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D YNAMIQUE DE RECOURS AUX CDD : L ’ APPORT DES DONNEES INDIVIDUELLES

CDD : EFFET TAILLE ET EFFET SECTORIEL

3. C OMPORTEMENTS DES ENTREPRISES DANS LEUR USAGE DES CDD DANS LA DUREE

3.1. Durée et conversion des CDD

3.1.1. Taux de conversion

Les conversions de CDD en CDI ne sont pas renseignées par les DMMO. Cependant, la méthode retenue ici pour passer des flux aux stocks de CDD permet de calculer implicitement le nombre de conversions. En effet, la variation du stock de CDD5 est égale à la différence entre les entrées en CDD, d’une part, et les sorties pour fin de CDD et conversions, d’autre part.

∆ CDD = (ECDD – SCDD – CONV)

CONV= ECDD – SCDD – ∆ CDD

Avec ECDD : Entrées en CDD, SCDD : Sorties pour fin de CDD, CONV : Conversions

de CDD en CDI.

Graphique 3-17 : Taux de conversion CDD/CDI sur l’ensemble de l’échantillon

1986-1999 0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

Sources : EAE, DMMO, nos calculs.

Le graphique 3-17 indique le taux de conversion global, établi sur l’ensemble des CDD de la base d’étude. Pour calculer ce taux de conversion, on rapporte la somme des conversions aux entrées en CDD.

Le taux de conversion connaît lui aussi des variations procyliques. Il augmente à la fin des années 1980 avec la reprise, puis diminue au début des années 1990 avec le ralentissement de la conjoncture, et enfin repart à la hausse à partir de 1996, sans

5 Pour la variation du stock de CDD, on prend non plus les stocks au mois de mars, mais au mois de

toutefois atteindre le maximum de 1991. Il apparaît en 2000 plus élevé qu’en début de période mais de peu.

A structure des entrées (entrée dans l’entreprise en CDD ou en CDI) donnée, plus les taux de conversion sont faibles, plus le poids des CDD dans l’emploi augmente. En effet, la baisse des conversions réduit le flux d’entrées en CDI. Ainsi la baisse en tendance du taux de conversion peut expliquer une partie de la tendance à la hausse de la part des CDD dans l’emploi.

La question du passage de CDD à CDI a souvent été analysée du point de vue des trajectoires des salariés au moyen du calcul de probabilités de transition de CDD à CDI à partir de l’enquête emploi. C’est, en particulier, la méthode employée par Bloch et Estrade (1999) qui s’interrogent sur la capacité des formes particulières d’emploi à constituer un marchepied vers les emplois stables. Les auteurs calculent la probabilité de transition des formes particulières d’emploi (CDD, intérim, stages, contrats aidés) vers les emplois stables de 1992 à 1998. Cette probabilité connaît une tendance à la baisse : de 35% en 1992, elle passe à 29% en 1998. Cancé et Fréchou (2003), de leur côté, évaluent à un tiers la part des salariés en CDD en 2001 étant en CDI en 2002. Junod (2006) estime une probabilité d’accès au CDI pour les salariés en CDD à deux tiers, mais cette fois sur une période de trois ans. Cependant dans ces travaux, le CDI n’est pas forcément dans la même entreprise que le CDD. Il ne s’agit donc pas d’un taux de conversion mais d’une probabilité de transition de CDD et CDI qui inclut les conversions mais aussi les transitions d’un emploi en CDD à un emploi en CDI quelle que soit l’entreprise. Cela donne néanmoins la borne inférieure des taux de conversion : le taux de conversion des CDD en CDI au sein des entreprises est forcément inférieur à un tiers.

D’autres calculs de taux de conversion ont été proposés. Abowd, Corbel et Kramarz (1998), travaillent sur la différence entre entrées et sorties en CDD rapportée aux entrées en CDD. La différence entre les deux indicateurs est la prise en compte de la variation du stock de CDD. L’indicateur qu’ils proposent s’appuie sur l’hypothèse d’une absence de croissance du stock de CDD. Or, sur la plupart des années de la période 1985-2000, le stock de CDD connaît une augmentation. Cet indicateur produit ainsi une surévaluation du taux de conversion. Considérer que l’intégralité de l’écart entre les entrées et les sorties de CDD correspond à des conversions de CDD en CDI,

c’est interdire toute hausse du stock de CDD. Les auteurs ont calculé la moyenne de cet indicateur sur l’ensemble des établissements de leur échantillon pour la période 1987- 1990. Le chiffre qu’ils obtiennent, 36,8 %, est surestimé par la non prise en compte de la croissance du stock sur la période, laquelle est justement très importante, et même maximale, sur cette période comme nous l’avons vu (cf. graphique A-10).

En outre, ils travaillent sur la moyenne des taux de conversion par établissement. Or, une chose est de mesurer la moyenne des taux de conversion par établissement, une autre est de calculer un taux de conversion sur l’ensemble de l’échantillon en rapportant l’ensemble des conversions à l’ensemble des entrées en CDD de tous les établissements de l’échantillon. Seul le second indicateur peut être interprété comme une mesure de la part des CDD qui sont convertis en CDI. La comparaison des deux indicateurs réalisée ici, permet de constater que, sur la période 1985-2000, le second est toujours nettement plus faible que le premier. La part des CDD convertis en CDI serait ainsi plus proche d’un cinquième que d’un tiers. Cette faible part, et sa réduction sont de nature à ralentir la progression du stock de CDI.

Pour étudier les comportements individuels des entreprises, on établit cette fois le ratio des CDD convertis en CDI rapportés aux entrées en CDD à chacune des entreprises. C’est l’évolution de ce ratio individuel qui permet de caractériser la manière dont les entreprises usent des CDD. On observe qu’en 2000 50 % des entreprises ont un taux de conversion inférieur à 34 %. Ainsi, lorsqu’on prend la médiane des taux de conversion par entreprise, on obtient un indicateur plus élevé, mais qui connaît les mêmes tendances procycliques.

Graphique 3-18 : Médiane des taux de conversion CDD/CDI par entreprise 0 0 ,0 5 0 ,1 0 ,1 5 0 ,2 0 ,2 5 0 ,3 0 ,3 5 0 ,4 1 9 8 6 1 9 8 7 1 9 8 8 1 9 8 9 1 9 9 0 1 9 9 1 1 9 9 2 1 9 9 3 1 9 9 4 1 9 9 5 1 9 9 6 1 9 9 7 1 9 9 8 1 9 9 9

Sources : EAE, DMMO, nos calculs.

La question de la conversion des CDD en CDI est aussi centrale dans le rôle qu’on attribue aux CDD dans l’analyse de l’organisation de la gestion de la main-d’œuvre. Le CDD est-il un nouveau port d’entrée des marchés internes ? Cette hypothèse correspond à l’analyse des CDD comme opportunité de disposer par ce recours d’une période d’essai allongée par rapport aux normes du droit du travail. Pour être confortée, elle requiert que la diffusion des CDD s’accompagne d’un taux de conversion élevé de CDD en CDI, en cohérence avec la faiblesse des ruptures de contrat en fin de période d’essai. Le taux de 20 % en moyenne que nous obtenons, et le fait que 50 % des entreprises ont un taux de conversion inférieur à 33 % en 2000 montre qu’il n’en est rien.

On peut se donner quelques éléments supplémentaires pour réduire la dimension conjoncturelle qui semble marquer la dynamique du taux de conversion en regardant l’évolution de la part des entreprises qui convertissent le plus en moyenne (50 % et plus) et celles qui le font le moins (10 % et moins) (graphique 3-19).

Graphique 3-19 : Part des entreprises qui ont un taux de conversion supérieur à 50 % et inférieur à 10 % 20 25 30 35 40 45 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 tconv>=50% tconv<10%

Sources : DMMO, EAE, nos calculs.

Ici prévaut bien le sentiment que l’amplitude des conversions est déterminée par l’évolution macro-économique de l’activité. Les forts taux de conversion sont d’autant plus pratiqués que la conjoncture est favorable. Dès qu’elle se retourne, les CDD retrouvent leur usage de variable d’ajustement et débouchent de moins en moins sur un CDI. Mais cette dépendance conjoncturelle semble ici aussi s’atténuer en fin de période.

Il reste maintenant à regarder s’il existe des spécificités sectorielles en matière de conversion.

Le graphique 3-20 cherche à cerner si la propension à convertir les CDD en CDI est propre à certains secteurs. On observe que les courbes de taux de conversion sont presque en miroir de celles de l’intensité du recours par secteur. Le taux de conversion est plus faible dans les secteurs qui ont le plus recours aux CDD (services, commerce) et plus élevé pour ceux dont l’usage est restreint (transport et construction). On retrouve à nouveau le phénomène de détachement de la conjoncture en fin de période, en particulier pour les services qui connaissent pourtant à ce moment-là une forte hausse de leur activité économique (cf. graphique 3-10) sans qu’elle ne se traduise par une hausse du taux de conversion comme cela avait été le cas en début de période. Ce constat vaut aussi, bien que plus modestement, pour l’industrie et le commerce.

Graphique 3-20 : Médiane des taux de conversion par secteur 0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 Ensemble Co m merce C o nstructio n Industrie Services Transpo rts

Sources : EAE, DMMO, nos calculs.

Sur l’année 2000, on peut tenter de saisir les spécificités sectorielles en comparant pour chaque secteur la part des entreprises qui convertissent beaucoup (taux supérieur à 50 %) ou peu (10 %) (graphique 3-21).

On constate à nouveau les spécificités des secteurs du transport et de la construction. Pour les trois autres secteurs, aucune disparité véritable n’est constatée quant à la part des entreprises qui ont un faible taux de conversion. En revanche, les taux de conversion plus élevés sont plus le fait de l’industrie que des deux autres et c’est dans le secteur du commerce que les taux de conversion les plus élevés sont les moins courants. Graphique 3-21 : Répartition des entreprises selon le taux de conversion par secteur

en 2000 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 CO M C ON IN D S ER T R A <10% >=50%

Si on désagrège l’échantillon par taille, on constate que, contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, les grandes entreprises sont celles qui offrent les perspectives d’intégration les plus faibles à leurs salariés en CDD. La part des entreprises qui ont un taux de conversion inférieur à 10 % est quasiment identique quelle que soit la taille, et même en fait quel que soit le secteur (environ 35 %). Comme pour la désagrégation par secteur, la disparité des comportements affecte les taux de conversion élevés. Il n’y a que 25 % des entreprises de 200 salariés et plus à avoir un taux de conversion de plus de 50 % alors que cette part va de 37 % pour la taille la plus petite à 32 % pour la plus élevée6.

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