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B.1 Profil des « migrants avec un parcours de demande d’asile » souffrant d’ESPT

VI. Synthèse sous forme d’articles

A] Article 1

Introduction

Actuellement, le monde fait face à une crise humanitaire sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale avec plus de 65,3 millions de déracinés fin 2015. Parmi eux, 21,3 millions de réfugiés et 3,2 millions de demandeurs d’asile [1].Ces mouvements migratoires sont, essentiellement, liés à la multiplication des guerres contemporaines avec l’éclatement ou la reprise d’au moins quatorze conflits entre 2010 et 2015 [2].Cela se traduit par une hausse du nombre de réfugiés et du nombre de demandes d’asile. Ce dernier a doublé, dans les pays de l’OCDE, entre 2014 et 2015, passant de 800 000 en 2014 à 1,62 million en 2015. [4] En Europe, la France se situait, en 2015, au troisième rang des pays d’accueil, après l’Allemagne et la Suède. Elle enregistrait plus de 80 000 demandes soit une hausse de 23,6% par rapport à 2014 [5] Cet afflux a lieu dans un contexte d’interprétations minimalistes de la Convention de Genève par les États avec, pour justification, la gestion des flux migratoires. Les rejets sont plus fréquents : en France, le taux global d’admission est passé de 95% en 1976 à 31,5 % en 2015. [5] Déposer une demande d’asile signifie s’engager dans un parcours administratif, long et compliqué, reposant sur la rédaction d’un récit détaillé et sur un entretien à l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), voire à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), en cas de recours. Cette augmentation a aussi lieu dans un contexte d’harmonisation des politiques d’intégration des personnes immigrées mises en place dans chaque État membre avec, en France, l’adoption de la loi relative à la réforme du droit d’asile du 29 juillet 2015. En septembre 2015, la Commission européenne a aussi fait une proposition de répartition de ces migrants. La France s’est alors engagée à accueillir plus de 30 000 demandeurs d’asile relocalisés sur les deux prochaines années, en plus de ceux demandant l’asile en France chaque année. De fait, ce contexte place la question des « migrants avec un parcours de demande d’asile » (MPDA), c’est-à-dire des demandeurs d’asile, des réfugiés et des déboutés, au centre du débat politique.

Ces populations ont fait l’objet d’une attention croissante au cours des quinze dernières années, avec notamment des travaux autour de leur santé mentale. En effet, ceux qui demandent l’asile pensent correspondre à la définition du réfugié, donnée dans la Convention de Genève : toute personne « qui, par suite d’événements survenus avant le 1er janvier 1951 et craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ». De fait, ces migrants ont dû quitter leur pays d’origine, de manière précipitée, sans pouvoir dire adieu et sans pouvoir y retourner. Ils ont aussi vécu un nombre élevé d’événements potentiellement traumatiques avant ou durant leurs parcours migratoires [10]. Il est alors fréquent d’identifier, chez eux, une souffrance psychique qui peut être rattachée à l’état de stress post-traumatique (ESPT).

La prévalence de cette pathologie au sein de cette population reste difficile à évaluer, les études réalisées étant très hétérogènes en termes de taille, de lieu de recrutement et de méthodes diagnostiques. On retrouve des chiffres allant de 9 % dans une méta-analyse à propos des réfugiés [20], à 86 % dans une étude réalisée auprès de réfugiés suivis en psychiatrie ambulatoire [15], en passant par 34 % dans un échantillon communautaire [19]. En France, une des seules données est celle du COMEDE avec une prévalence de 15,3 % pour le psychotraumatisme, au sein d’une population de migrants/étrangers [22] alors que la prévalence instantanée en population générale est estimée à 0,7 % et à 5,3 % pour les formes incomplètes [23]. Son développement et son maintien sont liés à des facteurs pré-migratoires, mais aussi post-migratoires (culturels, sociaux, politiques et économiques) [25]. Sa prise en charge est relativement bien codifiée dans les recommandations nationales [28] et internationales [26 ; 27]. Cependant, l’accès aux soins de cette population est rendue difficile par le manque d’information, le manque de repérage de leur souffrance psychique, les difficultés à ouvrir les droits sociaux dont ils sont censés bénéficier durant et après la procédure, et la précarité de leurs conditions de vie [29]. De plus, on dénombre seulement huit structures sur le territoire français, accueillant cette population et prenant en compte le psycho-traumatisme. De fait, ces migrants se présentent aux urgences, ou dans des associations, comme Médecins du Monde, qui les réorientent souvent, sur des structures à « bas seuil », comme les Permanences d’Accès aux Soins de Santé (PASS) généralistes et/ou psychiatriques [30].

Devant l’augmentation du nombre des MPDA et le risque élevé de survenue d’un ESPT avec un risque de chronicisation freinant le processus d’acculturation, il semble important que les pays d’accueil puissent mettre en place des circuits de dépistage et de prise en charge adaptés. On peut alors s’interroger sur les soins proposés actuellement à ce public, non pas en France, mais dans une zone géographique plus restreinte correspondant à l’ancienne région Rhône-Alpes, qui est aussi la deuxième région de résidence des demandeurs d’asile [5]. L’objectif de ce travail est de réaliser, sur ce territoire, un état des lieux de la prise en charge des « migrants avec un parcours de demande d’asile » souffrant d’ESPT, du point de vue des moyens existants, mais aussi, de l’ensemble des actions proposées par les professionnels sous forme de soins ou d’orientation. Dans cet article, il s’agira de caractériser plus précisément cette population et les dispositifs de soins fréquentés ainsi que d’identifier leurs trajectoires de soins.

Méthodes

Pour réaliser cette étude, une approche qualitative paraissait pertinente puisque, par définition, elle permet de donner sens et de comprendre des phénomènes sociaux et humains complexes [33]. Les principales questions soulevées par ce sujet ont permis l’élaboration d’un guide d’entretien, composé de trois parties : la première concernait le parcours professionnel des interviewés, la deuxième permettait de mettre en lien les données de la littérature avec la réalité du terrain, et la dernière interrogeait les pratiques professionnelles au sein du dispositif. Un entretien pilote a été réalisé pour

affiner ce travail.

L’échantillon a été choisi à partir des lieux de soins fréquentés par les MPDA souffrant d’ESPT. Du fait de la pathologie ciblée, il paraissait évident d’intégrer les PASS psychiatriques/équipes mobiles psychiatrie précarité (EMPP). Les soins physiques pouvant constituer une porte d’entrée vers les soins psychiques [34], les PASS somatiques ont aussi été ajoutées. Afin d’obtenir un regard extérieur aux structures de soins du service public, cet échantillon a été complété par des associations dispensant des soins à ce public, à la fois sur le plan somatique et psychique. Un nombre de 15 structures a été choisi répartie, de manière égale, en cinq PASS psychiatriques/EMPP, cinq PASS somatiques et cinq associations.

Actuellement, l’ancienne région Rhône-Alpes compte : cinq PASS psychiatriques/EMPP, une PASS généraliste, sept EMPP, 37 PASS somatiques et 5 associations dispensant des soins [35]. Les conseils de la coordinatrice régionale des PASS ont permis de pré-sélectionner 5 PASS psychiatriques/EMPP et 10 PASS somatiques. La sélection a ensuite ciblé les PASS des grandes et moyennes agglomérations plus à même de recevoir ce public que les PASS rurales. Sept villes ont alors été retenues : Lyon, Grenoble, Saint-Étienne, Valence, Chambéry, Bourg-en-Bresse et Vienne.

Les premiers contacts, pris à partir d’août 2016, ciblaient les responsables des dispositifs quelles que soient leurs fonctions, la demande d’entretien pouvant être réorientée vers un autre professionnel de la structure. Une préférence était donnée aux entretiens de visu. Des entretiens téléphoniques, ou en présence de deux personnes, pouvaient aussi avoir lieu, s’ils permettaient de faciliter leur réalisation ou d’enrichir le discours. Il s’agissait d’entretiens semi-directifs, réalisés à partir du guide d’entretien, et commençant par une présentation de l’enquêteur et un rappel de l’objet de l’étude. Un enregistrement avait lieu avec l’accord de l’interlocuteur. L’entretien terminé, le rapport d’activités du dispositif était demandé dans l’idée d’obtenir des données sur la prévalence de l’ESPT et les caractéristiques socio-démographiques de la population étudiée. Les entretiens ont ensuite été retranscrits dans leur quasi intégralité, certains propos étant enlevés ou modifiés pour permettre le respect de l’anonymat des interviewés. Un travail de thématisation continu a suivi afin de relever les thèmes pertinents, puis de les regrouper en rubriques jusqu’à l’élaboration d’arbres thématiques. Le nombre de récurrences montre que le niveau de saturation a été atteint.

Résultats

14 entretiens (E) ont été réalisés entre le 19 août et le 12 octobre 2016 au sein des structures choisies : trois à Lyon, cinq à Grenoble, une à Saint-Étienne, deux à Valence, une à Chambéry, une à Bourg-en-Bresse et une à Vienne. Un entretien avec une association n’a pas pu avoir lieu du fait de difficultés organisationnelles. Quatre entretiens ont été réalisés au téléphone et quatre autres étaient à deux voix. Le nombre total de personnes interrogées étaient de 18 (8 femmes et 8 hommes). Leur répartition par fonctions était : 6 médecins somaticiens, 6 psychologues, 6 psychiatres, 2 assistantes sociale et un infirmier de secteur psychiatrique. Leurs autres caractéristiques (Figure 8) étaient : un âge

moyen compris entre 40 et 45 ans, une expérience moyenne dans le champ de la psychiatre de 10,5 ans, et au sein de leurs structures respectives de 4 ans. La durée moyenne des entretiens était de 69 min. Huit rapports d’activités ont aussi pu être récupérés.

Deux arbres thématiques et un schéma ont été réalisés pour rendre compte des caractéristiques de cette population (Figure 9), de leurs trajectoires de soins (Figure 10) et du fonctionnement des dispositifs existants (Figure 11).

Le public des MPDA correspondait à des hommes et des femmes dont les nationalités fluctuaient en fonction du déclenchement, de la poursuite ou de la résolution de conflits dans le monde, et de leurs temps de trajet. Ils venaient surtout d’Afrique, du Moyen-Orient et des Balkans.

« On commence à recevoir plus de gens qui viennent dans […] du conflit encore actuel ». E13

Leur santé mentale était affectée par trois grands facteurs cumulatifs de vulnérabilité. Tout d’abord, ces personnes avaient vécu des événements traumatiques avant ou pendant le parcours migratoire.

« C’est […] des personnes qui sont dans d’authentiques pathologies traumatiques avec des vécus

de confrontation sidérante avec la réalité de la mort ». E6

De plus, elles étaient en situation d’exil, qui renvoie à une perte de l’identité familiale, sociale et professionnelle ainsi que des étayages culturels habituels.

« C’est des affects de perte, de déclassement social, de deuils […] réels ou supposés ». E13

Elles étaient aussi, souvent, isolées pour faire face à ces changements. Enfin, leur inscription dans ce parcours administratif était fragilisante psychiquement, du fait du déroulement de la procédure et des conditions de vie qu’elle imposait. Ainsi, l’attente d’une réponse incertaine dans un délai inconnu et l’impossibilité de travailler légalement plaçaient ces sujets hors du temps, renforçant alors les effets du traumatisme. De même, l’hébergement en centres d’accueil pour demandeurs d’asile n’était pas possible pour tous. Cette précarité entraînait la mise en place de logiques de survie qui empêchait aussi la projection dans l’avenir.

« Le problème de [cette] population […], qui est posée de manière tout à fait précaire, entre son arrivée et son départ supposé, on est dans une espèce de no man’s land matériel et […] psychique, dans cette espèce d’attente qui est toujours dans l’incertain ». E13

De fait, trois grandes problématiques psychiques pouvaient être observées : des pathologies psychiatriques anciennes, des troubles de l’adaptation liées aux situations de vie complexes et l’ESPT dont la prévalence semblait élevée sans pouvoir être précisée davantage.

« On en voit beaucoup, que j’estime être des syndromes de stress post-traumatiques ». E2

Les tableaux cliniques présentés étaient complexes du fait du caractère subjectif du trauma et de la multiplicité des présentations cliniques avec, au premier plan, des signes non spécifiques comme les somatisations, les troubles du sommeil et les affects dépressifs.

« Il y a des gens pour qui tout va passer à travers le corps, d’autres qui vont effectivement être plus sur un versant dépressif ». E3

Ces symptômes, parfois colorés par la culture d’origine, pouvaient masquer la pathologie post- traumatique. Son évocation nécessitait alors un travail de recontextualisation.

« C’est presque un diagnostic de probabilité : un Congolais qui vient et qui a mal partout, qui demande l’asile ». E4

La posture et le discours conduisaient ensuite à la recherche de symptômes plus spécifiques permettant d’identifier l’ESPT dans ses formes complètes ou incomplètes.

Les entretiens réalisés ont mis en évidence les principaux acteurs permettant leur accès aux soins. Ainsi, ces migrants pouvaient se présenter d’eux-mêmes par le biais du bouche-à-oreille ou être adressés par la plate-forme d’accueil, les structures d’hébergement, les urgences, et les associations caritatives comme le Secours Catholique, ou celles accompagnant le parcours administratif. Trois trajectoires de soins ont alors été identifiées. L’une permettait un accès direct à des soins psychiatriques, par le biais des PASS/EMPP, ou des associations dispensant des soins psychiques comme Forum Réfugiés. Les motifs d’adresse étaient alors : une souffrance psychique, des affects dépressifs, des idées suicidaires, des troubles du comportement, des événements potentiellement traumatiques verbalisés lors du travail sur le récit et des antécédents psychiatriques dans le pays d’origine. Des relais pouvaient ensuite avoir lieu sur le secteur extra-hospitalier. Les deux autres permettaient un accès indirect par le biais des PASS somatiques, ou des associations d’accueil de soins et d’orientation type Médecins du Monde. Les motifs d’adresse communs étaient des pathologies aiguës ou chroniques, et des plaintes algiques. Lorsqu’un ESPT était identifié, une orientation pouvait avoir lieu sur les structures de soins psychiatriques, publiques ou associatives.

Les fonctionnements des structures interrogées présentait des points communs. Ainsi, le cadre de soins devait rester souple, notamment pour la gestion des rendez-vous. Une attention particulière était aussi portée à l’accueil.

« Notre devoir premier, c’est vraiment d’accueillir les gens […] de la manière la plus humaine qui soit ». E12

De plus, le travail en équipe pluridisciplinaire et en réseau était vu comme permettant la création d’un maillage autour des patients en impliquant des professionnels de champs différents : médical, médico- social et social.

« C’est l’idée de la constellation de Tosquelles de la clinique de La Borde, où on peut en partageant les connaissances qu’on a d’une personne, ça permet de prendre soin de la personne ». E3

Enfin, des temps interstitiels, par le biais d’échange informels, de réunions cliniques, ou encore d’analyse de la pratique semblaient nécessaires pour permettre aux soignants de rester vivants psychiquement du fait du poids des prises en charge individuelles et des responsabilités qu’elles engageaient.

quelque chose que l’on pourra déposer de tout ça ». E14

Par contre, on notait des positionnements différents pour la durée des soins, avec des choix évoluant entre pré-soins, soins provisoires et soins pérennes, mais aussi par rapport au recours à l’interprétariat professionnel en cas d’allophonie. Certaines structures y faisaient quasi-systématiquement appel, surtout pour les soins psychiques.

« Un des pré-requis, c’était de se dire qu’une des premières violences, c’était de ne pas pouvoir s’exprimer dans sa langue ». E6

D’autres en avaient une utilisation plus ponctuelle pour des informations précises et/ou importantes. D’autres encore n’y avaient pas recours, du fait d’une population francophone, ou d’une absence de budget spécifique. Ceci conduisait à l’utilisation d’autres stratégies, comme les compétences linguistiques personnelles, les professionnels hospitaliers parlant une langue étrangère, les logiciels de traduction type Google Trad ou TraducMed, ou la présence d’un proche comme traducteur.

Quant aux professionnels travaillant dans ces structures, ils présentaient à la fois des qualités d’écoute, de bienveillance et de courtoisie que tout soignant devrait avoir et d’autres qualités, qualifiées de nécessaires : être structuré, être engagé tout en trouvant la juste distance et être créatif.

« C’est une clinique qui oblige à déplacer son cadre, à chercher, à susciter la rencontre, à se décaler ». E6

La plupart d’entre eux n’avaient pas bénéficié de formations spécialisées et avaient appris les spécificités de cette prise en charge au fil des consultations, au contact des autres membres de l’équipe, voire par un travail personnel. Les formations spécifiques étaient perçues comme intéressantes tout comme les temps d’échange, à la fois avec des professionnels de structures similaires mais aussi, avec leurs partenaires, afin de partager des expériences et de créer un référentiel commun ce qui, à terme, facilitait le travail en réseau.

« C’est très intéressant parce que ça enrichit notre façon de penser et puis, cela sort de l’isolement ». E14

Discussion

Cette étude a permis de caractériser le public étudié à partir des constatations faites sur les différents lieux de soins, d’identifier leurs trajectoires de soins et d’étudier les différentes structures le prenant en charge en Rhône-Alpes. Elle présente des limites du fait de la réalisation des entretiens par un seul enquêteur, de l’hétérogénéité de l’échantillon en termes de fonctions et de l’absence de triangulation lors de l’analyse.

Les facteurs de vulnérabilité identifiés renvoient aux différents regards portés sur la santé mentale des migrants au fil des années. Le premier se situe dans le champ du psychotraumatisme d’autant que ces MDPA ont souvent vécu des événements traumatiques réalisés avec une intentionnalité humaine. Il existe une association entre ces vécus et l’ESPT [14 ; 18], une relation

dose-effet entre le nombre d’événements traumatiques vécus, notamment en pré-migratoire et le développement d’un ESPT [17 ; 37 ; 24; 38] et une corrélation significative entre ce nombre d’événements et la sévérité de l’ESPT [39]. Le deuxième renvoie à l’exil, et à la lecture de la souffrance psychique engendrée dans sa dimension culturelle, avec notamment les travaux de Devereux et de Tobie Nathan. Le troisième correspond à la clinique psychosociale du fait de la précarité sociale. Ainsi, des études ont montré l’existence d’un lien entre la sévérité des symptômes d’ESPT et l’absence de statut administratif stable [39 ; 43-46]. Les conditions de vie post-migratoires influent aussi sur leur santé mentale en augmentant la morbidité psychiatrique [15 ; 47 ; 24]. L’usage de ces trois référentiels de lecture permet donc de mieux cerner la souffrance psychique des MDPA dans l’ensemble de ses dimensions.

Cette coexistence de cliniques différentes a incité les soignants à remettre en question l’utilisation de la seule catégorie diagnostique de l’ESPT. La définition du DSM-IV-TR leur semblant trop réductrice, d’autres termes ont vu le jour comme « syndromes psychotraumatiques » ou « ESPT complexe ». Sa validité transculturelle a aussi été contestée, puisque sa création, dans les suites de la Guerre du Vietnam, reflétait le contexte socioculturel américain de l’époque. Ces critiques sont moins évidentes depuis la parution du DSM-5 avec la prise en compte du caractère subjectif du trauma par le critère A, des éléments dissociatifs, des expériences de honte et de culpabilité, et des modifications du rapport aux autres par le critère D. Une étude validait aussi l’utilisation de cette définition auprès d’une population de demandeurs d’asile et de réfugiés traumatisés de nationalités différentes [51]. Ces interrogations, retrouvées au cours des entretiens, expliquent en partie, le manque de données épidémiologiques françaises à propos de la prévalence de l’ESPT au sein de cette population.

Les structures interrogées correspondaient à des dispositifs d’orientation, mais aussi de soins, provisoires pour les PASS, et plus pérennes pour les associations dispensant des soins psychiques. Même s’ils présentaient des points communs, ces dispositifs restaient très variés, en termes de gestion de l’accès aux droits et aux soins, de moyens humains et financiers, ainsi que de partenaires. Leur