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27 b) Complications chroniques [Ballas, 2010]

1.3.6. Prise en charge des syndromes drépanocytaires

La prise en charge de la drépanocytose est basée sur le principe de « l’evidence based medecine ». Les recommandations formulées pour la prise en charge et le suivi de la naissance jusqu’à l’âge adulte sont fondées sur des preuves scientifiques établies selon le niveau des études cliniques. Les recommandations sont classées selon les modalités suivantes

[HAS, 2005] :

• une recommandation de grade A est fondée sur une preuve scientifique établie par des études de fort niveau de preuve que sont les essais comparatifs randomisés de forte puissance et sans biais majeur et/ou méta analyse d’essais contrôlés randomisés, analyse de décision basée sur des études bien menées ;

• une recommandation de grade B est fondée sur une présomption scientifique fournie par des études de niveau intermédiaire de preuve, par exemple essais comparatifs randomisés de faible puissance, études comparatives non randomisées bien menées, études de cohorte ; • une recommandation de grade C est fondée sur des études de moindre niveau de preuve, par exemple études cas-témoins, séries de cas.

En l’absence de précision sur le grade, les recommandations sont fondées sur un accord professionnel au sein du groupe de travail et du groupe de lecture.

1.3.6.1. Prévention des complications

Le diagnostic néonatal de la drépanocytose permet d’identifier les nouveau-nés atteints de SDM. Ceux-ci doivent être référés à un centre de référence de prise en charge pédiatrique et les parents informés du diagnostic de l’enfant. Au niveau du centre de référence, il est recommandé qu’un réseau de soins soit organisé autour de l’enfant [de Montalembert, 2011]. Une politique préventive passe par un rythme de surveillance régulier. Cette surveillance amène à pratiquer des bilans annuels à la recherche de complications [de Montalembert, 2004].

Infections

• Prévention des infections pneumococciques

L’instauration d’une prévention précoce des infections pneumococciques a considérablement amélioré le pronostic. L’administration préventive quotidienne de pénicilline V est instaurée dès l’âge de 2 mois [de Montalembert, 2011]. Bien que le bénéfice n’ait pas été démontré au-delà de l’âge de 5 ans, en Europe, cette antibioprophylaxie est parfois maintenue jusqu’à l’adolescence. Selon les recommandations, le vaccin antipneumococcique conjugué est administré à la 6ème et 8ème semaine, avec une dose additionnelle vers 12 mois. Ensuite, le

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rappel à base du vaccin polysaccharide anti-pneumocoque (vaccin Pneumo 23) est administré

[de Montalembert, 2011] tous les 3 à 5 ans, tout au long de la vie. L’importance de cette antibioprophylaxie pour la maîtrise du risque infectieux doit être soulignée à chaque visite médicale afin de diminuer la non-observance progressive au traitement. La mise en route de cette antibioprophylaxie doit être une recommandation forte en Afrique. En effet, en Afrique, il existe des souches spécifiques de pneumococcoque, [Usen, 1998 ; Adegbola, 2006 ; Bere, 2009 ;]. Le vaccin conjugué heptavalent ne sera donc pas toujours efficace car les sérotypes de ce vaccin ne correspondent pas aux sérotypes le plus souvent impliqués dans notre contexte [Adegbola, 2006]. Hormis leur coût, les vaccins anti pneumococciques conjugués à 10 ou à 13 valences, contenant en particulier les sérotypes 1 et 5 si fréquents en Afrique, devraient en améliorer l’efficacité.

• Autres infections

Le programme élargi de vaccination couvre la majorité des vaccinations recommandées pour le drépanocytaire. On préconise d’ajouter à ce calendrier vaccinal le vaccin contre la méningite C et le vaccin antigrippal. En Afrique sont réalisés en plus le Typhim Vi® (anti salmonelles typhiques) et le vaccin antiméningococcique actif contre les souches A et W135.

Education du patient et de sa famille

Elle vise à rendre apte les parents d’enfants malades et les malades à prendre en charge une crise simple à domicile. Ils doivent reconnaitre précocement les signes d’alerte (aggravation de l’anémie, fièvre, détresse respiratoire) qui imposent une consultation en urgence. Des mesures simples d’hygiène de vie doivent être expliquées dès les premiers mois de vie et est applicable à tout âge. Une hydratation abondante, un régime alimentaire riche en folates, l’éviction de facteurs favorisant la survenue de la CVO peuvent avoir un impact majeur sur l’évolution de la drépanocytose [de Montalembert, 2004 ; de Montalembert, 2011]. Par ailleurs, Les adolescents et leurs familles doivent être informés du retard de croissance et du développement pubertaire.

Crises vaso-occlusives

Certains facteurs sont plus fréquemment responsables de la survenue de CVO. Il est recommandé d’expliquer aux parents les facteurs favorisant les crises vaso-occlusives douloureuses : hypoxie (par effort excessif et inhabituel, altitude >1500 m, vêtements trop serrés); changement brusque de température; fièvre; déshydratation (vomissements, diarrhée); stress physiques et psychologiques; prises d’excitants, d’alcool, de tabac ou de drogues

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illicites (notamment chez l’adolescent). Ces facteurs doivent être bien connus des patients et de leur entourage. Il est recommandé de leur rappeler la nécessité d’une hydratation abondante.

Anémie

Dans les régions à risque, la prophylaxie antipalustre doit être rigoureuse chez les patients drépanocytaires, car une infection par Plasmodium falciparum peut avoir des complications graves (hémolyse aigue). Les principales interventions recommandées actuellement par l’OMS [OMS, 2010] pour lutter contre le paludisme sont, pour la lutte antivectorielle, l’utilisation de moustiquaires imprégnées d’insecticide ou les pulvérisations à domicile à effet rémanent. L’OMS préconise désormais une nouvelle intervention contre le paludisme à

Plasmodium falciparum : le traitement préventif intermittent du nourrisson (TPIn) exposé au

paludisme. Un traitement anti-palustre est systématique en cas de voyage dans les pays à risque. La supplémentation en acide folique se justifie tout au long de l’évolution de la maladie [de Montalembert, 2004]. En Afrique un déparasitage systématique est préconisé chez les enfants.

Accident vasculaire cérébral

Il est souhaitable de systématiser la pratique du doppler transcrânien à partir de l’âge de 2 ans. Cet examen non invasif explore le flux sanguin des artères cérébrales, des carotides internes et du tronc basilaire. Une accélération du flux est prédictive du risque de constitution d’un accident vasculaire cérébral [Adams, 1998]. Le DTC doppler être renouvelé annuellement chez l’enfant jusqu’à l’âge de 16 ans [de Montalembert, 2011].

L’IRM, plus sensible que la tomodensitométrie peut retrouver des lésions de type infarctus chez des enfants drépanocytaires n’ayant pas eu d’AVC clinique. Ces lésions, appelées infarctus silencieux apparaissent précocement, vraisemblablement lors des épisodes d’anémie aiguë par séquestration splénique ou érythroblastopénie de la petite enfance, ou encore lors des épisodes d’hypoxie lors des syndromes thoraciques par exemple [Bernaudin, 2006]. Au cours de l’examen d’IRM, les artères intracrâniennes sont étudiées par la séquence d’angiographie (ARM). L’ARM, dans la drépanocytose, est surtout réalisée chez les enfants ayant eu un AVC, chez lesquels elle évalue la sévérité de la vasculopathie des gros vaisseaux et chez ceux ayant un DTC pathologique. Parmi les patients sans antécédent d’AVC mais ayant un DTC pathologique, l’ARM identifie un groupe à risque accru d’AVC avec sténoses visibles, corrélées à des vitesses supérieures au DTC. L’ARM est aussi indiquée lorsque le DTC n’est pas informatif du fait de fenêtres temporales non perméables.

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En situation aiguë, devant la survenue d’un AVC, il convient en urgence d’effectuer d’abord un examen tomodensitométrique (TDM) cérébral ou une imagerie par résonance magnétique de façon à éliminer un accident hémorragique pouvant éventuellement nécessiter un geste neurochirugical [Bernaudin, 2006]. La lésion ischémique ne sera visible en TDM que 2 à 3 heures après l’accident. La TDM permet d’éliminer les autres causes de déficit neurologique, telles qu’un hématome sous-dural post-traumatique, un abcès ou une tumeur.

Depuis la fin des années 2000, certaines équipes d'Afrique sub-saharienne ont mis en place le dépistage de la vasculopathie cérébrale dans le cadre du suivi pédiatrique. C’est ainsi qu’au Mali, une étude conduite au Centre de Recherche et de Lutte contre la Drépanocytose de Bamako de 2008 à 2011 a montré que 17% des enfants atteints d’un SDM présentaient des vitesses accélérées [Dorie, 2012].

Figure 14 : Age de survenue de l’accident vasculaire cérébrale (Frempong, 1998)

Visites médicales régulières

• Chez l’enfant

Le rythme de surveillance, les vaccinations, la surveillance de la croissance, les conseils en matière de médecine préventive doivent être identiques à ceux de la population pédiatrique générale. Le rythme des visites médicales durant les 2 premières années doit suivre le calendrier vaccinal. Annuellement, il est recommandé, un bilan paraclinique pour dépister et traiter précocement certaines complications spécifiques de la maladie. Son contenu varie selon l’âge de l’enfant et le contexte clinique.Ce bilan annuel (tableau 5) peut comprendre : un bilan biologique ; un échoDoppler transcrânien ; une échographie abdominale ; une

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radiographie de thorax; une radiographie du bassin ; une échographie cardiaque; un bilan ophtalmologique (à partir de 6 ans chez les enfants SC et 10 ans chez les enfants SS).

• Chez l’adolescent de l’adulte

Le dépistage néonatal et la prise en charge adéquate de la drépanocytose ont améliorés la survie et la qualité de vie des patients. L’adolescence est une période à haut risque de mortalité [Quinn, 2010]. Aussi, durant cette période où le STA et la survenue de complications multi organique sont plus fréquents, une attention particulière doit être accordée aux adolescents drépanocytaires. Ceci justifie que le passage des unités de soins pédiatriques aux unités de soins adultes soit présenté et discuté avec les patients. Les contrôles annuels ne doivent pas être interrompus et ce afin de détecter précocement la survenue de complications.

Tableau 4 : Examens recommandés annuellement chez le drépanocytaire (de Montalembert 2011)

1.3.6.2. Traitement des complications Crises vaso-occlusives

Le choix de l’antalgique est adapté à l’intensité de la douleur et est fonction des trois paliers de l’OMS. Il est recommandé que la douleur soit toujours évaluée au moyen d'une échelle validée, adaptée à l'âge, avant, pendant et après l’administration des antalgiques. Une hyperhydratation et le repos doivent être associés.

40 Infections

Devant une suspicion d’infection, il est recommandé de débuter un traitement antibiotique probabiliste sans attendre les résultats des cultures bactériologiques [HAS, 2010]. L’antibiothérapie probabiliste doit être : bactéricide et adaptée au site infectieux suspecté ou identifié, active sur les pneumocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline compte tenu du risque élevé d’infection fulminante à pneumocoque chez l’enfant drépanocytaire; à spectre large pour être également efficace sur Haemophilus influenza et les salmonelles. L’antibiothérapie est ensuite adaptée en fonction du germe en cause.

Anémie aiguë

La transfusion sanguine simple est discutée lorsqu’il existe une diminution du taux d’hémoglobine de 20g/L ou plus par rapport au taux de base. Cependant, il faut tenir aussi compte de la réponse réticulocytaire. Elle est également recommandée en cas de crise douloureuse hyperalgique résistante à la morphine ou de syndrome thoracique aigu en absence de défaillance viscérale associée. La transfusion se fait avec des culots de globules rouges phénotypés, compatibilisés, au minimum Rhésus Kell et en tenant compte des anticorps irréguliers antérieurs. Le taux d’hémoglobine post-transfusionnel sera fonction du taux d’hémoglobine basal du patient qu’il ne faudra pas dépasser sous peine d’aggraver ou de déclencher une crise vaso-occlusive par augmentation de la viscosité sanguine [AFSSAPS, 2002].

Autres complications aiguës

• STA

Un échange transfusionnel doit être réalisé quand existent des signes de gravité. La kinésithérapie respiratoire incitative représente une procédure simple qui a fait la preuve de son efficacité [Bellet, 1995]

• Priapisme

Le traitement du priapisme doit débuter en urgence en raison du pronostic fonctionnel mis en jeu. Il repose sur des mesures locales (injection intracaverneuse d’étiléfrine, puis drainage)

[Mantadakis 2000] et générale (traitement de la crise douloureuse) et pose l’indication d’un échange transfusionnel.

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• AVC

Les drépanocytaires présentant un tableau neurologique central aigu doivent en urgence bénéficier d’échanges transfusionnels et d’une imagerie cérébrale par tomodensitométrie avec temps artériel ou imagerie par résonance magnétique (IRM) avec angio-IRM. [Frempong, 1998].

Complications chroniques

• Complications ostéo-articulaires

Le traitement de l’ostéonécrose aseptique repose sur la classification radiologique. Il est orthopédique ou chirurgical et est fonction du stade.

• Complications ophtalmologiques

Le traitement de la rétinopathie proliférante repose sur la photocoagulation au laser argon

• Ulcères de cutanés

Le traitement décevant, n’est pas encore clairement codifié. Il doit dans tous les cas associer des mesures générales et des soins locaux.

1.3.6.3. Indications des traitements spécifiques Traitement préventif

• Échange transfusionnel ponctuel et préventif

Le but de cet échange est de diminuer le taux d’HbS au-dessous de 40 %, tout en maintenant un taux d’hémoglobine au-dessous de 110 g/L afin d’augmenter l’apport en oxygène aux tissus et améliorer la viscosité sanguine. Les indications sont : la préparation à la chirurgie

[Vichinsky, 1999 ; AFSSAPS, 2002], la grossesse [Howard, 1995 ; Koshy, 1995; Driss, 2007], la préparation à un long voyage, la préparation à un examen.

• Programme transfusionnel

Les échanges transfusionnels au long cours ont pour but de réduire ou prévenir de nouvelles complications. Les échanges se font régulièrement toutes les 3 à 6 semaines, l’objectif étant de maintenir en permanence un taux d’Hb S inférieur à 40 %, voire 30 % dans la prévention primaire et secondaire de l’AVC, des CVO et du STA récidivants en cas d’échec ou de contre-indication à l’hydroxyurée.

Traitement symptomatique

• Echange transfusionnel ponctuel et curatif

Le but est de diminuer le taux d’hémoglobine anormale au-dessous de 30 à 40 %. Les indications d’échange transfusionnel ponctuel urgent sont la survenue : d’un STA, d’un AVC, d’un Priapisme aigu, de CVO résistantes aux antalgiques majeurs depuis plus de 48 heures,

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d’une défaillance multiviscérale ; d’une infection sévère intercurrente [de Montalembert, 2007 ; Lionnet, 2009]

• Chélation du fer

Une surveillance du bilan martial tous les 4 à 6 mois dans les programmes transfusionnels au long cours est instituée avec : un dosage du fer sérique, du coefficient de saturation et de la ferritine. Une mise en place d’un traitement chélateur lors de l’augmentation de la ferritine au-delà de 1000 mg/L sur 2 contrôles.

• Saignées sans transfusion

Les patients hétérozygotes composés SC ont une viscosité sanguine accrue. L’indication d’une saignée peut être préconisée en fonction de la symptomatologie et de la concentration en hémoglobine [Lionnet, 2009]. L’instauration de saignées induit une carence martiale qu’il ne faut pas traiter. Pour ce type de syndrome drépanocytaire, il s’agit d’une proposition de traitement. En effet, en pratique courante, peu de centres utilisent ce mode de traitement car il n’y a pas d’études randomisées à ce sujet.

Intensification du traitement : Hydroxycarbamide

L’hydroxycarbamide ou hydroxyurée (HU) a fait la preuve de son efficacité [Ferster, 1996]; c’est l’un des traitements de fond de la drépanocytose validé à l’heure actuelle. Il réduit, la fréquence et la sévérité des crises douloureuses chez l’enfant et l’adulte ainsi que les récidives de syndrome thoracique aigu, des hospitalisations, des transfusions et probablement de la mortalité [Charache, 1995 ; Ferster, 1995 et 2001 ; Steinberg, 1997 ; Voskaridou, 2010]. Les indications consensuelles chez l’enfant [de Montalembert, 2004] sont la survenue de plus de trois crises vaso-occlusives hospitalisées par an et/ou de plus de deux syndromes thoraciques aigus. Il existe également des indications chez l’adulte [Charache, 1995]. Ce traitement est proposé également aux patients souffrant d’une anémie sévère avec mauvaise tolérance clinique [Miller, 2000]. Son efficacité à prévenir les récidives d’AVC en alternative aux transfusions sanguines est discuté

[Ware, 1999 ; Gulbis, 2005]. L’intérêt de l’HU n’a pas été démontré dans le traitement de certaines complications, comme le priapisme, les ulcères cutanés et dans la prévention ou l’amélioration des complications organiques chroniques. L'hydroxyurée ne semble ni cancérigène ni tératogène, mais c'est un cytotoxique et on ignore encore les conséquences d'un traitement à très long terme [Labie, 2010]. Les inquiétudes portent sur la fertilité ultérieure des garçons traités jeunes et longtemps.

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Traitement curatif : allogreffe de cellules souches hématopoïétiques

La greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH), est le seul traitement potentiellement curateur. L’allogreffe géno-identique de cellules souches hématopoïétiques (moelle osseuse ou sang de cordon) offre actuellement 95 % de chances de « guérison » lorsqu’elle est réalisée durant l’enfance à partir d’un donneur HLA identique de la fratrie. Les patients greffés ont une qualité de vie radicalement transformée [Vermylen, 2003 ; Klein, 2005]. Les indications doivent être discutées au cas par cas pour les enfants drépanocytaires de moins de 16 ans présentant : une vasculopathie cérébrale même asymptomatique, des CVO et/ou des STA sévères malgré la mise en route d’un traitement bien conduit par hydroxycarbamide. Les résultats sont satisfaisants ; les risques de rejet du greffon et ceux de la morbidité et de la mortalité liés à la réaction du greffon contre l’hôte sont mieux maitrisés [Ferster, 1992 ; Cornu, 1999; Bachir, 2000 ; Girot, 2003].

1.3.7. Perspectives

La drépanocytose est centenaire [Herrick, 2010 ; Serjeant, 2010]. Les progrès récents dans la compréhension de la physiopathologie de la maladie, ouvrent la voie à des espoirs thérapeutiques. Différentes approches pharmacologiques pour traiter cette maladie sont aux essais cliniques. Il est probable que la thérapeutique du futur, préventive ou curative, des crises et de certaines complications, combinera des molécules ayant différentes cibles afin d’augmenter leur synergie et de réduire les effets secondaires indésirables [Brugnara, 2006].

1.3.7.1. Réactivateurs de la synthèse d’hémoglobine fœtale

Le problème de la thérapeutique de la drépanocytose sera peut-être résolu quand on aura compris celui de la commutation HbF/HbA et la régulation de l'hémoglobine fœtale [Orkin, 2010]. C'est dans cette perspective d'action sur la modulation par l'HbF que se situent des travaux récents. Les facteurs contrôlant la commutation HbF→HbA au cours du développement ontogénique ont été un sujet de recherche depuis plusieurs décennies, se fondant souvent sur l'exploration de mutants naturels. Depuis quelques années plusieurs équipes ont cherché à mettre en évidence une trans-régulation de l'HbF [Bauer, 2011 ; Xu, 2011]

1.3.7.2. Inhibiteurs de la déshydratation érythrocytaire

La falciformation est favorisée par la déshydratation intra-érythrocytaire. Deux mécanismes ont été particulièrement étudiés pour tenter de limiter la sortie d’eau : le cotransport K-Cl dont l’activité est liée au taux de magnésium intra-érythrocytaire et le canal Gardos. Les stratégies

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visant à améliorer l’hydratation érythrocytaire, sont actuellement centrées sur deux molécules. D’une part le clotrimazole (inhibiteur de l’effet Gardos), d’autre part le magnésium (inhibiteur du cotransport KCl). Une amélioration clinique sous traitement par magnésium per os a été observée dans une seule étude non contrôlée chez des adultes drépanocytaires [de Montalembert, 2004]. La preuve de cette efficacité clinique reste à apporter par d’autres études contrôlées. L'effet du cromoglycate a été comparé à celui du clotrimazole. Les résultats ont montré que le cromoglycate n'exerce pas d'effet inhibiteur sur le canal de Gardos, contraireent au clotrimazole [Bizumukama, 2011]. L’ICA-17043, inhibiteur du canal Gardos, a été étudié sous la forme de SénicapocR et s’est avéré un échec [Ataga, 2011].

Un autre agent efficace pour moduler l’activité du canal Gardos est la L-arginine, précurseur du NO. Le supplément alimentaire en L-arginine de souris transgéniques drépanocytaires induit une inhibition du canal Gardos et réduit la déshydratation cellulaire [De Franceschi, 2004].

1.3.7.3. Monoxyde d’azote et son précurseur (l’arginine)

Il existe chez les patients drépanocytaires un déficit en monoxyde d’azote (NO). Les actions vasodilatatrice, anti-agrégation plaquettaire et anti-inflammatoire du NO en font un candidat de choix pour le traitement de la drépanocytose. Une première étude sur le NO inhalé, randomisée contre placebo, chez l’enfant drépanocytaire souffrant d’une crise vaso-occlusive montre une réduction de la consommation d’antalgiques dans le groupe traité [Weiner, 2003]. Cependant ce résultat est controversé [Hajeri, 2008 ; Gladwin, 2011]. Une autre possibilité thérapeutique pour augmenter la production du NO chez les patients drépanocytaires est représentée par le supplément oral en L-arginine qui induit de manière inattendue la production de métabolites du NO[Morris, 2003].

1.3.7.4. Thérapie anti-adhérence à l’endothélium vasculaire

Des essais de phase 1 sont actuellement en cours pour valider l’approche anti-adhésion. Les interactions anormales entre les globules rouges, les réticulocytes, les cellules endothéliales, les plaquettes ou des médiateurs solubles de l’inflammation représentent de nouvelles cibles thérapeutiques. L’objectif d’une thérapeutique anti-adhésion est d’interférer avec l’initiation et ou avec l’amplification d’évènements d’adhérence. Ces approches thérapeutiques ont été essentiellement étudiées pendant les accidents douloureux aigus et les mécanismes d’action ne sont que partiellement connus [Brugnara, 2006].

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La mise au point d’une thérapie génique est un véritable espoir pour les 80 % de malades ne pouvant pas avoir accès à une greffe de moelle. Envisagée depuis près de trente ans, cette thérapie génique représente un véritable défi. La guérison de souris drépanocytaires [Pawliuk, 2001] à l’aide d’un gène thérapeutique (β-globine) dans les cellules souches hématopoïétiques marque une avancée importante sur la voie de la thérapie génique de la drépanocytose chez l’homme. Les essais cliniques sont en cours.

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