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D YNAMIQUE DE RECOURS AUX CDD : L ’ APPORT DES DONNEES INDIVIDUELLES

CDD : EFFET TAILLE ET EFFET SECTORIEL

3. C OMPORTEMENTS DES ENTREPRISES DANS LEUR USAGE DES CDD DANS LA DUREE

3.2. Trajectoires individuelles de recours aux CDD

3.2.4. Sens de la variation

Si l’on se contente de comparer le taux de recours des entreprises en 1985 et en 2000, on observe un accroissement pour la majorité d’entre elles : 51,75 %. Mais on observe un effet « taille » (mesurée par le nombre de salariés en 1985) : le taux de recours n’est majoritairement croissant que dans les plus grandes et les plus petites entreprises. Il n’est croissant que dans 48,73 % des entreprises de 70 à 99 salariés et 48,66 % des entreprises des entreprises de 100 à 199 salariés. En termes de secteur d’activité, on retrouve le commerce, les services et les transports comme secteurs dans lesquels le recours est majoritairement croissant, tandis que dans l’industrie et les transports, il est majoritairement décroissant, traduisant peut-être la préférence pour l’intérim.

Mais comment se caractérise le profil de recours à l’intérieur de la période. Si près de 52 % des entreprises augmentent leur recours entre 1985 et 2000, cette hausse est-elle continue ?

Pour commencer, examinons le nombre d’années où le recours augmente.

- Aucune entreprise n’a augmenté son stock de CDD plus de 11 années, donc aucune entreprise n’a un profil strictement croissant de recours.

- Environ 80 % des entreprises connaissent 5 à 8 années de hausse pendant les 16 années où elles sont présentes dans la base.

- Alors qu’au niveau global, on compte à peu près autant d’entreprises qui connaissent moins de 7 années de hausse que d’entreprises qui en connaissent 7 ou plus, la désagrégation par secteur d’activité fait apparaître un clivage entre les secteurs de l’industrie et de la construction d’une part, et les services, le commerce et les transports d’autre part. Au sein des premiers, les entreprises connaissant moins de 7 hausses sont majoritaires, alors que c’est l’inverse au sein des seconds. La taille a aussi un effet : plus les entreprises comptent de salariés (nombre de salariés en 1985), plus elles sont nombreuses à avoir connu 7 années de hausse et plus : seulement 39 % des entreprises de 50 à 69 salariés contre 55 % des entreprises de 200 salariés et plus.

Le comportement de recours aux CDD présente quelques aspects de cessation transitoire de recours. Plus de la moitié des entreprises cessent moins de deux fois leur recours aux CDD.

- La taille (effectif en 1985) apparaît corrélée négativement au nombre de cessations du recours : plus l’entreprise a une grande taille, plus la probabilité qu’elle cesse moins de deux fois son recours aux CDD est élevée (39 % pour les entreprises de 50 à 69 salariés contre 69 % pour les entreprises de 200 salariés et plus).

- Les secteurs dans lesquels les cessations de recours sont les plus fréquentes sont la construction (63 % des entreprises de ce secteurs connaissent plus d’une cessation de recours) et l’industrie (48 %), alors que dans les services, il est beaucoup plus rare de connaître une telle cessation (27 %).

Ainsi, la plus grande fréquence des cessations de recours dans les petites entreprises, et dans les entreprises industrielles et de la construction peut expliquer le résultat mis en évidence au paragraphe précédent selon lequel ces mêmes entreprises connaissent moins de hausses de leur recours aux CDD.

Pour finir, nous proposons de caractériser plus précisément les trajectoires de recours des entreprises en croisant deux variables : le sens de variation et le nombre de cycles dans la dynamique du recours. On appelle cycle une alternance croissance-décroissance ou l’inverse. Pour ne retenir que deux modalités pour chaque variable, on distingue seulement les entreprises ayant un recours décroissant ou stable et celles ayant un recours croissant. Pour ce qui est des cycles, la première modalité rassemble les entreprises connaissant moins de 5 cycles, et la deuxième celles connaissant 5 cycles et plus.

On obtient alors quatre catégories d’entreprises :

(1) celles dont le recours reste stable, ou décroît plutôt continûment (elles représentent 31,51 % de l’échantillon),

(2) celles dont le recours augmente et de façon plutôt continue (34,34 %),

(3) celles dont le recours reste stable ou décroît de façon très discontinue (15,87 %). (4) celles dont le recours augmente souvent mais de façon très discontinue (18,28 %).

Tableau 3-3 : Typologie des profils de recours

Recours décroissant ou stable Recours croissant Moins de 5 Cycles 31,51 % (1) 34,34 % (2) 5 cycles et plus 15,87 % (3) 18,28 % (4)

Les secteurs surreprésentés dans chacune des catégories sont les suivants : - pour la catégorie (1), il s’agit de l’industrie et de la construction, - pour la catégorie (2) : transports, commerce, services,

- pour la catégorie (3) : construction, industrie, transports, - et pour la catégorie (4) : commerce, services, transports.

Concernant la taille, on trouve une surreprésentation des entreprises de taille moyenne (70 à 199 salariés en 1985) dans les catégories (1) et (3). A l’inverse, on

observe une surreprésentation des entreprises de taille extrême dans les catégories (2) et (4).

Les entreprises qui connaissent la hausse de leur recours la plus élevée sont celles qui appartiennent à la catégorie (2). Le taux de variation médian est de 157 % dans la catégorie (2) contre 136 % au sein de la catégorie (4), et bien entendu négatif dans les catégories (1) et (3). La part importante des entreprises qui ont une dynamique croissante et plutôt stable (2) témoigne que la hausse globale du recours sur l’ensemble de la période s’explique aussi par la dynamique des comportements individuels. Car une logique de recours presque continûment croissant n’est pas marginale (plus d’un tiers des entreprises).

Finalement, l’image que l’on pourrait donner du profil de recours des entreprises est pour le moins contrastée. L’échantillon pourrait en effet être grossièrement divisé en trois parties quasiment égales. La première regroupe les entreprises qui ne font qu’accroître leur recours et qui peuvent de la sorte substituer progressivement les CDI par des CDD. La deuxième regroupe celles qui semblent se détacher progressivement de cette pratique. Le dernier tiers correspond à l’image que l’on donne habituellement de cette pratique : une réponse des entreprises aux fluctuations de leur environnement. Pour mieux saisir les logiques à l’œuvre et comprendre les sources de cette hétérogénéité, la suite de notre analyse se focalisera sur les déterminants du recours aux CDD.

C

ONCLUSION

Le développement du recours aux CDD sur la période 1985-2000, en France est plus largement le résultat d’un phénomène d’intensification que de diffusion à une proportion plus grande d’entreprises. Ce phénomène d’intensification s’est effectué de manière hétérogène, notamment en fonction du secteur et de la taille de l’entreprise.

Les dimensions temporelles, durée des contrats, taux de conversion, trajectoire de recours, permettent d’aller plus loin dans la caractérisation des comportements et de leur évolution. On note à la fois une tendance à la réduction de la durée des CDD et à la baisse du taux de conversion des CDD en CDI au cours des années 1990, après une

période de hausse à la fin des années 1980. On a ici les signes d’un affaiblissement de la dimension d’intégration à l’entreprise que pourrait jouer le CDD.

L’étude des trajectoires de recours au fil des seize années que nous observons fait apparaître une que si un tiers des entreprises fait bien usage cyclique du recours aux CDD, en revanche pour un autre tiers il s’agit d’une pratique en quasi constante expansion, alors que pour le dernier tiers cette pratique décline au cours de la période. Pour deux tiers des entreprises le simple examen des trajectoires de recours ne permet pas de mettre en évidence un comportement de recours cyclique sur l’ensemble de la période, laissant pointer l’idée d’une différenciation des stratégies de gestion de la main-d’œuvre entre d’une part des entreprises qui finalement délaisseraient les CDD et d’autres qui au contraire tendraient à substituer toujours davantage leurs emplois en CDI par des emplois en CDD, tout cela relativement indépendamment des variations de l’activité. Ce sont ces deux hypothèses alternatives, celle du besoin d’ajustement et celle de choix structurel de gestion de la main-d’œuvre que le reste de cette thèse se propose de préciser et de confronter de manière empirique.

Chapitre IV

L’ARBITRAGE ENTRE CDD ET CDI DANS LES THEORIES

ECONOMIQUES : ENTRE BESOINS DAJUSTEMENTS ET

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