont recherchées certaines maladies et comportements à risques pouvant présager la présence de maladies transmissibles par le sang chez le donneur. L’efficacité de cette mesure est bien établie dans les pays industrialisés [Kocher, 1994 ; Beauplet, 2003] où le niveau d’éducation des populations favorise certainement une plus grande réceptivité.

3.4.1.1. Matériel et méthodes

Il s’agit de deux études transversales descriptives. La première, en collecte fixe, a inclus de façon aléatoire, 544 candidats autorisés au don de sang. L’enquête a consisté à soumettre aux donneurs inclus un questionnaire supplémentaire (annexe 4), en complément du questionnaire pré-don standard (annexe 5). Les variables recueillies ont porté sur : les données sociodémographiques (âge, sexe, niveau d’instruction, situation matrimoniale) ; les motivations au don de sang ; les comportements, connaissances et attitudes face à la sélection et aux maladies transmissibles par le sang. Par ailleurs, en vue de la qualification biologique du don, un prélèvement sanguin a été effectué et a servi au dépistage du VIH, VHC, AgHBs. Tous les prélèvements ont ensuite été testés pour les virus HTLV. Les Kits utilisés qui avaient une sensibilité de 100% et une spécificité de 99% (Giles, 1998) ont été les suivants : Determine HIV1-2TM® (Abbott Diagnostics, Japan) pour le dépistage des anticorps (Ac) anti-VIH1-2 et Determine AgHBs® (Abbott Diagnostics, Japan) pour la détection de l’antigène HBs ; ortho-HCV 3,01® (Ortho Clinical Diagnostics, Raritan NJ ; United States) pour la détection des Ac anti-HCV; HTLV1/2 de Vironostika® (Biomérieux, France) pour la détection des Ac anti-HTLV1-2.

La seconde étude s’est intéressée aux donneurs non éligibles pour un don de sang d’octobre 2011 à juin 2012 au centre régional de transfusion sanguine de Ouagadougou. Les candidats

77

au don ont été exclus à l’issue de l’entretien médical, pour des raisons de comportements à risque.

Les proportions ont été comparées par un test de X2 ou un test exact de Fischer. Le seuil de signification retenu est p < 0,05.

3.4.1.2. Résultats

Etant donnés des données manquantes pour certains questionnaires, seuls 500 résultats ont été analysés pour les motifs au don de sang. Les caractéristiques générales de la population étudiée ont montré que l’âge moyen des donneurs était de 28 ± 7,9 ans et la répartition H/F de 2,5; environ 31 % des donneurs avaient un niveau d’instruction correspondant au niveau primaire ou non instruit. Les nouveaux donneurs et les donneurs familiaux étaient les plus nombreux représentant respectivement 54,3% et 52% des cas. L’analyse de motivation au don de sang (Tableau 7) a révélé que 14,4% des donneurs avaient pour motivation principale la connaissance de leur statut sérologique notamment VIH. De ces motivations, 63,7% étaient peu compatibles avec la sécurité transfusionnelle. Le VIH était la maladie infectieuse transmissible par la transfusion la plus connue des donneurs (88,4%). Les notions de « fenêtre sérologique ou de séroconversion » étaient par contre peu ou pas connues par 25% des donneurs.

Tableau 7 : Principales motivations au premier don de sang

Motivations Réponses

N = 500

Proportion

Parent hospitalisé 243 48,6

Sauver des vies 235 47,1

Dans le cadre d’un dépistage 72 14,4

Incitation par média 44 8,8

Compatible avec sécurité transfusionnelle

183 36,6

Peu compatible avec sécurité transfusionnelle

317 63,7

La seconde étude a montré que sur un total de 10814 candidats donneurs de sang, 11% (1191/10814) ont été exclus et les comportements à risque représentaient 4,5% (484/10814)

78

des exclusions. L’âge moyen ces donneurs exclus était de 26 ans et 16% (79/484) d’entre eux avaient des marqueurs sérologiques positifs (tableau 8).

Tableau 8 : Séroprévalence des marqueurs sérologiques chez les donneurs éligibles et non éligibles

Donneurs éligibles N= 9623

Donneurs exclus pour comportements à risque N= 484 P Ac/Ag VIH 160 1,7% 7 1,5% NS Ag HBs 964 10,0% 53 11,0% NS Ac anti-VHC 488 5,0% 19 4,9% NS NS : Non significatif 3.4.1.3. Discussion

Nos deux études ont mis en évidence une prévalence relativement élevée des marqueurs viraux. Sur un total de 31405 nouveaux donneurs de sang bénévoles en 2009, 24,0% étaient infectés par au moins un pathogène [Nagalo, 2012].

D’énormes progrès ont été réalisés au Burkina Faso en ce qui concerne la transfusion sanguine. Ainsi, en 2000, le Burkina Faso a entrepris de réformer son système transfusionnel selon les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. Le Centre National de Transfusion Sanguine (CNTS) est l’opérateur unique du sang sur l’ensemble du territoire national. Quatre centres régionaux y sont implantés renforçant ainsi son activité. Aujourd’hui près des deux tiers de l’activité transfusionnelle au Burkina Faso sont passés sous contrôle du CNTS avec pour résultat une nette amélioration de la couverture des besoins. Entre 2006 et 2010, le nombre de dons collectés a plus que doublé passant de 22 000 à 57 950 poches de sang recueillies exclusivement auprès de donneurs volontaires. Le don rémunéré n’est pas autorisé au Burkina Faso et les donneurs se répartissent en donneurs réguliers, nouveau donneurs et donneurs familiaux (de remplacement).

La réalisation des tests sérologiques avec des trousses de dépistage très sensible est actuellement intégrée dans les centres de santé. Cependant, il se pose toujours la question du risque résiduel de transmission d’agents infectieux par le sang. Bien avant le dépistage génomique viral, l’introduction des tests sérologiques avait diminué le risque de transmission par transfusion d’agents infectieux [Allain, 2003 ; Dodd, 2009]. La sélection infectieuse ne doit pas

79

se limiter à la réalisation des tests sérologiques. S’il est essentiel d’identifier les facteurs de risque spécifiques en Afrique, le processus de sélection médicale, la sensibilisation et l’éducation des donneurs de sang constituent des étapes fondamentales et incontournables.

3.4.1.4. Publication

Faible niveau de connaissances des donneurs de sang au Burkina Faso: une entrave potentielle à la sécurité transfusionnelle.

Nébié K.Y., Olinger C.M., Kafando E., Dahourou H., Diallo S., Y. Kientega, Y. Domo, Kienou K., Ouattara S., Sawadogo I., Ky L., Muller C.P.

Transfusion Clinique et Biologique. 2007; 14:446–452.

Comportements à risque chez des donneurs de sang non éligibles dans un centre de transfusion sanguine (Burkina Faso)

E. Kafando, Y. Nébié, S. Sawadogo, K. Kienou, Y. Kientega, H. Dahourou, B Gulbis.

Soumis pour publication dans la Revue Santé Publique

3.4.2. Sécurité transfusionnelle immunologique

Les indications transfusionnelles chez les patients drépanocytaires sont particulières et ont été largement modifiées ces dernières années avec trois modes d’application que sont la transfusion sanguine simple, l’échange transfusionnel ponctuel, l’échange transfusionnel chronique. Une complication de la transfusion sanguine est le risque d’allo-immunisation érythrocytaire qui justifie des mesures préventives parmi lesquelles le groupage sanguin érythrocytaire Rhésus C, E, c, e et Kell chez les drépanocytaires.

3.4.2.1. Matériel et méthodes

Une étude prospective conduite sur une période de six mois a analysé les transfusions incompatibles Rhésus et Kell chez des enfants transfusés. Les motifs de la transfusion ont été obtenus à partir de l’ordonnance de PSL (annexe 6). Le phénotype ABO, Rhésus et Kell a été déterminé simultanément chez le patient et sur l’unité de concentré de globules rouges transfusée. La détermination du phénotype Rhésus et Kell ; le dépistage des anticorps anti-érythrocytaires et leur identification ont été effectués par le test indirect à l’antiglobuline au laboratoire d’immuno-hématologie du centre national de transfusion sanguine.

80 3.4.2.2. Résultats

Sur un total de 474 patients, 119 ont été des transfusions incompatibles (25%). Cinq patients (5/119) soit 4,2% ont présenté une allo-immunisation avec les anticorps anti-érythrocytaires anti-RhC et anti- RhE.

3.4.2.3. Discussion

Chez l’enfant, il est difficile de prévoir le nombre de transfusions au cours de sa vie, notamment en Afrique sub-saharienne où sévit la malaria, la drépanocytose étant souvent associée au déficit en G6PD. Le polymorphisme érythrocytaire différent chez les caucasiens et les africains est à l’origine de la fréquence élevée d’allo-immunisation [Olujohungbe, 2001]. La compatibilité phénotypique ethnique entre donneurs de sang et patients africains pourrait expliquer le faible taux d’allo immunisation anti-érythrocytaire dans notre expérience. Cependant, si on considère qu’un programme de transfusion multiple chez un enfant accroît fortement les risques d’allo-immunisation, il souhaitable d’avoir recours à des CGR compatibles et phénotypés portant sur les antigènes Rhésus [Sosler, 1993] et Kell.

3.4.1.4. Publication

Incompatible blood transfusion in children in Burkina Faso

E. Kafando, L. R Wandji Nana, Y. Domo, Y. Nébié, Y. Dahourou H., B. Gulbis.

81