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5 10 15 20 25

Ouvèze

U'(Q) à k=2 [%]

CV = 0.2 5 10 15 20 25

Toulourenc

CV = 0.21 5 10 15 20 25

Cernon

CV = 0.43 #1 #2 5 10 15 20 25

Durzon

CV = 0.11 CV = 0.18

Figure 14.4 – Boîtes à moustaches des incertitudes U0(Q) selon la méthode Flaure,

expri-mées au niveau de confiance de 95%, pour chaque essai. Les boîtes s’étendent du quartile 25%

au quartile 75% et les moustaches s’étendent jusqu’à la valeur distante de 1,5 fois la distance

interquartile. Les lignes rouges sont les estimations de l’incertitude par la méthode des essais

interlaboratoires, les lignes en pointillés délimitent l’intervalle de confiance associé.

14.3 Synthèse et préconisations

La confrontation des méthodes analytiques avec l’approche interlaboratoires permet de

mettre en évidence les limites des deux méthodes d’estimation d’incertitude.

Les essais interlaboratoires, appliqués aux jaugeages au courantomètre, nécessitent d’une

part une logistique lourde limitant le nombre de laboratoires présents et, d’autre part la durée

d’un jaugeage limite le nombre de répétitions de mesure. Les estimations d’incertitude qui en

découlent sont donc statistiquement limitées et incertaines.

D’un point de vue hydraulique, la présence inévitable de plusieurs opérateurs simultanément

dans l’eau peut induire des perturbations dans l’écoulement. Ces dernières peuvent contribuer à

la variabilité des débits mesurés, augmentant de fait l’estimation de l’incertitude. En conditions

habituelles, ce type de perturbation n’a pas lieu et c’est pourquoi cette source d’incertitude n’est

pas estimée par les méthodes analytiques.

On a également montré que les essais interlaboratoires nécessitent d’imposer un protocole fixé

pour tous les laboratoires, notamment en termes de nombre de verticales et de nombre de points

par verticales, bien qu’il ne soit pas forcément adapté aux conditions de l’écoulement sur chaque

section de mesure.

Les méthodes analytiques sont, elles, limitées à l’exhaustivité et à la difficulté de quantifier

toutes les sources d’incertitude. Si les incertitudes des matériels de mesure sont plutôt simples

à quantifier par la répétition de mesure dans des conditions d’essais maîtrisées, les erreurs dues

à l’environnement, au site de mesure ou à l’opérateur sont bien plus difficiles à quantifier. Les

travaux visant à quantifier le terme u0m montrent à quel point il est difficile de proposer un

calcul adapté aux conditions de chaque site de mesure. Ainsi, si la méthode Flaure semble

mieux prendre en compte la qualité de l’échantillonnage sur l’estimation des erreurs dues à

l’intégration latérale des profils de vitesse et de bathymétrie, il faudrait étendre ce type d’étude

pour objectiver toutes les sources d’incertitude en fonction des conditions propres à chaque site

de mesure. Il serait ainsi utile de définir des indicateurs représentatifs des conditions de

me-sure pour quantifier certains termes d’incertitude. Par exemple, l’incertitude due à l’intégration

temporelle des vitesses au cours du temps devrait être adaptée aux conditions de turbulence.

Enfin, on a souligné que les corrélations entre les différents termes d’incertitude sont également

difficiles à évaluer (section 11.3.3).

Bien que le protocole des essais interlaboratoires propose des tests statistiques pour exclure

d’éventuelles valeurs aberrantes, un examen systématique des profils, verticaux et latéraux, des

vitesses doit être conduit pour mettre en évidence soit une mesure incohérente soit un site de

mesure non adéquat. C’est ce type d’analyse qui a permis de mettre en évidence l’effet des

os-cillations turbulentes de l’écoulement au cours de la régate ADCP de Génissiat en 2010 (Hauet

et al., 2012; Le Cozet al., 2016), expliquant ainsi la différence d’incertitude entre deux sites de

mesure voisins.

Il est également utile de veiller au respect des protocoles de mesure. On a constaté, sur certaines

verticales, le non respect de la position des points de mesure pour l’application des formules

algébriques normalisées. Ces écarts ont pu augmenter la variabilité des résultats de débit et

donc l’incertitude associée.

Au-delà de l’intercomparaison simple, il serait utile, en vue de futurs essais, de définir un

plan d’expérience permettant d’isoler certaines sources d’incertitude omises dans les méthodes

analytiques. Les erreurs dues à l’instrumentation (et son paramétrage), à l’opérateur ainsi qu’au

choix d’une section de mesure ne sont pas distinguées dans l’estimation de l’incertitude

puis-qu’un laboratoire est caractérisé par son instrumentation, son ou ses opérateurs (s) et la section

de mesure. Il serait ainsi intéressant de quantifier l’incertitude due au choix de la section de

mesure. En effet, lors des essais interlaboratoires en rivière, le choix de la section de mesure est

contraint pour des raisons pratiques car il faut rassembler les équipes sur un bief relativement

court. Certains sites sont moins favorables que d’autres puisqu’il n’est pas possible de garantir

la même qualité de section de mesure pour l’ensemble des sections de jaugeage (les critères

de qualité sont rappelés dans la section 5.1.1). Le choix de la section peut ainsi induire une

sur-estimation de l’incertitude selon l’approche interlaboratoires puisque la variabilité observée

des sections de jaugeage, illustrée par la variabilité des SQI sur la figure 13.3, peut entraîner

une variabilité plus importante des débits et donc, in fine , de l’incertitude. D’autre part, ce

terme n’est pas quantifié dans les méthodes analytiques (voir section 11.3.1), pouvant

expli-quer en partie la sous-estimation probable de l’incertitude estimée par les méthodes analytiques.

14.3.1 Estimation de l’incertitude liée à la section de mesure

Au cours d’un essai interlaboratoires, un laboratoire (noté i) est caractérisé par la section

de mesure, l’opérateur et l’instrument utilisé. Afin d’isoler la composante d’incertitude due à

la section de mesure, il faut procéder à des permutations du couple opérateur/instrument sur

les différentes sections de mesure. Une permutation avait été réalisée sur le site du Durzon à

Nant, entre les séries (e, f) et (g, h) sans que des écarts significatifs en termes de débit n’aient

été observés (Despax et al., 2014).

Le Coz (2016) propose, dans l’optique d’un essai interlaboratoires de mesure par ADCP à

Chauvan, en novembre 2016, une analyse statistique plus fine afin de séparer la composante

d’incertitude due à la section de mesure, en permutant les couples opérateur/instrument sur

dif-férentes sections. En définissantkl’indice de l’essai (ou indice de la permutation), l’équation 4.4

s’écrit :

CHAPITRE 14. CONFRONTATION DES ESSAIS AUX MÉTHODES ANALYTIQUES

oùQi,j,k est la jième mesure de débit du laboratoirei lors de l’essai k.Qi,jk 1 est la moyenne des

débits obtenus au cours de l’essai k (en prenant en compte toutes les répétitions i et tous les

laboratoires j). Bi,k et i,j,k désignent respectivement le biais du laboratoire i et l’erreur

aléa-toire. On note bien que le biais B, propre au couple opérateur/instrument, repéré par l’indice

y, ne dépend pas de l’indice j de la répétition de mesure.

En définissantxl’indice de la section de mesure ety, l’indice du couple opérateur/instrument,

la décomposition du biais et des erreurs aléatoires donne : Bi,k = Bx,k + By,k et i,j,k =

x,j,k+y,j,k. L’équation 14.1 devient alors :

Qi,j,k =Q(ki,j)+Bx,k+By,k+x,j,k+y,j,k (14.2)

Soit ∆Q(ki,j) la différence entre le débit moyen tous essais confondus et le débit moyen de

l’essai k, tel que : Q(ki,j) =Q

(i,j,k)

+ ∆Q(ki,j). Dans des conditions d’essais avec un débit stabilisé

(∆Q(ki,j) faible), on peut considérer que les erreursB etne dépendent pas de l’indice de l’essai

k. On obtient alors :

Qi,j,k−∆Q(ki,j) =Q

(i,j,k)

+Bx+By +x,j +y,j (14.3)

En appliquant une moyenne à l’équation 14.3 sur les participants y et sur les essais k, on

peut considérer que le biais moyen By(y) est inclus dans la moyenne des débits Q

(i,j,k)

et que

l’erreur moyenne y(y) ' 0 si le nombre de participants est suffisant. On obtient l’estimation

suivante :

d

Qx,j =Qx,y,j,k−∆Q(ki,j)

(y,k)

=Q

(i,j,k)

+Bx+x,j (14.4)

Étant donné que le nombre de participants est égal au nombre de sections de mesure, on a :

d

Qx,j =Qx,j,y−∆Q(kx,j)

(y)

=Q

(x,j,y)

+Bx+x,j (14.5)

L’équation 14.5 permet donc d’isoler les composantes de biais Bx et d’erreur aléatoire x,j

due à la section de mesure. La correction des mesures de chaque essai k par l’écart du débit

moyen de l’essai au débit moyen global (∆Q(kx,j)) permet de compenser les différences de débit

moyen entre les essais. On obtient alors pour chaque section x, une valeur moyenne corrigée

d

Qx,j de débit estimée à partir des valeurs de débits de chaque participant y mesurés sur une

section x.

On peut finalement appliquer les traitements statistiques de l’approche interlaboratoires sur les

valeurs Qdx,j pour évaluer l’écart-type interlaboratoires de l’erreur systématique Bx et

l’écart-type de répétabilité de l’erreur aléatoire x,j. L’intercomparaison a alors lieu sur les sections de

mesure.

Ce type d’essai reste malgré tout difficile à appliquer à des jaugeages au courantomètre en

raison de la durée d’un jaugeage. Il est en effet difficile de réaliser une dizaine de permutation

d’équipes tout en maintenant un débit stable. On pourra néanmoins transposer les résultats

obtenus lors de la prochaine intercomparaison d’ADCP en faisant l’hypothèse que l’effet de la

section de mesure est identique selon les deux techniques de jaugeage. Cette hypothèse est

discu-table dans la mesure où les ADCP sont capables de mesurer les composantes tridimensionnelles

des vitesses par rapport aux jaugeages au moulinet. Une section pour laquelle l’écoulement

n’est pas orthogonal est en effet plus préjudicable pour un jaugeage au moulinet à hélice que

pour un jaugeage ADCP.

Le Coz (2016) propose aussi de décomposer l’incertitude due aux participants, mais on peut

s’attendre pour des essais ADCP que la part de cette incertitude soit négligeable puisque les

participants n’ont que peu d’influence sur le jaugeage. En revanche, cette part n’est pas

négli-geable pour les jaugeages au courantomètre mais la répétition et la permutation des équipes

sont trop lourdes à envisager pour quantifier ce terme sous l’hypothèse de stabilité du débit.

A l’issue de ce type d’intercomparaison, l’incertitude due à la section devra être mise en

re-lation avec un indicateur pertinent de manière à pouvoir transposer l’évaluation de l’incertitude

à toute configuration de rivière. Cet indicateur peut être, par exemple, un indice de sinuosité

ou de courbure du tronçon de rivière, un critère d’asymétrie de l’écoulement, (Le Coz et al.,

2016), des paramètres de rugosité relative (rapport de la taille des gros blocs sur la profondeur

hydraulique) ou encore la magnitude des courants secondaires.

Conclusion de la partie IV

On a montré que les essais interlaboratoires appliqués à l’hydrométrie et en particulier aux

jaugeages au courantomètre sont utiles puisqu’ils répondent à la difficulté d’évaluer toutes les

composantes d’incertitude exprimées par la méthode analytique du GUM (méthode de

réfé-rence). Ces essais permettent une estimation expérimentale de l’incertitude de mesure pour la

méthode de jaugeage testée, uniquement dans les conditions données des essais.

La confrontation avec les méthodes analytiques a montré les limites des deux approches et

a souligné la difficulté d’évaluer l’incertitude des jaugeages au courantomètre. D’une part, la

logistique lourde à mettre en œuvre pour les jaugeages au courantomètre ne permet pas de

réa-liser des essais interlaboratoires dans les règles de l’art (difficulté de maintenir un débit stable,

perturbation possible de l’écoulement par les hydromètres, choix de la section de mesure pas

forcement propice. . .). Pour des jaugeages lents tels que les jaugeages au courantomètre, il vaut

mieux augmenter le nombre de participants plutôt que d’augmenter le nombre de répétitions

en raison des risques de variation de débit au cours d’essais longs (il faut deux heures environ

pour obtenir deux mesures consécutives de débit). En outre, il a été montré qu’au delà de 4 à

6 répétitions de mesures, il n’y a pas de gain significatif en termes d’intervalle de confiance sur

l’incertitude estimée (Le Coz et al., 2016) . D’autre part, la quantification objective

(c’est-à-dire valable quels que soient le matériel, les conditions de déploiement et environnementales) et

exhaustive de l’ensemble des sources d’erreur pour l’application des méthodes analytiques est

délicate.

Les deux approches s’enrichissent néanmoins l’une de l’autre. Les protocoles d’essais

in-terlaboratoires sont désormais mieux définis (Le Coz et al., 2016) tandis que l’estimation des

différents composants d’incertitude, selon l’approche analytique, s’affine.

En vue de prochains essais interlaboratoires au courantomètre, il serait judicieux de réaliser plus

de répétitions ou de réunir un plus grand nombre de participants afin de compenser

l’incerti-tude élevée sur les résultats d’incertil’incerti-tude (tableau 13.2). En cas d’augmentation du nombre de

participants, il faudra veiller à limiter la perturbation de l’écoulement par les opérateurs dans

l’eau et à garantir des sections de mesure suffisamment propices (c’est-à-dire qui respectent au

mieux les préconisations exposées en section 5.1.1).

Les futurs essais interlaboratoires de mesure par ADCP et les calculs proposés par Le Coz

(2016) laissent espérer la possibilité d’estimer l’incertitude due au choix de la section de

me-sure. A l’image duSQI qui qualifie l’échantillonnage d’une section de mesure, l’incertitude due

au choix de la section de mesure devra être reliée à un indicateur pertinent représentatif des

conditions de l’écoulement et des caractéristiques morphologiques du tronçon de rivière.