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Notre étude s’est seulement limitée à deux structures sanitaires de la ville de Ouagadougou assurant des consultations de suivi ambulatoire des enfants drépa-nocytaires. Cela nous a permis de recruter des drépanocytaires mais a aussi consti-tué un biais de sélection. Ainsi, la couver-ture vaccinale des enfants drépanocytai-res dans le cadre de cette étude ne pourrait donc significativement refléter la situation réelle dans la ville de Ouaga-dougou, encore moins sur toute l’étendue du territoire burkinabé. Néanmoins, les résultats obtenus suscitent les commen-taires et discussions suivants.

Aspects épidémiologiques La prédominance féminine n’est que le reflet de la situation démographique nationale avec 52 % de la population [9]. Sinon, génétiquement la maladie n’est pas liée au sexe. Nous avons noté une prédominance du phénotype SC à partir de 10 ans. Mais entre 0 et 4 ans on a pu noter une prédominance du phénotype SS. Nos résultats sont comparables à ceux Tableau 2.Répartition selon la couverture vaccinale des vaccins

du PEV.

Table 2. Distribution according to vaccination coverage of vaccines in the expanded vaccination programme.

Vaccins PEV Effectifs Couverture

(%)

Vaccinés Non vaccinés

BCG polio 0 120 2 98,4 DTCP1 120 2 98,4 DTCP2 119 3 97,5 DTCP3 119 3 97,5 DTCPr 76 46 62,3 Rougeole 109 13 89,3 Fièvre jaune 109 13 89,3 Total 82

PEV : programme élargi de vaccination.

Tableau 3.Répartition selon la couverture vaccinale des vaccins non-PEV.

Table 3. Distribution according to vaccination coverage of vaccines outside the expanded vaccination programme.

Vaccin non-PEV Vaccinés Pourcentage

(%)

Antipneumo Prevenar 00 0

1èredose 77 65,8

Pneumo 23 2edose 16 13,7

3edose 01 0,1

Anti-VHB 1èredose 40 32,8

2edose 32 26,2

Rappel1 13 10,7

Rappel2 3 2,5

Anti-Hib 1èredose 33 27

2edose 14 11,5

3edose 7 5,7

Rappel 00 00

Antityphoïdique 1èredose 48 41

2edose 8 6,8

3edose 00 00

Antiméningococcique 1èredose 47 40,2

2edose 3 2,5

3edose 1 0,8

PEV : programme élargi de vaccination.

de Kafando qui retrouvait également une prédominance des SS aux premières années de vie au cours d’un dépistage néonatal [10]. Cela pourrait s’expliquer par le dépistage tardif lié à la disparition plus précoce des SS beaucoup plus sujets à des complications anémiques et infec-tieuses que les SC qui font plus tardive-ment leurs complications osseuses et ophtalmologiques.

La répartition selon l’âge montre que seu-lement 3 patients avaient moins d’1 an et 27,9 % moins de 5 ans. Cela traduit un gros retard au dépistage et donc à la prise

en charge. En effet, les complications et les hospitalisations ont constitué dans trois quarts des cas les circonstances de découverte de la maladie. Le dépistage néonatal n’étant pas systématique, cer-tains enfants meurent en effet d’infections ou d’anémie dans les premières années de vie sans se savoir drépanocytaires. Statut vaccinal PEV

La couverture vaccinale pour les vaccins PEV était assez satisfaisante car se situant au-delà des moyennes nationales qui

étaient en 2005 de 97,2 % pour le DTC1 ; de 91,9 % pour le DTC2 ; et de 88,9 % pour le DTC3, selon la Direction de la prévention par la vaccination du Burkina Faso. Nos chiffres sont comparables à ceux de Yameogo qui a trouvé une cou-verture vaccinale à 98,8 % et à ceux de Dagnan et al. [11, 12] qui trouvaient une couverture vaccinale de l’ordre de 99 %. Ils sont cependant supérieurs à ceux de Gbadoe et al. [6] au Togo qui retrouvait une couverture vaccinale de 87,1 %. La recherche des raisons de non-vaccination nous a permis d’identifier plusieurs cau-ses, dont la principale était l’ignorance (67,2 %), d’une part du calendrier vacci-nal, notamment des périodes des diffé-rents rappels, et l’ignorance du lieu de vaccination, d’autre part. Par exemple, pour le rappel du DTC qui n’est pas pris en compte dans le PEV au Burkina Faso, bien des parents ne savaient où faire ce vaccin. Dagnan en Cote d’Ivoire avait trouvé la négligence comme principale cause de non-vaccination [12]. Cette diffé-rence peut s’expliquer par la restriction des antigènes inclus dans le PEV au Bur-kina Faso et aussi par l’organisation des séances de vaccination dans des sites bien déterminés et connus de la population. Tableau 4.Répartition des vaccinés selon les antécédents d’hospitalisation.

Table 4. Vaccination coverage according to hospitalisation antecedents.

Vaccin non-PEV Vaccinés avec

antécédent d’hospitalisation (%) Vaccinés sans antécédent d’hospitalisation (%) p Antipneumo Prevenar 00 00 1èredose 67,5 32,5 0,92 Pneumo 23 2edose 81,3 18,2 0,19 3edose 100 0 0,48

Anti-VHB 1èredose 80 20 0,03

2edose 81,3 18,7 0,04

3edose 78,3 21,7 0,21

Rappel1 69,2 30,8 0,86

Rappel2 66,7 33,3 0,98

Anti-Hib 1èredose 66,7 33,3 0,93

2edose 64,3 35,7 0,80

3edose 42,9 57,1 0,15

Rappel 0 0

Antityphoïdique 1èredose 79,2 20,8 0,02

2edose 87,5 12,5 0,20

3edose 0 0

Antiméningococcique 1èredose 72,3 27,7 0,33

2edose 100 0 0,22

3edose 100 0 0,48

PEV : programme élargi de vaccination.

Tableau 5.Répartition selon les raisons de non-vaccination.

Table 5. Distribution according to reasons for non-vaccination.

Raisons de non-vaccination Effectifs Pourcentage (%)

Oubli 0 0

Voyage 1 1,5

Maladie de l’enfant 1 1,5

Moyens financiers pour vaccins 49 75,4

Indisponibilité vaccin 0 00

Autres causes 2 3,1

Cause non précisée 12 18,5

Total 65

Cahiers Santé vol. 16, n° 3, juillet-août-septembre 2006

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Statut vaccinal

pour les vaccins non PEV Le tableau 6 donne les taux comparatifs de couverture vaccinale pour les vaccins non PEV dans quelques pays africains. La couverture vaccinale pour les vaccins hors PEV était moins bonne. En effet, aucun nourrisson n’avait reçu de dose de Prevenar, alors que ce vaccin constitue une alternative très intéressante en attente d’une vaccination antipneumo-coccique par le Pneumo 23, qui, dans notre étude, a été le vaccin le plus prati-qué. Cependant, après la dose initiale, les rappels n’étaient plus faits régulièrement. Le diagnostic précoce par isoélectrofoca-lisation avant l’âge de 6 mois, suivi d’une prise en charge précoce incluant la pré-vention par le Prevenar réduirait au maxi-mum les complications infectieuses qui constituent la première cause de morbi-mortalité avant l’âge de 5 ans [5, 7]. Pour le vaccin contre l’hépatite B, sachant que l’immunité est conférée un mois après la troisième injection, on peut esti-mer que moins de 20 % des sujets étaient immunisés.

Les trois doses immunisantes du vaccin contre l’Hæmophilus influenzae B ont été administrées à 7 patients soit 5,7 % patients. C’est le vaccin qui a été le moins administré. Avant la vaccination,

Hæmo-philus influenzae était la première cause

des méningites de l’enfant de moins de 5 ans [13].

Environ 68 % des patients ont déjà été hospitalisés. M’Pemba a trouvé que la drépanocytose était la deuxième cause d’hospitalisation dans le service de pédia-trie grands enfants du CHU/Brazzaville [14]. Cependant, nous n’avons retrouvé de différence significative entre la couver-ture vaccinale chez les enfants déjà hospi-talisés et ceux non encore hospihospi-talisés

que pour l’hépatite virale (première et seconde doses) et la fièvre typhoïde (pre-mière dose). Cela traduirait deux choses :

un souci plus marqué du personnel hospitalier vis-à-vis de l’hépatite et de la fièvre typhoïde ;

une nécessité d’insister également sur les autres vaccins durant le séjour hospitalier. Les couvertures vaccinales dans notre étude ont augmenté avec la durée de suivi. Ce constat a également été fait par Gbadoe qui a noté des augmentations allant de 3,2 % pour le Typhim Vi à 22,4 % pour l’hépatite B après une année de suivi [6].

Ainsi, aussi bien à Brazzaville, Abidjan, Lomé, Dakar ou Ouagadougou, le Pneumo 23 était le vaccin le plus appli-qué. Cela peut s’expliquer par le fait que le pneumocoque étant le germe le plus redoutable, les praticiens donnent avant tout la priorité à l’achat de ce vaccin. En effet, il représente 21 % des méningites au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo, avec un risque de survenue chez l’enfant drépanocytaire qui est de 314 à 1 000 fois supérieur à celui encouru par un enfant normal et est également incriminé dans certaines septicémies fou-droyantes, pneumopathies graves et oti-tes [13, 15]. De plus, le coût du vaccin antipneumococcique reste parmi les plus abordables. En revanche, le Prevenar n’a été administré dans aucune de ces séries africaines. Est-ce le fait de l’inexistence d’un programme de dépistage néonatal ou de son coût prohibitif ?

Hormis à Lomé, le vaccin anti-Hib est le moins appliqué dans toutes les études ; cela peut s’expliquer par le fait que dans notre contexte africain où le dépistage n’est toujours pas systématique, bien des patients ne se savent drépanocytaires qu’après l’âge de 5 ans, moment où l’inté-rêt de cette vaccination n’est plus

justifia-ble. Ce faible taux sera, tout comme celui de l’hépatite B, revu à la hausse dans les années à venir au Burkina en raison de l’introduction de ces deux antigènes dans le PEV depuis janvier 2006.

Le manque d’informations et de moyens financiers (75,4 %) qui ont constitué les principales raisons de non-vaccination, a été également retrouvé dans les autres séries africaines [6, 12, 14]. Les raisons financières expliquent la chute de la cou-verture de 65,8 % pour la dose initiale à 0,08 % pour la troisième dose de rappel du Pneumo 23.

Le vaccin antiméningococcique a été effectué par moins de la moitié des enfants alors que les méningites à ménin-gocoques sévissent chaque année par épidémies au Burkina. Ce faible taux peut être lié au fait que, lors des campagnes nationales de vaccination contre la ménin-gite, certains personnels de santé ne pren-nent pas le soin de mentionner dans le carnet de vaccination le lieu, la date et le numéro du lot du vaccin. Ainsi, certains patients qui affirment avoir été vaccinés n’ont pas été considérés comme tel en raison d’une absence de preuve médicale.

Conclusion

Permettre à au moins 40 % des enfants drépanocytaires de fêter leur cinquième anniversaire d’ici à l’an 2015, tel est notre objectif à tous. La prévention étant notre arme essentielle face aux multiples priori-tés sanitaires de nos pays pauvres, l’éta-blissement d’un programme de vaccina-tion spécifique intégré aux différents centres de suivi relève de l’urgence. Tou-tes ces activités permettront d’aboutir à brève échéance à la mise sur pied du programme national de lutte contre la drépanocytose■

Tableau 6.Couverture vaccinale pour les vaccins hors PEV sans quelques pays africains.

Table 6. Vaccination coverage for vaccines outside the expansed vaccination programme in five African countries.

Couverture vaccinale (%)

Burkina Faso Congo

[14] Togo [6] Sénégal [16] Cote d’Ivoire [12]. Prevenar 00 Pneumo 23 65,8 28,9 32 21,4 39,8 Anti-VHB 3 18,9 9,9 27,7 10,2 29,2 Anti-Hib 5,7 0 33, 3 8,4 12 Typhim Vi 41,2 18,2 5,3 8,4 21,7

Références

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6. Gbadoe AD, Atsou K, Gbodjan OA, et al. Prise en charge ambulatoire des drépanocytai-res : évaluation de la première année de suivi

des patients dans le service de pédiatrie de Lomé (Togo). Bull Soc Pathol Exot 2001 ; 94 : 101-5.

7. Latoundji S, Anani L, Ablet E, Zohoun I. Morbidité et mortalité drépanocytaire au Bénin. Med Afr Noire 1991 ; 38 : 571-6. 8. Schaechter M, Medoff G, Eisenstein BI. Microbiologie et pathologie infectieuse. Bruxelles : De Boeck université, 1999. 9. Institut national de statistique et de démo-graphie (INSD). Enquête démographique et de santé. Ouagadougou : INSD, 2003.

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11. Yameogo I. Bilan de la prise en charge ambulatoire de l’enfant drépanocytaire dans deux structures sanitaires de la ville de ouaga-dougou. Thèse Médecine, Ouagadougou (Bur-kina Faso), UFR/SDS, 2002.

12. Dagnan S, Tiembre I, Doutabe N, et al. Évaluation du statut vaccinal des enfants dré-panocytaires pris en charge au CHU de Yopougon-Abidjan. Med Afr Noire 2005 ; 52 : 69-72.

13. Clot J. Immunité anti-infectieuse : méca-nismes, facteurs spécifiques et non spécifi-ques. Rev Prat 1994 ; 44 : 2505-12.

14. M’Pemba LAB, N’Zingoula S. Le statut vac-cinal de l’enfant drépanocytaire homozygote congolais. Med Afr Noire 2004 ; 51 : 37-41. 15. Njomo Njossu C. Méningite à Streptococ-cus pneumoniae au Centre hospitalier univer-sitaire Yalgado Ouedraogo : aspects épide-miologiques, cliniques et évolutifs. Thèse Médecine no°64, Ouagadougou-UFR/SDS, 2004.

16. Diagne I, N’Diagne O, Moreira C. Les syn-dromes drépanocytaires majeurs en pédiatrie à Dakar. Arch Pediatr 2000 ; 7 : 16-24.

Cahiers Santé vol. 16, n° 3, juillet-août-septembre 2006

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