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Chloramphenicol

Nous avons envisagé d’accrocher le chloramphenicol aux iminosydnones par une fonction urée puisqu’il s’agit de la fonctionnalisation permettant la réaction de click & release la plus rapide. Pour la synthèse de l’analogue de chloramphenicol nous envisageons de réduire le nitro aromatique puis de faire réagir l’amine formée avec le cyanate de potassium afin d’obtenir le composé désiré (Figure 233).

Figure 233 : Rétrosynthèse envisagée pour obtenir le chloramphénicol-urée.

Le chloramphenicol se révèle sensible aux conditions réductrices de par son carbone asymétrique en position benzylique ainsi que du résidu gem-dichloro. Les conditions de réduction de la fonction nitro que nous avons essayées se sont traduites par l’isomérisation du carbone asymétrique et même la perte d’un chlore dans le cas de l’hydrogénolyse en présence de palladium sur charbon (Figure 234).

Figure 234 : Conditions de réduction du nitro sur le chloramphenicol.

Pour avoir un substrat moins sensible, nous avons envisagé d’introduire la chaîne portant le gem-dichloro après l’étape de réduction (Figure 235). Le précurseur envisagé a donc été réduit par hydrogénolyse en présence de palladium sur charbon pour obtenir l’aniline correspondante avec un rendement de 92%. Aucune racémisation du centre benzylique n’est observée dans ce cas.

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Figure 235 : Obtention de l’analogue de chloramphenicol 92 ; aRendement estimé par RMN ; bRendement déterminé par rapport à 91.

L’étape de couplage suivante se fait avec le chlorure de 2,2-dichloroacetyle. Deux azotes sont susceptibles de réagir avec ce produit. Bien que l’aniline soit moins nucléophile, on obtient un mélange inséparable dans nos mains du produit désiré et du di-amide. Ce mélange est utilisé tel-quel dans l’étape suivante avec le cyanate de potassium. Le produit 91 est converti en urée désirée 92 mais est également acétylé. Le mélange obtenu est purifié par colonne de chromatographie pour obtenir l’analogue de chloramphénicol désiré avec un rendement de 50%.

Nous obtenons ainsi l’analogue libéré par la réaction de click & release. Si celui-ci s’avère actif, la synthèse de l’iminosydnone associée sera à établir en considérant une nouvelle voie de synthèse.

Novobiocine

La problématique de la novobiocine ne réside pas dans la synthèse d’un analogue mais dans son greffage à l’iminosydnone dont la rétrosynthèse envisagée est présentée en Figure 236.

Figure 236 : Analyse rétrosynthétique pour l’obtention d’une iminosydnone portant la novobiocine.

La synthèse repose sur le clivage du carbamate et la protection des alcools pour obtenir uniquement un alcool libre en position C3 du sucre.

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La première étape de clivage du carbamate a déjà été décrite auparavant ; elle est réalisée en chauffant la novobiocine au reflux en présence de cyanate de sodium (Figure 237).294

Figure 237 : Clivage du carbamate de la novobiocine.

La protection des alcools n’est en revanche pas décrite. Nous savons que les deux alcools les plus nucléophiles sont le phénol et l’alcool substituant la coumarine puisque ce sont les premiers à réagir avec le sulfate de méthyle.294 L’ordre suivant de réactivité devrait être l’alcool en  de l’hémiacétal. Suivant cette idée, nous avons essayé d’introduire des groupements protecteurs, soient silylés, soit acétyles (Figure 238).

Figure 238 : Protection des groupements hydroxyles du composé 93.

Le composé 93 est resté inerte dans les conditions de silylation des alcools. Le traitement par un excès d’anhydride acétique (6 équivalents) a permis en revanche d’obtenir le produit tri-acétylé 94 avec un rendement de 23%. Malheureusement, l’alcool libre du composé 94 n’a montré aucune réactivité en présence de triphosgène pour la formation du chloroformate correspondant, ou en présence de CDI pour la formation du carbamate d’imidazole. Cette stratégie de synthèse est antérieure au développement d’iminosydnones-carbonylimidazoliums (cf. Chapitre I). L’addition du composé 94 sur une iminosydnone activée est actuellement en cours au laboratoire pour l’obtention d’une iminosydnone-novobiocine.

294 G. M. K. B. Gunaherath, M. T. Marron, E. M. K. Wijeratne, L. Whitesell, A. A. L. Gunatilaka, Bioorg. Med. Chem.

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La vancomycine

Etant donné la taille de la vancomycine, nous avons souhaité utiliser un petit bras espaceur pour sa fonctionnalisation. Cela permet à la fois d’utiliser une iminosydnone-urée optimale pour la réaction avec les cyclooctynes, mais également de limiter l’encombrement stérique autour du mésoionique.

Nous avons utilisé le bras iminosydnone bi-fonctionnel 26k portant une amine protégée et un acide carboxylique (Figure 239).

Figure 239 : Formation du produit 95.

Dans la littérature, les réactions de couplage entre la vancomycine et des amines sont réalisée sur l’acide carboxylique nu en présence de HBTU comme agent de couplage.295 L’iminosydnone 26k portant également un acide carboxylique, nous avons préalablement activé l’acide de la vancomycine par le succinimide. Parallèlement le groupement Boc de l’iminosydnone 26k a été clivé avant de réaliser le couplage entre les deux partenaires. Nous avons ainsi obtenu l’iminosydnone 95 avec un rendement de 10% après purification par HPLC préparative. Ce rendement, bien que faible, ne fait étonnamment pas écho à des réactions parasites avec la grande diversité et le grand nombre de fonctionnalités présentes sur la vancomycine. La chémosélectivité du couplage avec l’amine libre de l’iminosydnone est totale.

Par la suite, nous avons vérifié que la réaction de click & release restait effective sur ce substrat (Figure 240).

295 a) V. Yarlagadda, P. Akkapeddi, G. B. Manjunath, J. Haldar, J. Med. Chem. 2014, 57, 4558–4568; b) D. A.

MacKenzie, A. R. Sherratt, M. Chigrinova, A. J. Kell, J. P. Pezacki, Chem. Commun. 2015, 51, 12501–12504; c) V. Yarlagadda, P. Sarkar, S. Samaddar, J. Haldar, Angew. Chem. Int. Ed. 2016, 55, 7836–7840.

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Figure 240 : Coupure de l’iminosydnone 95 par le DBCO à 100 µM : chromatogramme après 6h.

Après 6h de réaction en présence d’un équivalent et demi de DBCO, on observe les deux produits désirés. L’excès de DBCO ainsi que du produit de départ 95 sont également présents. Après 16h, la réaction est totale et 95 n’est plus détectable.

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La tobramycine

Nous envisageons deux sites pour le greffage des iminosydnones à la tobramycine en nous basant sur la littérature décrivant la synthèse d’analogues de tobramycine. Comme pour la vancomycine, nous utiliserons un espaceur entre la fonction iminosydnone et l’antibiotique.

Greffage en C6’’

La position C6’’ de la tobramycine est l’alcool dont la dérivatisation est la plus simple. Nous avons suivi la stratégie généralement employée pour cette fonctionnalisation 296 (Figure 241).

Figure 241 : Fonctionnalisation de la position C6’’ de la tobramycine.

Le précurseur 96 est préparé en deux étapes avec un rendement de 58% à partir de la tobramycine. Les amines sont d’abord protégées par des groupements Boc. Puis l’alcool en position C6’’ qui est le seul alcool primaire de la structure réagit sélectivement avec un chlorure de sulfonyl très encombré (TIBS-Cl).

Le composé 96 possède alors un groupement partant susceptible d’être substitué par un nucléophile. La substitution par l’iminosydnone portant une amine primaire est restée sans succès, tout comme l’introduction d’un thiol. En revanche, la réaction entre 96 et l’azoture de sodium dans le DMF a permis d’obtenir la tobramycine fonctionnalisée par un azoture 97 avec un très bon rendement de 84%.

Comme nous l’avons montré auparavant, la réaction de CuAAC est orthogonale avec le motif iminosydnone. Nous avons donc choisi cette réaction pour fonctionnaliser l’azoture avec une iminosydnone alcyne 98 (Figure 242). Cet alcyne est obtenu par couplage entre l’iminosydnone amine et l’ester activé correspondant avec un rendement de 47%.

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Figure 242 : Synthèse de l’iminosydnone 100.

La réaction de CuAAC se fait ensuite en conditions organo-aqueuses en présence de cuivre I généré in situ sans ligand. On obtient l’iminosydnone-tobramycine 99 avec un rendement de 56% dont les groupements Boc sont ensuite déprotégés dans des conditions acides classiques pour obtenir le composé 100.

Greffage en C5

Historiquement, les dérivés de tobramycine substitués en position C5 ont été obtenus par protection successives des amines par des groupements Cbz puis des alcools par des acétates.293a L’alcool de la position C5 est le plus encombré et réagit en dernier. La protection des alcools est alors sélective et permet de réaliser les transformations chimiques voulues sur la position C5. Dans notre cas, le noyau iminosydnone n’est pas stable dans les conditions d’hydrogénolyse ce qui exclut cette voie de synthèse.

Nous nous sommes plutôt basés sur des groupements protecteurs clivables en conditions acides (Figure 243).297 Ainsi, les amines sont protégées par des groupements Boc et les alcools par des groupements silylés, ce qui permet d’obtenir le produit 101 avec un rendement de 71% sur deux étapes. Un premier essai d’alkylation de l’alcool libre par un bromo-acide est resté infructueux. Nous avons alors continué à suivre la stratégie de synthèse décrite en alkylant cet alcool avec le 1,4-dibromo butane et avons obtenu le produit 102 avec un rendement de 54%. La substitution du brome par un azoture permet alors d’obtenir le dérivé de tobramycine 103 avec un rendement de 94%.

297 Y. Lyu, X. Yang, S. Goswami, B. K. Gorityala, T. Idowu, R. Domalaon, G. G. Zhanel, A. Shan, F. Schweizer, J. Med.

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Figure 243 : Synthèse du produit 103.

Les conditions de CuAAC entre 103 et l’iminosydnone 98 ont été délicates à optimiser. Le criblage des conditions réactionnelles s’est fait sur très petite échelle par suivi LC-MS (Figure 244).

Figure 244 : Synthèse de l’iminosydnone-tobramycine 104 ; THPTA = tris-hydroxypropyltriazolylmethylamine ; Na Asc. = ascorbate de sodium.

Le système catalytique utilisé précédemment (CuSO4/Na Asc.) n’a pas été efficace pour cette réaction de CuAAC, en absence ou en présence de ligand stabilisant les espèces de cuivre I. En revanche, l’emploi de cuivre à l’état d’oxydation I (CuI ou CuBr) dans un solvant organique en présence de THPTA a permis d’obtenir le produit désiré. Nous avons sélectionné CuBr et réalisé la réaction sur une plus large échelle. L’iminosydnone-tobramycine 104 désirée a ainsi pu être obtenue avec un rendement de 22%.

L’étape de déprotection des groupements silylés et Boc par du HCl méthanolique nous fournit le produit désiré, mais malheureusement la purification de ce dernier s’est avérée infructueuse dans nos mains et nous n’avons pas pu poursuivre les études sur ce produit.