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Chapitre 2 – Les différents modes de fonctionnement de l’AFM et leurs applications en

C. Temps d’acquisition des images

Les paramètres importants déterminant le temps d’acquisition des images sont récapitulés ci-dessous : les paramètres ne pouvant pas être modifiés (intrinsèques à la construction de l’instrument), les paramètres pour lesquels il existe une latitude de choix avant l’expérience (caractéristiques du microlevier), et les paramètres sur lesquels il est possible d’agir pendant l’expérience (paramètres d’imagerie). C’est surtout pour l’AFM en milieu liquide qu’il est important d’augmenter au maximum la fréquence d’acquisition des images, tout en conservant une résolution suffisante, afin d’obtenir des informations dynamiques fines sur le système étudié.

1. Paramètres de construction intrinsèques à l’instrument. 1.1. Bande passante du convertisseur RMS-DC.

Le convertisseur RMS-DC sert à mesurer la valeur efficace du signal de réponse qui représente l’amplitude d’oscillation du microlevier. En fonction de la fréquence de résonance fc du microlevier sa bande passante fd détermine le nombre de périodes d’oscillations no utilisées pour la mesure :

Equation 4 : d c o f f n =

Par exemple avec un microlevier oscillant à 30 kHz en milieu liquide et un convertisseur RMS-DC de bande passante fd = 5 kHz, no = 6 (21). En concevant un convertisseur avec une bande passante plus large, la mesure peut être faite plus rapidement.

1.2. Bande passante de la rétroaction (boucle PID + scanner).

Le système de rétroaction sert à garder constante l’amplitude d’oscillation du microlevier lors du balayage de la surface. Sa bande passante fb doit être adaptée aux fréquences spatiales w rencontrées à la vitesse de balayage V, avec la contrainte (22) :

Equation 5 : w V fb

fb est limitée par la fréquence de résonance du scanner piézoélectrique plus que par l’électronique de la boucle PID (PID : Proportionnelle, Intégrale et Dérivée). Dans le système d’Ando et al (22), fb est d’environ 60 kHz ce qui impose comme valeur limite supérieure 120 µm/s pour la vitesse de balayage V si la fréquence spatiale considérée w est de 2 nm.

2. Fréquence de résonance des microleviers.

En mode contact intermittent, le microlevier doit osciller d’au moins un cycle pour chaque pixel de l’image afin que soit mesurée la modification d’amplitude due à l’interaction avec la surface. Comme les microleviers sont excités au voisinage de leur fréquence de résonance, plus celle-ci est élevée, plus vite la mesure est effectuée. Dans l’exemple d’un microlevier rectangulaire, la fréquence de résonance fc et la raideur k sont données par les formules suivantes (22) : Equation 6 : ρ 12 ² 56 , 0 E L d fc = Equation 7 : E L wd k 3 3 4 = avec d : épaisseur du microlevier L : longueur du microlevier w : largeur du microlevier E : module d’Young du matériau ρ : densité du matériau

En fabriquant des microleviers de petites dimensions on augmente la fréquence de résonance tout en gardant une constante de raideur faible. La fréquence d’acquisition des images peut alors être augmentée (22,23).

3. Paramètres d’imagerie.

3.1. Nombre de pixels de l’image.

Le temps tim d’acquisition de l’image est donné par : Equation 8 : L L L L im f N t N t = =

où NL est le nombre lignes, tL le temps mis pour parcourir chaque ligne de l’image, fL la fréquence de balayage des lignes. Diminuer le nombre de pixels de l’image permet donc de réduire le temps d’acquisition ; il faut conjointement diminuer la taille de la zone scannée du même facteur, pour ne pas perdre en résolution (cela revient à garder la même taille absolue de pixel).

Si la résolution maximale n’est pas nécessaire, le nombre de pixels peut être diminué (et donc tim augmenté) sans réduire la taille de la zone scannée (ceci implique que la taille absolue du pixel augmente). Un tel compromis entre résolution et rapidité d’acquisition des images peut être adéquat pour suivre la dynamique des complexes ADN-protéines sur la surface.

3.2. Le problème de la dérive.

En général au cours des expériences d’AFM il se produit entre les images une dérive plus ou moins rapide, d’origine à la fois thermique et mécanique. Le problème existe pour l’observation AFM à l’air, mais il est accentué en milieu liquide, où la dérive cumulée peut rapidement atteindre plusieurs centaines de nm, avec le risque que les molécules d’intérêt ne soient alors plus dans la zone balayée. J’ai mesuré dans mes expériences une vitesse de dérive atteignant typiquement 3 nm/s (soit environ 200 nm/min). Le joint flexible qui assure la jonction et l’étanchéité entre la cellule liquide et la surface de l’échantillon a une grande influence sur la dérive ; les nouveaux joints commercialisés par Veeco Instruments, avec un profil en S (figure II-9), sont de ce point de vue bien plus performants que les anciens joints toroïdaux.

Figure II-9 : Joint flexible pour la cellule liquide AFM. Photo d’après (24).

Compenser la dérive nécessite habituellement que l’opérateur réajuste régulièrement la zone scannée en imposant un offset, mais cela interrompt la séquence d’enregistrement d’images. Pour minimiser ce problème, une équipe hollandaise a mis au point une méthode de corrélation des paires d’images successives qui permet d’ajuster la zone scannée entre chaque capture d’image. Ils ont pu par exemple suivre un plasmide pendant environ 30 minutes avec une dérive cumulée inférieure à 10 nm (21).

4. Performances.

4.1. Avec un AFM commercial.

L’AFM Multimode utilisé au laboratoire est associé à l’électronique de contrôle Nanoscope IIIa. Pour l’observation à l’air, c’est typiquement une fréquence de balayage des lignes entre 0,5 et 1,5 Hz qui est choisie pour observer les macromolécules biologiques immobilisées sur la surface, ce qui pour une image de 512 lignes donne un temps d’acquisition par image de quelques minutes. Pour l’observation en milieu liquide, il est possible de réaliser un balayage plus rapide ; des séquences avec une image environ toutes les 6-8 secondes et une résolution satisfaisante peuvent être enregistrées. Des exemples de séquences d’images enregistrées au cours de ce travail de thèse sont présentés aux chapitres 3 et 5.

4.2. Avec un AFM spécialisé.

A ma connaissance, c’est avec l’AFM développé par Ando et al (22) que la plus haute fréquence d’acquisition des images a été atteinte, en milieu liquide, après amélioration des principaux facteurs limitants présentés précédemment. Cette équipe a mis au point un AFM fonctionnant avec des microleviers de petite dimension (longueur ~10 µm, épaisseur 140 nm, largeur 2 µm), pour concilier fréquence de résonance élevée (450-650 kHz en milieu liquide) et constante de raideur faible (estimée à 150-280 pN/nM). Ils ont conjointement conçu un nouveau type de convertisseur RMS-DC qui n’a besoin que d’une demi-période de signal pour fonctionner. Le système de détection optique de la déflection du microlevier a été adapté pour obtenir une taille de spot laser (2-3 µm seulement) adaptée à la petite taille des microleviers. Ils ont également fabriqué un nouveau type de scanner. Enfin, le traitement des données par l’ordinateur a été optimisé. Avec toutes ces améliorations, le temps d’acquisition d’une image de de 100 x 100 pixels a été réduit à 80 ms. Le fonctionnement en milieu liquide pour suivre une biomolécule sur la surface est validé avec l’observation sur un champ de 240 x 240 nm² des mouvements d’une molécule de myosine V sur une surface de mica. Cependant à ma connaissance aucun autre travail l’utilisant en biologie n’a été publié à ce jour.

III – Principales applications de l’AFM en biologie.

L’AFM a un potentiel énorme, principalement grâce à la possibilité de travailler en milieu liquide et ainsi de se rapprocher des conditions physiologiques. L’AFM permet déjà d’aborder un large éventail de sujets biologiques. Cependant l’analyse des paramètres biophysiques des expériences n’est pas toujours prise en compte de manière suffisamment approfondie pour passer de la faisabilité de l’enregistrement des données à la validation d’une interprétation biologique. Les paragraphes suivants indiquent brièvement les principaux domaines d’application actuels de l’AFM en biologie, le lecteur se réfèrera par exemple à (25), (26) et (27) pour des revues plus détaillées.